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nouvelle évangélisation-retour

CONFÉRENCE de S. Ém. le Card. Darío Castrillón Hoyos,

 

Préfet de la Congrégation pour le Clergé

 

 

Le pretre, ministre d’espérance,

 

épiphanie de Dieu parmi les hommes

 

Mes freres, c’est la troisieme fois que je m’adresse a vous en ces journées, et chaque fois je suis rempli de joie et d’émotion parce qu’il fait bon etre ensemble, parce que je considere avec respect, affection et vénération cette magnifique et vibrante assemblée. Si nous nous regardons entre nous, dans ce climat de fraternité sacramentelle, configurés au Christ dans l’unique sacerdoce, nos horizons s’élargissent bien au-dela des limites de nos églises de provenance et notre assemblée assume alors une dimension fortement missionnaire.

 

Maintenant que nous sommes proches, y compris physiquement, du Vicaire du Christ, l’image de l’Église qu’il nous est donné de contempler est plus vive et complete et notre priere se fait plus intense et universelle.

 

Notre âme s’ouvre a l’action de grâces:

 

"Heureux ton élu, ton familier, / il demeure en tes parvis: / Rassasions-nous des biens de ta maison, / Des choses saintes de ton Temple…/ Tu nous réponds en prodiges de justice / Dieu de notre salut … " (Ps 65, 5-6).

 

Et c’est bien un prodige qu’il y ait des hommes qui, relevant le défi d’un monde trop souvent indifférent, en butte aux tentations du matérialisme, choisissent et perséverent dans le choix radical et décisif du Christ vierge, docile et pauvre, et sont prets a consacrer leur vie pour présenter au monde le visage de Dieu, pour proclamer la gratuité et l’infinie miséricorde du Christ Crucifié et Ressuscité.

 

C’est un prodige qu’il y ait des hommes qui, répondant chaque jour, toute leur vie durant, a l’appel du Christ, et saisis par sa fascination absolument unique, fassent sans hésiter le choix d’une vie intérieure de consécration face a une société plongée dans l’éphémere et l’insignifiant: le choix d’une perfection austere et exigeante, mais qui est aussi source de joie, face a une médiocrité commode, résignée et souvent ennuyée.

 

 

 

Le pretre, ministre d’espérance pour l’homme du troisieme millénaire

 

Toute considération sur le ministere sacerdotal, tant du point de vue ontologique, quand on veut définir son contenu, que du point de vue existentiel, afin de préciser la place que ce ministere occupe dans l’Église et dans le monde, doit tenir compte avant tout du fait que l’expression par laquelle saint Paul a décrit sa prodigieuse divinisation: "Ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi" (Ga 2, 20) doit pouvoir s’appliquer a tout chrétien.

 

Nous savons que Jésus Christ, Pretre supreme et éternel, a voulu que toute son Église prenne part a son sacerdoce unique et indivisible (cf. 1 P 2, 4-10; LG 10).

 

Toutefois le plan salvifique de Dieu implique que la vie divine soit communiquée a l’intérieur de l’Église par les voies qu’Il a spécialement instituées a cet effet: la proclamation de la Parole, les Sacrements et la conduite pastorale, qui sont proprement et spécifiquement les actes sacerdotaux du Christ, Chef, Maître et Pasteur de l’Église. Le Christ est donc présent dans sont Église non seulement en attirant a Lui tous les fideles du Trône de grâce et de gloire qu’est Sa Croix rédemptrice (cf. Col 1, 20) et en ne formant qu’un seul Corps avec tous les hommes de tous les temps, mais aussi en étant toujours présent dans le temps, de maniere éminente, comme Chef, Maître et Pasteur qui instruit, sanctifie et dirige continuellement son Peuple. Cette présence se réalise a travers le sacerdoce ministériel qu’Il a voulu instituer au sein de Son Église: aussi le pretre, qui comme tous les chrétiens a été incorporé au Christ par le Bapteme, devient-il par la nouvelle consécration du sacrement de l’Ordre ipse Christus afin de remplir non seulement en son nom, mais avec son pouvoir (cf. PO 2), la fonction d’enseigner, de sanctifier et de conduire pastoralement les autres membres de son Corps jusqu’a la fin des temps. Dans le presbytérat, la nature du Christ, Chef de l’Église, revit de maniere sacramentelle, et Sa Seigneurerie sur le cosmos et sur l’histoire, dont le Verbe de Dieu est "l’Alfa et l’Oméga" (Ap 1, 8), "le Principe et la Fin" (Ap 21, 6) se réactualise de maniere spécifique afin de servir l’ensemble du créé en récapitulant toute chose et en les ramenant, régénérées, a la maison du Pere (cf. Ep 1, 0).

