Sapientiae Christianae
DES PRINCIPAUX DEVOIRS DES CHRÉTIENS
À nos Vénérables
Frères les Patriarches, Primats, Archevêques, Évêques
et autres ordinaires, en paix et en communion avec le Saint Siège
Apostolique.
LÉON XIII PAPE
Vénérables Frères,
Salut et Bénédiction Apostolique
1 - Retourner aux. principes chrétiens
et y conformer en tout la vie, les moeurs et les institutions des peuples,
est une nécessité qui, de jour en jour, devient plus évidente.
Du mépris où ces règles sont tombées sont résultés
de si grands maux que nul homme raisonnable ne saurait soutenir, sans une
douloureuse anxiété, les épreuves du présent,
ni envisager sans crainte les perspectives de l'avenir.
2 - Il s'est fait, sans doute, un
progrès considérable quant à ce qui regarde les jouissances
et le bien-être du corps, mais la nature sensible tout entière,
avec les ressources, les forces et les richesses qu'elle met à notre
disposition, tout en multipliant les commodités et les charmes de
la vie, ne suffit pas pour rassasier l'âme, créée à
des fins plus hautes et plus glorieuses. Regarder vers Dieu et tendre à
Lui, telle est la loi suprême de la vie de l'homme. Fait à
son image et à sa ressemblance il est porté par sa nature
même à jouir de son Créateur. Or, ce n'est par aucun
mouvement ou effort corporel qu'on se rapproche de Dieu, mais par des actes
propres à l'âme : par la connaissance et l'amour.
Dieu, en effet, est la vérité
première et suprême, et la vérité n'est un aliment
que pour l'intelligence. Il est la sainteté parfaite et le souverain
bien, vers lequel la seule volonté peut aspirer et tendre efficacement
à l'aide de la vertu.
3 - Mais ce qui est vrai de l'homme,
considéré individuellement, l'est aussi de la société,
tant domestique que civile. En effet, si la nature elle-même a institué
la société, ce n'a pas été pour qu'elle fût
la fin dernière de l'homme, mais pour qu'il trouvât en elle
et par elle des secours qui le rendissent capable d'atteindre à
sa perfection. Si donc une société ne poursuit autre chose
que les avantages extérieurs et les biens qui assurent à
la vie plus d'agréments et de jouissances, si elle fait profession
de ne donner à Dieu aucune place dans l'administration de la chose
publique et de ne tenir aucun compte des lois morales, elle s'écarte
d'une façon très coupable de sa fin et des prescriptions
de la nature. C'est moins une société qu'un simulacre et
une imitation mensongère d'une véritable société
et communauté humaine.
4 - Quant à ces biens de l'âme
dont Nous parlons, et qui n'existent pas en dehors de la vraie religion
et de la pratique persévérante des préceptes du christianisme,
nous les voyons chaque jour tenir moins de place parmi les hommes, soit
à cause de l'oubli dans lequel ils les tiennent, soit par le mépris
qu'ils en font. On pourrait presque dire que plus le bien-être physique
est en progrès, plus s'accentue la décadence des biens de
l'âme. Une preuve évidente de la diminution et du grand affaiblissement
de la foi chrétienne, ce sont les injures trop souvent répétées
qu'on fait à la religion en plein jour et aux yeux du public, injures,
en vérité, qu'un âge plus jaloux des intérêts
religieux n'eut tolérées à aucun prix.
5 - Quelle multitude d'hommes se
trouve, pour ces causes, exposée à la perdition éternelle,
il serait impossible de le décrire, mais les sociétés
elles-mêmes et les empires ne pourront rester longtemps sans en être
ébranlés, car la ruine des institutions et des moeurs chrétiennes
entraîne nécessairement celle des premières bases de
la société humaine. La force demeure l'unique garantie de
l'ordre et de la tranquillité publique. Mais rien n'est faible comme
la force quand elle ne s'appuie pas sur la religion. Plus propre, dans
ce cas, à engendrer la servitude que l'obéissance, elle renferme
en elle-même les germes de grandes perturbations.
Déjà le présent
siècle a subi de graves et mémorables catastrophes, et il
n'est pas démontré qu'il n'y ait pas lieu d'en redouter de
semblables. - Le temps lui-même dans lequel nous vivons nous avertit
donc de chercher les remèdes là où ils se trouvent,
c'est-à-dire de rétablir, dans la vie privée et dans
toutes les parties de l'organisme social, les principes et les pratiques
du christianisme ; c'est l'unique moyen de nous délivrer des maux
qui nous accablent et de prévenir les dangers dont nous sommes menacés.
Voilà, Vénérables Frères, à quoi nous
devons nous appliquer avec tout le soin et tout le zèle dont nous
pouvons être capables.
6 - C'est pourquoi, bien qu'en d'autres
circonstances et toutes les fois que l'occasion s'en est présentée,
Nous ayons déjà traité ces matières, nous estimons
utile d'exposer avec plus de détails dans ces Lettres les devoirs
des chrétiens, devoirs dont l'accomplissement exact contribuerait
d'une manière admirable à sauver la société.
Nous sommes engagés, sur des intérêts de premier ordre,
dans une lutte violente et presque quotidienne, où il est très
difficile qu'un grand nombre d'hommes ne soient pas trompés, ne
s'égarent et ne se découragent. Notre devoir, Vénérables
Frères, est d'avertir, d'instruire, d'exhorter chaque fidèle,
d'une manière conforme aux exigences des temps, afin que personne
ne déserte la voie de la vérité.
7 - On ne saurait mettre en doute
que, dans la pratique de la vie, des devoirs plus nombreux et plus graves
ne soient imposés aux catholiques qu'aux hommes mal instruits de
notre foi ou totalement étrangers à ses enseignements. Après
avoir opéré le salut du genre humain, Jésus-Christ,
commandant à ses apôtres de prêcher l'Évangile
à toute créature, imposa en même temps à tous
les hommes l'obligation d'écouter et de croire ce qui leur serait
enseigné. À l'accomplissement de ce devoir est rigoureusement
attachée la conquête du salut éternel. Celui qui croira
et qui sera baptisé sera sauvé ; celui qui ne croira pas
sera condamné. Mais l'homme qui a, comme il le doit, embrassé
la foi chrétienne est, par ce fait même, soumis à l'Église,
sa Mère, et devient membre de la société la plus haute
et la plus sainte que, sous Jésus-Christ, son chef invisible, le
Pontife de Rome, avec une pleine autorité, a la mission de gouverner.
8 - Or, si la loi naturelle nous
ordonne d'aimer d'un amour de prédilection et de dévouement,
le pays où nous sommes nés et où nous avons été
élevés en sorte que le bon citoyen ne craint pas d'affronter
la mort pour sa patrie, à plus forte raison, les chrétiens
doivent-ils être animés de pareils sentiments à l'égard
de l'Église. Car elle est la cité sainte du Dieu vivant et
la fille de Dieu lui-même, de qui elle a reçu sa constitution.
