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« POUR UNE PASTORALE DE LA CULTURE. »

 

Présentation du document du Conseil Pontifical de la Culture (Mai 1999)

 

 

 

Le Conseil Pontifical de la Culture a fait paraître le 23 mai 1999 un document intitulé : « Pour une pastorale de la culture. » Ce document, s’adressant a toutes les Eglises particulieres, puise sa réflexion non seulement dans les écrits de Jean-Paul II mais aussi dans les débats et les conclusions des différents synodes continentaux.

 

L’Eglise qui est en France a une longue expérience d’une pastorale de la culture. Elle a été marquée par la présence d’intellectuels catholiques dans les débats de société, l’influence des universités catholiques dans la recherche intellectuelle, les «semaines des intellectuels catholiques »... L'Eglise qui est en France a eu aussi une approche originale de cette pastorale. Avec les mouvements d’action catholique dans les mondes ouvriers, ruraux et indépendants, elle a lié, pourrait-on écrire aujourd’hui, «inculturation et évangélisation. » La plupart des dioceses ont mis en place des centres de formation pour les laics. En créant, en novembre 1998, un groupe de travail «arts, cultures et foi », l’épiscopat français exprime le besoin de poursuivre la réflexion, de prendre des initiatives afin que la foi pénetre au plus profond le bouillonnement intellectuel et artistique.

 

Ce document donne l’occasion de faire le point sur la pastorale de la culture en France et d’ouvrir des perspectives.

 

 

 

Le document commence par préciser ce qu’on entend par culture. Il souligne ensuite l’enjeu d’une pastorale de la culture. Si cette pastorale est signe d’une communion respectueuse de l’Eglise avec les hommes, elle provoque en meme temps une rupture. Le document se termine par quelques propositions d’action pastorale. Le commentaire suivra cette présentation.

 

 

 

Une approche de la culture et ses mutations.

 

 

 

Une définition de la culture.

 

 

 

La culture : « Cette façon particuliere dont les hommes et les peuples cultivent leur relation avec la nature et leurs freres, avec eux-memes et avec Dieu afin de parvenir a une existence pleinement humaine (Gaudium et Spes n°53). Il n’est de culture que de l’homme, par l’homme et pour l’homme. C’est toute l’activité de l’homme, son intelligence, et son affectivité, sa quete de sens, ses coutumes et ses reperes éthiques. La culture est si naturelle a l’homme que sa nature n’a de visage qu’accomplie dans sa culture. L’enjeu d’une pastorale de la culture est de le restituer dans sa plénitude de créature «a l’image et la ressemblance de Dieu. » (Gn. 1.26) en l’arrachant a la tentation anthropocentrique de se considérer indépendant du Créateur. (p.7) »

 

 

 

En définissant ainsi la culture, le conseil pontifical rejoint l’intuition biblique qui parle si souvent de la «justice de Dieu » : Dieu provoque continuellement l’homme a s’ajuster a la création qu’il doit dominer pour qu’elle soit la terre de tous, notamment des plus démunis, a s’ajuster a ses freres qui tous, sans exception, de leur naissance a leur mort, ont leur mot a dire sur leur vie, leur vie-ensemble, a s’ajuster a lui-meme, sans se surestimer ni se dévaloriser, a s’ajuster a Dieu tel qu’Il vient se révéler dans la Bible.

 

 

 

L’homme ne se définit pas totalement par sa culture.

 

 

 

Mais la culture d’un homme ne rend pas compte totalement de son etre. « Dés lors, et cette observation est capitale pour une pastorale de la culture, «on ne peut nier que l’homme se situe toujours dans une culture particuliere, mais on ne peut nier non plus que l’homme ne se définit pas tout entier par cette culture. Le progres meme des cultures montre qu’il existe en l’homme quelque chose qui transcendante les cultures. Ce quelque chose est précisément la nature de l’homme. Cette nature est la mesure de la culture et la condition pour que l’homme se soit prisonnier d’aucune de ses cultures, mais pour qu’il affirme sa dignité personnelle dans une vie conforme a la vérité profonde de son etre. » ( Veritas Splendor n°53) » p.7

 

Et le texte poursuit : « Toute culture est un effort de réflexion sur le mystere du monde et, en particulier, de l'homme : elle est une maniere d'exprimer la dimension transcendante dans de la vie humaine. Le cour de toute culture est constituer par son approche du plus grand des mysteres, le mystere de Dieu. C'est dire l'enjeu décisif d'une pastorale de la culture : " une foi qui ne devient pas culture est une foi qui n'est pas pleinement accueillie, entierement pensée et fidelement vécue. » p. 5

 

 

 

La culture est toujours en gestation.