 

A ce propos, nous ne pouvons pas manquer de rappeler ici, en conformité avec le Magistere, certains documents récents qui sont pour nous fondamentaux, surtout dans les circonstances présentes: le Directoire pour le ministere et la vie des pretres, la Lettre circulaire sur le pretre, maître de la Parole, ministre des sacrements et guide de la communauté a l’aube du troisieme millénaire chrétien, et l’Instruction interdicastérielle sur certaines questions concernant la collaboration des fideles laiques au ministere des pretres.

 

Aussi pouvons-nous affirmer que dans la perspective du troisieme millénaire, le ministere sacerdotal, avant tout ministere et a la lumiere qui filtre a travers la Porte sainte du grand Jubilé, est en premier lieu mystere d’espérance, en rendant présente toute la puissance rédemptrice du Christ qui "est le meme hier, aujourd’hui et a jamais" (He 13, 8). Dans le ministere du presbytérat se reflete la lumiere du Verbe incarné, lumen gentium, lumiere d’amour, d’espérance et de vérité (cf. Jean-Paul II, Lettre a tous les Pretres a l’occasion du Jeudi Saint, Novo incipienti nostro, n. 4, AAS 71, 1979, 398-400).

 

Le vrai don d’espérance, c’est Lui, le Christ Jésus, don de Dieu au monde: c’est a Lui que le pretre se configure ontologiquement, par son ordination sacramentelle, qui lui donne le pouvoir sacré et fait de lui un ministre de l’épiphanie de Dieu parmi les hommes, en prolongeant dans les siecles – comme nous l’avons vu précédemment – la mission du Verbe incarné, et en montrant dans l’Esprit Saint le visage du Pere a tous les hommes. C’est pourquoi nous pouvons affirmer que le ministere pastoral est vraiment, avec le Christ et dans le Christ, "la manifestation du Dieu d’espérance de l’homme, de Dieu libération de l’homme, de Dieu salut de l’homme" (Jean-Paul II, Homélie en la Basilique Saint-Pierre, 6.1.1999).

 

L’évangélisation est la traditio Evangelii qui, au sens profond que lui donne la théologie paulinienne, signifie transmettre la dynamis Théou, "la force de Dieu, pour le salut de tout croyant" (Rm 1, 16). Elle se réalise avant tout et principalement au moyen de la Parole, des Sacrements et de la conduite pastorale du pretre ordonné, comme "homme de Dieu" (1 Tm 6, 11) et " serviteur du Christ" (1 Cor 4, 1).

 

Pour les pretres d’aujourd’hui et de toujours, apporter l’Évangile aux autres, approcher les hommes du Christ, signifie en premier lieu apporter l’Évangile en eux-memes, en s’identifiant pleinement avec la Parole vivante qui est le Christ lui-meme. C’est le but vers lequel doit tendre toute formation sacerdotale, tant initiale que permanente, a chacune de ses étapes: il consiste dans la sainteté spécifique du ministre ordonné.

 

 

2. Le ministere sacerdotal au service de l’homme, comme chemin premier et fondamental de l’Église.

 

Les temps le veulent: tout le Peuple de Dieu est convoqué et pressé par le Successeur de Pierre "a continuer sous l’impulsion de l’Esprit Consolateur l’ouvre meme du Christ, venu dans le monde pour rendre témoignage a la vérité, pour sauver non pour condamner, pour servir non pour etre servi" (Conc. Ocum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes (GS), 3).

 

A l’aube du troisieme millénaire, le monde a plus que jamais besoin d’expérimenter a nouveau cette présence de Dieu, de Le rencontrer personnellement sur le chemin de la vie, de sentir la proximité de sa bonté riche de miséricorde (cf. Ef 2,4).

