INDEX

HOMÉLIE DE S. AUGUSTIN POUR UNE FÊTE DE MARTYRS

Les exploits glorieux des martyrs, qui font en tout lieu l'ornement de l'Église. nous permettent de comprendre par nous-mêmes la vérité de ce que nous avons chanté Aux yeux du Seigneur, la mort de ses saints a un grand prix. En effet, elle a un grand prix à nos yeux, et aux yeux de celui pour le nom duquel ils sont morts. Mais le prix de toutes ces morts, c'est la mort d'un seul. Combien de morts a-t-il achetées, en mourant à lui seul, puisque, s'il n'était pas mort, le grain de blé ne se serait pas multiplié? Vous avez entendu ce qu'il disait lorsqu'il approchait de sa passion, c'est-à-dire alors qu'il approchait de notre rédemption : Si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il reste seul; mais s'il meurt, il porte beaucoup de fruit. Car sur la croix s est réalisée une affaire grandiose. C'est là que s'est ouverte la bourse contenant le prix de notre rançon: quand son côté a été ouvert par la lance qui le frappait, ce qui en a jailli, c'est le prix de l'univers. Les fidèles et les martyrs ont été achetés; mais la foi des martyrs a fait ses preuves, leur sang en est témoin. Ce qui a été dépensé pour eux, ils l'ont rendu, et ils ont accompli la parole de saint Jean : Le Christ a donné sa vit pour nous; nous aussi, nous devons donner notre vie pour nos frères. Il est dit ailleurs: Lorsque ta t'assieds à une table magnifique, regarde bien ce que l'on te sert, car il faut que tu en prépares autant. C'est une table magnifique, celle où l'on mange le maître du banquet lui-même. Personne ne nourrit ses invités avec lui-même : c'est ce que fait le Christ Seigneur. Il est l'hôte qui invite. il est lui-même la nourriture et la boisson. Les martyrs ont donc fait attention à ce qu'ils mangeaient et buvaient, pour pouvoir en rendre autant. Mais comment auraient-ils pu en rendre autant, si celui qui a fait la première dépense ne leur avait donné de quoi lui rendre? Aussi. qu'est-ce que nous recommande le psaume où nous avons chanté cette parole: Aux veux du Seigneur, la mort de ses saints a un grand prix ? L'homme a considéré combien il a reçu de Dieu; il a passé en revue combien la grâce du Tout-Puissant l'a comblé : il l'a créé ; après sa chute, il l'a cherché ; l'ayant trouvé, il lui a pardonné ; il a aidé ses pauvres forces dans le combat; il ne l'a pas quitté lorsqu'il défaillait; lorsqu'il a été vainqueur, il l'a couronné et il s'est donné lui-même en récompense. Lorsqu'il a considéré tout cela, l'homme s'est écrié : Comment rendrai-je ai~ Seigneur tout le bien qu'il m'a fait? J'élèverai la coupe, dit saint.

Quelle est cette coupe? La coupe amère et salubre de la passion ; la coupe que le malade craindrait de toucher, Si le médecin n'y avait bu le premier. Voici quelle est cette coupe, nous reconnaissons qu'elle s'approche des lèvres du Christ, lorsqu'il dit : Père, si c'est possible, que cette coupe passe loin de moi! C'est de cette coupe que les martyrs ont dit: J'élèverai la coupe du salut, et j'invoquerai le nom du Seigneur. Tu ne crains donc pas de défaillir? Non, répond-il. Pourquoi? Parce que j'invoquerai le nom du Seigneur. Comment les martyrs seraient-ils victorieux, s'il n'était pas victorieux dans les martyrs, celui qui a dit: Réjouissez-vous, parce que j'ai vaincu le monde. Le Souverain des cieux dirigeait leur âme et leur langue, par eux il triomphait du diable sur terre, et au ciel il couronnait les martyrs. Heureux ceux qui ont bu ainsi à cette coupe ! Ils sont délivrés de leurs douleurs, ils sont comblés d'honneurs.

 

Les âmes des justes sont dans la main de Dieu, nul tourment ne les atteindra.

Dieu les a soumis à l'épreuve et les a trouvés dignes de lui.

