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Je crois en l'Esprit Saint.

« Nul ne peut appeler Jésus Seigneur sinon dans l'Esprit Saint » (1 Co 12, 3). « Dieu a envoyé dans nos coeurs l'Esprit de son Fils qui crie : Abba, Père! » (Ga 4, 6.) Cette connaissance de foi n'est possible que dans l'Esprit Saint. Pour être en contact avec le Christ, il faut d'abord avoir été touché par l'Esprit Saint. C'est Lui qui vient au-devant de nous, et suscite en nous la foi. De par notre Baptême, premier sacrement de la foi, la Vie, qui a sa source dans le Père et nous est offerte dans le Fils, nous est communiquée intimement et personnellement par l'Esprit Saint dans l'Église. Le Baptême nous accorde la grâce de la nouvelle naissance en Dieu le Père par le moyen de son Fils dans l'Esprit Saint. Car ceux qui portent l'Esprit de Dieu sont conduits au Verbe, c'est-à-dire au Fils; mais le Fils les présente au Père, et le Père leur procure l'incorruptibilité. Donc, sans l'Esprit, il n'est pas possible de voir le Fils de Dieu, et, sans le Fils, personne ne peut approcher du Père, car la connaissance du Père, c'est le Fils, et la connaissance du Fils de Dieu se fait par l'Esprit Saint. L'Esprit Saint, par sa grâce, est premier dans l'éveil de notre foi et dans la vie nouvelle qui est de « connaître le Père et celui qu'il a envoyé, Jésus-Christ » (Jn 17, 3). Cependant Il est dernier dans la révélation des Personnes de la Trinité Sainte. St. Grégoire de Nazianze, « le Théologien », explique cette progression par la pédagogie de la «condescendance » divine. L'Ancien Testament proclamait manifestement le Père, le Fils plus obscurément. Le Nouveau a manifesté le Fils, a fait entrevoir la divinité de l'Esprit. Maintenant l'Esprit a droit de cité parmi nous et nous accorde une vision plus claire de Lui-même. En effet il n'était pas prudent, quand on ne confessait pas encore la divinité du Père, de proclamer ouvertement le Fils et, quand la divinité du Fils n'était pas encore admise, d'ajouter l'Esprit Saint comme un fardeau supplémentaire, pour employer une expression un peu hardie... C'est par des avances et des progressions «de gloire en gloire » que la lumière de la Trinité éclatera en plus brillantes clartés. Croire en l'Esprit Saint c'est donc professer que l'Esprit Saint est l'une des Personnes de la Trinité Sainte, consubstantielle au Père et au Fils, e adoré et glorifié avec le Père et le Fils ». C'est pourquoi il a été question du mystère divin de l'Esprit Saint dans la « théologie » trinitaire. Ici il ne s'agira donc de l'Esprit Saint que dans « l'économie »divine. L'Esprit Saint est à l'oeuvre avec le Père et le Fils du commencement à la consommation du dessein de notre salut. Mais c'est dans les e derniers temps », inaugurés avec l'Incarnation rédemptrice du Fils, qu'Il est révélé et donné, reconnu et accueilli comme Personne. Alors ce dessein divin, achevé dans le Christ, « Premier-Né » et Tête de la nouvelle création, pourra prendre corps dans l'humanité. l'Esprit répandu : l'Église, la communion des saints, la rémission des péchés, la résurrection de la chair, la vie éternelle.

«Je crois en l'Esprit Saint».

