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Les communautés nouvelles

Date de mise en ligne : 11 septembre 2007

 

 

Les communautés charismatiques représentent désormais en France une réalité incontournable ayant une réelle influence dans le paysage catholique Français. Si pendant longtemps on leur attribuait l’adjectif de progressiste, leur attachement a l’Eglise leur vaut désormais, au meme titre que les communautés d’autre sensibilité liturgique, le qualificatif que l’on désirerait insultant de « traditionnaliste » !!

 

De ce point de vue, il est intéressant de les resituer dans leur histoire et de montrer comment elles integrent l’appel des papes a évangéliser les structures sociales elles memes. [1].

 

Les années 60-70 sont marquées en France par une forte contestation qui remet en cause les références morales, sociales et religieuses, les cadres traditionnels et qui mettent en exergue l’individualisme.

 

Il faut se rappeler également que le contexte de l’époque des années 1970 état tres particulier dans l’Eglise en France. On n’envisageait aucunement une nouvelle évangélisation mais bel et bien la disparition lente de la foi. La plupart cherchant surtout a sauver ce qui pouvait l’etre ; au mieux on se disait « On va finir le plus proprement possible » [2]. Or, c’est a partir de 1972 que commencent a apparaître ces nouvelles communautés charismatiques.

 

Dans le meme temps, l’Eglise convoque le concile Vatican II (1962-1965) afin de réfléchir aux conditions d’évangélisation du monde moderne et de répondre aux questions qu’il se pose.

 

Des formes nouvelles de vie chrétienne

Mais il faut également noter qu’avant le Concile naissaient dans l’Eglise de nouvelles initiatives parmi lesquelles des mouvements et communautés nouvelles : Schönstatt, 1917, Cursillos, 1939, Foccolari 1942, Comunione e Liberazione, Chemin Néo-Catéchuménal....

 

Ceux-ci inventent des formes inattendues de vie chrétienne, de sainteté et de mission. Ces mouvements sont en grande partie composés et animés par des laics (personnes mariées ou célibataires) et non plus seulement par des pretres ou des religieux.

 

C’est en 1967 qu’apparaît aux Etats-Unis le Renouveau charismatique Catholique. Il arriva en France dans les années 70.

 

« Quand le renouveau charismatique commença en France, il toucha un des pays chrétiens qui avaient la plus forte et la plus ancienne tradition de fondation de communautés religieuses. Sur 237 communautés ayant existé au moyen âge, 114 sont nées en France et au XIXe siecle entre 1800 et 1880, 500 ordres religieux ont été fondés en France. En raison des luttes anticléricales du XIXe siecle ce mouvement de création s’était arreté mais apres la seconde guerre mondiale ce mouvement a repris : A la suite du pere de Foucauld une série de congrégations prenaient naissance. D’autre part plusieurs instituts séculiers se développaient. Enfin des expériences originales avaient lieu, qui devaient avoir valeur d’exemple pour le Renouveau français » [3].

 

Parmi ces expériences, les foyers de Charité de Marthe Robin eurent une influence considérable. Or il faut nous rappeler son souci constant de former les laics, afin de leur permettre plus particulierement d’accomplir « leurs devoirs d’état ». Beaucoup de futurs communautaires furent d’abord touchés par l’influence de Marthe.

 

Les principales communautés

Les trois grandes [4] communautés charismatiques Françaises naissent a cette époque la.

 

 

La communauté de l’Emmanuel

 

Elle est aujourd’hui la plus nombreuse, est née en 1972 par l’entremise de son fondateur Pierre Goursat. Face a un monde qui ne voulait pas de Dieu, son souci était de présenter sans détours Jésus a la société présente, par tous les moyens, meme les plus originaux (comme l’évangélisation de rue). Au cour de ce souci une vie mystique fondée sur l’adoration eucharistique au service de la compassion et de l’évangélisation et regroupant tous les états de vie. L’Emmanuel est d’abord une communauté d’adorateurs qui petit a petit a perçu la profondeur de l’appel du Sacré Cour a Paray-le-Monial et s’en est fait l’apôtre. Elle s’enracine en profondeur dans l’Eglise catholique et si les exigences communautaires sont fortes, elles sont extremement souples dans leur application.

