1301

COMMENTAIRE DE SAINT CYPRIEN SUR LA PRIÈRE DU SEIGNEUR

Une prière humble et secrète. 

Chez les hommes qui prient, la parole et la demande doivent être bien réglées, paisibles et modestes. Pensons que nous sommes en présence de Dieu. Il faut que le legard divin trouve plaisir à l'attitude du corps et au ton de la voix. Autant il est inconvenant de vociférer, autant il convient de prier avec modestie et réserve. Le Seigneur nous a ordonné de prier dans le secret, dans des lieux cachés et retirés et même dans notre chambre. C'est ce qui s'ccorde le mieux avec la foi, car nous devons savoir que Dieu est présent partout, qu'il entend et voit tous les hommes, que par la plénitude de sa gloire il pénètre dans ce qu'il y a de secret et de caché. Ainsi est-il écrit: Moi, je suis un Dieu proche, et non un Dieu lointain. Si un homme s'enfonce dans des retraites, est-ce que moi, je ne le verrai pas ? Est-ce que moi, je ne remplis pas le ciel et la terre ? Et encore : En tout lieu les regards de Dieu observent les bons et les méchants.

Lorsque, dans l'unité, nous nous rassemblons avec les frères, et que nous célébrons les sacrifices divins avec le prêtre de Dieu, nous devons rester attentifs à la modestie et au bon ordre. Nous ne devons pas éparpiller nos prières en paroles informes ni jeter vers Dieu avec un bavardage bruyant une requête qui devrait être recommandée par la modestie. Car Dieu écoute non la voix mais le coeur. Et nous n'avons pas à attirer par nos cris l'attention de celui qui voit les pensées. Le Seigneur le prouve quand il dit:

Pourquoi ces pensées dans vos coeurs ? Et dans un autre passage : Que toutes les Èglises le sachent : Moi, je sonde les reins et les coeurs.

Au premier livre des Rois, Anne, qui préfigure l'Église, observe cette règle. Elle n'implorait pas Dieu à grands cris, mais le priait en silence et modestement dans le secret de son coeur. Lorsqu'elle parlait, sa prière était cachée, mais sa foi était manifeste : elle parlait non des lèvres mais du coeur, car elle savait que Dieu entend ce langage. C'est pourquoi elle a obtenu ce qu'elle demandait, car elle suppliait avec foi. L'Ecriture le montre, lorsqu'elle dit: Elle parlait dans son coeur, elle remuait les lèvres mais on n'entendait pas sa voix et le Seigneur l'exauça. Par Jérémie, le Saint-Esprit nous donne le même enseignement: C'est dans notre esprit qu'il faut t'adorer, Seigneur.

Celui qui adore, mes frères bien-aimés, ne doit pas ignorer comment, dans le Temple, à côté du pharisien, priait le publicain. Il ne levait pas les yeux vers le ciel avec effronterie, il ne tendait pas les mains avec insolence. Il se frappait la poitrine, il reconnaissait ses péchés intérieurs et cachés, il implorait le secours de la divine miséricorde.

Alors que le pharisien se complaisait en lui-même ; il obtint d'être sanctifié de préférence à celui-ci. Car il priait sans mettre l'espérance de son salut dans son innocence puisque personne n'est innocent. Mais il priait en confessant ses péchés et sa prière fut exaucée par celui qui pardonne aux humbles. 

Tu connais ton oeuvre, Dieu créateur: souviens-toi que nous sommes poussière et ferme les yeux sur les péchés des hommes, et ne condamne pas le pauvre qui t'implore.

N'oublie pas tes miséricordes, Seigncur, pardonne-moi. Pitié pour moi, ô Dieu, pitié pour moi, en toi s'abrite mon âme. J'appelle vers Dieu, le Très-Haut, le Dieu qui a tout fait pour moi.

Dieu tout-puissant, force de ceux qui espèrent en toi, sois favorable à nos appels: puisque l'homme est fragile et que sans toi il ne peut rien, donne-nous toujours le secours de ta grace; ainsi nous pourrons, en observant tes commandements, vouloir et agir de manière à répondre à ton amour. 

De mes faiblesses surtout je me vanterai, sur moi reposera la puissance de Dieu. Ce qu'il y a de faible dans le monde, Dieu l'a choisi pour confondre la force. Ce que l'on méprise, Dieu l'a choisi, afin que personne n'aille se glorifier devant lui.

 

1301