retour page principale REFLEXIONS SUR LE SUJET DE LA NOUVELLE EVANGELISATION

Evangéliser, c'est proclamer ce dont on a besoin

Évangéliser dans la force de l’Esprit

Monique Anctil, r.s.r.

Des le début de sa lettre apostolique Novo Millennio Ineunte, le pape Jean-Paul II nous invite, a la suite de Pierre et de ses compagnons, a

" avancer en eau profonde et a lâcher les filets pour la peche " (Lc 5, 4) ; il termine en nous exhortant, apres avoir contemplé le Christ, a nous mettre en marche : " Allez donc, de toutes les nations faites des disciples, les baptisant au nom du Pere, du Fils et du Saint Esprit " (Mt 28, 19). Il ajoute : " Ce commandement missionnaire nous introduit dans le nouveau millénaire et en meme temps nous appelle au meme enthousiasme que celui qui a caractérisé les chrétiens de la premiere heure : nous pouvons compter sur la force de l’Esprit lui-meme, qui a été répandu a la pentecôte et qui nous pousse aujourd’hui a reprendre la route, soutenus par l’espérance qui ne déçoit pas " (Rm 5, 5), (No 58). Comme un jour, ses disciples, Jésus nous envoie, forts de la force de l’Esprit, proclamer la Bonne Nouvelle.

Évangéliser est la grâce et la vocation propre de l’Église, son identité la plus profonde. De par notre bapteme, comme membres de l’Église, nous sommes tous appelés a l’évangélisation. Mais a l’époque ou nous vivons, il est évident qu’il nous faut un renouveau de l’évangélisation dans la puissance de l’Esprit saint. Comme l’affirmait le pape Jean-Paul II, " nous avons besoin d’une nouvelle évangélisation. Nouvelle dans son ardeur, nouvelle dans sa méthode, nouvelle dans son expression ". En dépit de ce que le visage extérieur de l’Église peut nous présenter, nous pouvons affirmer que celle-ci expérimente aujourd’hui une nouvelle Pentecôte. Et la Pentecôte sera a l’ouvre dans l’Église tant et aussi longtemps que la mission du Christ ne sera pas achevée sur cette terre.

Pour nous, touchés par la grâce de l’Effusion de l’Esprit, nous devons répandre la Bonne Nouvelle avec l’audace et la spontanéité des premiers apôtres au sortir du Cénacle pour aller, sous le souffle de l’Esprit, porter la Bonne Nouvelle et témoigner avec puissance de Jésus et de sa résurrection.

La Pentecôte est pour l’évangélisation.

Les groupes du Renouveau charismatique sont essentiellement des communautés évangélisatrices.

Chaque fois que nous nous retrouvons pour prier, meme en petit nombre, l’entier mystere de l’Église est présent. Chacun d’entre nous est membre du Corps, chacun d’entre nous est en communion avec des freres et sours. " Évangéliser n’est pas un acte individuel et isolé, mais c’est un acte profondément ecclésial. Lorsque le plus obscur prédicateur, catéchiste ou pasteur, dans la contrée la plus lointaine, preche l’Évangile, rassemble sa petite communauté, meme seul, il fait un acte d’Église. (…) Cela suppose qu’il le fasse, non pas par une mission qu’il s’attribue, ou par une inspiration personnelle, mais en union avec la mission de l’Église et en son nom " (Évangélisation dans le monde moderne, Paul VI, No 60).

Évangéliser, c’est inviter quelqu’un a faire une rencontre personnelle avec Dieu,a accueillir Jésus comme Sauveur et Seigneur de sa vie.

La démarche des Séminaires de la Vie nouvelle dans l’Esprit est une occasion de favoriser une profonde expérience personnelle de conversion a Jésus, Seigneur et Sauveur. Il nous faut une audace renouvelée pour offrir cette démarche de foi dans nos groupes du Renouveau charismatique et surtout, pour inviter de nouvelles personnes a se joindre a nous. Les groupes fideles a la grâce de l’Effusion de l’Esprit deviennent de plus en plus évangélisateurs car, sous le Souffle de l’Esprit de Pentecôte, ils sont poussés a " avancer au large " pour proclamer la Bonne Nouvelle. Et c’est par la communion fraternelle, la louange, le partage de la Parole de Dieu, le témoignage et l’exercice des charismes, grandes caractéristiques de nos assemblées, qu’ils évangéliseront dans la puissance de l’Esprit.

Sans amour, il ne peut y avoir d’évangélisation vraie ! La grande révélation de Jésus est l’AMOUR. Il est venu nous apprendre qu’il nous faut aimer de l’amour meme du Pere ; ce qui suppose que nous demeurions branchés a cette Source qui transfigure nos paroles et nos gestes. Seul celui qui puise a la source de Dieu qui est Amour peut exprimer par sa vie le véritable amour. N’est-ce pas la voie supérieure que nous propose l’Évangile ? Sans amour, nous dit saint Paul, " je ne suis rien, qu’un cuivre qui résonne, qu’une cymbale retentissante " (1 Co 13, 1-13).

 

Dans un groupe, une autre maniere d’évangéliser est la joie authentique qui s’exprime dans la louange, grande force de la priere charismatique. Dans une société de morosité, il est urgent de témoigner de cette joie de l’Esprit qui s’est emparée des apôtres au jour de la Pentecôte, joie si intense qu’on les croyait " ivres, pleins de vin ". Le motif de notre joie nous est précisé par l’Ange aux bergers de Bethléem : " Voici que je vous annonce une grande joie, qui sera celle de tout le peuple : aujourd’hui, dans la cité de David, un Sauveur vous est né, qui est le Christ Seigneur " (Lc 2, 10-11).

Un élément fondamental dans l’annonce de la Bonne Nouvelle est l’utilisation des Saintes Écritures. Il est donc important de se nourrir, personnellement et a l’intérieur de nos assemblées, de la Parole de Dieu. Un groupe qui se laisse instruire et conduire par la Parole de Dieu expérimentera les " surprises de l’Esprit " ; il verra éclater les dons et charismes nécessaires a l’évangélisation. C’est alors que la Parole, proclamée et enseignée dans la puissance de l’Esprit, sera confirmée par des signes et des prodiges comme ce le fut pour Jésus, premier évangélisateur, et pour les apôtres a la suite de leur Maître.

Que l’Esprit de Pentecôte nous insuffle un nouvel élan missionnaire afin de répondre audacieusement a ce souhait de Jean-Paul II : " Au seuil du troisieme millénaire, l’Église tout entiere, pasteurs et fideles, doit sentir plus fortement la responsabilité qu’elle a d’obéir au commandement du Christ : Allez dans le monde entier et prechez l’Évangile a toutes les créatures (Mc 16, 15). A l’Église est confiée une entreprise de grande envergure, urgente, exigeante et magnifique : celle d’une nouvelle évangélisation dont le monde d’aujourd’hui a un immense besoin " (Vocation et mission des laics, No 64).

De la communauté Notre-Dame du Saint Rosaire, sour Monique Anctil est responsable du Renouveau charismatique du diocese de Rimouski. Elle est aussi membre du comité de rédaction de la revue Selon Sa Parole.

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Chers Freres et Soeurs !

1. La célébration annuelle de la Journée Mondiale des Missions, le 22 octobre 2000 prochain, nous invite a prendre une conscience nouvelle de la dimension missionnaire de l’Eglise, et nous rappelle l’urgence de la Mission " ad gentes ", qui " concerne tous les chrétiens, tous les Dioceses et toutes les paroisses, toutes les Institutions et toutes les Associations ecclésiales " (Lettre Encyclique Redemptoris Missio, 2).