 

 

La communauté des Béatitudes

 

Elle voit le jour en 1973 (elle se nommait a l’époque communauté du Lion de Juda et de l’Agneau immolé) avec des fondateurs protestants qui petit a petit se sont convertis au catholicisme : « Quand nous sommes arrivés a Cordes, raconte Philippe Madre,nous n’étions plus protestants, mais nous n’étions pas encore catholiques. C’est la priere qui nous a conduits a approfondir l’aspect liturgique, qui lui-meme nous a aidés a cheminer vers le catholicisme. De plus en plus nous nous sentions chez nous dans l’Eglise ». [5]

 

Cette communauté a vécu plusieurs phases. Tout d’abord une phase contemplative marquée par une forte dimension eschatologique, une redécouverte des racines juives du christianisme, de la tradition monastique et une forte expérience de Dieu vécue par ses membres. Elle ne constituait pas un ordre religieux, mais se calquait sur le modele de l’Eglise primitive. Une seconde phase fut celle de son enracinement dans l’Eglise puis, avec son développement, la mise en ouvre d’un gouvernement plus élaboré.

 

Avec le développement numérique de la communauté, celle-ci se lança dans des activités diverses d’évangélisation (cassettes audio, vidéo, livres, mensuels (Feu et lumiere)), dans l’organisation de retraites, dans des activités charitables (Mere de miséricorde), dans le suivi psychologique et spirituel.

 

Elle a toujours été soucieuse d’intégrer le meilleurs de la tradition juive réformée et orthodoxe dans ses formes de priere et dans sa liturgie.

 

 

La Communauté du Chemin neuf

 

Elle est née en 1973 rue du Chemin neuf (d’ou elle tire son nom) a Lyon grâce en partie a Laurent Fabre, jeune novice jésuite. Tres marqué par cette origine ignacienne, l’accent fut tres vite mis sur la formation. C’est une communauté catholique avec une vocation ocuménique qui constitue une de ses particularités. Elle aussi comprend des membres de tous états de vie. Ceux qui vivent en fraternité de vie commune pratiquent la mise en commun des biens. La communauté des ouvres propres (comme le centre d’accueil de l’abbaye de Hautecombe ou les sessions Cana pour les couples) mais elle a reçu des missions d’Eglise (foyers d’étudiants, paroisses, aumôneries d’hôpitaux, maisons d’accueil...).

 

Une autre particularité du Chemin-Neuf est l’existence, autour de la communauté proprement dite, d’une communion beaucoup plus nombreuse, regroupant des personnes qui ne se sentent pas appelées a etre membres du Chemin-Neuf mais veulent cependant avoir un lien avec lui.

 

Il existe bien d’autres communautés nouvelles comme le Pain de vie, ou la communauté Réjouis-toi, celle du Verbe de vie mais nous renvoyons au livre cité plus haut pour mieux les connaître.

 

L’ensemble de ces communautés a toujours eu pour souci l’évangélisation. Il faut se rappeler que c’est le 8 décembre 1975 que le pape Paul VI donnait l’exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi. Ce texte paru au moment de leur création a marqué le développement de ces communautés. Elles n’ont pu passer sous silence ces trois interrogations du Saint-Pere :

 

Qu’est devenue, de nos jours, cette énergie cachée de la Bonne Nouvelle, capable de frapper profondément la conscience de l’homme ?

 

Jusqu’a quel point et comment cette force évangélique est-elle en mesure de transformer vraiment l’homme de ce siecle ?

 

Suivant quelles méthodes faut-il proclamer l’Evangile pour que sa puissance soit efficace ?

 

Le souci de l’évangélisation

Selon ses grâces propres chacune des communautés a essayé de répondre a ces questions. Je m’attacherai plus particulierement aujourd’hui a la communauté de l’Emmanuel car c’est celle qui a le plus grand effectif.

 

Pour autant nombre de constats pourront etre réalisés dans les autres communautés suivant leurs dons propres. Ainsi le souci de la formation a la doctrine sociale de l’Eglise dans les écoles d’évangélisation de l’Emmanuel se retrouve également au sein de celles de Jeunesse lumiere.

 

Le theme de la famille, cellule de base de la société, fut dans un premier temps abordé dans le sens d’un soutien aux familles, d’un approfondissement de leur foi (pensons aux sessions Cana de la communauté des Béatitudes ou aux sessions familles de l’Emmanuel). Mais tres vite ces communautés se sont rendu compte que cela ne suffisait pas et se sont attachées a développer un enseignement plus fondamental sur la famille. Nous retrouvons ces enseignements a travers différents supports diffusés par les différentes communautés ou par les branches spécifiques développées. Ainsi l’Emmanuel a t’il développé sa branche « Amour et Vérité » chargée plus particulierement de ce theme.