Au jour de sa visite, ils resplendiront; le Seigneur régnera sur eux pour toujours.

Nous faisons mémoire des saints Côme et Damien pour te glorifier. Seigneur, puisque ton admirable Providence leur a donné la gloire sans fin et nous donne maintenant ton secours.

Victimes de la Révolution

(suppliciées pendant la Terreur, 1792-1794)

La fidélité

Rester ferme dans sa foi et ses convictions au milieu de la tourmente révolutionnaire.

Fêtes

Les martyrs

de Septembre, le 2 septembre les carmélites de Compiègne, le 17 juillet

les martyrs d'Angers, le 19 février

les ursulines de Valenciennes, le 17 octobre.

Les massacres de Septembre

Des gravures de la Bibliothèque nationale représentent les massacres de Septembre au séminaire des Carmes.

Les martyrs

d'Angers

De nombreuses scènes de tuerie des martyrs d'Angers sont représentées sur les vitraux de la chapelle du Champ des Martyrs à Avrillé près d'Angers.

La Révolution, qui marque la fin de l'Ancien Régime, vit changer les convictions, les autorités, les habitudes même. Plus rien ne semblait stable, ni le politique, ni l'économique, ni le religieux. La foi, l'Église, le culte allaient-ils être ébranlés dans leurs fondements, resteraient-ils en tout point les mêmes ou bien retrouvaient-ils un nouveau visage, fidèle aux origines et adapté au nouveau temps

Qui aurait pu le dire

Il s'est trouvé des hommes et des femmes pour qui la fui devait être défendue au prix de la vie. Ils y ont trouvé l'occasion de manifester ce qui était pour eux l'essentiel, à savoir non les changements dans la société, mais l'attachement contre vents et marées à ce qui n'est pas de ce monde, l'au-delà.

· Les massacres de Septembre

En 1792, Paris était depuis trois ans déjà en ébullition. On avait vu les états généraux, ~ camouflet infligé au pouvoir royal, l'essai de mise sous tutelle de l'Église, une guerre étrangère difficile. Les prêtres réfractaires à la constitution civile du clergé, soupçonnés d'être favorables à l'Ancien Régime, donc à l'ennemi, avaient été emprisonnés. Ils étaient des centaines aux Carmes, à Saint-Firmin, à l'Abbaye, autant de maisons religieuses transformées en prisons.

Le contraste était étonnant entre la sérénité de ces lieux d'incarcération où la vie religieuse avait repris ses habitudes prières, bréviaire, promenades, etc., et l'agitation de la rue. Le 19 août les Prussiens avaient franchi les frontières, le 30, ils prenaient Thionville, le 2 septembre Verdun. La révolution était en danger.

Le dimanche 2 septembre, vers cinq heures, le tocsin de Saint-Sulpice sonne. Puis des émeutiers s'engouffrent dans le jardin du séminaire des Carmes et se mettent à percer de piques les malheureux prisonniers. L'archevêque d'Arles s'interpose courageusement. Les prêtres traqués sont rassemblés d'abord au pied de l'escalier, puis dans l'église. Ils se donnent mutuellement l'absolution. Près d'une demi-heure s'écoule. Puis on pousse les prisonniers par petits groupes vers le jardin où les attendent les assassins massés au pied du petit escalier. Enfin une autorité arrive, un commissaire de section. Il établit un simulacre de jugement réduit à un interrogatoire d'identité avant de livrer les survivants aux assassins excités par le vin et la vue du sang.

Des scènes semblables se sont produites dans les autres lieux de détention. Cent quatre-vingt-onze victimes de ces massacres de septembre furent béatifiées par le pape Pie XI le 17 octobre 1926.

Les carmélites de Compiègne

Le Carmel de Compiègne avait été inauguré en 1648. Il avait d'étroites relations avec la famille royale et la cour. En 1759 y vivaient dix-sept religieuses pensionnées par la couronne. Le monastère était réputé pour sa dévotion et sa charité.