« Nul ne connaît ce qui concerne Dieu, sinon l'Esprit de Dieu » (1 Co 2, 11). Or, son Esprit qui Le révèle nous fait connaître le Christ, son Verbe, sa Parole vivante, mais ne se dit pas Lui-même. Celui qui « a parlé par les prophètes »nous fait entendre la Parole du Père. Mais Lui, nous ne L'entendons pas. Nous ne Le connaissons que dans le mouvement où Il nous révèle le Verbe et nous dispose à L'accueillir dans la foi. L'Esprit de Vérité qui nous dévoile » le Christ « ne parle pas de Lui-même » (Jn 16, 13). Un tel effacement, proprement divin, explique pourquoi « le monde ne peut pas Le recevoir, parce qu'il ne Le voit pas ni ne Le connaît », tandis que ceux qui croient au Christ Le connaissent parce qu'Il demeure avec eux (Jn 14, 17). L'Église, communion vivante dans la foi des apôtres qu'elle transmet, est le lieu de notre connaissance de l'Esprit Saint: - dans les Écritures qu'Il a inspirées; - dans la Tradition, dont les Pères de l'Église sont les témoins toujours actuels; - dans le Magistère de l'Église qu'Il assiste; - dans la liturgie sacramentelle, à travers ses paroles et ses symboles, où l'Esprit Saint nous met en communion avec le Christ; - dans la prière dans laquelle Il intercède pour nous; - dans les charismes et les ministères par lesquels l'Église est édifiée; - dans les signes de vie apostolique et missionnaire; - dans le témoignage des saints où Il manifeste sa sainteté et continue l'oeuvre du salut.

I. La mission conjointe du Fils et de l'Esprit.

Celui que le Père a envoyé dans nos coeurs, l'Esprit de son Fils, est réellement Dieu. Consubstantiel au Père et au Fils. Il en est inséparable, tant dans la Vie intime de la Trinité que dans son don d'amour pour le monde. Mais en adorant la Trinité Sainte, vivifiante, consubstantielle et indivisible, la foi de l'Église professe aussi la distinction des Personnes. Quand le Père envoie son Verbe, Il envoie toujours son Souffle : mission conjointe où le Fils et l'Esprit Saint sont distincts mais inséparables. Certes, c'est le Christ qui parait, Lui, l'Image visible du Dieu invisible, mais c'est l'Esprit Saint qui Le révèle. Jésus est Christ, « oint », parce que l'Esprit en est l'onction et tout ce qui advient à partir de l'Incarnation découle de cette plénitude. Quand enfin le Christ est glorifié, Il peut à son tour, d'auprès du Père, envoyer l'Esprit à ceux qui croient en Lui Il leur communique sa Gloire, c'est-à-dire l'Esprit Saint qui Le glorifie. La mission conjointe se déploiera dès lors dans les enfants adoptés par le Père dans le Corps de son Fils la mission de l'Esprit d'adoption sera de les unir au Christ et de les faire vivre en Lui. La notion de l'onction suggère (...) qu'il n'y a aucune distance entre le Fils et l'Esprit. En effet de même qu'entre la surface du corps et l'onction de l'huile ni la raison ni la sensation ne connaissent aucun intermédiaire, ainsi est immédiat le contact du Fils avec l'Esprit, Si bien que pour celui qui va prendre contact avec le Fils par la foi, il est nécessaire de rencontrer d'abord l'huile par le contact. En effet il n'y a aucune partie qui soit nue de l'Esprit Saint. C'est pourquoi la confession de la Seigneurie du Fils se fait dans l'Esprit Saint pour ceux qui la reçoivent, l'Esprit venant de toutes parts au-devant de ceux qui s'approchent par la foi.

11. Le nom, les appellations et les symboles de l'Esprit Saint.

Le nom propre de l'Esprit Saint.

« Saint-Esprit », tel est le nom propre de Celui que nous adorons et glorifions avec le Père et le Fils. L'Église l'a reçu du Seigneur et le professe dans le Baptême de ses nouveaux enfants. Le terme « Esprit » traduit le terme hébreu Ruah qui, dans son sens premier, signifie souffle, air, vent. Jésus utilise justement l'image sensible du vent pour suggérer à Nicodème la nouveauté transcendante de Celui qui est personnellement le Souffle de Dieu, l'Esprit divin (Jn 3, 5-8). D'autre part, Esprit et Saint sont des attributs divins communs aux Trois Personnes divines Mais en joignant les deux termes, l'Ecriture, la liturgie et le langage théologique désignent la Personne ineffable de I'Espnt Saint, sans équivoque possible avec les autres emplois des termes « esprit » et « saint ».

Les appellations de l'Esprit Saint.