C'est sur cette terre, il est vrai, qu'elle accomplit son pèlerinage;
mais, établie institutrice et guide des hommes, elle les appelle
à la félicité éternelle. Il faut donc aimer
la patrie terrestre qui nous a donné de jouir de cette vie mortelle
; mais il est nécessaire d'aimer d'un amour plus ardent l'Église
à qui nous sommes redevables de la vie immortelle de l'âme,
parce qu'il est raisonnable de préférer les biens de l'âme
aux biens du corps et que les devoirs envers Dieu ont un caractère
plus sacré que les devoirs envers les hommes.
9 - Au reste, si nous voulons juger
de ces choses sainement, nous comprendrons que l'amour surnaturel de l'Église
et l'amour naturel de la patrie procèdent du même éternel
principe. Tous les deux ont Dieu pour auteur et pour cause première
; d'où il suit qu'il ne saurait y avoir entre les devoirs qu'ils
imposent de répugnance ou de contradiction. Oui, en vérité,
nous pouvons et nous devons, d'une part, nous aimer nous-mêmes, être
bons pour notre prochain, aimer la chose publique et le pouvoir qui la
gouverne ; d'autre part, et en même temps, nous pouvons et nous devons
avoir pour l'Église un culte de piété filiale et aimer
Dieu du plus grand amour dont nous puissions être capables.
10 - Cependant la hiérarchie
de ces devoirs se trouve quelquefois injustement bouleversée, soit
par le malheur des temps, soit plus encore par la volonté perverse
des hommes. Il arrive, en effet, que, parfois, les exigences de l'État
envers le citoyen contredisent celles de la religion à l'égard
du chrétien, et ces conflits viennent de ce que les chefs politiques
tiennent pour nulle la puissance sacrée de l'Église ou bien
affectent la prétention de se l'assujettir. De là, des luttes
et, pour la vertu, des occasions de faire preuve de valeur. Deux pouvoirs
sont en présence, donnant des ordres contraires. Impossible de leur
obéir à tous les deux simultanément. Nul ne peut servir
deux maîtres. Plaire à l'un, c'est mépriser l'autre.
Auquel accordera-t-on la préférence ? L'hésitation
n'est pas permise. Ce serait un crime, en effet, de vouloir se soustraire
à l'obéissance due à Dieu pour plaire aux hommes,
d'enfreindre les lois de Jésus-Christ pour obéir aux magistrats,
de méconnaître les droits de l'Église sous prétexte
de respecter les droits de l'ordre civil. Il vaut mieux obéir à
Dieu qu'aux hommes. Cette réponse que faisaient autrefois Pierre
et les apôtres aux magistrats qui leur commandaient les choses illicites,
il faut, en pareille circonstance, la redire toujours et sans hésiter.
Il n'est pas de meilleur citoyen, soit en paix, soit en guerre, que le
chrétien fidèle à son devoir ; mais ce chrétien
doit être prêt à tout souffrir, même la mort,
plutôt que de déserter la cause de Dieu et de l'Église.
11 - Aussi, c'est ne pas bien connaître
la force et la nature des lois que de blâmer cette fermeté
d'attitude dans le choix entre des devoirs contradictoires et de la traiter
de sédition. Nous parlons ici de choses très connues et que
Nous avons Nous-mêmes déjà plusieurs fois exposées.
La loi n'est pas autre chose qu'un commandement de la droite raison porté
par la puissance légitime, en vue du bien général.
Mais il n'y a de vraie et légitime puissance que celle qui émane
de Dieu, souverain Seigneur et Maître de toutes choses, lequel seul
peut investir l'homme d'une autorité de commandement sur les autres
hommes. On ne saurait donner le nom de droite raison à celle qui
est en désaccord avec la vérité et avec la raison
divine ; ni, non plus, appeler bien véritable celui qui est en contradiction
avec le bien suprême et immuable, et qui détourne et éloigne
de Dieu les volontés humaines.
12 - Les chrétiens entourent
donc d'un respect religieux la notion du pouvoir, dans lequel, même
quand il réside dans un mandataire indigne, ils voient un reflet
et comme une image de la divine Majesté. Ils se croient tenus de
respecter les lois, non pas à cause de la sanction pénale
dont elles menacent les coupables, mais parce que c'est pour eux un devoir
de conscience, car Dieu ne nous a pas donné l'esprit de crainte.
Mais, si les lois de l'État sont en contradiction ouverte avec la
loi divine, si elles renferment des dispositions préjudiciables
à l'Église ou des prescriptions contraires aux devoirs imposés
par la religion, si elles violent dans le Pontife Suprême l'autorité
de Jésus-Christ, dans tous ces cas, il y a obligation de résister
et obéir serait un crime dont les conséquences retomberaient
sur l'État lui-même. Car l'État subit le contrecoup
de toute offense faite à la religion. On voit ici combien est injuste
le reproche de sédition formulé contre les chrétiens.
En effet, ils ne refusent, ni au prince, ni aux législateurs, l'obéissance
qui leur est due ou, s'ils dénient cette obéissance, c'est
uniquement au sujet de préceptes destitués d'autorité
parce qu'ils sont portés contre l'honneur dû à Dieu,
par conséquent en dehors de la justice, et n'ont rien de commun
avec de véritables lois.
13 - Vous reconnaissez là,
Vénérables Frères, la doctrine très autorisée
de l'apôtre saint Paul. Dans son épître à Tite,
après avoir rappelé aux chrétiens qu'ils doivent être
soumis aux princes et puissances, et obéir à leurs commandements,
il ajoute aussitôt : et être prêts à faire toutes
sortes de bonnes oeuvres. Par là, il déclare ouvertement
que, si les lois des hommes renferment des prescriptions contraires à
l'éternelle loi de Dieu, la justice consiste à ne pas obéir.
De même, à ceux qui voulaient lui enlever la liberté
de prêcher l'Evangile, le Prince des Apôtres faisait cette
courageuse et sublime réponse : Jugez vous-mêmes s'il est
juste devant Dieu de vous obéir plutôt qu'à Dieu, car
nous ne pouvons pas ne pas dire ce que nous avons vu et entendu.
14 - Aimer les deux patries, celle
de la terre et celle du ciel, mais de telle façon que l'amour de
la patrie céleste l'emporte sur l'amour de la première et
que jamais les lois humaines ne passent avant la loi de Dieu, tel est donc
le devoir essentiel des chrétiens d'où sortent, comme de
leur source, tous les autres devoirs. Le Rédempteur du genre humain
n'a-t-il pas dit de lui-même : Je suis né et je suis venu
au monde afin de rendre témoignage à la vérité,
et encore : Je suis venu apporter le feu sur la terre et que veux-je, sinon
qu'il s'allume ? C'est dans la connaissance de cette vérité
qu'est la suprême perfection de l'intelligence ; c'est dans la charité
divine, qui perfectionne la volonté, que résident toute la
vie et la liberté chrétiennes. Cette vérité
et cette charité forment le glorieux patrimoine confié, par
Jésus-Christ à l'Église qui le défend et le
conserve avec un zèle et une vigilance infatigables.
15 - Mais, avec quel acharnement
et de combien de façons on fait la guerre à l'Église,
il est à peine nécessaire de le rappeler. De ce qu'il a été
donné à la raison, armée des investigations de la
science, d'arracher à la nature un grand nombre de ses secrets les
plus cachés et de les faire servir aux divers usages de la vie,
les hommes en sont venus à ce degré d'orgueil qu'ils croient
pouvoir bannir de la vie sociale l'autorité et l'empire du Dieu
suprême.