 

 

 

La culture est surtout actuellement en effervescence. Le document parle, a la suite du Concile Vatican II d’ «un nouvel âge de l’histoire humaine. » (Gaudium et Spes, n°54). Les nouveaux traits de la culture constituent autant de défis et de points d’appui pour une pastorale de la culture. » (p.22)

 

Dans ce qui domine dans la situation culturelle dominante, le document retient «le subjectivisme qui prévaut comme mesure et critere de la vérité…un athéisme pratique anthropocentrique, une indifférence religieuse, un matérialisme hédoniste envahissant…les criteres du jugement et de choix retenus par les croyants eux-memes se présentent souvent comme étrangers ou meme opposés a ceux de l’Evangile… » (p.23)

 

Les sujets comme l’urbanisation galopante et le déracinement culturel, les moyens de communication sociale et technologique de l’information, les identités et minorités nationales, l’écologie, la science, la philosophie et la bioéthique, la famille et l’éducation, l’art et les loisirs, la diversité culturelle et la pluralité religieuse, les sectes et les nouveaux mouvements religieux (p.22 a 47) doivent spécialement retenir l’attention des Eglises particulieres suivant le continent dans lequel elles sont implantées.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ayant précisé la nature de la culture et décrit quelques mutations, le document du Conseil pontifical souligne l’enjeu d’une pastorale de la culture. Cet enjeu est de «le (l’homme) restituer dans sa plénitude de créature «a l’image et a la ressemblance de Dieu (Gn.1, 26) en l’arrachant a la tentation anthropocentrique de se considérer indépendant du Créateur. » p.7

 

L’Eglise se doit donc d’etre attentive a toutes les créations artistiques, les recherches culturelles de toutes les couches de la population car «c’est le propre de la personne humaine de n’accéder vraiment et pleinement a l’humanité que par la culture. » rappelle le conseil pontifical en citant Gaudium et Spes (n° 53.) Paul VI, en soulignant que le drame de notre époque est la rupture entre la culture et la foi, avait déja appelé l’Eglise a etre non seulement attentive mais présente aux hommes qui cherchent a etre plus pleinement hommes.

 

« Une foi qui ne devient pas culture est une foi qui n’est pas pleinement accueillie, entierement pesée et fidelement vécue. » Jean-Paul II, le 20 mai 1982.

 

Le Conseil Pontifical pour la Culture voudrait répondre aux questions posées par Jean-Paul II : « Comment le message de l’Eglise est-il accessible aux cultures nouvelles, aux formes actuelles de l’intelligence et de la sensibilité ? Comment l’Eglise du Christ peut-elle se faire entendre par l’esprit moderne, si fier de ses réalisations et en meme temps si inquiet pour l’avenir de la famille humaine ? » (Janvier 1995).

 

« Vous devez aider toute l'église a répondre a ces questions fondamentales pour les cultures actuelles : comment le message de l'Eglise est-il accessible aux cultures nouvelles, aux formes actuelles de l’intelligence et de la sensibilité vie? Comment l'Eglise du Christ peut-elle se faire entendre par l'esprit moderne, si fier de ses réalisations et en meme temps si inquiet pour l'avenir de la famille humaine? » p. 5

 

 

 

 

 

 

 

Avant de faire des propositions concretes, le texte du conseil pontifical insiste sur une donnée qui lui paraît essentielle : une pastorale de la culture est une pastorale qui fait signe que l’Eglise veut vivre en communion respectueuse avec la recherche des hommes mais aussi que cette pastorale provoque une rupture culturelle.