Jésus, lorsqu'Il annonce et promet la venue de l'Esprit Saint, Le nomme le « Paraclet », littéralement « Celui qui est appelé auprès », ad-vocatus (Jn 14, 16.26; 15, 26; 16, 7). « Paraclet » est traduit habituellement par « Consolateur », Jésus étant le premier consolateur. Le Seigneur Lui-même appelle l'Esprit Saint « l'Esprit de Vérité (Jn 16, 13). Outre son nom propre, qui est le plus employé dans les Actes des apôtres et les Epîtres, on trouve chez S. Paul les appellations l'Esprit de la promesse (Ga 3, 14; Ep 1, 13), l'Esprit d'adoption (Rm. 8, 15 ; Ga 4, 6), l'Esprit du Christ (Rm 8, 11), l'Esprit du Seigneur (2 Co 3, 17), l'Esprit de Dieu (Rm 8, 9.14; 15, 19; 1 Co 6, h ; 7, 40), et chez S. Pierre, l'Esprit de gloire (1 P 4, 14).

Les symboles de l'Esprit Saint.

L'eau.

Le symbolisme de l'eau est significatif de l'action de l'Esprit Saint dans le Baptême, puisque, après l'invocation de l'Es prit Saint, elle devient le signe sacramentel efficace de la nouvelle naissance de même que la gestation de notre première naissance s'est opérée dans l'eau, de même l'eau baptismale signifie réelle ment que notre naissance à la vie divine nous est donnée dan'. l'Esprit Saint. Mais « baptisés dans un seul Esprit », non sommes aussi « abreuvés d'un seul Esprit » (1 Co 12, 13) l'Esprit est donc aussi personnellement l'Eau vive qui jaillit de Christ crucifié comme de sa source et qui en nous jaillit en Vie éternelle.

L'onction.

Le symbolisme de l'onction d'huile est aussi significatif de l'Esprit Saint, jusqu'à en devenir le synonyme. Dans l'initiation chrétienne, elle est le signe sacramentel de la Confirmation, appelée justement dans les Églises d'Orient « Chrismation ». Mais pour en saisir toute la force, il faut revenir à l'onction première accomplie par l'Esprit Saint : celle de Jésus. Christ (« Messie » à partir de l'hébreu) signifie « oint » de l'Esprit de Dieu. Il y a eu des « oints » du Seigneur dans l'Ancienne Alliance', le roi David éminemment2. Mais Jésus est l'oint de Dieu d'une manière unique : l'humanité que le Fils assume est totalement « ointe de l'Esprit Saint ». Jésus est constitué « Christ » par l'Esprit Saint. La Vierge Marie conçoit le Christ de l'Esprit Saint qui par l'ange l'annonce comme Christ lors de Sa naissance et pousse Siméon à venir au Temple voir le Christ du Seigneur; c'est Lui qui emplit le Christ et dont la puissance sort du Christ dans ses actes de guérison et de salut. C'est Lui enfin qui ressuscite Jésus d'entre les morts. Mors, constitué pleinement « Christ » dans son humanité victorieuse de la mort, Jésus répand à profusion l'Esprit Saint jusqu'à ce que « les saints » constituent, dans leur union à l'humanité du Fils de Dieu, « cet Homme parfait (...)qui réalise la plénitude du Christ » (Ep 4, 13): « le Christ total », selon l'expression de S. Augustin.

Le feu.

Alors que l'eau signifiait la naissance et la fécondité de la Vie donnée dans l'Esprit Saint, le feu symbolise l'énergie transformante des actes de l'Esprit Saint. Le prophète Elie, qui « se leva comme un feu et dont la parole brûlait comme une torche » (Si 48, 1), par sa prière attire le feu du ciel sur le sacrifice du mont Carmel, figure du feu de l'Esprit Saint qui transforme ce qu'il touche. Jean-Baptiste, « qui marche devant le Seigneur avec "l'esprit" et la puissance d'Elie » (Le 1, 17) annonce le Christ comme celui qui « baptisera dans l'Esprit Saint et le feu » (Le 3, 718 16), cet Esprit dont Jésus dira : « Je suis venu jeter un feu sur la terre et combien je voudrais qu'il fût déjà allumé » (Le 12, 49). C'est sous la forme de langues « qu'on eût dites de feu » que l'Esprit Saint se pose sur les disciples au matin de la Pentecôte et les remplit de Lui (Ac 2, 34). La tradition spirituelle retiendra ce symbolisme du feu comme l'un des plus expressifs de l'action de l'Esprit Saint :" « N'éteignez pas l'Esprit » (1 Th 5, 19).