En 1790, le pouvoir révolutionnaire fit l'inventaire des biens du couvent et les carmélites affirmèrent leur volonté de vivre et de mourir dans leur maison. Non assujetties au serment de la constitution civile du clergé, elles gardèrent leurs pensions, mais tout les inclinait à résister à la nouvelle organisation de l'Église et de l'État. C'est aux alentours de Pâques 1792 qu'une religieuse aurait fait un songe prémonitoire du martyre. Alors, la communauté unanime fit solennellement un acte de consécration par lequel chacune s'offrirait en holocauste pour apaiser la colère de Dieu et ramener la paix dans le pays.

Ainsi, malgré les conseils de prudence qu'on leur prodiguait, elles entretenaient une correspondance imprudente avec l'extérieur. Au cours d'une perquisition qui eut lieu le 21 juin 1794, les hommes du pouvoir en découvrirent les traces, en même temps qu'un portrait de Louis XVI et des images du Sacré Coeur, signe de ralliement des insurgés de Vendée. Autant de pièces qui venaient étayer les soupçons de complot royaliste et fanatique. Les soeurs furent alors emprisonnées dans l'ancienne maison des Visitandines.

Le martyre des carmélites

Le procès eut lieu lors de la Grande Terreur de juin 1794. Elles furent jugées rapidement, sans témoins, et parmi une multitude d'autres. Mère Thérèse, la prieure, déclara qu'elle voulait être la seule victime. Elle n'obtint que d'être exécutée la dernière. Elles chantaient le Veni Creator en allant sur le lieu du supplice. La prieure bénit chacune de ses compagnes qui montaient à l'échafaud. Elle tenait dans la paume de la main une minuscule statue de la Sainte Vierge qu'elle leur donnait à baiser.

Soeur Marie de l'Incarnation fut la seule rescapée du massacre parce qu'elle était en voyage lors de l'arrestation. Elle entreprit de faire connaître ses compagnes, leur vie et les détails de leur exécution. Ce fut l'origine d'une abondante littérature hagiographique, parfois polémique, le plus souvent symbolique, dont la pièce la plus remarquable est sans doute Dialogues des Carmélites de Georges Bernanos. La béatification des carmélites de Compiègne fut proclamée par Pie X le il juin 1905.

Les martyrs d'Angers

Après la déroute de l'année vendéenne, catholique et royale, à Savenay le

23 décembre 1793, la répression fut particulièrement dure des milliers de survivants furent fusillés ou noyés dans la Loire. Puis une immense rafle fut opérée. Hommes, femmes et enfants furent amenés à Angers. La loi du 17 septembre permettait d'arrêter tout opposant au régime. L'arrestation se faisait sur dénonciation. Les motifs en étaient multiples participer à des processions, colporter des objets d'église, cacher des prêtres réfractaires, fréquenter les brigands a (les chouans révoltés).

Les prisons débordaient. Il y en avait six en ville : la prison nationale, la Citadelle, le séminaire et les trois couvents du Bon Pasteur, des Pénitentes et du Calvaire. Cette dernière, réservée aux femmes et aux enfants, est particulièrement malsaine : fange, vermine, miasmes multiples contaminent l'atmosphère. Quatre cent vingt-huit personnes vont y mourir de maladie ou de froid. Les prisonniers sont souvent jugés sur place par les juges du comité de surveillance révolutionnaire. Les jugements sont sans appel et les exécutions immédiates. Au Calvaire toujours, les conducteurs placent les chariots sous une fenêtre située à deux mètres au-dessus du sol alors on pousse les condamnés qui tombent directement les uns sur les autres dans le chariot. Puis le cortège s'organise : les autorités, les tambours, les soldats, les condamnés et les charrettes des malades. Tous traversent la ville en ordre.

Sur les prairies des berges de la Luire, on déshabille les victimes et on les fait agenouiller. Puis on les fusille par-derrière. Bientôt on continuera les tueries dans le parc de la Haie, au nord de la ville. Il y aura quinze fusillades dans l'ancien couvent de Grandmont. Quand on ne fusille pas, on guillotine. L'instrument est installé, à partir de décembre 1793, place du Ralliement, en plein centre-ville, et chaque jour il fonctionne pour les trois ou quatre victimes dont la confiscation des biens permet de financer l'exécution.