Cette année, la Journée prend une signification plus riche a la lumiere du Grand Jubilé, année de grâce, célébration du Salut que Dieu, dans son Amour miséricordieux, offre a l’humanité tout entiere. Rappeler les 2000 ans de la Naissance de Jésus veut dire célébrer aussi la naissance de la Mission : le Christ est le premier et le plus grand missionnaire du Pere. Née avec l’Incarnation du Verbe, la Mission continue dans le temps par l’annonce et par le témoignage de l’Eglise. Le Jubilé est un temps favorable, pour que l’Eglise tout entiere s’engage, grâce a l’Esprit, dans un nouvel élan missionnaire

C’est pourquoi j’adresse un appel spécial et angoissé a tous les baptisés pour que, avec un courage humble, en répondant a l’appel du Seigneur et aux besoins des hommes et des femmes de notre époque, ils deviennent des hérauts de l’Evangile. Je pense aux Eveques, aux pretres, aux religieux, aux religieuses, aux laics ; je pense aux catéchistes et aux autres ouvriers pastoraux qui, a différents niveaux, font de la Mission " ad gentes " la raison d’etre de leur propre existence, en persévérant meme au sein de grandes difficultés. L’Eglise est reconnaissante pour le dévouement de ceux qui, si souvent, " sement dans les larmes… " (cf. Ps 126,6). Qu’ils sachent que leur effort et leurs souffrances ne seront pas perdus, mais qu’ils représentent au contraire le levain qui fera germer dans les coeurs d’autres apôtres le désir profond de se consacrer a la noble cause de l’Evangile. Au nom de l’Eglise, je les remercie et je les encourage a persévérer dans leur générosité : Dieu les récompensera de maniere abondante.

2. Je pense aussi a tous ceux qui pourraient commencer ou approfondir leur engagement dans l’annonce de l’Evangile de la Vie. D’une maniere différente, tous sont invités a continuer dans l’Eglise la Mission de Jésus. C’est la un titre de gloire : l’Envoyé est associé de maniere singuliere a la Personne du Christ, pour accomplir, comme l’affirme le Divin Maître, ses memes oeuvres : " … Celui qui croit en moi fera, lui aussi, les oeuvres que je fais, et il en fera meme de plus grandes, parce que je vais vers le Pere " (Jn 14,12). Tous sont appelés a collaborer en partant de leur propre situation de vie. En ce temps, temps de grâce et de miséricorde, je ressens de maniere spéciale qu’il faut engager toutes les forces ecclésiales pour la nouvelle évangélisation et pour la Mission " ad gentes ". Aucun croyant, aucune Institution de l’Eglise ne peut se soustraire au devoir supreme d’annoncer le Christ a tous les peuples (cf. Lettre Encyclique Redemptoris Missio, 3). Personne ne peut se considérer comme étant dispensé d’offrir sa propre collaboration au déroulement de la Mission du Christ, qui continue dans l’Eglise. Au contraire, l’invitation de Jésus est plus beaucoup plus actuelle que jamais : " Allez, vous aussi, a la vigne " (Math 20,7).

3. Comment ne pas consacrer ici un souvenir spécial, chargé d’affection et d’émotion profonde, a tous les missionnaires, a tous les martyrs de la foi qui, comme le Christ, ont donné leur vie en versant leur propre sang ? Ils ont été innombrables meme au XX° siecle, durant lequel " l’Eglise est devenue a nouveau l’Eglise des Martyrs " (Lettre Apostolique Tertio Millenio Adveniente, 37). Oui, le Mystere de la Croix est toujours présent dans la vie chrétienne. J’écrivais dans l’Encyclique Redemptoris Missio : " Comme toujours dans l’histoire chrétienne, les <<martyrs>>, c’est-a-dire les témoins, sont nombreux et ils sont indispensables a la marche de l’Evangile… " (45). Les paroles de Paul aux Philippiens nous viennent a la mémoire : " C’est par sa faveur qu’il vous a été donné, non pas seulement de croire au Christ, mais encore de souffrir pour lui " (Phil 1,29). Le meme Apôtre encourage Timothée, son disciple, a souffrir sans rougir, avec lui, pour l’Evangile, aidé par la force de Dieu (cf. I Tim 1,8). La Mission tout entiere de l’Eglise, et, de maniere spéciale la Mission " ad gentes ", a besoin d’apôtres disposés a persévérer jusqu’au bout, fideles a la mission reçue, en suivant la meme voie que celle parcourue par le Christ, " la voie de la pauvreté, de l’obéissance, du service et du sacrifice de soi jusqu’a la mort… " (Décret Ad Gentes, 5). Puissent les témoins de la foi, dont nous avons fait mémoire, etre un modele et un exemple pour tous les chrétiens, de maniere a ce que l’annonce du Christ soit considérée par chaque chrétien comme une tâche qui lui est propre.

4. Dans cet effort, le chrétien n’est pas seul. Il est vrai qu’il n’y a pas de proportion entre les forces humaines et la grandeur de la Mission. L’expérience la plus commune et la plus authentique est de ne pas sentir dignes de cette tâche. Mais ils vrai également que " notre capacité vient de Dieu, quoi nous a rendus capables d’etre ministres d’une Nouvelle Alliance " (II Cor 3, 5b-6a). Le Seigneur n’abandonne pas celui qu’il appelle a son service. " Tout pouvoir m’a été donné au ciel et sur la terre. Allez donc, de toutes les nations faites des disciples… Et voici que je suis avec vous pour toujours jusqu’a la fin du monde " (Math 28, 18-20). La présence continue du Seigneur dans son Eglise, et en particulier notamment dans la Parole et dans les Sacrements, est une garantie pour l’efficacité de sa Mission. Elle se réalise aujourd’hui par des hommes et par des femmes qui ont fait l’expérience du salut dans leur propre fragilité et dans leur propre faiblesse, et qui la témoignent a leurs freres, dans la conscience que nous sommes tous appelés a la meme plénitude de vie.

5. Comme je le disais auparavant, la perpective elle-meme du Grand Jubilé que nous célébrons, nous amene a un engagement missionnaire plus grand " ad gentes ". Deux mille ans apres le début de la Mission, il y a encore de vastes domaines géographiques, culturels, humains ou sociaux ou le Christ et son Evangile n’ont pas encore pénétré. Comment ne pas entendre l’appel qui ressort de cette situation ?

Ceux qui ont connu la joie de la rencontre avec le Christ ne peuvent la tenir enfermée en eux, ils doivent la répandre. Il faut aller au-devant de cette invocation non exprimée qui monte de toutes les parties du monde, comme elle parvint a l’apôtre Paul durant son deuxieme voyage : " Passe en Macédoine, viens a notre secours ! " (Act 16,9). L’évangélisation est une " aide " offerte a l’homme, puisque le Fils de Dieu s’est fait chair pour rendre possible a l’homme ce que, par ses seules forces, il ne pourrait obtenir : " l’amitié avec Dieu, sa grâce, la vie surnaturelle, la seule dans laquelle peuvent se résoudre les aspirations les plus profondes du coeur humain… L’Eglise, en annonçant Jésus de Nazareth, vrai Dieu et Homme parfait, ouvre devant chaque etre humain la perspective d’etre <<divinisé>> et de devenir ainsi plus homme. C’est la la seule et unique voie grâce a laquelle le monde peut découvrir la haute vocation a laquelle il est appelé, et la réaliser dans le salut opéré par Dieu " (Bulle Incarnationis Mysterium, 2).

Nous devons en outre etre intiment persuadés du fait que l’évangélisation représente aussi un service de valeur rendu a l’humanité, étant donné qu’elle la prépare a réaliser le projet de Dieu qui veut unir a Lui tous les hommes, en en faisant un peuple de freres libérés des injustices et animés de sentiments d’une solidarité authentique.

6. Je désire a présent fixer mes regards sur les nombreux protagonistes de la Mission spécifique " ad gentes " : les Eveques, en premier lieu, et leurs collaborateurs, les pretres, en rappelant en meme temps l’oeuvre des Instituts Missionnaires d’hommes et de femmes. Je me sens le devoir de consacrer une parole spéciale aux catéchistes dans les terres de Mission ! ce sont eux " qui portent par excellence ce titre de <<catéchistes>>… Des Eglises aujourd’hui florissantes ne se seraient pas édifiées sans eux " (Exhortation Apostolique Catechesi Tradendae, 66).

Le Décret Conciliaire sur l’activité missionnaire parle d’eux comme d’une " armée qui a si magnifiquement mérité de l’oeuvre des Missions aupres des paiens,… qui, pénétrés de l’esprit apostolique, apportent par leurs labeurs considérables une aide singuliere et absolument nécessaire a l’expansion de la foi et de l’Eglise " (Décret Ad Gentes, 17). En déployant un grand effort et un grand zele missionnaires, ils représentent sans aucun doute l’appui le plus efficace pour les missionnaires dans de multiples tâches. Souvent, en raison du petit nombre de ministres, c’est a eux qu’incombe la responsabilité de vastes régions, ou ils suivent les petites communautés, en remplissant le rôle d’animateurs dans la priere, dans la célébration liturgique de la Parole de Dieu, dans l’explication de la doctrine, et dans l’organisation de la charité.