La nuée et La lumière.

Ces deux symboles sont inséparables dans les manifestations de l'Esprit Saint. Dès les théophanies de l'Ancien Testament, la Nuée, tantôt obscure, tantôt lumineuse, révèle le Dieu vivant et sauveur, en voilant la transcendance de sa gloire : avec Moïse sur la montagne du Sinaï, à la Tente de Réunion et durant la marche au désert ; avec Salomon lors de la dédicace du Temple. Or ces figures sont accomplies par le Christ dans l'Esprit Saint. C'est Celui-ci qui vient sur la Vierge Marie et la prend « sous son ombre » pour qu'elle conçoive et enfante Jésus (Le 1, 35). Sur la montagne de la Transfiguration, c'est Lui qui « survient dans la nuée qui prend sous son ombre » Jésus, Moïse et Elie, Pierre; Jacques et Jean, et « de la nuée sort une voix qui dit "Celui-ci est mon Fils, mon Elu, écoutez-Le" » (Lc 9,34-35). C'est enfin la même Nuée qui « dérobe Jésus aux yeux » des disciples le jour de l'Ascension (Ac 1, 9) et qui Le révélera Fils de l'Homme dans sa gloire au Jour de son Avènement.

Le sceau.

Le sceau est un symbole proche de celui de l'onction. C'est en effet le Christ que « Dieu a marqué de son sceau » (Jn 6, 27) et c'est en Lui que le Père nous marque aussi de son sceau (2 Co 1, 22; Ep 1, 13; 4, 30). Parce qu'elle indique l'effet indélébile de l'onction de l'Esprit Saint dans les sacrements du Baptême, de la Confirmation et de l'Ordre, l'image du sceau (sphragis) a été utilisée dans certaines traditions théologiques pour exprimer le caractère » ineffaçable imprimé par ces trois sacrements qui ne peuvent être réitérés.

La main.

C'est en imposant les mains que Jésus guérit les malades et bénit les petits enfants3. En son nom, les apôtres feront de même. Mieux encore, c'est par l'imposition des mains des apôtres que l'Esprit Saint est donné. L'Epître aux Hébreux met l'imposition des mains au nombre des e articles fondamentaux » de son enseignement6. Ce signe de l'effusion toute-puissante de l'Esprit Saint, l'Église l'a gardé dans ses épiclèses sacramentelles.

Le doigt.

« C'est par le doigt de Dieu que [Jésus] expulse les démons » (Lc il, 20). Si la Loi de Dieu a été écrite sur des tables de pierre « par le doigt de Dieu » (Ex 31, 18), e la lettre du Christ », remise aux soins des apôtres, « est écrite avec l'Esprit du Dieu vivant, non sur des tables de pierre, mais sur des tables de chair, sur les coeurs » (2 Ca 3, 3). L'hymne « Veni, Creator Spiritus »invoque l'Esprit Saint comme « le doigt de la droite du Père.

La colombe.

A la fin du déluge (dont le symbolisme concerne le Baptême), la colombe lâchée par Noé revient, un rameau tout frais d'olivier dans le bec, signe que la terre est de nouveau habitable. Quand le Christ remonte de l'eau de son Baptême, l'Esprit Saint, sous forme d'une colombe, descend sur Lui et y demeure . L'Esprit descend et repose dans le coeur purifié des baptisés. Dans certaines églises, la sainte Réserve eucharistique est conservée dans un réceptacle métallique en forme de colombe (le columbarium) suspendu au-dessus de l'autel. Le symbole de la colombe pour suggérer l'Esprit Saint est traditionnel dans l'iconographie chrétienne.

L'Esprit et la Parole de Dieu dans le temps des promesses.