 

 

 

Une pastorale de la culture est signe de communion quand …

 

 

 

. elle rejoint ce qui au cour de la vie des hommes : « La foi a Jésus-Christ met au cour de la vie la personne et l’amour. Le Christ est la source de cette civilisation de l’amour dont les hommes porte de la nostalgie. » p.13

 

 

 

. quand elle emprunte des éléments culturels, signe de respect pour les chemins divers qu'empruntent les hommes pour chercher a exprimer leur dignité : « La construction du royaume ne peut pas ne pas emprunter des éléments de la culture et des cultures humaines. Il est nécessaire d’annoncer l’évangile dans le langage et la culture des hommes. » p.14

 

 

 

. quand elle met en lumiere ce qui reste caché : « L’annonce de Jésus-Christ met en lumiere les semina Verbi cachés et parfois comme enfouis au cour des cultures… » p. 13

 

 

 

L’inculturation est une démarche essentielle pour l’Eglise : « L’Eglise éclaire et élargit le sens de la vie, élargit les horizons de la raison et affermit les fondements de la morale humaine. »

 

 

 

La pastorale, signe de rupture.

 

 

 

Le texte du Conseil pour la Culture insiste sur la rupture culturelle que provoque l’accueil du Dieu unique qui vient a la rencontre d’Abraham :

 

« La rupture culturelle par laquelle s’inaugure la vocation d’Abraham. « Pere des croyants » traduit ce qui advient au plus profond du cour de l’homme lorsque Dieu fait irruption dans son existence, pour se révéler et susciter l’engagement de tout son etre. Abraham est spirituellement et culturellement déraciné pour etre, dans la foi, planté par Dieu dans la Terre promise. Mieux, cette rupture souligne la fondamentale différence de nature entre la foi et la culture. Contrairement aux idoles qui sont le produit d’une culture, le Dieu d’Ahraham est le Tout-Autre. C’est par révélation qu’il entre dans la vie d’Abraham. Le temps cyclique des religions anciennes est caduc avec Abraham et le peuple juif commence un nouveau temps qui devient l’historie des hommes en marche vers Dieu. Ce n’est pas un peuple qui se fabrique un dieu, c’est Dieu qui donne naissance a son peuple comme Peuple de Dieu. La culture biblique tient de ce fait, une place unique. Elle est la culture du Peuple de Dieu, au cour duquel il s’est incarné. La promesse faite a Abraham culmine dans la glorification du Christ crucifié. Le Pere des Croyants tendu vers l’accomplissement de la Promesse, annonce le sacrifice du Fils de Dieu sur le bois de la Croix. Dans le Christ venu récapituler l’ensemble de la création, l’amour de Dieu appelle tous les hommes a partager la condition de fils Le Dieu Tout-Autre se manifeste en Jésus-Christ Tout-Nôtre. : « Le Verbe du Pere éternel ayant pris la chair de la faiblesse humaine, s’est fait semblable aux hommes. (Dei Verbum, n°13) Quelle est la cause de cette rupture? « Il s'agit non seulement de greffer la foi sur les cultures mais aussi de redonner vie a un monde déchristianisé dont souvent les seules références chrétiennes sont d'ordre culturel. » p.3 S’agit-il de rompre avec la culture actuelle ? ...de créer une nouvelle culture ? « …la foi a le pouvoir de rejoindre le cour de toute culture pour le purifier, la féconder, l’enrichir et lui donner de se déployer a la mesure sans mesure de l’amour du Christ. La réception du message du Christ suscite ainsi une culture dont les deux constituantes fondamentales sont , a un titre tout a fait nouveau, la personne et l’amour. » p.11

 

Cette rupture est de quelle nature? La réponse dépend en grande partie de la maniere dont une culture particuliere met l’amour et la personne humaine en son centre.

 

 

 

Mission des Eglises particulieres.