Dès 1796, des documents attestent l'existence d'un culte populaire. Les autorités signalent en effet des rassemblements au « champ des Martyrs a. En 1818, le terrain est acheté. En 1847 un monument est construit. En 1867, dix tombes sont ouvertes et ~s pèlerinages s'organisent. Parmi ~s victimes, l'Église distinguera quatre-vingt-dix-neuf martyrs. Ce sont pour la plupart de simples fidèles de toutes conditions. Quatre-vingt-trois sont des femmes. Les hommes étaient à la guerre s'ils n'avaient pas déjà été tués au combat. Ils seront béatifiés le 19 février 1984 par le pape Jean-Paul Il.

Les ursulines de Valenciennes

La maison des ursulines de Valenciennes avait un effectif de trente-deux membres en 1790. Ces religieuses s'occupaient essentiellement de l'enseignement des filles. Quand, le 18 août 1792, les congrégations religieuses enseignantes furent dissoutes, les ursulines abandonnèrent leur maison et s'exilèrent à Mons en Belgique.

Au printemps 1793, les coalisés occupèrent Valenciennes. Les soeurs rentrèrent alors dans leur couvent, rouvrirent leurs classes et reprirent leur apostolat auprès de la jeunesse de la ville. Cette situation dura plus d'un an. Mais, en août 1794, l'armée autrichienne dut abandonner la ville aux troupes républicaines.

Alors les patriotes valenciennois relevèrent la tête. Ils chantèrent la liberté retrouvée, mais aussi le châtiment pour les ennemis de la République. Un bon millier de personnes furent incarcérées, parmi elles quinze ursulines dont onze dans les prisons de Valenciennes. Cinq d'entre elles furent condamnées à mort le 17 octobre 1794 et les autres le 23 du même mois, toutes devaient être guillotinées comme émigrées rentrées '~.

Quelques instants avant leur exécution, elles récitèrent la prière des agonisants, préparèrent leur toilette funèbre et se donnèrent rendez-vous dans l'éternité. Chacune présenta ses mains pour qu'on les lui lie dans le dos, se laissa couper les cheveux et monta a l'échafaud en récitant à haute voix le Magnificat.

Les ursulines de Valenciennes furent béatifiées le 13 juin 1920 par le pape Benoît XV.

Une sainte patriote

Perrine Dugué était la dernière d'une famille de sept enfants. Ses parents, pauvres fermiers du Maine, attendaient des événements révolutionnaires un soulagement à leur misère. Ils étaient d'autant plus patriotes que les passages de l'armée vendéenne avaient fait souffrir le pays et que des bandes de chouans continuaient a harceler les pauvres gens. Des milices s'étaient formées pour lutter contre elles et deux des frères de Perrine étaient volontaires à Sainte-Suzanne.

En 1796, la jeune fille avait dix-sept ans, Elle servait souvent de messagère pour les corps de volontaires retranchés dans l'église à demi détruite de Thorigny. Elle avait déjà reçu des menaces des chouans, très bien organisés et maîtres de la campagne. Mais la foi et le courage ne lui faisaient pas défaut. Le mardi 22 mars, elle partait avec des voisins à la foire de Sainte-Suzanne. Montée en croupe sur le cheval d'un des fermiers, elle devait longer la forêt de la Charnie, occupée par des Vendéens et des émigrés. À mi-route, dans la lande de Blandouet, au lieu-dit Lande de Pain-Sec, sous le chêne des Évêts, trois chouans les arrêtèrent. Ils obligèrent Perrine à descendre de cheval et firent fuir ses compagnons. Ils forcèrent Perrine à se déshabiller, mais elle défendit sauvagement son honneur. Ils la frappèrent à coups de sabre et la laissèrent pour morte.

Le lendemain seulement, des volontaires se rendirent sur les lieux. Ils la trouvèrent râlant encore, un sein arraché. Elle mourut peu de temps après. Quatre jours plus tard, on enterra la jeune fille et une grande croix de pierre surmonta sa tombe. Très vite des miracles furent attribués à cette jeune infortunée.

