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«Là où est ton trésor là aussi sera ton coeur. »

Les exigences radicales du Royaume. (Yves DE MONTCHFUIL)

Les paraboles du trésor et de la perle nous révèlent une des exigences les plus profondes du Royaume. Le Royaume n'est pas quelque chose qui puisse être simplement surajouté à notre vie personnelle, même en prenant encore une grande part de notre pensée et de notre activité. On n'a le vrai souci du Royaume que lorsque ce souci domine tout. Le Royaume est absolu : il ne souffre pas le plus et le moins. Il n'est pas quelque chose que l'on possède à moitié, ou à quoi l'on fait une part. On ne le possède que lorsque tout a été abandonné pour lui. L'homme qui a trouvé le trésor va vendre tout ce qu'il possède; l'homme qui veut acquérir la perle unique va vendre tout ce qu'il possède. Autrement dit, la vie chrétienne, dans son principe, ne connaît pas de partage elle n'est réelle que lorsqu'elle prend tout. C'est sa caractéristique, à l'encontre de tous les autres modes de vie. Pour la vie intellectuelle, la vie esthétique, la vie sociale, il y a un dosage à établir; non pour la vie religieuse. Celle-ci n'exclut pas les autres, mais elle est d'un autre ordre : elle ne peut pas se juxtaposer à elles; il faut que, prenant tout l'homme, elle pénètre ses autres modes de vie. Il n'y a vie religieuse authentique que là où cette vie tend à tout envahir. Lorsqu'elle a tout envahi, par hypothèse, c'est la perfection. Nous savons bien que la perfection, sur terre, n'est jamais atteinte. Soyons heureux du moindre pas accompli. Mais, dans la tendance, dans l'orientation de base, sachons qu'il n'y a pas de compromis possible. Il y a un exclusivisme de Dieu. Seulement, cet exclusivisme ne s'exerce point à la manière des exclusivismes humains. Dieu n'est pas une réalité créée, occupant dans l'étoffe de l'être une place dont, par son existence même, elle chasse toutes les autres réalités créées. La présence de Dieu ne chasse pas l'humain : elle le pénètre et le transforme. Mais l'humain doit se laisser pénétrer tout entier; il doit se laisser pour ainsi dire enlever à lui-même. La présence de Dieu, dans son exigence exclusive, est conciliable avec tout ce qui, de la création, n'est pas atteint par le péché. Mais c'est à condition de tout renouveler. Lorsque vient l'Esprit de Dieu, il renouvelle toute chose. Nous ne possédons Dieu que lorsqu'il pénètre en nous tout le reste et que par conséquent nous acceptons de ne plus posséder rien. Il nous faut donc, pour posséder Dieu, c'est-à-dire pour entrer dans le Royaume, renoncer à toutes les autres choses pour elles-mêmes : pour la perle, pour le trésor, il nous faut vendre tout. Cela paraît encore assez facile dans l'action; mais cela devient plus difficile lorsqu'il s'agit de formes de vie supérieures : vie intellectuelle ou vie esthétique. On en arrive ainsi à la question de l'humanisme Dieu peut-il être trouvé sans que l'on renonce à l'homme pour lui-même? La richesse humaine, non pénétrée par Dieu, est pratiquement exclusive de Dieu. Le meilleur devient alors le pire. On en vient à professer ou à vivre un humanisme exclusif, et la jouissance indéfinie de la richesse humaine fait manquer l'occasion de la perle unique. On adore l'homme à la place de Dieu. Le Royaume est quelque chose que l'on n'obtient qu'en renonçant à tout le reste.

PRIÈRE

Donne, Seigneur, à tes fils de rendre hardiment témoignage à la vérité de l'Évangile.

Que par eux ton Église soit présente à la construction du monde.