16 - Égarés par leur
erreur, ils transfèrent à la nature humaine cet empire dont
ils prétendent dépouiller Dieu. D'après eux, c'est
à la nature qu'il faut demander le principe et la règle de
toute vérité ; tous les devoirs de religion découlent
de l'ordre naturel et doivent lui être rapportés ; par conséquent,
négation de toute vérité révélée,
négation de la morale chrétienne et de l'Église. Celle-ci,
à les entendre, n'est investie ni de la puissance d'édicter
des lois, ni même d'un droit quelconque ; elle ne doit tenir aucune
place dans les institutions civiles. Afin de pouvoir plus commodément
adapter les lois à de telles doctrines et en faire la norme des
moeurs publiques, ils ne négligent rien pour s'emparer de la direction
des affaires et mettre la main sur le gouvernail des États. C'est
ainsi qu'en beaucoup de contrées, le catholicisme est, ou bien ouvertement
battu en brèche, ou secrètement attaqué. Les erreurs
les plus pernicieuses sont assurées de l'impunité et de nombreuses
entraves sont apportées à la profession publique de la vérité
chrétienne.
17 - En présence de ces iniquités,
il est tout d'abord du devoir de chacun de veiller sur soi-même et
de prendre tous les moyens pour conserver intacte la foi dans son âme,
en évitant ce qui la pourrait compromettre et en s'armant contre
les fallacieux sophismes des incrédules. Afin de mieux sauvegarder
encore l'intégrité de cette vertu, Nous jugeons très
utile et très conforme aux besoins de nos temps, que chacun, dans
la mesure de ses moyens et de son intelligence, fasse de la doctrine chrétienne
une étude approfondie et s'efforce d'arriver à une connaissance
aussi parfaite que possible des vérités religieuses accessibles
à la raison humaine. Cependant, il ne suffit pas que la foi demeure
intacte dans les âmes ; elle doit, de plus, y prendre de continuels
accroissements, et c'est pourquoi il convient de faire monter très
souvent vers Dieu cette humble et suppliante prière des Apôtres
: Seigneur, augmentez notre foi.
18 - Mais, en cette même matière
qui regarde la foi chrétienne, il est d'autres devoirs, dont le
fidèle et religieux accomplissement, nécessaire en tous les
temps aux intérêts du salut, l'est plus particulièrement
encore de nos jours.
19 - Dans ce déluge universel
d'opinions, c'est la mission de l'Église de protéger la vérité
et d'arracher l'erreur des âmes, et cette mission, elle la doit remplir
saintement et toujours, car à sa garde ont été confiés
l'honneur de Dieu et le salut des hommes. Mais, quand les circonstances
en font une nécessité, ce ne sont pas seulement les prélats
qui doivent veiller à l'intégrité de la foi, mais,
comme le dit saint Thomas : " Chacun est tenu de manifester publiquement
sa foi, soit pour instruire et encourager les autres fidèles, soit
pour repousser les attaques des adversaires ".
20 - Reculer devant l'ennemi et garder
le silence, lorsque de toutes parts s'élèvent de telles clameurs
contre la vérité, c'est le fait d'un homme sans caractère,
ou qui doute de la vérité de sa croyance. Dans les deux cas,
une telle conduite est honteuse et elle fait injure à Dieu ; elle
est incompatible avec le salut de chacun et avec le salut de tous ; elle
n'est avantageuse qu'aux seuls ennemis de la foi ; car rien n'enhardit
autant l'audace des méchants que la faiblesse des bons.
21 - D'ailleurs, la lâcheté
des chrétiens mérite d'autant plus d'être blâmée,
que souvent il faudrait bien peu de chose pour réduire à
néant les accusations injustes et réfuter les opinions erronées
; et, si l'on voulait s'imposer un plus sérieux labeur, on serait
toujours assuré d'en avoir raison. Après tout, il n'est personne
qui ne puisse déployer cette force d'âme où réside
la propre vertu des chrétiens ; elle suffit souvent à déconcerter
les adversaires et à rompre leurs desseins. De plus, les chrétiens
sont nés pour le combat. Or, plus la lutte est ardente, plus, avec
l'aide de Dieu, il faut compter sur la victoire : Ayez confiance, j'ai
vaincu le monde. Il n'y a point à objecter ici que Jésus-Christ,
protecteur et vengeur de l'Église, n'a pas besoin de l'assistance
des hommes. Ce n'est point parce que le pouvoir lui fait défaut,
c'est à cause de sa grande bonté qu'il veut nous assigner
une certaine part d'efforts et de mérites personnels, lorsqu'il
s'agit de nous approprier et de nous appliquer les fruits du salut procuré
par sa grâce.
22 - Les premières applications
de ce devoir consistent à professer ouvertement et avec courage
la doctrine catholique, et à la propager autant que chacun le peut
faire. En effet, on l'a dit souvent et avec beaucoup de vérité,
rien n'est plus préjudiciable à la sagesse chrétienne
que de n'être pas connue. Mise en lumière, elle a par elle-même
assez de force pour triompher de l'erreur. Dès qu'elle est saisie
par une âme simple et libre de préjugés, elle a aussitôt
pour elle l'assentiment de la saine raison. Assurément, la foi,
comme vertu, est un don précieux de la grâce et de la bonté
divine ; toutefois, les objets auxquels la foi doit s'appliquer ne peuvent
guère être connus que par la prédication : Comment
croiront-ils à celui qu'ils n'ont pas entendu ? Comment entendront-ils
si personne ne leur prêche ?... La foi vient donc de l'audition,
et l'audition par la prédication de la parole du Christ. Or, puisque
la foi est indispensable au salut, il s'ensuit nécessairement que
la parole du Christ doit être prêchée. De droit divin,
la charge de prêcher, c'est-à-dire d'enseigner, appartient
aux docteurs, c'est-à-dire aux évêques que l'Esprit-Saint
a établis pour régir l'Église de Dieu. Elle appartient
par dessus tout au Pontife Romain, Vicaire de Jésus-Christ, préposé
avec une puissance souveraine à l'Église universelle et Maître
de la foi et des moeurs. Toutefois, on doit bien se garder de croire qu'il
soit interdit aux particuliers de coopérer d'une certaine manière
à cet apostolat, surtout s'il s'agit des hommes à qui Dieu
a départi les dons de l'intelligence avec le désir de se
rendre utiles.
23 - Toutes les fois que la nécessité
l'exige, ceux-là peuvent aisément, non, certes, s'arroger
la mission des docteurs, mais communiquer aux autres ce qu'ils ont eux-mêmes
reçu, et être, pour ainsi dire, l'écho de l'enseignement
des maîtres. D'ailleurs, la coopération privée a été
jugée par les Pères du Concile du Vatican tellement opportune
et féconde, qu'ils n'ont pas hésité à la réclamer.
" Tous les chrétiens fidèles, disent-ils, surtout ceux qui
président et qui enseignent, nous les supplions par les entrailles
de Jésus-Christ et nous leur ordonnons, en vertu de l'autorité
de ce même Dieu Sauveur, d'unir leur zèle et leurs efforts
pour éloigner ces horreurs et les éliminer de la sainte Église
". - Que chacun donc se souvienne qu'il peut et qu'il doit répandre
la foi catholique par l'autorité de l'exemple, et la prêcher
par la profession publique et constante des obligations qu'elle impose.