Puisque leur rôle est tellement important, leur formation est encore plus nécessaire, a savoir leur " préparation doctrinale et pédagogique approfondie, un constant renouvellement spirituel et apostolique " (Lettre Encyclique Redemptoris Missio, 73). Leur travail est toujours un travail nécessaire. Je souhaite que l’engagement de toute l’Eglise dans cet tâche soit toujours plus ressenti. La formation des catéchistes, ainsi que de tout le personnel missionnaire, est une priorité pastorale ; elle représente, si l’on peut dire, un " investissement en personnes " puisque seuls les évangélisateurs et les formateurs qui sont a la hauteur de leur tâche peuvent contribuer de maniere efficace a construire l’Eglise.

7. Le champ est immense, et il y a encore tellement de choses a faire : la collaboration de tous est nécessaire. Personne, en effet, n’est tellement pauvre qu’il ne puisse donner quelque chose. On participe a la Mission avant tout par la priere, dans la liturgie ou dans le secret de sa propre chambre, par le sacrifice et par l’offrande a Dieu de ses propres souffrances. C’est la la premiere collaboration que chacun peut offrir. Il est important ensuite de ne pas se dérober a la contribution économique, qui est vitale pour tant d’Eglises particulieres. Comme chacun le sait, tout ce qui est recueilli a l’occasion de cette Journée, sous la responsabilité des Oeuvres Pontificales Missionnaires, est affecté intégralement aux besoins de la Mission universelle. En cette circonstance, je tiens a manifester ma vive gratitude a cette Institution ecclésiale digne de mérite qui, depuis 74 ans, se charge d’organiser cette Journée et qui anime, dans un sens missionnaire, le Peuple de Dieu tout entier, en rappelant que, des enfants aux adultes, des Eveques aux pretres, des religieux aux fideles laics, tous sont appelés a etre missionnaires dans leur propre communauté locale, en s’ouvrant ainsi aux besoins de l’Eglise universelle. L’animation et la coopération missionnaires, réalisées par les Oeuvres Pontificales, présentent au Peuple de Dieu la Mission comme étant un don : don de soi et don de ses propres biens matériels et spirituels au bénéfice de toute l’Eglise (cf. Lettre Encyclique Redemptoris Missio, 81).

De plus, cette année, la Journée se déroulera a Rome avec une solennité particuliere, avec la célébration du Congres Missionnaire Mondial, qui rassemblera les membres des Oeuvres Pontificales Missionnaires provenant de tous les angles de la terre, comme représentants des Eglises locales de chaque continent, comme signe de l’universalité du Salut de Jésus. Et moi-meme, s’il plaît a Dieu, j’aurai la joie de présider cette célébration significative.

8. Chers Freres et Soeurs, puissent mes paroles servir d’encouragement pour tous ceux qui ont a coeur l’activité missionnaire. En célébrant le Jubilé de l’Année Sainte 2000, " toute l’Eglise est encore plus engagée dans un nouvel Avent missionnaire. Nous devons entretenir en nous la passion apostolique de transmettre a d’autres la lumiere et la joie de la foi, et nous devons former a cet idéal tout le Peuple de Dieu " (Lettre Encyclique Redemptoris Missio, 86). L’Esprit de Dieu est notre force ! Lui, qui a manifesté sa puissance dans la Mission de Jésus, envoyé pour " porter la bonne nouvelle aux pauvres… et proclamer une année de grâce du Seigneur " (Lc 4,18), Il a été répandu dans le coeur de nous tous, qui sommes croyants (cf. Rom 5,5), pour nous préparer a etre les témoins des oeuvres du Seigneur.

Que la Vierge Sainte, Mere du Christ et Mere des croyants, Femme entierement docile au Saint-Esprit, nous aide a répéter en toutes circonstances son " Fiat " au dessein de salut de Dieu, au service de la nouvelle évangélisation.

Dans cet esprit, a vous tous qui vous engagez sans réserve dans la grande Mission " ad gentes ", et a vos communautés, j’envoie de grand coeur une Bénédiction Apostolique spéciale.

Fait au Vatican, le 11 juin 2000, Solennité de la Pentecôte.

Joannes Paulus II

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L'appel a évangéliser qui s'adresse a nous peut sembler le plus difficile a assumer ; c'est pourtant le plus crucial, et le plus irrémédiablement lié a notre condition de baptisés, d'enfants de Dieu1.

" Nous ne pouvons pas nous taire. "2

Étant par le bapteme devenus temples de l'Esprit, empreints de l'amour du Christ, nous sommes naturellement portés a faire connaître le Christ a tous ceux qui nous entourent. Le Christ nous inspire un amour fraternel pour l'humanité entiere, et ainsi nous fait souhaiter que tous renaissent en lui. L'élan apostolique découle a la fois du précepte formel du Seigneur et de l'exigence profonde de la vie en Dieu : la foi aspire a se communiquer et se raffermit en se donnant3. Il se fait encore plus pressant par la conscience de notre appartenance au peuple de Dieu, a l'Église, et donc de notre participation a son devoir fondamental, qui fait d'elle ce qu'elle est : annoncer et instaurer le Royaume de Dieu4.

" Comme le Pere m'a envoyé, moi aussi je vous envoie. "5

Le fondement théologique de l'activité missionnaire de l'Église réside dans la dynamique trinitaire : Dieu décida, pour établir une pleine communion entre les hommes, " d'entrer dans l'histoire humaine d'une façon nouvelle et définitive, en envoyant son Fils dans notre chair "6, pour défaire les liens de Satan. Le Christ ensuite envoya l'Esprit d'aupres du Pere pour parachever Son oeuvre salvifique, unifier et étendre l'Église, signe et moyen de l'union des hommes avec Dieu7. En sa vie la plus intime, la mission de l'Église est de s'évangéliser, pour rendre plus parfaite sa communion et son unité, et d'annoncer la Bonne Nouvelle a toutes les nations. Ainsi l'Église, de par sa catholicité et son apostolicité, doit etre entierement ordonnée a l'annonce universelle du kérygme8 et a la propagation du Royaume, c'est-a-dire a la réalisation du dessein de Dieu ; a moins de s'opposer au dessein de Dieu, qui a voulu qu'étant en union avec Lui, nous formions un peuple uni, on ne peut donc precher l'Évangile contre l'Église, que le Christ aima jusqu'a se livrer pour elle9, ni disjoindre le Royaume et l'Église qui en est la servante privilégiée10.

" Allez travailler a ma vigne ! "11

En tant que membres du Corps du Christ, nous sommes des ouvriers de la vigne du Seigneur, envoyés dans l'Esprit. Du fait de notre participation a Sa triple fonction, sacerdotale, prophétique et royale, nous sommes responsables de son développement, individuellement et au sein de nos communautés de base. La tâche est immense : de la " nouvelle évangélisation " a l'activité pastorale, en passant par l'extreme pointe de l'action apostolique que reste la mission universelle " Ad Gentes " --- du décret éponyme du Concile Vatican II concernant l'activité missionnaire de l'Église, désigne l'annonce de l'Évangile en des contrées qui l'ignorent --- pour en arriver au témoignage quotidien, qui s'incarne dans les trois domaines précédents12.