 

Mais a travers cet exemple nous voyons la progression et l’approfondissement toujours plus grand. En effet, s’il était au départ orienté vers le soutien des couples et des familles, « Amour et Vérité » s’est tres vite intéressé a tous les domaines touchant a la vie et a la bioéthique avec désormais un forum annuel de bioéthique et des formations universitaires dans le domaine de la pastorale familiale et de la bioéthique.

 

Le deuxieme axe sur lequel nous trouvons les différentes communautés est celui de la vie active. Rappelons-nous qu’en 1981 paraissait l’encyclique Laborem Exercens et en 1987 l’encyclique Sollicitudo Rei Socialis. En 1988, l’Emmanuel officialise une branche apostolique appelée Présence et Témoignage qui s’oriente vers l’annonce du christ au sein du monde du travail en s’appuyant sur l’enseignement des peres de l’Eglise. Il s’agit pour cette communauté de montrer qu’« une vie de foi n’entrave pas la vie professionnelle mais au contraire lui donne tout son sens ».

 

Cette branche de la communauté de l’Emmanuel organise ainsi des soirées ou week-end d’enseignements, des forums de la vie active, un site internet...

 

Mais les autres communautés citées plus haut ont également pris en compte cette dimension de l’homme au travail. Pensons par exemple aux retraites « Siloé vie professionnelle » de la Communauté du Chemin neuf.

 

Ces deux exemples sont cités ici pour montrer que dans le domaine des communautés nouvelles la dimension sociale et l’évangélisation des structures n’est pas abandonnée. Nous retrouvons meme des retraites spirituelles de quatre jours intitulées « connaître et aimer son pays ».

 

Des esprits chagrins diront que la dimension politique n’est guere abordée. Cela est tout a la fois vrai et faux.

 

Vrai car s’agissant d’abord de communautés spirituelles qui regroupent les différents états de vie, elles n’ont pas pour mission de s’engager en politique. Ce qui ne les empeche pas d’avoir des membres engagés et d’etre un soutien spirituel pour ceux qui partent a la bataille.

 

Faux car le souci du bien commun et d’une saine vision de la société est présent. En témoignent les écoles d’évangélisation qui integrent a leurs programme la doctrine sociale de l’Eglise, l’histoire des idées politiques et la philosophie. Ou le master « théologie de la nouvelle évangélisation » qui se déroule a Rome et integre un programme important d’approfondissement de la doctrine sociale de l’Eglise.

 

Il me semble donc que ces communautés ont intégré au fil du temps cette dimension de l’évangélisation des structures et qu’il nous faut compter avec elles dans le renouvellement de notre pays.

 

Certainement faudra-t-il les aider en les faisant profiter de l’expérience que nous avons acquise jusqu’a ce jour, ce qui leur évitera des erreurs et leur permettra d’aller plus vite, mais peut-etre avons nous également a nous mettre a leur école dans le domaine de l’élan missionnaire.

 

Pourquoi ne pas imaginer une collaboration profonde dans laquelle chacun, gardant ses spécificités, ferait profiter l’autre de ses dons et qualités ?

 

Nous en voyons déja les prémices par l’intervention de certains d’entre nous au sein des écoles d’évangélisation ou au cours des sessions d’été... La France a tout a y gagner.

 

[1] Pour ce faire nous nous sommes en grande partie inspirer de l’excellent ouvrage de Bernard Peyrous et Hervé-Marie Catta : Qu’est-ce quee Renouveau Charismatique. D’ou vient-il ? Ou va-t-il ?

 

[2] Bernard Peyrous et Hervé Catta,Le feu et l’espérance.

 

[3] Qu’est-ce que le Renouveau Charismatique ? Idemsupra

 

[4] Grand n’est pas a prendre en terme de qualité, mais en terme de nombre de membres, nous n’oublions pas qu’il en existe beaucoup d’autres

 

[5] Entretien avec Monique Hebrard dans les nouveaux Disciples.Voyage a travers les communautés charismatiques. Paris, 1978, 3eme édition.

 

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