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La main du Seigneur est sur moi. (Charles DE FOUCAULD)

« J'ai encore d'autres brebis. Il faut que je les amène. »  

Je m'éloignais, je m'éloignais de plus en plus de vous, mon Seigneur et ma vie... et aussi ma vie commençait à être une mort, ou plutôt c'était déjà une mort à vos yeux. Vous me faisiez sentir un vide douloureux, une tristesse que je n'ai jamais éprouvée qu'alors; elle me revenait chaque soir, lorsque je me trouvais seul dans mon appartement, elle me tenait muet et accablé pendant ce qu'on appelle les fêtes : je les organisais, mais le moment venu je les passais dans un mutisme, un dégoût, un ennui infinis. Vous me donniez cette inquiétude vague d'une conscience mauvaise, qui, tout endormie qu'elle est, n'est pas tout a fait morte. Je n'ai jamais senti cette tristesse, ce malaise, cette inquiétude qu'alors.

Mon Dieu, c'était donc un don de vous. Comme j'étais loin de m'en douter! Que vous êtes bon! Et en même temps que vous empêchiez mon âme, par cette intervention de votre amour, de se noyer irrémédiablement, vous gardiez mon corps : car si j'étais mort alors, j'aurais été en enfer. Les accidents de cheval miraculeusement évités, avortés! Ces duels que vous avez empêchés d'avoir lieu! Ces périls en expédition, que vous avez tous écartés! Ces dangers en voyage, si grands et si multipliés, dont vous m'avez fait sortir comme par miracle! Cette santé inaltérable dans les lieux les plus malsains, malgré de si grandes fatigues! O mon Dieu, comme vous aviez la main sur moi, et comme je la sentais peu! Que vous êtes bon! Comme vous m'avez gardé! Comme vous me couviez sous vos ailes lorsque je ne croyais même pas à votre existence!

Et pendant que vous me gardiez ainsi, le temps passait, vous jugiez que le moment approchait de me faire rentrer au bercail.

Vous dénouâtes malgré moi toutes les liaisons mauvaises qui m'auraient tenu éloigné de vous. Que vous avez été bon! de quelles tristes et coupables rechutes vous m'avez miséricordieusement préservé! Votre seule main a fait en cela le commencement, le milieu et la fin! Que vous êtes bon! C'était nécessaire pour préparer mon âme à la vérité : le démon est trop maître d'une âme qui n'est pas chaste, pour y laisser entrer la vérité. Vous ne pouviez pas entrer, mon Dieu dans une âme où le démon des passions immondes régnait en maître. Vous vouliez entrer dans la mienne, ô bon Pasteur, et vous en avez chassé vous-même votre ennemi.

Tu nous conduis des abîmes de ténèbres à ta merveilleuse lumière, de la mort à la vie, de l'esclavage à la liberté; Par la Résurrection de ton Fils, sanctifie-nous tout entiers.

 

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