Du commencement jusqu'à « la Plénitude du temps» (Ga 4, 4), la mission conjointe du Verbe et de l'Esprit du Père demeure cachée, mais elle est à l'oeuvre. L'Esprit de Dieu y prépare le temps du Messie, et l'un et l'autre, sans être encore pleinement révélés, y sont déjà promis afin d'être attendus et accueillis lors de leur manifestation. C'est pourquoi lorsque l'Église lit l'Ancien Testament1, elle y scrute ce que l'Esprit, « qui a parlé par les prophètes », veut nous dire du Christ. Par «prophètes», la foi de l'Église entend ici tous ceux que l'Esprit Saint a inspirés dans la rédaction des livres saints, tant de l'Ancien que du Nouveau Testament. La tradition juive distingue la Loi (les cinq premiers livres ou Pentateuque), les Prophètes (nos livres dits historique set prophétiques)et les Ecrits (surtout sapientiaux, en particulier les Psaumes).

Dans la création.

La Parole de Dieu et son Souffle Sont à l'origine de l'être et de la vie de toute créature. Au Saint-Esprit il convient de régner, de sanctifier et d'animer la création, car Il est Dieu consubstantiel au Père et au Fils (...). A Lui revient le pouvoir sur la vie, car étant Dieu Il garde la création dans le Père par le Fils. « Quant à l'homme, c'est de ses propres mains [c'est-à-dire le Fils et l'Esprit Saint] que Dieu le façonna (...) et Il dessina sur la chair façonnée sa propre forme, de façon que même ce qui serait visible portât la forme divine . »

L'Esprit de la promesse.

Défiguré par le péché et par la mort, l'homme demeure à l'image de Dieu », à l'image du Fils, mais il est « privé de la Gloire de Dieu » (Rm 3, 23), privé de la « ressemblance ». La promesse faite à Abraham inaugure l'économie du salut au terme de laquelle le Fils Lui-même assumera « l'image » et la restaurera dans « la ressemblance » avec le Père en lui redonnant la Gloire, l'Esprit « qui donne la Vie ». Contre toute espérance humaine, Dieu promet à Abraham une descendance, comme fiait de la foi et de la puissance de l'Esprit Saint. En elle seront bénies toutes les nations de la terre. Cette descendance sera le Christ en qui l'effusion de l'Esprit Saint fera « l'unité des enfants de Dieu dispersés ». En s'engageant par serment6, Dieu s'engage déjà au don de son Fils bien-aimé et au don de « l'Esprit de la Promesse (...) qui prépare la rédemption du Peuple que Dieu s'est acquis » (Ep 1, 13~14).

Dans les Théophanies et la Loi.

Les Théophanies (manifestations de Dieu) illuminent le chemin de la promesse, des patriarches à Moïse et de Josué jusqu'aux visions qui inaugurent la mission des grands prophètes. La tradition chrétienne a toujours reconnu que dans ces Théophanies le Verbe de Dieu se laissait voir et entendre, à la fois révélé et « ombré » dans la Nuée de l'Esprit Saint. Cette pédagogie de Dieu apparaît spécialement dans le don de la Loi. La lettre de la Loi a été donnée comme un « pédagogue » pour conduire le Peuple vers le Christ (Ga 3, 24). Mais son impuissance à sauver l'homme privé de la « ressemblance » divine et la connaissance accrue qu'elle donne du péché suscitent le désir de l'Esprit Saint. Les gémissements des Psaumes en témoignent.

Dans le Royaume et l'Exil.

La Loi, signe de la promesse et de l'alliance, aurait dû régir le coeur et les institutions du Peuple issu de la foi d'Abraham. « Si vous écoutez ma voix et gardez mon alliance, je vous tiendrai pour un royaume de prêtres, pour une nation sainte » (Ex 19, 5). Mais, après David, Israël succombe à la tentation de devenir un royaume comme les autres nations. Or le Royaume, objet de la promesse faite à David sera l'oeuvre de l'Esprit Saint; il appartiendra aux pauvres selon l'Esprit. L'oubli de la Loi et l'infidélité à l'alliance aboutissent à la mort c'est l'Exil, apparemment échec des promesses, en fait fidélité mystérieuse du Dieu sauveur et début d'une restauration promise, mais selon l'Espriit. il fallait que le Peuple de Dieu soufflit cette purification ; l'Exil porte déjà l'ombre de la Croix dans le dessein de Dieu, et le Reste des pauvres qui en revient est l'une des figures les plus transparentes de l'Église.

L'attente du Messie et de son Esprit.