 

L’Église, signe et instrument efficace de l’union intime de l’homme a Dieu et de l’unité de tout le genre humain (cf. Conc. Ocum. Vat. II, Const. dogm. Lumen gentium, n. 1), "sacrement indivisible d’unité" (Saint Cyprien, Epist. ad Magnum, 6: PL 3,1142), et "sacrement universel du salut" (Const. dogm. Lumen gentium, n. 48), se donne pour tâche fondamentale de faire en sorte que cette union puisse continuellement se réaliser et se renouveler au moyen de la charité du Christ dans l’Esprit Saint (cf. Ep 2, 14; Const. past. GS, n. 45).

 

Si tout fidele chrétien, tout fils de l’Église doit se sentir interpellé par cette responsabilité commune et pressante, les pretres, spécialement choisis, consacrés et envoyés pour faire émerger la contemporanéité du Christ, dont ils deviennent les authentiques représentants et messagers, le sont d’une maniere particuliere (cf. Congrégation pour le Clergé, Directoire pour le ministere et la vie des Pretres, Tota Ecclesia, 31.1.1994, n. 7, L.E.V. 1994, p. 11).

 

 

3. La dignité du ministere ordonné et son caractere irremplaçable

 

Il convient de rappeler ici l’image suggestive du cristal qui irradie tout autour de lui la lumiere du soleil utilisée par saint Basile pour souligner que l’âme de l’apôtre doit etre "limpide" afin de pouvoir réfléchir la lumiere de l’Esprit et les vérités de la foi: "Et de meme qu’au contact d’un rayon de soleil, les corps tres transparents et limpides deviennent tres lumineux et brillent d’un nouvel éclat, ainsi les âmes habitées et illuminées par l’Esprit deviennent saintes et réfléchissent la grâce aux autres" (Le Saint Esprit, IX, 23). Cette qualité est particulierement nécessaire chez le pretre, qui n’est pas appelé a annoncer des concepts abstraits, mais la Vérité, la Personne du Christ avec lequel l’homme est invité a se mettre en communion, une communion que seul l’Esprit peut transformer en union sponsale. Le ministre ordonné est donc appelé a collaborer avec l’Esprit afin que puisse s’opérer ce miracle, et plus sa collaboration avec le Consolateur sera docile, plus son ministere sera efficace. Comme l’a dit saint Jean Chrysostome: "Les Apôtres ne descendirent pas de la montagne comme Moise en portant dans leurs mains des tables de pierre; ils sortirent du Cénacle en portant l’Esprit Saint dans leur cour et offrant partout des trésors de sagesse et de grâce et des dons spirituels, comme s’ils provenaient d’une source intarissable: c’est ainsi qu’ils allerent precher dans le monde entier comme s’ils étaient eux-memes la loi vivante, comme s’ils étaient des livres animés par la grâce de l’Esprit Saint" (Homélie sur l’Évangile de Matthieu, I). Aussi, comme le rappelait déja Paul VI (cf. Message aux pretres, 30.6.1968, pour la Clôture de l’Année de la Foi), le sacerdoce ministériel fait partie d’une structure institutionnelle voulue par Dieu afin que la vie divine parvienne aux hommes de tous les temps par l’intermédiaire de ministres établis spécialement par Lui a cet effet. C’est pourquoi le ministere sacerdotal n’est pas un métier ou un service en faveur de la communauté ecclésiale parmi tant d’autres, mais participe, en vertu du sacrement de l’Ordre et d’une maniere absolument spéciale, a la puissance du sacerdoce du Christ, et possede un caractere indélébile (cf. ibid.).

 

Les atteintes portées au sacerdoce ordonné ne sont certes pas rares et se présentent sous divers aspects. J’estime qu’elles représentent aujourd’hui l’une des plus grandes menaces qui pesent sur l’Église de Jésus Christ. En ternissant la nature du ministere sacerdotal et, par conséquent, en recherchant des formes d’insertion dans la société de ce nouveau millénaire peu appropriées a la nature du sacerdoce ministériel, on priverait le Peuple de Dieu et le monde entier de cette présence particuliere du Christ, Maître, Pretre et Pasteur de son Église, qui ne peut se réaliser que dans la personne du pretre ordonné.