- Ainsi, dans les devoirs qui nous lient à Dieu et à l'Église,
une grande place revient au zèle avec lequel chacun doit travailler,
dans la mesure du possible, à propager la foi chrétienne
et à repousser les erreurs.
24 - Les fidèles ne satisferaient
pas complètement et d'une manière utile à ces devoirs,
s'ils descendaient isolément sur le champ de bataille. Jésus-Christ
a nettement annoncé que l'opposition haineuse faite par les hommes
à sa personne se perpétuerait contre son oeuvre, de façon
à empêcher un grand nombre d'âmes de profiter du salut
dont nous sommes redevables à sa grâce. C'est pour cela qu'il
a voulu non seulement former les disciples de sa doctrine, mais les réunir
en société et faire d'eux et de leur harmonieux assemblage
un seul corps qui est l'Église et dont il serait le Chef. La vie
de Jésus-Christ pénètre donc tout l'organisme de ce
corps, entretient et nourrit chacun de ses membres, les unit entre eux
et les fait tous conspirer à une même fin, bien qu'ils n'aient
pas à remplir tous les mêmes fonctions. Il suit de là
que l'Église, société parfaite, très supérieure
à toute autre société, a reçu de son auteur
le mandat de combattre pour le salut du genre humain comme une armée
rangée en bataille.
25 - Cet organisme et cette constitution
de la société chrétienne ne peuvent souffrir aucun
changement. Il n'est permis à aucun de ses membres d'agir à
son gré ou de choisir la manière qui lui plaît le mieux
de combattre. En effet, quiconque ne recueille pas avec l'Église
et avec Jésus-Christ dissipe, et ceux-là sont très
certainement les adversaires de Dieu qui ne combattent pas en union avec
lui et avec son Église.
26 - Pour réaliser cette union
des esprits et cette uniformité dans la conduite, si justement redoutée
des adversaires du catholicisme, la première condition à
réaliser est de professer les mêmes sentiments. Avec quel
zèle ardent et avec quelle singulière autorité de
langage saint Paul, exhortant les Corinthiens, leur recommande cette concorde
: Mes Frères, je vous en conjure par le nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ,
dites tous la même chose ; qu'il n'y ait pas de divisions parmi nous
; ayez entre vous le plus parfait accord de pensées et de sentiments.
27 - La sagesse de ce précepte
est d'une évidence immédiate. En effet, la pensée
est le principe de l'action, d'où il suit que l'accord ne peut se
trouver dans les volontés, ni l'ensemble dans la conduite, si chaque
esprit pense différemment des autres. Chez ceux qui font profession
de prendre la raison seule pour guide, on trouverait difficilement - si
tant est qu'on la trouve jamais - l'unité de doctrine. En effet,
l'art de connaître le vrai est plein de difficultés ; de plus,
l'intelligence de l'homme est faible par nature et tirée en sens
divers par la variété des opinions ; elle est souvent le
jouet des impressions venues du dehors, il faut joindre à cela l'influence
des passions, qui, souvent, ou enlèvent complètement, ou
diminuent dans de notables proportions la capacité de saisir la
vérité. Voilà pourquoi, dans le gouvernement politique,
on est souvent obligé de recourir à la force, afin d'opérer
une certaine union parmi ceux dont les esprits sont en désaccord.
28 - Il en est tout autrement des
chrétiens : ils reçoivent de l'Église la règle
de leur foi ; ils savent avec certitude qu'en obéissant à
son autorité et en se laissant guider par elle, ils seront mis en
possession de la vérité. Aussi, de même qu'il n'y a
qu'une Église, parce qu'il n'y a qu'un Jésus-Christ, il n'y
a et il ne doit y avoir entre les chrétiens du monde entier qu'une
seule doctrine, un seul Seigneur, une seule foi. Ayant entre eux le même
esprit de foi, ils possèdent le principe tutélaire d'où
découlent, comme d'elles-mêmes, l'union des volontés
et l'uniformité dans la conduite.
29 - Mais, ainsi que l'ordonne l'apôtre
saint Paul, cette unanimité doit être parfaite.
30 - La foi chrétienne ne
repose pas sur l'autorité de la raison humaine, mais sur celle de
la raison divine ; car, ce que Dieu nous a révélé,
" nous ne le croyons pas à cause de l'évidence intrinsèque
de la vérité, perçue par la lumière naturelle
de notre raison, mais à cause de l'autorité de Dieu, qui
révèle et qui ne peut ni se tromper, ni nous tromper ". Il
résulte de là que, quelles que soient les choses manifestement
contenues dans la révélation de Dieu, nous devons donner
à chacune d'elles un égal et entier assentiment. Refuser
de croire à une seule d'entre elles équivaut, en soi, à
les rejeter toutes. Car ceux-là détruisent également
le fondement de la foi, qui nient que Dieu ait parlé aux hommes,
ou qui mettent en doute sa vérité et sa sagesse infinie.
31 - Quant à déterminer
quelles doctrines sont renfermées dans cette révélation
divine, c'est la mission de l'Église enseignante, à laquelle
Dieu a confié la garde et l'interprétation de sa parole ;
dans l'Église, le docteur suprême est le Pontife Romain. L'union
des esprits réclame donc, avec un parfait accord dans la même
foi, une parfaite soumission et obéissance des volontés à
l'Église et au pontife Romain, comme à Dieu lui-même.
32 - L'obéissance doit être
parfaite, parce qu'elle appartient à l'essence de la foi, et elle
a cela de commun avec la foi qu'elle ne peut pas être partagée.
Bien plus, si elle n'est pas absolue et parfaite de tout point, elle peut
porter encore le nom d'obéissance, mais elle n'a plus rien de commun
avec elle. La tradition chrétienne attache un tel prix à
cette perfection de l'obéissance, qu'elle en a toujours fait et
en fait toujours le signe caractéristique auquel on peut reconnaître
les catholiques. C'est ce que saint Thomas d'Aquin explique d'une manière
admirable dans le passage suivant :
33 - " L'objet formel de la foi est
la vérité première, en tant qu'elle est manifestée
dans les Saintes Écritures et dans la doctrine de l'Église,
qui procèdent de la vérité première. Il suit
de là que quiconque n'adhère pas, comme à une règle
infaillible et divine, à la doctrine de l'Église, qui procède
de la vérité première manifestée dans les Saintes
Écritures, n'a pas la foi habituelle, mais possède autrement
que par la foi les choses qui sont de son domaine... Or, il est manifeste
que celui qui adhère à la doctrine de l'Église comme
à une règle infaillible donne son assentiment à tout
ce que l'Église enseigne ; autrement, si, parmi les choses que l'Église
enseigne, il retient ce qui lui plaît et exclut ce qui ne lui plaît
pas, il adhère à sa propre volonté et non à
la doctrine de l'Église, en tant qu'elle est une règle infaillible.
