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LA CROIX, passion avec le Christ. (Dietrich BONHOEFFER)

«Si quelqu'un veut venir à ma suite, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive. »

La Croix n'est pas une infamie et un lourd destin mais la souffrance qui ne prend naissance pour nous que par l'union à Jésus Christ. La Croix n'est pas une souffrance qui survient par hasard mais une souffrance nécessaire. La Croix n'est pas une souffrance liée à l'existence naturelle mais la souffrance liée à l'existence chrétienne.

Dans son essence, la Croix n'est pas seulement souffrance mais souffrance et réprobation et ici aussi, au sens strict, réprobation pour l'amour de Jésus Christ et non pour l'amour de quelque autre attitude ou confession. Un christianisme qui ne prenait pas au sérieux l'imitation du Christ, qui ne faisait de l'Évangile qu'une consolation à bon marché et pour lequel, à part cela, l'existence naturelle et l'existence chrétienne ne se distinguaient pas, ce christianisme ne pouvait comprendre la Croix que comme ce qu'il y a d'incommode dans la vie quotidienne, comme la détresse et l'angoisse de notre vie naturelle. On avait oublié ici que la Croix signifie toujours aussi réprobation et que la honte de la souffrance fait partie de la Croix. Dans la souffrance, être repoussé, méprisé et abandonné par les hommes, comme c'est la plainte interminable du psalmiste, ce caractère essentiel de la souffrance de la Croix, un christianisme ne peut plus le comprendre en ne sachant plus distinguer entre 1 'existence bourgeoise et l'existence chrétienne. La Croix est la passion avec le Christ, la Passion du Christ. Seule, la liaison avec le Christ, telle qu'elle se réalise dans l'imitation du Christ, fait qu'on se tient sérieusement au pied de la Croix...

Qu'il prenne sa croix - la croix est donc déjà toute prête depuis le début et on n'a qu'à la prendre. Que personne ne comprenne par là qu'il doit se chercher quelque croix pour lui-même, qu'il doit choisir lui-même sa croix. Car Jésus dit qu'à chacun sa croix est déjà préparée, déterminée et mesurée par Dieu. Chacun doit porter la mesure de souffrance et de réprobation qui est prévue pour lui. C'est une mesure différente pour chacun. Dieu juge l'un digne de grandes souffrances et lui accorde la grâce du martyre. Il ne permet pas que l'autre soit tenté au-dessus de ses forces. Pourtant, c'est l'unique Croix.

 

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