 

Une hypothese absurde, nous le savons bien, car cela entraînerait par la meme occasion la disparition du sacerdoce commun des fideles qui trouvent dans le sacerdoce ministériel leur centre propulseur, et le retour non pas aux temps de l’Église des origines, mais a des phases plus primitives de l’humanité, lorsque le Peuple de Dieu était divisé et errait comme un troupeau sans pasteur (cf. Nb 27,17; 1 R 22,17; 2 Co 18,16; Mt. 9,36).

 

Mais nous savons que Dieu promit a son peuple la présence efficace de pasteurs chargés de le rassembler et de le guider: "Je vous donnerai des Pasteurs selon mon cour" (Jr 3, 15) avait prophétisé Jérémie.

 

"C’est moi, avait prophétisé Ézéchiel, qui ferai paître mes brebis et qui les ferai reposer, oracle du Seigneur Yahvé. Je chercherai celle qui est perdue, je ramenerai celle qui est égarée, je panserai celle qui est blessée, je fortifierai celle qui est malade" (Ez 34, 15 ss.).

 

C’est en quelque sorte l’irruption de la puissance et de la sagesse divines dans la vie de chaque homme, laquelle se réalise pleinement dans la mission du Verbe Incarné et se prolonge dans le temps par le ministere de ses pretres, ces "autres Christs".

 

 

4. L’Esprit Saint dans le ministere sacerdotal, premier protagoniste de l’évangélisation.

 

Pour revenir a ce que nous disions a propos de la nouvelle évangélisation, c’est une tâche qui, comme le dit le Saint-Pere, "incombe a tout le peuple de Dieu et demande une nouvelle ardeur, de nouvelles méthodes et un nouveau langage pour l’annonce et le témoignage évangéliques. Elle exige que les pretres soient radicalement et totalement plongés dans le mystere du Christ et capables de réaliser un nouveau style de vie pastorale " (Exhort. Ap. Post-synodale PdV , n. 18).

 

A cette nécessité, l’Esprit Saint répond par les paroles du prophete Jérémie: "Je vous donnerai des pasteurs selon mon cour" (Jr 3, 15). Dieu promet aujourd’hui encore a son Peuple la présence efficace de pasteurs chargés de le rassembler et de le guider selon son cour, ce cour de Dieu qui s’est pleinement révélé a nous a travers le cour du Christ Bon Pasteur (cfr. Exhort. Ap. PdV, 28): Il ne possede rien en propre (cfr. Lc 9,59), ne suit pas ses propres intérets (cf. Jn 13, 14-16), mais s’offre totalement a nous en vue de notre rachat, pour nous libérer de la mort et nous rendre participants de la vie éternelle (cf. Jn 10, 10 ss.). Il est le Réconciliateur par excellence.

 

Par la consécration que nous avons reçue au moyen du sacrement de l’Ordre, nous pouvons affirmer que le don de l’Esprit nous configure d’une maniere spécifique et sacramentelle a Jésus Christ, Pretre Supreme et Éternel, Chef, Maître, Époux et Pasteur de son Église (cf. Conc. de Trente, sess. XII, chap. II; Pie XII, Lett. Enc. Mediator Dei, 20.11.1947; Conc. Ocum. Vat. II, Const dogm. Lumen gentium, n. 10 et 28; Décr. Presbyterorum Ordinis, n. 2). Rappelons que le pretre ordonné est rendu apte et idoine a agir non seulement au nom, mais aussi dans la personne meme du Christ, et a participer de l’autorité avec laquelle le Christ lui-meme édifie, sanctifie et gouverne son Corps.

 

Par le ministere sacerdotal se prolonge donc la présence réconciliatrice, salvifique du Christ dans le monde: l’union avec l’Esprit reçu lors de l’ordination sacerdotale façonne la vie des pretres au moyen de la charité du Verbe incarné qui, a travers eux, propose Son style de vie au monde entier (cf. Exhort. apost. post-synodale PdV, n. 36).