« Voici que je vais faire du nouveau » (Is 43, 19) : deux lignes prophétiques vont se dessiner, portant l'une sur l'attente du Messie, l'autre sur l'annonce d'un Esprit nouveau, et elles convergent dans le petit Reste, le peuple des Pauvres, qui attend dans l'espérance la «consolation d'Israël » et la « délivrance de Jérusalem ». On a vu plus haut comment Jésus accomplit les prophéties qui Le concernent. On se limite ici à celles où apparaît davantage la relation du Messie et de son Esprit. Les traits du visage du Messie attendu commencent à apparaître dans le Livre de l'Emmanuel (« quand Isaïe eut la vision de la Gloire » du Christ Jn 12, 41), en particulier en Is 11, 1-2. Un rejeton sort de la souche de Jessé, un surgeon pousse de ses racines sur lui repose l'Esprit du Seigneur, esprit de sagesse et d'intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de science et de crainte du Seigneur. Les traits du Messie sont révélés surtout dans les chants du Serviteur. Ces chants annoncent le sens de la passion de Jésus, et indiquent ainsi la manière dont Il répandra l'Esprit Saint pour vivifier la multitude : non pas de l'extérieur, mais en épousant notre « condition d'esclave» (Ph 2, 7). Prenant sur Lui notre mort, Il peut nous communiquer son propre Esprit de vie. C'est pourquoi le Christ inaugure l'annonce de la Bonne Nouvelle en faisant sien ce passage d'Isaïe (Le 4, 18-19): L'Esprit du Seigneur est sur moi, car le Seigneur m'a oint. Il m'a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, panser les coeurs meurtris, annoncer aux captifs l'amnistie et aux prisonniers la liberté, annoncer une année de grâce de la part du Seigneur. Les textes prophétiques concernant directement l'envoi de l'Esprit Saint sont des oracles où Dieu parle au coeur de son Peuple dans le langage de la promesse, avec les accents de « l'amour et de la fidélité» dont S. Pierre proclamera l'accomplissement le matin de la Pentecôte. Selon ces promesses, dans les « derniers temps », l'Esprit du Seigneur renouvellera le coeur des hommes en gravant en eux une loi nouvelle; Il rassemblera et réconciliera les peuples dispersés et divisés ; Il transformera la création première et Dieu y habitera avec les hommes dans la paix. Le Peuple des « pauvres », les humbles et les doux, tout abandonnés aux desseins mystérieux de leur Dieu, ceux qui attendent la justice, non des hommes mais du Messie, est finalement la grande oeuvre de la mission cachée de l'Esprit Saint durant le temps des promesses pour préparer la venue du Christ. C'est leur qualité de coeur, purifié et éclairé par l'Esprit, qui s'exprime dans les Psaumes. En ces pauvres, l'Esprit prépare au Seigneur « un peuple bien disposé ».

L'Esprit du Christ dans la plénitude du temps.

Jean, Précurseur, Prophète et Baptiste.

« Parut un homme envoyé de Dieu. Il se nommait Jean » (Jn 1, 6). Jean est « rempli de l'Esprit Saint, dès le sein de sa mère» (Le 1, 15.41) par le Christ Lui-même que la Vierge Marie venait de concevoir de l'Esprit Saint. La « visitation » de Marie à Elisabeth est ainsi devenue « visite de Dieu à son peuple » (Le 1, 68). Jean est « Elie qui doit venir » (Mt 17, 10-13): le Feu de l'Esprit l'habite et le fait «courir devant » [en « précurseur »] le Seigneur qui vient. En Jean le Précurseur, l'Esprit Saint achève de « préparer au Seigneur un peuple bien disposé » (Lc 1, 17). Jean est « plus qu'un prophète » (Le 7, 26). En lui l'Esprit Saint accomplit de « parler par les prophètes ». Jean achève le cycle des prophètes inauguré par Elie1. Il annonce l'imminence de la consolation d'Israël, il est la « voix » du consolateur qui vient (Jn 1,23). Comme le fera l'Esprit de Vérité, « il vient comme témoin, pour rendre témoignage à la Lumière » (Jn 1, 7). Au regard de Jean, l'Esprit accomplit ainsi les « recherches des prophètes » et la « convoitise » des anges (1 P 1, 10-12): « Celui sur qui tu verras l'Esprit descendre et demeurer, c'est lui qui baptise dans l'Esprit (...). Oui, j'ai vu et j'atteste que c'est lui, l'Elu de Dieu. (...) Voici l'Agneau de Dieu » (Jn 1, 33-36). Enfin, avec Jean le Baptiste, l'Esprit Saint inaugure, en le préfigurant, ce qu'Il réalisera avec et dans le Christ redonner à l'homme la « ressemblance » divine. Le baptême de Jean était pour le repentir, celui dans l'eau et dans l'Esprit sera une nouvelle naissance.