" Que toute langue proclame que Jésus-Christ est Seigneur, pour la gloire de Dieu le Pere. "13

Des les premiers temps de Pentecôte (notamment au concile de Jérusalem), l'Église fut consciente d'etre envoyée aux extrémités de la terre, pour etre un ferment du Royaume, d'une grande paix entre les hommes. Les exemples de vocation missionnaire, de contrées évangélisées, ne manquent pas pour nous éclairer. Aujourd'hui cette exigence d'universalité implique la reconnaissance de nouveaux champs de prédication : les grandes cités, les différentes spheres socio-culturelles, au premier rang desquelles le monde de la communication. Le décret Ad Gentes distingue plusieurs étapes dans le processus d'évangélisation, a commencer par le témoignage de vie chrétienne. C'en est la partie la plus immédiate, et la condition sine qua non. Vient ensuite, essentielle et centrale, l'annonce de la Parole ; puis, apres la conversion, don gratuit de l'Esprit, le catéchuménat, qui conduit au bapteme, sacrement qui opere et signifie l'introduction dans la vie de l'Esprit. L'entrée effective dans cette nouvelle vie se vit de maniere privilégiée dans les sacrements " d'initiation chrétienne " (bapteme, confirmation et eucharistie), et dans l'insertion dans une communauté ecclésiale. En effet, le but de la mission étant d'établir la communion, un de ses objectifs est l'implantation d'Églises locales, devenant progressivement autonomes et puis elles-memes missionnaires. " Celui qui a été évangélisé évangélise a son tour. C'est la le test de vérité, la pierre de touche de l'évangélisation : il est impossible qu'un homme ait accueilli la Parole et se soit donné au Regne sans devenir quelqu'un qui témoigne et annonce a son tour. "14

" Un jour, la colline du temple dominera les montagnes, elle sera la plus haute. Alors toutes les nations afflueront vers elle. "15

Cette démarche d'annonce du kérygme16 et d'implantation du peuple de Dieu doit se faire conformément a la catholicité de l'Église, adaptant l'expression du Message divin au contexte culturel et spirituel sans dénaturer ce dernier. La liturgie et la pratique pastorale assumeront des lors les richesses des nations, sans oublier l'origine humaine de toute culture, par la meme marquée par le péché et donc a purifier ; citons, comme champions de l'" inculturation ", les co-patrons de l'Europe Cyrille et Méthode17 ; le discours de Paul a l'Aréopage d'Athenes est également un modele du genre18. Ainsi l'Église se fera symphonie des dons de l'Esprit et du Verbe, unité visible du genre humain, dans le respect de chacun et l'enrichissement mutuel de tous. Depuis les épîtres de Paul, le sens de la catholicité s'exprime également dans les liens de collaboration entre Églises particulieres et Église universelle, en vue d'un bénéfice mutuel et pour rester humble et ouvert a l'universel. " La communion parfaite dans l'amour préserve l'Église de toute forme de particularisme et d'exclusivisme ethnique ou de préjugé racial, comme de toute arrogance nationaliste. "19

" Malheur a moi si je n'annonçais pas l'Évangile ! "20

Si le Christ suscite toujours des charismes missionnaires spécifiques, nous sommes tous appelés a témoigner du Royaume. En tant que laics, nous sommes spécialement appelés a participer au " renouvellement chrétien de l'ordre temporel "21, en promouvant la civilisation de l'amour ; c'est-a-dire a continuer notre vie séculiere mais en l'ordonnant au Christ. Ainsi le regne de Dieu est a chercher et a construire dans les domaines de l'économie, de la politique, du progres social, de la communication, des relations internationales et de la culture ; sans oublier, au sein meme des communautés ecclésiales, la catéchese et l'animation liturgique et pastorale22. Le Concile Vatican II a insisté sur la nécessité de ne pas introduire de rupture entre vie de foi et comportement quotidien23. Le rôle des laics peut etre crucial dans l'annonce du message évangélique, étant entendu que de nombreuses personnes ne pourront y avoir acces que par eux. C'est également par eux que l'Église peut se trouver au coeur du monde, afin que Dieu soit " tout en tous "24.

" Commencez en vous l'oeuvre de paix, au point qu'une fois pacifiés en vous-memes, vous portiez la paix aux autres. "25

Charité bien ordonnée commence par soi-meme : nous sommes en effet également membres de l'unique Vigne du Seigneur, et l'oeuvre de notre propre conversion n'est jamais achevée. On ne peut évangéliser sans s'évangéliser soi-meme, y compris par une formation adéquate26. Cependant il s'agit de ne point se replier sur cet alibi, en nous souvenant des promesses du Christ : " C'est moi qui ferai pénétrer dans les coeurs mon enseignement, j'accomplirai ma promesse "27, en Le priant de nous accorder Sa grâce afin qu'a travers notre joie et notre sainteté apparaisse le visage de Celui qui nous rachete.

" Vous avez été ramenés de la mort a la vie par le Christ. "28

A l'heure ou l'homme a tant de besoins matériels, les activités de promotion humaine sont inséparables de l'annonce et de l'instauration du Regne. En effet, sans un certain développement des biens temporels et humains, la libération radicale promise par l'Évangile risque de ne pas etre entendue, ou de sembler hypocrite. Cependant, a l'encontre de la tendance actuelle a la " sécularisation du salut "29, il faut redire la nouveauté de la vie spirituelle subséquente au bapteme, il faut redire que le Christ est le salut intégral de chaque etre humain. Le développement technico-économique ne peut suffire a l'homme, sous peine d'amputer sa dimension verticale, son ouverture a l'absolu ; et l'exces d'opulence est source de misere spirituelle. En outre, les valeurs du monde sont toujours a imprégner de la notion fondamentale, mais ô combien fragile, de dignité inviolable de toute personne humaine30, principe de l'égalité entre les hommes. Il est constamment a rappeler que le progres de l'homme ne réside pas dans plus d'avoir, mais dans plus d'etre.

" Il est Son Logos, duquel le genre humain tout entier a reçu participation. "31

Le Concile l'a affirmé dans ses décrets et déclarations, le pape Jean-Paul II, dans son encyclique Redemptoris Missio, a renchéri : le dialogue inter-religieux, qui s'épanouit actuellement, ne dispense pas de la prédication du Royaume, et, entendu comme moyen de compréhension et d'enrichissement réciproque, en se gardant de tout scepticisme ou de tout syncrétisme (dans une conception saine de l'unicité de la Vérité), il en est partie intégrante.

Le Concile a reconnu la présence, dans les diverses religions et spiritualités humaines, de " semences du Verbe ", reprenant le concept de logos séminal développé par Justin32. Mais l'apologiste martyr nous fait remarquer la différence essentielle entre un reflet, une idée ou une ressemblance ; et la rencontre du Logos lui-meme, en son intégralité. L'exigence de l'annonce de la nouveauté radicale de la vie baptismale demeure33 : en effet, ces " semences de Verbe " ne tirent leur validité, leur valeur, que du Christ34 ; le Christ révele pleinement l'homme a lui-meme, en lui annonçant sa vocation d'intimité avec Dieu. Pourquoi des lors tairions-nous l'intégralité de la Vérité a ceux qui en tant qu'hommes, sont animés du meme désir que nous ?

" Que vos oeuvres brillent devant les hommes, afin qu'ils voient et admirent votre Pere qui est dans les cieux. "35

A la source et au début de la mission se situe le témoignage d'une vie authentiquement chrétienne, en premier par l'action caritative, " sceau de l'apostolat chrétien "36. En particulier aujourd'hui, ou les hommes écoutent davantage les témoins que les maîtres, ce premier mode d'évangélisation est essentiel. Notre engagement dans la recherche de la paix et la justice, et le débordement de notre vie spirituelle, ne peuvent qu'éveiller l'intéret de l'autre, le Christ étant principe et modele de l'humanité rénovée a laquelle tous aspirent. Si nous vivons en intimité avec le Christ, l'Évangile apparaîtra comme facteur de progres et de libération et le Christ comme ce qu'il est : l'" Attente des nations et leur Sauveur ".

L'Esprit-Saint, protagoniste de la mission37

De plus, le sujet transcendant de l'oeuvre salvifique reste toujours l'Esprit-Saint, particulierement lors de l'annonce du kérygme38. Il agit en l'orateur et en l'auditeur, du désir de la vérité a la persévérance dans la foi ; c'est lui qui suscite toute priere authentique. " Quand donc la parole de Dieu parvient a nos oreilles, par le ministere des prédicateurs, la puissance divine est a l'oeuvre derriere le son de la voix humaine, et celui qui a encouragé la mission de l'évangélisateur, renforce aussi les dispositions de l'auditeur : la parole substantielle paraît douce a l'âme, les ténebres anciennes sont repoussées par la nouvelle lumiere et le regard intérieur est débarrassé du voile de l'erreur qui l'obscurcissait depuis longtemps. "39 Se souvenir que nous sommes " administrateurs de la grâce multiforme de Dieu "40 peut nous aider a rester humbles, tout en gardant une confiance inébranlable en les dons de l'Esprit.