 

On comprend mieux alors que le pretre, sans cesser d’etre un frere parmi les freres, est constitué sacramentellement devant eux pour proclamer avec autorité la parole de l’unique Maître a l’adresse de tous les hommes et pour renouveler ses gestes de pardon, de réconciliation et d’offre de salut, avant tout par le Bapteme, la Pénitence et l’Eucharistie, en rendant ainsi présente sa sollicitude aimante jusqu’au don total de soi.

 

Le ministere sacré ne s’inscrit donc pas dans la ligne des rapports éthiques existants entre les hommes et ne se situe pas non plus au plan du seul effort de l’homme pour se rapprocher de Dieu: le ministere sacré est un don de Dieu; il est irréversiblement placé sur la ligne verticale de la recherche de l’homme de la part de son Créateur et Sauveur, sur l’horizon sacramentel de l’intimité divine rendue gratuitement accessible a l’homme. Autrement dit, le ministere ordonné est sacré par essence, que ce soit par son origine – il est conféré par le Christ –, par son contenu – les mysteres divins -, ou par la maniere dont il est conféré – sacramentellement: c’est la l’unique perspective qui permette de comprendre la nature de ce service sacerdotal, spécialement dans le contexte culturel ou nous nous trouvons aujourd’hui.

 

A ceux qui prétendent affirmer, dans le cadre des tendances sécularisantes et du relativisme doctrinal et existentiel, l’autosuffisance de l’homme en marche vers la félicité en pleine autonomie vis-a-vis du Dieu incarné et de ses Ministres ordonnés, nous répondons donc par l’affirmation bien connue du Concile Vatican II selon laquelle seul le Christ "manifeste (…) pleinement l’homme a lui-meme et lui découvre la sublimité de sa vocation" (Const. past. Gaudium et spes, n. 22). Nous devons répéter que le Christ est présent dans le pretre pour signifier au monde que la réconciliation opérée par son intermédiaire n’est pas un acte circonscrit a un temps et un lieu déterminés. Bien au contraire, comme unique acte de réconciliation universellement efficace, il transcende les catégories du devenir humain et se prolonge sans interruption dans le temps jusqu’au moment ou, a la derniere heure de l’histoire, le Christ reviendra (cf. 1 Cor 11, 26). Ici se manifeste la dimension ocuménique et missionnaire du ministere sacerdotal, qui embrasse tous les peuples du monde et transcende toutes les cultures.

 

 

5. Le pretre, en ce temps de croissance de la koinonía avec le Christ

 

"La nouvelle évangélisation a besoin de nouveaux évangélisateurs, de pretres qui s’engagent a vivre leur sacerdoce comme un chemin de sainteté " (Exhort. Ap. post-synodale PdV, n. 82).

 

Elle exige par conséquent une vie de priere et de pénitence, une direction spirituelle sincere, le recours régulier au sacrement de la Pénitence et une vie tout entiere enracinée, centrée et unifiée dans le Sacrifice eucharistique, tout cela accompagné d’une dévotion mariale a la fois fervente et délicate.

 

"Il faut commencer par se purifier soi-meme avant de purifier les autres – a dit saint Grégoire de Nazianze –; il faut etre instruits pour pouvoir instruire; devenir lumiere pour illuminer, s’approcher de Dieu pour en approcher les autres, etre sanctifiés pour sanctifier" (Orationes, 2, 71: PG 35,480). Telle est la réconciliation a laquelle le grand Jubilé nous appelle: nous réconcilier pour réconcilier, en nous faisant remarquer encore une fois que notre ministere lui-meme devient une exigence et une source de sanctification. Nous devons viser continuellement a une telle unité de vie.

 

Le Christ vit dans le pretre! (cf. Ga 2, 20): telle est la grande vérité qui remplit notre existence de contenu, qui en définit l’identité, la formation, le style de vie, l’ascese, et jusqu’a la discipline de la communion. Cette vérité est espérance pour le monde, et motif éternel de fascination pour les vocations. Cette vérité, nous devons la crier au monde, par le témoignage humble, ardent et saintement fier de notre vie!