Deux ans après la mort de Perrine, un citoyen riche offrit à la famille Dugué le champ sur lequel a été construite la chapelle en son honneur. Le corps de la sainte bleue y fut porté la nuit au milieu d'une grande assistance. Pour Perrine, il n'y aura pas de canonisation autre que populaire. Pourtant la fui religieuse renforçait chez elle la foi patriotique comme elle a renforcé chez d'autres la foi royaliste.

En parlant d'une sainte patriote, sainte parce que martyre, on libère le religieux de toute contagion politique. Le même souci a conduit l'Église à ne canoniser officiellement que ceux, parmi les martyrs, qui n'ont donné leur vie que pour la foi ou une conviction intime.

LES MARTYRS

Le peuple chrétien rassemblé célèbre avec une religieuse solennité les mémoires des martyrs afin d'exciter à les imiter, et aussi pour être associé à leurs mérites et secouru par leurs prières. Cependant, Si nous honorons les martyrs, nous n élevons des autels à aucun d'eux. En effet, quel évêque montant à l'autel, dans les lieux où les corps des saints sont ensevelis, a-t-il jamais dit: Nous offrons à toi, Pierre, ou Paul, ou Cyprien? Ce que l'on offre, on l'offre à Dieu qui a couronné les martyrs, auprès des tombeaux de ceux qu'il a couronnés, afin que les lieux eux-mêmes encouragent à une plus grande ferveur pour aiguiser la charité envers eux, que nous pouvons imiter, et envers lui, dont l'assistance nous permettra de le faire. Nous rendons aux martyrs le même culte d'affection et de solidarité que l'on rend en cette vie aux saints hommes de Dieu dont nous constatons que le coeur est prêt à subir les mêmes souffrances pour la vérité de l'Évangile. Toutefois, nous honorons les martyrs avec une plus grande ferveur parce que celle-ci est plus assurée, maintenant qu'ils ont triomphé de tous les combats; nous célébrons par une louange plus confiante ceux qui sont déjà victorieux dans une vie plus heureuse, de préférence à ceux qui sont encore dans les luttes d'ici-bas. Mais le culte d'adoration (pour les Grecs, « latrie »...) est une obligation due proprement à la divinité. Nous le rendons et nous enseignons à le rendre à Dieu seul. Or, c'est de e culte que relève l'oblation du sacrifice et c'est pourquoi ~n taxe d'idolâtrie ceux qui vont jusqu'à rendre un tel culte aux idoles. En aucune manière nous ne rendons un tel culte, ni nous ne prescrivons de le rendre, à aucun martyr, à aucune âme sainte, à aucun ange. Et quiconque tomberait ans une telle erreur, on le reprend, selon la saine doctrine, afin qu'il se corrige ou qu'il se tienne sur ses gardes. Ces saints eux-mêmes, n'étant que des hommes, refusent qu'on leur rende un tel culte, car ils savent qu'il est dû à Dieu seul. On l'a vu chez Paul et Barnabé: les Lycaoniens, bouleversés par les miracles qu'ils venaient d'accomplir, voulaient leur offrir des sacrifices comme à des dieux. Les deux apôtres, déchirant leurs vêtements, affirmèrent et persuadèrent qu'ils n'étaient pas des dieux et interdirent qu'on les traite ainsi. Mais autre chose est ce que nous enseignons, autre chose ce que nous supportons; autre chose, ce qu'il est ordonné de corriger et, en attendant que nous l'ayons corrigé, ce que nous sommes contraints de tolérer.

Jean Berchmans.

Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde. Sans miséricorde est le jugement, pour qui n'a pas eu pitié. La miséricorde se rit du jugement, elle rend fils du Père qui est dans les cieux.

Dieu de qui vient tout ce qui est juste et bon, tu as établi saint Yves comme juge parmi ses frères, et tu as fait de lui un grand ami des pauvres; accorde-nous, par son intercession, de rechercher passionnément la justice et de communier à ton amour pour les hommes.