L'attitude intérieure du missionnaire41

Le missionnaire authentique est l'homme des Béatitudes : il est animé d'un profond désir de justice et de paix, et d'un zele ardent pour les âmes découlant d'un amour sans exclusion a l'image de celui du Pere. En lui, toute violence, intérieure ou extérieure, est exclue ; il agit dans un esprit de charité. La vocation missionnaire, surtout face aux autres spiritualités, comporte une forte exigence de vie spirituelle et contemplative, en union intime avec le Christ. Cette richesse intérieure doit lui permettre d'affronter la solitude, le travail stérile, l'adversité et les persécutions : " N'aie pas peur, mais continue a parler ; ne te tais pas car je suis avec toi. "42 La kénose43 du Christ doit le soutenir dans son dépouillement de soi, de ses biens et de sa culture, afin de s'offrir tout entier aux autres, renvoyant tout au Christ comme le Christ renvoyait tout au Pere.

Enfin, personne n'évangélise jamais pour son propre compte, mais doit rester en communion avec le peuple de Dieu tout entier44 dont il est un sarment. En bref, le missionnaire est tel parce qu'il aime le Christ, les hommes et l'Église. Le premier missionnaire, c'est le Saint45.

" Qu'ils soient un pour que le monde croie. "46

Mission et communion étant profondément intriquées, on ne peut, au-dela meme de toute considération d'efficacité47, réfléchir a la mission sans l'envisager dans une approche oecuménique. Sans indifférentisme ni confusionnisme, l'Unité des chrétiens est une exigence essentielle, a vivre concretement dans la collaboration pratique et fraternelle dans l'oeuvre annonciatrice48. Face aux menaces matérielles et spirituelles qui pesent sur le monde et l'homme, il convient d'apporter, dans la mesure du possible, une réponse oecuménique49.

" Il faut premierement que la Bonne Nouvelle soit annoncée a tous les peuples. "50

Dans Redemptoris Missio, Jean-Paul II nous le rappelle : la mission n'en est qu'a ses débuts ; des milliards de personnes ne connaissent pas le Christ. Souvenons-nous que le Seigneur offre sa grâce a tous, y compris a ceux qui paraissent Lui etre le plus étrangers, voire opposés : " J'ai constamment tendu les mains a des gens qui n'en voulaient pas, qui suivaient un mauvais chemin et n'en faisaient qu'a leur tete. "51 Rappelons-nous enfin que nous agissons souvent comme de modestes semences de l'Esprit, comme le rappelle a sa façon Saint Justin, qui ne perd pas le nord : " Et meme si nous ne parvenons a persuader qu'un petit nombre de gens, nous aurons réalisé un bénéfice considérable car, comme de bons laboureurs, nous recevrons de notre maître notre récompense. "52

La mission aboutit et commence par le contact personnel, la rencontre de l'autre, dans le respect et le désir de découvrir le Christ en l'autre, afin de le révéler a lui-meme. Dans cette rencontre de l'autre, se faisant dans la charité et le désir de communion, se rejoignent les vocations universelles de sainteté et de mission, l'une étant l'enthousiasme et le dynamisme de l'autre.

Puisse le visage du Christ transparaître en nos vies, et l'Esprit-Saint guider la mission de l'Église et la nôtre, afin que nous communiquions la joie d'etre baptisés.

" La caractéristique de toute vie missionnaire authentique est la joie intérieure qui vient de la foi. Dans un monde angoissé et oppressé par tant de problemes, qui est porté au pessimisme, celui qui annonce la Bonne Nouvelle doit etre un homme qui a trouvé dans le Christ la véritable espérance. "53

J.L. retour page principale

Le mot évangéliser signifie annoncer une bonne nouvelle. C'est la Bonne Nouvelle absolue, annoncée d'abord par Jésus. Le texte de Marc débute par une proclamation: "Commencement de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, Fils de Dieu" (1,1). C’est la Bonne Nouvelle du Regne (Mt 4,23) annoncée aux pauvres (Lc 7,22-23). Avant de quitter ses disciples, il leur dit: "Allez par le monde entier, proclamez l'Evangile a toutes les créatures" (Mc 16,15). Les mots, "évangéliser", "évangile" sont employés 122 fois dans le Nouveau Testament.

De quelle bonne nouvelle s’agit-il? La Bonne Nouvelle est que Dieu s'est fait homme, est devenu une personne comme nous: Jésus-Christ, sa vie, son ouvre de salut, son message, voila la grande nouvelle. Comment la connaître? Comment la transmettre a d'autres?

Les Actes des Apôtres racontent qu'une nuit Paul a fait un songe: un Macédonien se tenait devant lui et lui présentait une supplique: "Passe en Macédoine, viens a notre secours!" (16,9) A la suite de cette vision Paul commence une nouvelle étape de son apostolat: il entreprend son premier voyage vers l'Europe, pour y annoncer l’Evangile de Jésus-Christ. Pour Paul, c'est l'Evangile du salut (Ep 1,13), l'Evangile de la paix (Ep 6,15) qu'il est appelé a annoncer. St Paul a été un évangélisateur passionné.

Il écrivait: Annoncer l’Evangile n'est pas un motif d'orgueil pour moi, c'est une nécessité qui s'impose a moi. Malheur a moi si je n’annonce pas l'Evangile! (1 Co 9, 16). Il annonça l'Evangile non seulement dans les villes et les cités avoisinantes, mais a toutes les nations qu'il put atteindre.

L'évangélisation est la proposition du message de salut de Jésus-Christ aux hommes et aux femmes qui ne le connaissent pas. Il est indispensable d'appliquer la Bonne Nouvelle a la vie concrete, en tenant compte des conditions sociales, culturelles, économiques, politiques et religieuses dans lesquelles vivent les familles et les individus.

L’évangélisation implique une transformation des relations humaines et des mours. Le chrétien doit marquer sa différence avec la société ambiante. Le salut n’est pas seulement spirituel ou reporté dans l’au-dela. Il concerne tout l’homme.

Aujourd’hui, le contenu de l’évangélisation s’est élargi dans le sens de la lutte pour la justice et la paix, de la transformation du monde, de la tolérance et du dialogue.

D’ailleurs comment pourrait-on annoncer de maniere cohérente Jésus-Christ, le Fils de Dieu fait homme, a des peuples qui sont encore aux prises avec le probleme de la faim, de la guerre ou de l'instabilité politique et sociale ?

Tout baptisé est invité a etre "évangélisateur", d’abord ici, dans son propre milieu de vie et de travail. La foi, don de l’Esprit accueilli dans le cour du croyant et de la croyante, se propage toujours. Evangéliser, c’est aider quelqu'un a reconnaître en la personne du Christ, en sa mort et sa résurrection, en son enseignement, la vérité qui illumine sa propre vie et qui peut changer notre monde. L’Evangile est la graine qui doit etre semée et qui, en son temps, germera dans tous les domaines de l’activité humaine. Car le salut ne consiste pas a sauver des âmes isolées ou des individus. L’évangile doit etre proclamé a toute la création par toutes les activités de ceux qui ont été renouvelés par le bapteme. Ils sont le ferment qui transformera l’histoire humaine.

Certains baptisés ont toutefois une vocation missionnaire particuliere, qui les amene a quitter leur milieu d’origine pour aller proclamer la Bonne Nouvelle sous d’autres cieux, dans d’autres cultures.

Regard sur notre vie

Si nous avons rencontré vraiment Jésus, il est impossible que nous gardions pour nous une nouvelle aussi heureuse.

Aujourd’hui on parle d’une nouvelle évangélisation, de la nécessité de faire arriver le message évangélique aux hommes et femmes de notre temps, qui ont perdu leurs racines chrétiennes: comment leur annoncer la bonne nouvelle du Sauveur?

Pour aller plus loin

L'évangélisation que nous connaissons risque souvent de se réduire a de tres beaux discours, sans aucune influence sur la vie. Propose-t-elle un mode de vie distinct d'autres modes de vie?

L’annonce doit etre faite avec courage, liberté et franchise. Jésus parla ’courageusement’ (cf. Mc 8,32; Jn 7,26; 18,28).