 

 

6. La vue de la multitude des non-croyants et la présence de tant de fideles qui manifestent trop souvent une vision humaine, plate et pour ainsi dire horizontale non seulement du sacerdoce ministériel, lequel est au contraire sacré et hiérarchique, mais aussi de leur sacerdoce propre, le sacerdoce commun des baptisés, doit nous toucher et nous pousser a réagir, comme fut touché et réagit avec ardeur missionnaire le cour de Paul a la supplication du Macédonien, dans la vision de Troas: "Viens a notre secours!" (Ac16, 9).

 

Il n’existe pas de société qui n’ait besoin d’etre évangélisée: aujourd’hui, les paroles que le Saint-Pere adressait aux participants au VIe Symposium du Conseil des Conférences épiscopales d’Europe en 1985 sont toujours actuelles: "Cet effort renouvelé d’évangélisation que nous entreprenons se situe en continuité organique et dynamique avec la premiere évangélisation, celle-la meme du Christ d’abord – cf. Evangelii nuntiandi, n. 7- et celle apostolique ensuite (…). Pour réaliser une ouvre d’évangélisation efficace, nous devons recommencer a nous inspirer des premiers modeles apostoliques" (Jean-Paul II, Allocution, 11.10. 1985, n. 2 et 18).

 

La rédemption du Christ est indispensable a tout homme: dans le plan divin, nous sommes les instruments destinés a Lui permettre de se déverser et d’irriguer toute terre et tout cour. C’est pourquoi la charité pastorale nous presse; courrons sur les chemins du monde en faisant nôtre cet "ignem veni mittere" qui embrase le cour sacerdotal de Jésus.

 

Ce qui compte n’est pas l’âge, mais le fait d’adhérer pleinement a notre identité sacerdotale! Avec le temps, il peut arriver que nos conditions de santé et certaines mutations intervenues dans nos charges fassent naître en nous le désir bien compréhensible d’un repos mérité. Mais pour nous, la mise au repos uniquement au motif de l’âge serait inconcevable: aucun pretre ne pourra jamais se considérer totalement et définitivement a la retraite. Le Sacerdoce n’est pas un emploi a durée déterminée!

 

Je vois ici, devant moi, qu’il y a quelques pretres âgés; je sais que parmi eux certains ont atteint ou meme dépassé l’âge de quatre-vingt-dix ans, mais je sais aussi que sous ces vénérable cheveux blancs et cette fragilité physique, se cache un cour et une volonté juvéniles. Courrons "ad Deum qui laetificat iuventutem meam"!

 

 

Conclusion

 

Le Jubilé nous appelle a nous convertir pour convertir et repartir, quelque soit notre âge, vers la grande aventure de la nouvelle évangélisation. Les colonnes de la Place Saint-Pierre semblent presque scander la marche glorieuse de cette évangélisation. C’est une marche rythmée par la sainteté spécifique des pretres, premiers et irremplaçables évangélisateurs.

 

Pour conclure, ma parole se fait maintenant priere au Pretre Supreme et Éternel. Seigneur, garde dans ton amour tes pretres, protege-les comme tu proteges ta maison, eux qui sont les annonciateurs de ta volonté, les ministres et les dispensateurs des saints mysteres: ils n’échappent pas a l’incompréhension, meme des meilleurs, a l’hostilité du monde, a l’impopularité dans l’opinion publique.

 

Entoure-les, ô Seigneur! d’une famille spirituelle qui prie, qui les comprenne, les aide et les soutienne: fais que ton peuple se réjouisse du don et de la consolation d’avoir des pretres fideles et saints. Puisse la Vierge Marie les garder unis et rassemblés dans l’admirable cathédrale de son cour immaculé, ou toi aussi Tu fus ordonné Pretre.

 

Seigneur, nous te supplions avec les paroles de sainte Thérese: Donne-leur le pouvoir de transformer le pain et le vin. Donne-leur le pouvoir de transformer les cours. Et accordes-nous que, a la question qui renferme toutes les angoisses et les doutes des hommes: "Ou donc peut-on chercher le Christ?" l’on puisse répondre comme le fit en son temps saint Ambroise: "Dans le cour d’un pretre sage"!

nouvelle évangélisation-retour

 

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