 

Il rendit un beau témoignage. Le gouverneur lui demanda qui était le Dieu des chrétiens. Il lui répondit: « Si tu en es digne, tu le connaîtras. » Il fut alors emmené et traîné sans pitié. Il souffrit toutes sortes de coups. Ceux qui étaient près de lui l'outrageaient de toute manière, des mains et des pieds, sans aucun respect pour son âge. Ceux qui étaient loin lançaient sur lui tout ce que chacun avait sous la main. Et tous auraient pensé être grandement criminels et impies s'ils avaient manqué de grossièreté à son égard:

ils croyaient en effet venger leurs dieux en agissant ainsi. Pothin respirait à peine quand il fut jeté en prison et, après deux jours, il rendit l'âme.

 

A toi seul, Fils du vrai Dieu, la gloire et la louange. Qui se déclarera pour moi devant les hommes, je me déclarerai pour lui devant mon Père. Qui aura tenu bon jusqu'à la fin, je lui donnerai la vie éternelle.

 

Heureux les coeurs purs: ils verront Dieu.

Les âmes des justes sont dans la main de Dieu, nul tourment ne les atteindra.

Dieu les a soumis à l'épreuve et les a trouvés dignes de lui.

Au jour de sa visite, ils resplendiront: Le Seigneur régnera sur eux pour toujours.

HOMÉLIE DES. AMBROISE SUR LE PSAUME 118

 

Lorsqu'il y a beaucoup de persécutions, il y a beaucoup de martyrs. Chaque jour tu es témoin du Christ*. Tu étais tenté par l'esprit d'impureté ; mais, par crainte du jugement futur, tu as jugé qu'il ne fallait pas souiller la chasteté de l'esprit et du corps : tues martyr du Christ. Tu étais tenté par l'esprit de lucre pour saisir la propriété d'un pauvre ou violer les droits d'une veuve sans défense ; mais. par la contemplation des préceptes divins, tu as jugé qu'il valait mieux porter secours que commettre une injustice : lu es témoin du Christ. En effet, le Christ veut avoir de tels témoins, selon cette parole de l'Écriture : Soyez justes pour l'orphelin, défendez la veuve, venez donc et discutons, dit le Seigneur. Tu étais tenté par l'esprit d'orgueil ; mais en voyant le pauvre et l'indigent, lu as été saisi d'une tendre compassion, tu as préféré l'humilité à l'arrogance : lu es témoin du Christ. Mieux que cela: lu n'as pas donné ton témoignage en parole seulement mais aussi en action. Quel est le témoin le plus sûr? Celui qui confesse que le Seigneur Jésus est venu parmi nous dans la chair et qui observe les préceptes de l'Évangile. Car celui qui écoute et n'agit pas nie le Christ; il a beau le proclamer en parole, il le nie par ses actions. Combien de gens disent: Seigneur, Seigneur, n'est-ce pas en ton nom que nous avons été prophètes, que nous avons chassé les démons et fait beaucoup de miracles? Au jour du jugement, le Christ leur répondra: Écartez-vous de moi, vous qui faites le ni al! Celui-là est témoin qui, avec la garantie des faits, rend témoignage aux préceptes du Seigneur Jésus. Combien y en a-t-il chaque jour, de ces martyrs cachés du Christ, qui confessent le Seigneur Jésus! L'Apôtre a connu ce martyre-là et le témoignage de foi rendu au Christ, lui qui a dit : Notre sujet de fierté, c'est le témoignage de notre conscience. Combien ont confessé la foi extérieurement, et l'ont niée intérieurement . Ne croyez pas n'importe quel prophète: c'est à leurs fruits que sous saurez lesquels vous devez croire. Sois donc fidèle et courageux dans les persécutions intérieures pour triompher aussi dans les persécutions extérieures. Dans les persécutions du dedans également. il v a des rois et des gouverneurs, des juges au pouvoir redoutable. Tu en as un exemple dans la tentation subie par le Seigneur. On lit encore ailleurs: Que le péché ne règne pas dans notre corps mortel. Tu vois devant quels rois lu vas comparaître, ô homme, devant quels gouverneurs de péchés, Si c'est le péché qui règne. Il y a autant de rois que de péchés et de vices; et c'est devant eux que nous sommes amenés, devant eux que nous comparaissons. Ces rois-là ont encore leur tribunal dans l'esprit d'un grand nombre. Mais celui qui confesse le Christ paralyse aussitôt le pouvoir de ce roi, il le détrône de son esprit. Comment le tribunal du diable pourrait-il subsister chez celui en qui est érigé le tribunal du Christ?