« Réjouis-toi, comblée de grâce ».

Marie, la Toute Sainte Mère de Dieu, toujours Vierge est le chef-d'oeuvre de la mission du Fils et de l'Esprit dans la plénitude du temps. Pour la première fois dans le dessein du salut et parce que son Esprit l'a préparée, le Père trouve la Demeure où son Fils et son Esprit peuvent habiter parmi les hommes. C'est en ce sens que la Tradition de l'Église a souvent lu en relation à Marie les plus beaux textes sur la Sagesse : Marie est chantée et représentée dans la liturgie comme le « Trône de la Sagesse ». En elle commencent à se manifester les « merveilles de Dieu », que l'Esprit va accomplir dans le Christ et dans l'Église. L'Esprit Saint a préparé Marie par sa grâce. Il convenait que fût « pleine de grâce » la Mère de Celui en qui « habite corporellement la Plénitude de la Divinité » (Col 2, 9). Elle a été, par pure grâce, conçue sans péché comme la plus humble des créatures, la plus capable d'accueil au Don ineffable du Tout-Puissant. C'est à juste titre que l'Ange Gabriel la salue comme la « Fille de Sion » « Réjouis-toi. » C'est l'action de grâce de tout le Peuple de Dieu, et donc de l'Église, qu'elle fait monter vers le Père dans l'Esprit Saint en son cantique, alors qu'elle porte en elle le Fils éternel. En Marie, l'Esprit Saint réalise le dessein bienveillant du Père. C'est avec et par l'Esprit Saint que la Vierge conçoit et enfante le Fils de Dieu. Sa virginité devient fécondité unique par la puissance de l'Esprit et de la foi. En Marie, l'Esprit Saint manifeste le Fils du Père devenu Fils de la Vierge. Elle est le Buisson ardent de la Théophanie définitive : comblée de l'Esprit Saint, elle montre le Verbe dans l'humilité de sa chair et c'est aux Pauvres et aux prémices des nations qu'elle Le fait connaître. Enfin, par Marie, l'Esprit Saint commence à mettre en communion avec le Christ les hommes « objets de l'amour bienveillant de Dieu6 », et les humbles sont toujours les premiers à le recevoir les bergers, les mages, Siméon el Anne, les époux de Cana et les premiers disciples. Au terme de cette mission de l'Esprit, Marie devient 1a « Femme », nouvelle Ève « mère des vivants », Mère dt « Christ total ». C'est comme telle qu'elle est présente avec les Douze, « d'un même coeur, assidus à la prière (Ac 1, 14), à l'aube des « derniers temps » que l'Esprit va inaugurer le matin de la Pentecôte avec la manifestation de l'Église.

Le Christ Jésus.