La foi de toute l'Église doit être Une, selon cette parole
de saint Paul aux Corinthiens (I Cor., 1) : Ayez tous un même langage
et qu'il n'y ait pas de division parmi vous. Or, cette unité ne
saurait être sauvegardée qu'à la condition que les
questions qui surgissent sur la foi soient résolues par celui qui
préside à l'Église tout entière, et que sa
sentence soit acceptée par elle avec fermeté. C'est pourquoi
à l'autorité du Souverain Pontife seul il appartient de publier
un nouveau symbole, comme de décerner toutes les autres choses qui
regardent l'Église universelle ".
34 - Lorsqu'on trace les limites
de l'obéissance due aux pasteurs des âmes et surtout au Pontife
Romain, il ne faut pas penser qu'elles renferment seulement les dogmes
auxquels l'intelligence doit adhérer et dont le rejet opiniâtre
constitue le crime d'hérésie. Il ne suffirait même
pas de donner un sincère et ferme assentiment aux doctrines qui,
sans avoir été jamais définies par aucun jugement
solennel de l'Église, sont cependant proposées à notre
foi, par son magistère ordinaire et universel, comme étant
divinement révélées, et qui, d'après le Concile
du Vatican, doivent être crues de foi catholique et divine. Il faut,
en outre, que les chrétiens considèrent comme un devoir de
se laisser régir, gouverner et guider par l'autorité des
évêques, et surtout par celle du Siège Apostolique.
Combien cela est raisonnable, il est facile de le démontrer. En
effet, parmi les choses contenues dans les divins oracles, les unes se
rapportent à Dieu, principe de la béatitude que nous espérons,
et les autres à l'homme lui-même et aux moyens d'arriver à
cette béatitude. Il appartient de droit divin à l'Église
et, dans l'Église, au Pontife Romain, de déterminer dans
ces deux ordres ce qu'il faut croire et ce qu'il faut faire. Voilà
pourquoi le Pontife doit pouvoir juger avec autorité de ce que renferme
la parole de Dieu, décider quelles doctrines concordent avec elle
et quelles doctrines y contredisent. De même, dans la sphère
de la morale, c'est à lui de déterminer ce qui est bien,
ce qui est mal, ce qui est nécessaire d'accomplir et d'éviter
si l'on veut parvenir au salut éternel ; autrement, il ne pourrait
être ni l'interprète infaillible de la parole de Dieu, ni
le guide sûr de la vie humaine.
35 - Il faut encore pénétrer
plus avant dans la constitution intime de l'Église. En effet, elle
n'est pas une association fortuitement établie entre chrétiens,
mais une société divinement constituée et organisée
d'une manière admirable, ayant pour but direct et prochain de mettre
les âmes en possession de la paix et de la sainteté. Et, comme
seule elle a reçu de la grâce de Dieu les moyens nécessaires
pour réaliser une telle fin, elle a ses lois fixes, ses attributions
propres et une méthode déterminée et conforme à
sa nature de gouverner les peuples chrétiens.
36 - Mais l'exercice de ce gouvernement
est difficile et donne lieu à de nombreux conflits. Car l'Église
régit des nations disséminées dans toutes les parties
du monde, différentes de races et de moeurs, qui, vivant chacune
sous l'empire des lois de son pays, doivent à la fois obéissance
au pouvoir civil et religieux. Ces devoirs s'imposent aux mêmes personnes.
Nous avons déjà dit qu'il n'y a entre eux ni contradiction,
ni confusion ; car les uns ont rapport à la prospérité
de la patrie terrestre, les autres se réfèrent au bien général
de l'Église ; tous ont pour but de conduire les hommes à
la perfection.
37 - Cette délimitation des
droits et des devoirs étant nettement tracée, il est de toute
évidence que les chefs d'État sont libres dans l'exercice
de leur pouvoir de gouvernement et, non seulement l'Église ne répugne
pas à cette liberté, mais elle la seconde de toutes ses forces,
puisqu'elle recommande de pratiquer la piété, qui est la
justice à l'égard de Dieu, et qu'ainsi elle prêche
la justice à l'égard du prince. Cependant, la puissance spirituelle
a une fin bien plus noble, puisqu'elle gouverne les hommes en défendant
le royaume de Dieu et sa justice, et qu'elle dirige vers ce but toutes
les ressources de son ministère. - On porterait atteinte à
l'intégrité de la foi si l'on mettait en doute que l'Église
seule a été investie d'un semblable pouvoir de gouverner
les âmes, à l'exclusion absolue de l'autorité civile.
En effet, ce n'est pas à César, c'est à Pierre que
Jésus-Christ a remis les clés du royaume des cieux. De cette
doctrine sur les rapports de la politique et de la religion découlent
d'importantes conséquences dont Nous voulons parler ici.
38 - Entre les gouvernements politiques,
quelle que soit leur forme et le gouvernement de la société
chrétienne, il y a une différence notable. Si la république
chrétienne a quelque ressemblance extérieure avec les autres
sociétés politiques, elle se distingue absolument d'elles
par son origine, par son principe, par son essence. - L'Église a
donc le droit de vivre et de se conserver par des institutions et par des
lois conformes à sa nature. Étant d'ailleurs, non seulement
une société parfaite en elle-même, mais une société
supérieure à toute société humaine, elle refuse
résolument de droit et par devoir à s'asservir aux partis
et à se plier aux exigences muables de la politique. Par une conséquence
du même principe, gardienne de son droit et pleine de respect pour
le droit d'autrui, elle estime un devoir de rester indifférente
quant aux diverses formes de gouvernement et aux institutions civiles des
États chrétiens, et, entre les divers systèmes de
gouvernement, elle approuve tous ceux qui respectent la religion et la
discipline chrétienne des moeurs.
39 - Telle est la règle à
laquelle chaque catholique doit conformer ses sentiments et ses actes.
Il n'est pas douteux que, dans la sphère de la politique, il ne
puisse y avoir matière à de légitimes dissentiments
et que, toute réserve faite des droits de la justice et de la vérité,
on ne puisse chercher à introduire dans les faits les idées
que l'on estime devoir contribuer plus efficacement que les autres au bien
général. Mais vouloir engager l'Église dans ces querelles
des partis, et prétendre se servir de son appui pour triompher plus
aisément de ses adversaires, c'est abuser indiscrètement
de la religion. Au contraire, tous les partis doivent s'entendre pour entourer
la religion du même respect et la garantir contre toute atteinte.
De plus, dans la politique, inséparable des lois de la morale et
des devoirs religieux, l'on doit toujours et en premier chef se préoccuper
de servir le plus efficacement possible les intérêts du catholicisme.
Dès qu'on les voit menacés, tout dissentiment doit cesser
entre catholiques, afin que, unis dans les mêmes pensées et
les mêmes conseils, ils se portent au secours de la religion, bien
général et suprême auquel tout le reste doit être
rapporté. Nous croyons nécessaire d'insister encore davantage
sur ce point.
40 - L'Église, sans nul doute,
et la société politique ont chacune leur souveraineté
propre ; par conséquent, dans la gestion des intérêts
qui sont de leur compétence, aucune n'est tenue d'obéir à
l'autre dans les limites où chacune d'elles est renfermée
par sa constitution. De là, il ne s'ensuit pas, cependant, que naturellement
elles soient désunies et encore moins ennemies l'une de l'autre.