Nous, familles chrétiennes, jeunes, enfants, membres de groupes divers, comment pouvons-nous annoncer l’Évangile dans notre monde?

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Priere

Dieu qui as envoyé ton Fils pour nous sauver

et pour faire de tous les hommes tes enfants d'adoption,

donne nous la ferveur de l'Esprit dont tu as comblé tes apôtres

des les premiers jours de l'Eglise.

Fais que l'Evangile parvienne a toutes les nations.

"Les mouvements ecclésiaux et les nouvelles communautés sont une "réponse providentielle", "suscitée par l'Esprit Saint", a la demande actuelle de nouvelle évangélisation", a affirmé le pape au cours de la veillée de Pentecôte qu'il a présidée place Saint Pierre, samedi en fin d'apres-midi.

C'est le pape lui-meme qui avait invité les fideles a cette rencontre, dimanche dernier, pour offrir, a la veille de la Pentecôte, un témoignage de la diversité des charismes présents dans l'Eglise. Environ 15.000 personnes ont participé a cette célébration des premieres vepres de la solennité de la Pentecôte.

L'idée du pape, comme il l'avait expliqué, était de renouveler l'expérience faite il y a six ans, quand pour la premiere fois dans l'histoire, des représentants de ces nouveaux mouvements et communautés s'étaient rassemblés place Saint Pierre autour du pape.

"Ce fut une extraordinaire épiphanie de l'unité de l'Eglise, dans la richesse et la diversité des charismes, que l'Esprit Saint accorde en abondance", a rappelé Jean-Paul II dans son homélie.

"Ce que j'ai fait observer alors, je le répete aujourd'hui avec force: les mouvements ecclésiaux et les nouvelles communautés sont une "réponse providentielle", "suscitée par l'Esprit Saint", a la demande actuelle de nouvelle évangélisation", pour laquelle il faut des chrétiens "murs" et des "communautés chrétiennes vivantes", a-t-il affirmé.

Le pape a tenu a saluer "de façon spéciale, les membres du "Rinnovamento nello Spirito", l'une des expressions de la grande famille du mouvement charismatique catholique". Le "Rinnovamento nello Spirito" rassemble en Italie quelque 200.000 personnes réparties dans 1.800 communautés et groupes de priere.

"Grâce au mouvement charismatique, a affirmé le Saint Pere, tant de chrétiens, hommes et femmes, jeunes et adultes, ont redécouvert la Pentecôte comme réalité vivante et présente dans leur vie quotidienne".

"Puisse la spiritualité de la Pentecôte se répandre dans l'Eglise, comme un nouvel élan de priere, de sainteté, de communion et d'annonce", a-t-il poursuivi.

"J'encourage a cet égard l'initiative intitulée "Buisson Ardent" promue par le "Rinnovamento nello Spirito", a-t-il ajouté.

"Il s'agit d'une adoration perpétuelle, jour et nuit, devant le Saint Sacrement; une invitation aux fideles a "retourner au Cénacle" afin que, unis dans la contemplation du Mystere eucharistique, ils intercedent pour la pleine unité des chrétiens et la conversion des pécheurs. Je souhaite de tout cour que cette initiative conduise un grand nombre a redécouvrir les dons de l'Esprit, qui ont leur source dans la Pentecôte", a expliqué Jean-Paul II.

Le pape encourage les fideles a etre "dociles" a l'action de l'Esprit.

"Pour cela, je vous dis également a vous : Ouvrez-vous avec docilité aux dons de l'Esprit ! Accueillez avec reconnaissance et obéissance les charismes que l'Esprit ne cesse d'accorder ! N'oubliez pas que tout charisme est donné pour le bien commun, c'est-a-dire pour le bénéfice de toute l'Eglise!".

Le pape a conclu son homélie en se tournant vers Marie.

"La Vierge en priere, Mere du Christ et de l'Eglise est au milieu de nous, les mains levées. Avec elle, nous implorons et nous accueillons le don de l'Esprit Saint, lumiere de vérité, force de paix authentique", a-t-il déclaré.

Le Renouveau Charismatique Catholique (RCC) est né en 1967, lorsqu'un groupe d'étudiants de l'Université de Duquesne (Pittsburgh, Pennsylvania, Etats-Unis) participant a une retraite, fit l'expérience de l'effusion de l'Esprit et des charismes.

Actuellement, plus de 100 millions de catholiques vivent la spiritualité du RCC. Un conseil international a été créé (ICCRS – International Catholic Charismatic Renewal Services). Il est reconnu par le Conseil pontifical pour les Laics.

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La part des laics dans la nouvelle évangélisation de l’Amérique latine

ROME, Mercredi 16 mai 2007 (ZENIT.org) - Les Laics aussi doivent faire leur part dans la nouvelle évangélisation de l’Ampérique latine, fait observer le prof. Guzman Carriquiry, sous-secrétaire du Conseil pontifical pour les Laics, uruguayen, lui-meme laic, marié, pere de famille, et au service de ce dicastere depuis 30 ans. Il participe a la Ve conférence de l’épiscopat latino-américain et des Caraibes, a Aparecida, aux côtés de nombreux autres laics.

Il a confié au micro de Radio Vatican que " c’est la premiere fois que lors d’une conférence générale, il y a aussi parmi les participants des représentants des mouvements ecclésiaux ".

Il souligne qu’il y a " une participation nourrie des laics " et cela aussi, dit-il " semble tres important " parce que " leur rôle dans la nouvelle évangélisation est fondamental " car " ils rendent témoignage au Christ, et ouvrent la voie a l’Evangile dans tous les milieux de vie et sont appelés a montrer par leur vie, leurs ouvres, le service au bien commun, que l’amour est le plus fort ".

" Je crois, ajoutait le prof. Carriquiry, que le patrimoine plus grand dans la vie des peuples latino-américains est d’avoir reçu la grande tradition catholique, le plus grand don et la plus grande responsabilité. Sans ce patrimoine, on ne réussit pas a comprendre a fond le sens de la dignité, la sagesse de la vie, la passion pour la justice, les réseaux de solidarité, l’espérance contre toute espérance, y compris la joie de vivre, qui font bouger la vie de nos peuples. Donc, le theme de la Ve conférence générale est crucial : disciples et missionnaires de Jésus Christ, afin que notre peuple ait la vie, en Lui. L’enjeu capital c’est de reprendre, re-formuler la tradition catholique a partir de l’événement de la présence du Christ dans les personnes, dans les familles, dans les peuples, pour engendrer de nouveaux disciples, de nouveaux missionnaires ".

A propos de l’appellation " continent de l’espérance " donnée par Jean-Paul II au sous-continent latino-américain, le prof. Carriquiry fait observer : " Ce patrimoine de la grande tradition catholique est la véritable espérance de la vie de nos peuples. En meme temps, 45 % des baptisés de l’Eglise catholique - qui vivent en Amérique latine - sont une espérance vivante pour l’ensemble de la catholicité. C’est un motif d’espérance pour nos peuples et pour l’ensemble de la catholicité ".

" Il est urgent que la nouvelle évangélisation encourage la recherche de Jésus lui-meme dans l’adoration eucharistique. " (Jean-Paul II)

Fervent promoteur de l’adoration eucharistique permanente, le P. Martin Lucia resitue ce culte eucharistique dans la perspective du nouvel élan missionnaire que Jean-Paul II veut donner a l’Eglise au début de ce troisieme millénaire. L’eucharistie est au centre de l’Evangile, le cour de l’Evangile. C’est pourquoi elle est au cour de l’évangélisation. A ce siecle épris de superficialité et sans horizon, l’adoration est une plongée dans le mystere pascal. L’amour de Jésus exposé dans l’hostie consacrée, et contemplé dans la foi, redonne ferveur et sagesse au missionnaire. Les multiples références aux discours de Jean-Paul II, et en particulier a la magnifique lettre encyclique " Ecclesia de Eucharistia " (2003), font de ce livre tres accessible un excellent outil didactique de catéchese eucharistique. En cette année de l’eucharistie, l’Eglise est invitée a redécouvrir que "dans ce sacrement, se résume tout le mystere de notre salut" (St Thomas d’Aquin, Somme théologique III, p. 83). Le lecteur assidu pourra faire sienne cette conviction et surtout devenir lui-meme un adorateur zélé et un missionnaire."