Toute la Mission du Fils et de l'Esprit Saint dans 1a plénitude du temps est contenue en ce que le Fils est l'oint de l'Esprit du Père depuis son Incarnation : Jésus est Christ, le Messie. Tout le deuxième chapitre du Symbole de la foi est à lire à cette lumière. Toute l'oeuvre du Christ est mission conjointe du Fils et de l'Esprit Saint. Ici, on mentionnera seulement ce qui concerne la promesse de l'Esprit Saint par Jésus et son don par le Seigneur glorifié. Jésus ne révèle pas pleinement l'Esprit Saint tant que Lui-même n'a pas été glorifié par sa Mort et sa Résurrection. Pourtant, Il le suggère peu à peu, même dans son enseignement aux foules, lorsqu'Il révèle que sa Chair sera nourriture pour la vie du monde1. Il le suggère aussi à Nicodème, à la Samaritaine et à ceux qui participent à la fête des Tabernacles. A ses disciples, Il en parle ouvertement à propos de la prière et du témoignage qu'ils auront à rendre. C'est seulement quand l'Heure est venue où Il va être glorifié que Jésus promet la venue de l'Esprit Saint, puisque sa Mort et sa Résurrection seront l'accomplissement de la promesse faite aux Pères : l'Esprit de Vérité, l'autre Paraclet, sera donné par le Père à la prière de Jésus; Il sera envoyé par le Père au nom de Jésus; Jésus l'enverra d'auprès du Père car Il est issu du Père. L'Esprit Saint viendra, nous le connaîtrons, Il sera avec nous à jamais, Il demeurera avec nous; Il nous enseignera tout et nous rappellera tout ce que le Christ nous a dit et Lui rendra témoignage; Il nous conduira vers la vérité tout entière et glorifiera le Christ. Quant au monde, Il le confondra en matière de péché, de justice et de jugement. Enfin vient l'Heure de Jésus : Jésus remet son esprit entre les mains du Père au moment où par sa Mort Il est vainqueur de la mort, de sorte que, « ressuscité des morts par la Gloire du Père » (Rm 6, 4), Il donne aussitôt l'Esprit Saint en « soufflant » sur ses disciples. A partir de cette Heure, la mission du Christ et de l'Esprit devient la mission de l'Église : « Comme le Père m'a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jn 20, 21).

V. L'Esprit et l'Église dans les derniers temps.

La Pentecôte.

Le jour de la Pentecôte (au terme des sept semaines Pascales), la Pâque du Christ s'accomplit dans l'effusion de l'Esprit Saint qui est manifesté, donné et communiqué comme Personne divine : de sa Plénitude, le Christ, Seigneur, répand à profusion l'Esprit. En ce jour est pleinement révélée la Trinité Sainte. Depuis ce jour, le Royaume annoncé par le Christ est ouvert à ceux qui croient en Lui : dans l'humilité de la chair et dans la foi, ils participent déjà à la communion de la Trinité Sainte. Par sa venue, et elle ne cesse pas, l'Esprit Saint fait entrer le monde dans les «derniers temps », le temps de l'Église, le Royaume déjà hérité, mais pas encore consommé: Nous avons vu la vraie Lumière, nous avons reçu l'Esprit céleste, nous avons trouvé la vraie foi : nous adorons la Trinité indivisible car c'est elle qui nous a sauvés.

L'Esprit Saint - le Don de Dieu.

« Dieu est Amour » (1 Jn 4, 8. 16) et l'Amour est le premier don, il contient tous les autres. Cet Amour, « Dieu l'a répandu dans nos coeurs par l'Esprit qui nous fut donné» (Rm 5, 5). Parce que nous sommes morts, ou, au moins, blessés par le péché, le premier effet du don de l'Amour est la rémission de nos péchés. C'est la communion de l'Esprit Saint (2 Co 13, 13) qui, dans l'Église, redonne aux baptisés la ressemblance divine perdue par le péché. Il donne alors les « arrhes » ou les « prémices » de notre Héritage : la Vie même de la Trinité Sainte qui est d'aimer « comme Il nous a aimés ». Cet Amour (la charité de 1 Co 13) est le principe de la vie nouvelle dans le Christ, rendue possible puisque nous avons « reçu une force, celle de l'Esprit Saint » (Ac 1, 8). C'est par cette puissance de l'Esprit que les enfants de Dieu peuvent porter du fruit. Celui qui nous a greffés sur I' vraie Vigne, nous fera porter « le fruit de l'Esprit qui est charité, joie, paix, longanimité, serviabilité, bonté confiance dans les autres, douceur, maîtrise de soi » (Ga 5, 22-23). « L'Esprit est notre Vie »; plus nous renonçons a nous-mêmes, plus « l'Esprit nous fait aussi agir » (Ga 5, 25): Par communion avec Lui, l'Esprit Saint rend spirituel, rétablit au Paradis, ramène au Royaume des cieux et à l'adoption filiale, donne la confiance d'appeler Dieu Père et de participer à la grâce du Christ, d'être appelé enfant de lumière et d'avoir part à la gloire éternelle.