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CURE de Lorraine en 1631. (Saint FOULUER)

« Seigneur, viens à mon secours. »

La vie est là, avec ses urgences et ses drames qui nous ramènent continuellement au réel. Seule la vie peut nous aider à réfléchir sur nos positions.  

Nos pauvres paroissiens sont en extrême nécessité de pain, et tout ensemble, ou en extrême ou en probable danger de la contagion, et il me semble que, lorsque je suis avec eux, encore m'efforcé-je d'y procurer quelque sorte de remède, et non sans quelque fruit, par la grâce de Dieu. Serait-il raisonnable et séant que j 'abandonnasse ces pauvres aflligés, qui sont en si grand nombre, et qui crient après moi, me demandent et me pressent, comme celui qui leur est obligé en conscience et devant Dieu, et qui porte le nom de curé, c'est-à-dire de pasteur, de médecin, de père, de garde, de conducteur, de conseiller, de défenseur, de pourvoyeur, de serviteur, de mère, de contrôleur, de miroir, etc., tient la place d'un autre qui s'acquitterait parfaitement de ce titre-là, des devoirs et des fonctions duquel il s'éloigne, orsque la nécessité y est plus et la plus pressante...

Si vous saviez ce que c'est que d'être curé, et 'avoir en une paroisse quelque deux ou trois nts personnes qui n'ont point de pain, point 'argent, point de beurre, point d'ouvrage pour availler, point de crédit, point de meubles pour ndre, point de parents, ni d'amis, ni de voisins, veuillent et puissent les aider, et, en quelquespoint de santé! je m'assure que vous m 'écriez: «Gardez-vous bien, curé, d'abandonner ces ux pauvres villages, tenez bon durant ce mau-temps, laissez maintenant tout le reste du monde, si ce n'est pour aller par les autres villes villages voisins de chez nous, avec une besace ou hotte sur vos épaules, demander des aumônes pour ces pauvres gens-là; faites-leur du potage tous les jours, et leur en procurez pour tremper leur pain d'avoine moisi ou à demi rôti sur le charbon du foyer par eux qui n'ont pas la patience ni le loisir de le cuire en un four. Consolez vos malades, vos affamés, vos demi-morts, et ne vous mettez pas en peine de celles qui, pour maintenant, n'ont besoin de choses du monde. »

 

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