La nature, en effet, n'a pas seulement donné à l'homme l'être
physique : elle l'a fait un moral. C'est pourquoi de la tranquillité
de l'ordre public, but immédiat de la société civile,
l'homme attend le moyen de se perfectionner physiquement, et surtout celui
de travailler à sa perfection morale, qui réside exclusivement
dans la connaissance et la pratique de la vertu. Il veut, en même
temps, comme c'est son devoir, trouver dans l'Église les secours
nécessaires à son perfectionnement religieux, lequel consiste
dans la connaissance et la pratique de la religion véritable ; de
cette religion appelée la reine des vertus, parce que, les rattachant
à Dieu, elle les achève toutes et les perfectionne.
41 - Dès lors, ceux qui rédigent
des constitutions et font des lois doivent tenir compte de la nature morale
et religieuse de l'homme et l'aider à se perfectionner, mais avec
ordre et droiture, n'ordonnant ni ne prohibant rien sans avoir égard
à la fin propre de chacune des sociétés civile et
religieuse. L'Église ne saurait donc être indifférente
à ce que telles ou telles lois régissent les États,
non pas en tant que ces lois appartiennent à l'ordre civil et politique,
mais en tant qu'elles sortiraient de la sphère de cet ordre et empiéteraient
sur ses droits. Ce n'est pas tout. L'Église a encore reçu
de Dieu le mandat de s'opposer aux institutions qui nuiraient à
la religion, et de faire de continuels efforts pour pénétrer
de la vertu de l'Évangile les lois et les institutions des peuples.
Et comme le sort des États dépend principalement des dispositions
de ceux qui sont à la tête du gouvernement, l'Église
ne saurait accorder ni son patronage ni sa faveur aux hommes qu'elle sait
lui être hostiles, qui refusent ouvertement de respecter ses droits,
qui cherchent à briser l'alliance établie par la nature même
des choses entre les intérêts religieux et les intérêts
de l'ordre civil. Au contraire, son devoir est de favoriser ceux qui ont
de saines idées sur les rapports de l'Église et de l'État
et s'efforcent de les faire servir par leur accord au bien général.
42 - Ces préceptes renferment
la règle à laquelle tout catholique doit conformer sa vie
publique. En définitive, partout où l'Église ne défend
pas de prendre part aux affaires publiques, l'on doit soutenir les hommes
d'une probité reconnue et qui promettent de bien mériter
de la cause catholique, et pour aucun motif, il ne serait permis de leur
préférer des hommes hostiles à la religion.
43 - On voit encore par là
combien grande est l'obligation de maintenir l'accord entre les catholiques,
surtout dans un temps où le christianisme est combattu par ses ennemis
avec tant d'ensemble et d'habileté. Tous ceux qui ont à coeur
d'être étroitement unis à l'Église, colonne
et fondement de la vérité, éviteront facilement ces
maîtres de mensonge qui promettent la liberté tandis qu'eux-mêmes
sont les esclaves de la corruption. Bien plus, rendus eux-mêmes participants
de la divine vertu qui est dans l'Église, ils triompheront par la
sagesse des embûches des adversaires, et de leur violence par le
courage. Ce n'est pas ici le lieu de rechercher si et combien l'inertie
des dissensions intestines des catholiques ont favorisé le nouvel
état de choses. Mais, on peut l'affirmer, les méchants seraient
moins audacieux et ils n'auraient pas accumulé tant de ruines, si
la foi qui opère par la charité avait été en
général dans les âmes plus énergique et plus
vivante, et s'il n'y avait pas un relâchement aussi universel dans
la discipline des moeurs divinement établie par le christianisme.
Puissent, du moins, les leçons du passé avoir le bon résultat
d'inspirer une conduite plus sage pour l'avenir !
44 - Quant à ceux qui prendront
part aux affaires publiques, ils devront éviter avec le plus grand
soin deux écueils : la fausse prudence et la témérité.
Il en est, en effet, qui pensent qu'il n'est pas opportun de résister
de front à l'iniquité puissante et dominante, de peur, disent-ils,
que la lutte n'exaspère davantage les méchants. De tels hommes
sont-ils pour ou contre l'Église ? On ne saurait le dire. Car, d'une
part, ils se donnent pour professer la doctrine catholique, mais, en même
temps, ils voudraient que l'Église laissât libre cours à
certaines théories qui lui sont contraires. Ils gémissent
de la perte de la foi et de la perversion des moeurs ; mais, à de
tels maux, ils n'ont aucun souci d'apporter aucun remède, et même
il n'est pas rare qu'ils en augmentent l'intensité, soit par une
indulgence excessive, soit par une pernicieuse dissimulation. Ils ne permettent
à personne d'élever des doutes sur leur dévouement
au Siège Apostolique, mais ils ont toujours quelques reproches à
formuler contre le Pontife Romain.
45 - La prudence de ces hommes est
bien celle que l'apôtre saint Paul appelle sagesse de la chair et
mort de l'âme, parce qu'elle n'est pas et ne peut pas être
soumise à la loi de Dieu. Rien n'est moins propre à diminuer
les maux qu'une semblable prudence. En effet, le dessein arrêté
des ennemis, et beaucoup d'entre eux ne craignent pas de s'en expliquer
et de s'en glorifier ouvertement, c'est d'opprimer la religion catholique,
la seule véritable. Pour réaliser un tel dessein, il n'est
rien qu'ils n'osent tenter. Car ils savent très bien que, plus ils
feront trembler leurs adversaires, et plus ils auront de facilités
pour exécuter leurs perverses entreprises. Par conséquent,
ceux qui aiment la prudence de la chair et qui font semblant d'ignorer
que tout chrétien doit être un vaillant soldat du Christ,
ceux qui prétendent obtenir les récompenses promises aux
vainqueurs en vivant comme des lâches et en s'abstenant de prendre
part au combat, ceux-là, non seulement ne sont pas capables d'arrêter
l'invasion de l'armée des méchants, mais ils secondent ses
progrès.
46 - Par contre, d'autres, et en
assez grand nombre, mus par un faux zèle ou, ce qui serait encore
plus répréhensible, affectant des sentiments que dément
leur conduite, s'arrogent un rôle qui ne leur appartient pas. Ils
prétendent subordonner la conduite de l'Église à leurs
idées et à leur volonté, jusque-là qu'ils supportent
avec peine et n'acceptent qu'avec répugnance tout ce qui s'en écarte.
Ceux-là s'épuisent en vains efforts et ne sont pas moins
répréhensibles que les premiers. Agir ainsi, ce n'est pas
suivre l'autorité légitime, c'est la prévenir et transférer
à des particuliers, par une véritable usurpation, les pouvoirs
de la magistrature spirituelle, au grand détriment de l'ordre que
Dieu lui-même a constitué pour toujours dans son Église,
et qu'il ne permet à personne de violer impunément.