 

Un passage du texte du Conseil Pontifical fait une remarque de bon sens : toute pastorale d’une Eglise particuliere est marquée par une culture : « L'évangélisateur dont la foi est elle-meme liée a une culture se doit toujours de témoigner avec clarté de la place unique du Christ, de la sacramentalité de son Eglise, de l'amour de ses disciples pour tout homme … ce qui implique le rejet de tout ce qui est source de méché et fruit de péché au cour des cultures. » P. 15 Si cette remarque est prise au sérieux, tout «évangélisateur » doit avoir conscience que tout acte pastoral qu’il pose est porteur d’une culture.

 

Inculturer le message de l’évangile.

 

 

 

Le texte insiste sur le devoir qui incombe a toute Eglise particuliere d’inculturer le message de la foi.

 

« L’exigence est aujourd'hui fortement ressentie de l'évangélisation des cultures et de l’inculturation du message de la foi ». (Pastores dabo vobis. N°55) Par la inculturation, les Eglises incarnent l'évangile dans les diverses cultures et en meme temps et introduisent les peuples avec leur culture dans sa propre communauté vie. L'Eglise, par l’inculturation devient un signe plus compréhensible de ce qui est nécessaire et essentiel… Inculturation de la foi et évangélisation des cultures constitue comme un binôme qui exclut toute forme de syncrétisme : tel est le sens authentique de l’inculturation. » p. 16 et 17.

 

Inculturer le message de la foi est une réponse au commandement de Jésus a ses disciples d’aller precher l’Evangile a toutes les nations. : « Cette obéissance ne signifie ni syncrétisme, ni simple adaptation de l’annonce évangélique, mais le fait que l’Evangile pénetre vitalement dans les cultures, s’incarne en elles, dépassant leurs éléments culturels incompatibles avec la foi et la vie chrétienne et élevant leurs valeurs jusqu’au mystere du salut qui provient du Christ. » (Pastores dabo vobis n° 55) p. 17

 

Inculturer le message de la Foi appelle chaque Eglise a promouvoir une pastorale concertée : « Une évangélisation inculturée grâce a une pastorale concertée permet a la communauté chrétienne de recevoir, célébrer, vivre, traduire sa foi dans sa propre culture, dans la comptabilité avec l'évangile et la communion avec l'Eglise universelle. » P. 21

 

 

 

Propositions concretes

 

« Les nouveaux défis que doit relever une évangélisation inculturée a partir des cultures modelées par deux millénaires de christianisme et des points d’appui identifiés au cour des nouveaux aréopages culturels de notre temps, appellent une présentation renouvelée du message chrétien, ancrée dans la tradition vivante de l'Eglise et soutenue par le témoignage de vie authentique des communautés chrétiennes. .. C'est tout l'enjeu d'une pastorale de la culture, plus complexe peut etre dans ces exigences qu'une premiere évangélisation de culture non chrétienne. » p 51 Le texte rappelle ce que Jean-Paul II exprimait dans son discours au Conseil Pontifical d la Culture en 1997 : « Chaque église particuliere devrait avoir un projet culturel… » p.51

 

Pour mettre en ouvre cette pastorale, le texte souhaite que les Eglises s’appuient sur la piété populaire, les paroisses, les institutions d’éducation, les centres de formations théologiques, les Centres Culturels Catholiques, les moyens de communication sociale et information religieuse. A propos de l’art et des artistes, le texte note que «l’articulation de la voie esthétique avec la poursuite du bien et la recherche du vrai, constitue sans nul doute un chantier privilégié de la pastorale de la culture. » p. 71

 

 

 

Conclusion

 

« La culture entendue a la suite du concile Vatican II (G. et S. n°53-62) dans son sens le plus ample se présente pour l’Eglise, au seuil du III millénaire, comme une dimension fondamentale de la pastorale, et «une authentique pastorale de la culture (est) décisive pour la nouvelle évangélisation. » Résolument engagé dans les voies d'une évangélisation qui atteigne les esprits et les cours et transforme en les fécondant toutes les cultures, les pasteurs discernent, a la lumiere de l'Esprit-Saint, les défis surgis des cultures indifférentes, voire hostiles a la foi, comme aussi les données culturelles qui constituent des points d'appui pour l'annonce de l'évangile. « Car l'Evangile conduit la culture a sa perfection et la culture authentique est ouverte a l'Evangile. » p.79

 

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