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D'ou vient la Nouvelle Evangélisation ?

vendredi 31 aout 2007 Par Jean-Baptiste Maillard :

La Nouvelle Evangélisation n'est pas une mouvance, un groupement de communautés ou une spiritualité particuliere. Elle n'est rien de plus que la mission éternelle de l'Eglise, comme le faisaient les apôtres des premiers temps, mais avec de nouvelles méthodes, adaptées a notre monde nouveau. Explications.

Le Christ envoie ses apôtres a tous les peuples, selon la finale de l’Evangile de Mathieu : " allez vers toutes les nations, faites des disciples, les baptisant au nom du Pere, du Fils et du Saint Esprit, leur enseignant a observer tout ce que je vous ai prescrit ". Jésus promet ensuite aux disciples et a nous : " Et je serai avec vous jusqu’a la fin du monde " (Mt 28, 19). Evangéliser, c’est répondre a cet appel du Christ a répandre l’amour de Dieu. Le message de l’Evangile doit donner au monde la révélation d’un chemin qui est aussi Vérité et Vie… Or le monde évolue, et pour répondre aux nouveaux défis de la modernité, l’annonce du message – et non pas le message lui-meme ! – doit s’adapter.

Depuis Vatican II, cette prise de conscience est encouragée par le pape Paul VI a travers plusieurs textes conciliaires dont le décret sur l’activité missionnaire de l’Eglise et le décret sur l’apostolat des laics en 1965. De ce dernier décret naîtra en 1967 le Conseil des Laics afin de promouvoir et coordonner leur apostolat. En 1974, le 4eme Synode des éveques se réunit a Rome sur le theme de " l’évangélisation dans le monde moderne ". L’histoire raconte qu’au cours d’une des sessions finales, le Rapporteur Général, un certain Karol Wojtyla, archeveque de Cracovie et consulteur au Conseil des Laics, demande la parole. Dans une intervention qui va s’avérer par la suite prophétique, le Cardinal Wojtyla propose que les recommandations du Synode des éveques soient confiées au pape de sorte que Sa Sainteté puisse désormais les prendre a son compte. Le pape accepte. Ainsi est publiée l’exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi du pape Paul VI, texte de référence sur l’évangélisation dans le monde moderne, qui explique tres bien la façon dont on doit annoncer le Christ.

Devenu pape, Jean-Paul II va naturellement donner son plein élan a cette prise de conscience de Vatican II : en 1978, il exhorte le peuple des croyants a se lancer dans une " nouvelle évangélisation, nouvelle dans son ardeur, nouvelle dans ses méthodes et dans son expression ". En 1990, pour le 25eme anniversaire du décret de Vatican II sur l’activité missionnaire de l’Eglise, le pape consacre l’encyclique Redemptoris Missio a " l’urgence de l’activité missionnaire ". Dans son introduction, Jean-Paul II écrit : " J'estime que le moment est venu d'engager toutes les forces ecclésiales dans la nouvelle évangélisation et dans la mission ad gentes. Aucun de ceux qui croient au Christ, aucune institution de l'Eglise ne peut se soustraire a ce devoir supreme : annoncer le Christ a tous les peuples ".

Depuis, l'expression " nouvelle évangélisation " est restée. Elle est régulierement employée par Benoît XVI, mais aussi par de nombreux éveques, pretres, religieux ou laics, sans désigner un groupe particulier, puisque c'est la un mouvement de fond qui anime toute l'Eglise et la régénere.

Souvent aux avant-postes d’un dynamisme ecclésial des plus audacieux, parfois mal comprise car perçue comme un discrédit de ce qui a été réalisé jusqu’ici, la nouvelle évangélisation n’est ni une mouvance, ni un puissant réseau, mais une façon nouvelle, adaptée a notre temps, d’etre témoin du Christ au cour du monde : Internet est un bon exemple, mais il y a beaucoup d'autres possibilités, chacun selon son charisme.

Comme le rappelle Paul VI dans Evangelii Nuntiandi, " la tâche d’évangéliser constitue la mission essentielle de l’Eglise " et passe nécessairement par une annonce explicite du contenu de la foi. En effet, écrit-il, " le plus beau témoignage se révelera a longue impuissant s’il n’est pas éclairé, justifié – ce que Pierre appelait donner " les raisons de son espérance " - explicité, par une annonce claire, sans équivoque, du Seigneur Jésus. La Bonne Nouvelle proclamée par le témoignage de vie devra donc tôt ou tard etre proclamée par la parole de vie. Il n’y a pas d’évangélisation vraie si le nom, l’enseignement, la vie, les promesses, le Regne, le mystere de Jésus de Nazareth Fil de Dieu ne sont pas annoncés ".

En évangélisant, il ne s’agit ni " d’embrigader les foules " ni de " faire des chrétiens ", mais de partager le trésor de la foi avec ceux qui n’y ont pas encore gouté, comme le demande l’Eglise aux catholiques du monde entier, sans prosélytisme aucun.

Enseignement catholique

Mgr Jean-Pierre Cattenoz

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TOUCHE PAS A MON EVEQUE

De grâce, un peu de respect pour l’archeveque d’Avignon

Suite a ses prises de position concernant la mission évangélisatrice de l’enseignement catholique, Mgr Jean-Pierre Cattenoz, l’archeveque d’Avignon, est régulierement pris a parti et critiqué depuis un an dans les colonnes de la presse générale ou chrétienne, mais aussi par des personnalités de l’Eglise de France. Les termes et les arguments employés sont souvent caricaturaux et déformés voire mensongers, avec des accusations erronées comme celle de restauration catholique, d’intégrisme, d’une prétendue volonté de fermer l’Eglise au monde ou de créer des forteresses chrétiennes, de rendre le catéchisme ou la messe obligatoire pour les enfants… . C’est si mal le connaître, mais chacun reconnaîtra un procédé vieux comme le monde : quand tu veux te débarrasser de ton chien, répands l’idée qu’il a la rage !

Pour qui a pris le temps d’écouter ou de lire attentivement les propos de Mgr Cattenoz, les questions posées sont bien souvent d’une grande acuité, l’identification des enjeux essentielle et le fond de sa réflexion pastorale particulierement pertinente, en ligne droite avec celle définie par Jean-Paul II pendant 25 ans, puis maintenant Benoît XVI : la " Nouvelle Evangélisation ". Que certains - simples laics, intellectuels ou pasteurs - ne soient pas d’accord, on le comprend et on le respecte (nous-meme ne partageons pas toutes ses analyses : il est bon et tres utile que cela fasse débat, mais - de grâce - que cela s’opere dans un climat respectueux et non caricatural !

Que ce soit pour l’enseignement catholique, pour les diverses pastorales diocésaines, pour l’innovation missionnaire, etc. Mgr Cattenoz prend acte que la chrétienté a bel et bien disparu, et que la mission apostolique a la maniere des Actes des Apôtres redevient comme jamais d’actualité. Oui, notre éveque ne parle pas la langue de buis et surprend dans un monde clérical et épiscopal tres feutré en apparence ! Oui, il est plus pere que mere ! Oui, il tente de faire concretement " bouger les lignes " et refuse son enfermement dans une mission de " préfet catholique " expédiant les affaires courantes d’une Eglise en perdition ! Oui, ses positions ou propos apparaissent quelquefois maladroits voire excessifs, sa maniere d’opérer peut etre perçue comme déconcertante ou dérangeante ! … Eh alors ! Jésus, le Bon Pasteur par excellence, a bien souvent bousculé ses disciples sans ménagement ou de maniere apparemment exagérée. Mgr Cattenoz ou l’art de pas " épiscopaler " en rond !

N’est ce pas la une grâce pour son diocese et l’Eglise de France ? Certes, 100 éveques français a la personnalité fougueuse et aux charismes énergiques a la maniere de Mgr Cattenoz, ça ferait un peu désordre et ce serait sans doute un traitement de choc un peu trop vif pour la fille aînée de l’Eglise, on en convient : l’épiscopat français est divers, au travers de ses charismes, de ses sensibilités et de ses différentes personnalités, heureusement !