47 - Honneur à ceux qui, provoqués
au combat, descendent dans l'arène avec la ferme persuasion que
la force de l'injustice aura un terme, et qu'elle sera un jour vaincue
par la sainteté du droit et de la religion ! Ils déploient
un dévouement digne de l'antique vertu, en luttant pour défendre
la religion, surtout contre la faction dont l'extrême audace attaque
sans relâche le christianisme et poursuit de ses incessantes hostilités
le Souverain Pontife, tombé en son pouvoir. Mais de tels hommes
ont grand soin d'observer les règles de l'obéissance, et
ils n'entreprennent rien de leur propre mouvement. Cette disposition à
la docilité, unie à la constance et à un ferme courage,
est nécessaire à tous les catholiques, afin que, quelles
que soient les épreuves apportées par les événements,
ils ne défaillent en rien. Aussi, souhaitons-nous ardemment de voir
s'enraciner profondément dans les âmes de tous la prudence
que saint Paul appelle la prudence de l'esprit. Dans le gouvernement des
actions humaines, cette vertu nous apprend à garder un admirable
tempérament entre la lâcheté, qui porte à la
crainte et au désespoir, et une présomptueuse témérité.
48 - Il y a une différence
entre la prudence politique relative au bien général et celle
qui concerne le bien individuel de chacun. Celle-ci se montre dans les
particuliers qui, sous leur propre conduite, obéissent aux conseils
de la droite raison : celle-là est le propre des hommes chargés
de diriger les affaires publiques, et particulièrement des princes
qui ont pour mission d'exercer la puissance du commandement. Ainsi, la
prudence civile des particuliers semble consister tout entière à
exécuter fidèlement les préceptes de l'autorité
légitime. Ces mêmes dispositions et ce même ordre doivent
se retrouver au sein de la société chrétienne, et
cela d'autant plus que la prudence politique du Pontife Suprême s'étend
à un plus grand nombre d'objets. En effet, il n'a pas seulement
à gouverner l'Église dans son ensemble, mais encore à
ordonner et à diriger les actions des citoyens chrétiens
en vue de la réalisation de leur salut éternel. On voit par
là combien il est indispensable, qu'outre la parfaite concorde qui
doit régner dans leurs pensées et dans leurs actes, les fidèles
prennent toujours religieusement pour règle de leur conduite la
sagesse politique de l'autorité ecclésiastique. Or, immédiatement
après le Pontife Romain, et sous sa direction, le gouvernement des
intérêts religieux du christianisme appartient aux évêques.
S'ils ne sont pas placés au faîte de la puissance pontificale,
ils sont cependant véritablement princes dans la hiérarchie
ecclésiastique : et comme chacun d'eux est préposé
au gouvernement d'une Église particulière, ils sont, dit
saint Thomas, " comme les ouvriers principaux dans la construction de l'édifice
spirituel ", et ils ont les membres du clergé pour partager leurs
travaux et exécuter leurs décisions. Chacun doit régler
sa vie d'après cette constitution de l'Église qu'il n'est
au pouvoir d'aucun homme de changer. Aussi, de même que, dans l'exercice
de leur pouvoir épiscopal, les évêques doivent être
unis au Siège Apostolique, de même les membres du clergé
et les laïques doivent vivre dans une très étroite union
avec leurs évêques.
49 - Quelqu'un de ceux-ci pr6terait-il
à la critique, ou dans sa conduite, ou par les idées qu'il
soutient, il n'appartient à aucun particulier de s'arroger à
son égard l'office de juge, confié par Notre-Seigneur Jésus-Christ
au seul pasteur qu'il a proposé aux agneaux et brebis. Que chacun
grave en sa mémoire le très sage enseignement du pape saint
Grégoire le Grand. " Les sujets doivent être avertis de ne
pas juger témérairement la vie de leurs supérieurs,
alors même qu'il leur arriverait de les voir agir d'une façon
répréhensible, de peur que la perspicacité avec laquelle
ils reprennent le mal ne devienne en eux le principe d'un orgueil qui les
fera tomber dans des actions plus coupables. Ils doivent être prémunis
contre le péril de se constituer dans une opposition audacieuse
vis-à-vis des supérieurs dont ils ont constaté les
fautes. Ceux-ci ont-ils vraiment commis des actions blâmables, leurs
inférieurs, pénétrés de la crainte de Dieu,
ne doivent les juger au-dedans d'eux-mêmes, qu'avec la disposition
d'avoir toujours pour eux une respectueuse soumission. Les actions des
supérieurs ne doivent pas être frappées par le glaive
de la parole, même quand elles paraissent mériter une juste
censure ".
50 - Toutefois, ces efforts demeureront
stériles si la vie n'est pas réglée conformément
à la discipline des moeurs chrétiennes. Rappelons-nous ce
que nos saints Livres nous disent de la nation des Juifs: Tant qu'ils n'ont
pas péché contre leur Dieu, leur sort a été
prospère ; car Dieu hait l'iniquité. Mais quand ils se sont
écartés de la Voie que Dieu leur avait tracée, ils
ont été vaincus dans les combats par un grand nombre de peuples.
Or, la nation des Juifs était comme une ébauche du peuple
chrétien, et les vicissitudes de leur ancienne histoire ont souvent
été l'image prophétique de ce qui devait se réaliser
plus tard, avec cette différence que la bonté divine nous
a enrichis et comblés de bienfaits plus considérables, et
que les péchés des chrétiens sont marqués au
cachet d'une plus coupable ingratitude.
51 - Dieu n'abandonne jamais ni d'aucune
manière son Église. Celle-ci n'a donc rien à redouter
des attentats des hommes, mais les peuples qui ont dégénéré
de la vertu chrétienne ne sauraient avoir la même garantie.
Le péché rend les peuples misérables. Si les âges
passés ont éprouvé la force expérimentale de
cette vérité, de quel droit le nôtre serait-il l'objet
d'une exception ? On peut reconnaître à bien des signes que
nous commençons à subir les châtiments mérités
par nos fautes. Que l'on examine l'état des sociétés
modernes: un mal domestique en consume plusieurs ; nous n'en voyons aucune
qui soit parfaitement en sûreté. Si les factions des méchants
devaient poursuivre leur marche audacieuse, s'il leur réussissait
de grandir en influence et en puissance, comme ils progressent en méchanceté
et en inventions artificieuses, il serait à craindre qu'ils ne vinssent
à démolir les fondements mêmes que la nature a donnés
à l'édifice social. Les seules ressources humaines seront
impuissantes à prévenir de si formidables dangers, surtout
à l'heure présente, où un grand nombre d'hommes ont
rejeté la foi chrétienne et subissent la juste peine de leur
orgueil.
52 - Aveuglés par leurs passions,
ils cherchent vainement la vérité. Elle les suit et ne leur
laisse embrasser que l'erreur, et ils se croient sages lorsqu'ils appellent
mal le bien et bien le mal, lorsqu'ils mettent les ténèbres
à la place de la lumière et la lumière à la
place des ténèbres. Il est donc de toute nécessité
que Dieu intervienne, et que, se souvenant de sa miséricorde, il
jette un regard compatissant sur la société humaine. C'est
pourquoi Nous renouvelons ici l'instante exhortation que Nous avons déjà
faite, de redoubler de zèle et de persévérance, en
adressant au Dieu clément d'humbles supplications et en revenant
à la pratique des vertus qui constituent la vie chrétienne.