 

De la détresse des prisons monte le cri des fils de Dieu persécutés;

mais le Royaume est proche: bientôt se lèvera le Fils de l'homme qu'ils acclament:

Dieu vivant, Seigneur ressuscité, nous croyons en toi.

Un moment vous souffrirez, mais j'ai vaincu le monde, gardez courage.

En vérité, je vous le dis, Si quelqu'un garde ma parole, il ne verra jamais la mort.

Je suis la résurrection celui qui me donne sa foi vivra même dans la mort.

LA PASSION DES MARTYRS D'AGAUNE

 

Sous Maximien, qui fut empereur de Rome avec Dioclétien pour collègue, en de nombreuses provinces, des martyrs en foule furent torturés ou mis à mort. Il y avait dans l'armée, à cette époque, une légion de soldats appelés Thébéens. Ils étaient venus d'Orient d'où on les avait fait venir au secours de Maximien, car c'étaient d'excellents guerriers, nobles par leur courage, mais plus nobles par leur foi. Aussi, comme on les avait chargés de persécuter une multitude de chrétiens, ils furent les seuls à oser condamner cette mission de cruauté et ils refusèrent d'obéir à des ordres pareils. Maximien, épuisé par le trajet, se trouvait auprès de Martigny (dans le Valais). Là, il fut informé par des messagers que cette légion s'était immobilisée dans le défilé d'Agaune, et son indignation le fit bouillir de fureur. Donc, lorsqu'il connut la réponse des Thébéens, emporté par sa colère aveugle, il ordonna de tuer un homme sur dix, afin que les autres. terrifiés par les ordres du souverain, les acceptent par peur. Il réitère ses décisions et prescrit de forcer les survivants à persécuter les chrétiens. Lorsque les Thébéens reçoivent cette injonction renouvelée, une clameur s'élève dans le camp: ils affirment

qu'ils n'accepteront jamais une tâche aussi sacrilège, qu'ils ont toujours détesté l'impiété idolâtre, qu'ils ont reçu l'initiation des mystères chrétiens, qu'ils ont été formés dans la religion du vrai Dieu. et qu'ils préfèrent mourir plutôt que de combattre la foi chrétienne.

En apprenant cette réponse, Maximien ordonne que, de nouveau. un homme sur dix soit mis à mort et que les autres n'en soient pas moins forcés d'accomplir la tâche qu'ils rejettent. Ces ordres à leur tour parviennent au camp: on tire au sort un homme sur dix et il est exécuté. Mais le reste de la troupe s'encourageait à persister dans une aussi belle attitude. Cependant, celui qui fut le plus actif à encourager la foi fut saint Maurice, le chef de la légion : avec ses officiers, Exsupère et Candide, il excitait la ferveur de chacun par ses exhortations et ses avertissements. Les soldats de la légion thébéenne ainsi poussés par leurs chefs et leurs supérieurs envoient à Maximien un message aussi courageux que religieux, ainsi conçu: «Empereur, nous sommes tes soldats, mais aussi les serviteurs de Dieu, ce que nous professons hardiment. À toi nous devons le service militaire, à lui une conscience pure. Nous sommes prêts à porter les mains contre n'importe quel ennemi, mais nous estimons que c'est un crime de les ensanglanter en massacrant des innocents. Nous avons d'abord prêté serment envers Dieu, ensuite nous avons prêté serment envers le souverain. Sois persuadé que le second n'a plus aucune valeur pour nous, si nous avons rompu le premier. Tu nous ordonnes de rechercher les chrétiens pour les conduire au supplice. Désormais tu n'as pas besoin d'en chercher d'autres: nous professons que nous sommes chrétiens, nous ne pouvons pas persécuter les chrétiens. Maximien, voyant que ces guerriers avaient le coeur fixé dans la foi au Christ et désespérant de pouvoir fléchir leur glorieuse constance, ordonna, par une seule sentence, de les tuer tous, et en chargea les troupes qui les entouraient.