Il importe, par-dessus tout, d'exciter et d'entretenir la charité,
qui est le fondement principal de la vie chrétienne et sans laquelle
les autres vertus n'existent plus ou demeurent stériles. C'est pour
cela que l'apôtre saint Paul, après avoir exhorté les
Colossiens à fuir tous les vices et à s'approprier le mérite
des diverses vertus, ajoute : Mais, par-dessus tout, ayez la charité,
qui est le lien de la perfection. Oui, en vérité, la charité
est le lien de la perfection ; car ceux qu'elle tient embrassés,
elle les unit à Dieu lui-même ; par elle leur âme reçoit
sa vie de Dieu, vit avec Dieu et pour Dieu. Mais l'amour de Dieu ne doit
pas être séparé de l'amour du prochain, parce que les
hommes ont été rendus participants de l'infinie bonté
de Dieu et qu'ils portent en eux-mêmes l'empreinte de son visage
et la ressemblance de son Être. Nous tenons de Dieu ce commandement
: Que celui qui aime Dieu aime son frère, Si quelqu'un dit : J'aime
Dieu et qu'en même temps il haïsse son frère, il ment.
Ce précepte sur la charité a été qualifié
de nouveau par son divin Auteur, non pas en ce sens qu'une loi antérieure
ou la nature elle-même n'eût pas déjà commandé
aux hommes de s'entr'aimer, mais parce que le précepte chrétien
de s'aimer de la sorte était véritablement nouveau et sans
exemple dans le monde.
53 - En effet, le même amour
dont Jésus-Christ est aimé par son Père et par lequel
il aime lui-même les hommes, il en a imposé l'obligation à
ses disciples et à ses sectateurs, afin qu'ils puissent n'être
qu'un coeur et qu'une âme, de même que, par nature, lui et
son Père sont un. Personne n'ignore quelle a été la
force de ce commandement, et avec quelle profondeur, dès le commencement,
il s'implanta dans le coeur des chrétiens et avec quelle abondance
il a produit des fruits de concorde, de bienveillance mutuelle, de piété;
de patience, de courage. Pourquoi ne nous appliquerions-nous pas à
imiter ces exemples de nos pères ? Le temps même où
nous vivons ne doit pas nous exciter médiocrement à pratiquer
la charité. Puisque les impies se remettent à haïr Jésus-Christ,
que les chrétiens redoublent de piété à son
égard et se renouvellent dans la charité, qui est le principe
des grandes choses ! Si donc quelques dissensions ont éclaté
parmi eux, qu'elles disparaissent: Qu'elles cessent aussi, ces luttes qui
dissipent les forces des combattants sans profit aucun pour la religion.
Que les intelligences s'unissent dans la foi, les coeurs dans la charité,
afin que, comme cela est juste, la vie tout entière s'écoule
dans la pratique de l'amour de Dieu et de l'amour des hommes !
54 - Nous ne voulons pas manquer
ici d'exhorter spécialement les pères de famille à
régler d'après ces préceptes le gouvernement de leurs
maisons et la première éducation de leurs enfants. La famille
est le berceau de la société civile, et c'est en grande partie
dans l'enceinte du foyer domestique que se prépare la destinée
des États. Aussi bien, ceux qui veulent en finir avec les institutions
chrétiennes s'efforcent-ils de s'attaquer aux racines mêmes
de la famille et de la corrompre prématurément dans ses plus
tendres rejetons. Ils ne se laissent pas détourner de cet attentat
par la pensée qu'une telle entreprise ne saurait s'accomplir sans
infliger aux parents le plus cruel outrage, car c'est à eux qu'il
appartient, en vertu du droit naturel, d'élever ceux auxquels ils
ont donné le jour, avec l'obligation d'adapter l'éducation
et la formation de leurs enfants à la fin pour laquelle Dieu leur
a donné de leur transmettre le don de la vie. C'est donc une étroite
obligation pour les parents d'employer leurs soins et ne négliger
aucun effort pour repousser énergiquement toutes les injustes violences
qu'on leur veut faire en cette matière, et pour réussir à
garder exclusivement l'autorité sur l'éducation de leurs
enfants. Ils doivent, d'ailleurs, pénétrer celle-ci des principes
de la morale chrétienne et s'opposer absolument à ce que
leurs enfants fréquentent les écoles où ils sont exposés
à boire le funeste poison de l'impiété. Quand il s'agit
de la bonne éducation de la jeunesse, on n'a jamais le droit de
fixer de limites à la peine et au labeur qui en résultent,
si grands qu'ils puissent être. Aussi ces catholiques de toutes nations
qui, en dépensant beaucoup d'argent et plus encore de zèle
; ont créé des écoles pour l'éducation de leurs
enfants, sont dignes d'être proposés à l'admiration
de tous. Il convient que ce bel exemple soit imité partout où
les circonstances l'exigent. Toutefois, et par dessus tout, qu'on tienne
compte de l'influence considérable exercée sur les âmes
des enfants par l'éducation de famille. Si la jeunesse trouve au
foyer domestique les règles d'une vie vertueuse et comme l'école
pratique des vertus chrétiennes, le salut de la société
sera, en grande partie, garanti pour l'avenir.
55 - Nous croyons avoir indiqué
aux catholiques de notre temps la conduite qu'ils doivent tenir et les
périls qu'ils doivent éviter. Il reste maintenant, et c'est
à Vous, Vénérables Frères, que cette obligation
incombe, que Vous preniez soin de répandre partout Notre parole,
et que Vous fassiez comprendre à tous combien il importe de mettre
en pratique les enseignements contenus dans ces Lettres. Accomplir ces
devoirs ne saurait être une obligation gênante et pénible,
car le joug de Jésus-Christ est doux et son fardeau est léger.
- Si toutefois quelques-uns de Nos conseils paraissaient d'une pratique
difficile, c'est à Vous d'user de Votre autorité et d'agir
par Votre exemple, afin de décider les fidèles à faire
de plus énergiques efforts et à ne pas se laisser vaincre
par les difficultés. Nous avons souvent Nous-mêmes donné
cet avertissement au peuple chrétien. Rappelez-le lui ; les biens
de l'ordre le plus élevé et les plus dignes d'estime sont
en péril ; pour les conserver, il n'y a pas de fatigues qu'il ne
faille endurer : ces labeurs auront droit à la plus grande récompense
dont puisse être couronnée la vie chrétienne. Par contre,
refuser de combattre pour Jésus-Christ, c'est combattre contre lui.
Il l'a nettement proclamé : il reniera aux cieux devant son Père
ceux qui auront refusé de le confesser sur la terre. - Quant à
Nous et à Vous tous, jamais, assurément, tant que la vie
Nous sera conservée, Nous ne Nous exposerons à ce que, dans
ce combat, Notre autorité, Nos conseils, Nos soins puissent en quoi
que ce soit faire défaut au peuple chrétien ; et il n'est
pas douteux que, pendant toute la durée de cette lutte, Dieu n'assiste
d'un secours particulier et le troupeau et les pasteurs.
Plein de cette confiance, et comme
gage des dons célestes et de Notre bienveillance, Nous Vous accordons
de tout coeur, dans Notre-Seigneur, à Vous, Vénérables
Frères, à Votre clergé et à tout Votre peuple,
la bénédiction apostolique.
Donné à Rome, près
Saint-Pierre, le 10 janvier de l'année 1890, de notre Pontificat
la douzième.
LÉON XIII, PAPE