Cependant, apres plusieurs dizaines d’années en France d’une certaine ligne pastorale, tous les observateurs ou acteurs constatent ses nombreuses lacunes et ses bien maigres fruits apostoliques, alors que la majorité de l’épiscopat français reste toujours rétif a la " Nouvelle Evangélisation ", contrairement a l’épiscopat italien ou brésilien par exemple.

Dans ce contexte, n’est-il donc pas opportun que certains éveques français tentent des approches différentes et résolument novatrices, qui ne sont pas de simples réajustements a la marge ou des replâtrages de façade ? Tout en poursuivant des pastorales classiques qui restent indispensables dans les dioceses, Mgr Cattenoz - comme d’autres de ses confreres - tente également de démultiplier des approches missionnaires renouvelées, en s’inspirant notamment de ce qui " marche ", ici ou ailleurs. Cette orientation majeure est surement le fruit de sa propre expérience ecclésiale et missionnaire, tres internationale et diversifiée ; cependant, elle semble avant tout motivée par une approche théologique et spirituelle de la mission et de l’Eglise1, donnant la primauté a l’annonce explicite du kérygme, a l’indispensable conversion profonde au Christ de ceux qui se disent disciples, a une vie chrétienne centrée sur l’Esprit-Saint, a une ecclésiologie tres missionnaire. Chez lui, il est frappant de constater combien annonce, conversion et vie dans l’Esprit ne sont pas des dogmes froids et stériles, mais bien le fruit bouleversant d’une expérience transformante et efficace de l’amour et de la foi envers le Christ Sauveur, Seigneur et Maître de nos vies.

Le Cardinal de Paris – Jean Marie Lustiger – a pendant 20 ans tracé un chemin pastoral singulier et pertinent, bien loin du qu’en dira-t-on clérical et du " galiquement correct ". Alors, a sa suite, sans encenser ni mépriser quiconque, sans lancer de mauvais proces a ceux qui tentent de défricher des voies nouvelles comme nous y invitent les papes depuis 19752, tentons avec Saint Paul d’écouter et de discerner ce que l’Esprit-Saint dit de vraiment nouveau et d’important aux Eglises et a ses pasteurs : nous en avons tant besoin au regard des immenses enjeux missionnaires et spirituels aupres des plus jeunes générations de nos contemporains, en particulier les jeunes, les couples et les familles, devenues si réfractaires a tant de preches idéologiques ou verbeux, ou a des propositions pastorales qui n’étanchent plus depuis longtemps la soif universelle d’etre retourné par l’amour du Dieu vivant.

Avec l’Esprit, " n’ayons pas peur " et tentons d’avancer au large avec les apôtres !

Alex et Maud LAURIOT PREVOST,

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Communion Saint Jean-Baptiste, Diocese d’Avignon

Initiation a la Théologie de la Nouvelle Evangélisation (1)

L’évangélisation dans le monde contemporain... En 1975, un an apres le synode sur l’évangélisation, Paul VI publiait cette exhortation apostolique " Evangelii Nuntiandi ".

Ce texte prophétique peut etre considéré comme le plus grand texte pontifical du XXe siecle pour deux raisons : il cristallise d’une part la réflexion du Concile Vatican II sur la mission prioritaire, théologique et pastorale de l’Église et marque, d’autre part, une étape importante dans la préparation de l’Église entrant dans le 3e millénaire.

Le Pere Mario Saint-Pierre de l’Institut Missionnaire de Toulon s’attache, par cette chronique, a nous en montrer toute l’actualité et l’enjeu d’un tel renouveau missionnaire ecclésial.

Jean-Paul II voit dans cette exhortation apostolique de Paul VI les bases de la nouvelle évangélisation (cf Tertio Millenio adveniente, 21) Nous comprenons l’importance de ce texte ecclésial malheureusement trop peu étudié et approfondi, parce que trop souvent considéré comme un texte purement technique dans sa facture et son style. Pourtant, le contenu d’Evangelii nuntiandi demeure profondément théologique et garde une étonnante actualité. Jean-Paul II va plus loin : il parle du theme fondamental de l’expérience ecclésiale depuis le Concile jusqu’a l’entrée dans le nouveau millénaire qui est celui de la " nouvelle évangélisation ".

Une évangélisation nouvelle : question de vie ou de mort

Beaucoup de personnes au cour de l’Église posent la question du sens de cette expression " nouvelle évangélisation ". Plusieurs la banalisent voire meme la rejettent. Pourtant, depuis bientôt pres de 25 ans, Jean-Paul II ne cesse de l’utiliser. Plus le temps avance, plus le poids de l’âge se fait sentir, plus son cri prophétique se précise dans le sens d’une urgence et d’une priorité ecclésiale fondamentale. Le vide théologique, pour ne pas parler de la stérilité de la réflexion théologique actuelle, dans lequel certains milieux intellectuels catholiques s’enlisent de plus en plus n’est pas sans lien avec ce rejet avoué ou meme silencieux de " la nouvelle évangélisation ". L’Église qui ne vit pas de la nouvelle évangélisation s’atrophie dans la paralysie desséchante du rationalisme ou dans des pratiques pastorales vides et stériles.

A l’inverse, le renouveau évangélisateur stimule, vivifie, féconde, fructifie, non seulement l’expérience pastorale, mais aussi la vie spirituelle et la réflexion théologique. Les grands penseurs théologiens du XXe siecle (je pense par exemple a De Lubac, Congar, Balthasar, tous épris d’un zele missionnaire au cour meme de leur vocation de théologiens) qui ont préparé, sans trop le savoir d’ailleurs, le grand événement du Concile Vatican II, seraient eux-memes completement abasourdis de découvrir a quel point, aujourd’hui, nous nous fermons a l’appel prophétique de Jean-Paul II sur la nouvelle évangélisation.

Il faut donc sortir la tete du sable, ne pas avoir peur de regarder la réalité telle qu’elle se présente et s’ouvrir a l’urgence d’une réflexion théologique sur la nouvelle évangélisation. Cette chronique sur Evangelii nuntiandi n’a pas d’autre but que d’éveiller la conscience ecclésiale a cette nécessité vitale, puisqu’il s’agit pour l’Église, pour nous-memes et nos communautés chrétiennes, d’une question de vie ou de mort.

Diagnostic et remede

Quelle est la nouveauté de la nouvelle évangélisation ? Question genante pour ceux qui savent pertinemment que toute l’Église, depuis qu’elle est Église, évangélise. Elle ne sait pas faire autre chose. Alors ! Si l’Église a toujours évangélisé, pourquoi insister sur la nouveauté de la " nouvelle évangélisation " ?

La réponse est tres simple. Apres de nombreux siecles de vie ecclésiale, on a réussi par des mécanismes inconnus, sournois et imprécis, des procédés ignorés, subtils et confus, a affadir le sel de l’Évangile, a placer la lumiere sous le boisseau, a structurer un état d’apostasie au cour de la pratique sacramentelle, a bénir chez des mal croyants, des non pratiquants, des pratiquants occasionnels ou ambigus une spiritualité du " chrétiennement correct ". Les pasteurs ressentent ce malaise, sans avoir toujours le courage de l’identifier et de le dénoncer. Un pessimisme dépressif gangrene la vie ecclésiale par son manque de détermination a s’engager résolument sur la voie de la nouvelle évangélisation. N’insistons pas sur ce noir tableau. Mais tournons-nous vers cette forte espérance que suscite l’engagement a l’égard de la nouvelle évangélisation.

Pour déstructurer au cour de la vie ecclésiale ces structures cancérigenes, nous avons besoin d’une bonne dose d’Evangelii nuntiandi. Ce grand texte prophétique éclaire sur ce qui constitue le cour, l’essence meme de la vie de l’Église. Il nous offre les outils de réflexion pour mettre a l’oeuvre une espérance forte, un dynamisme inépuisable pour le renouveau de l’Église. Une " vision globale " (EN, 24) de l’évangélisation est présentée avec clarté. Et n’ayons pas peur du terme " vision " qui dit bien la perspective ample, biblique, dogmatique et spirituelle de cette nouvelle évangélisation. Une " vision " qui appelle l’Esprit Saint pour que, malgré nos pauvretés et nos limites, l’Église devienne réellement ce qu’elle doit etre, " le sacrement, c’est-a-dire a la fois le signe et le moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité de tout le genre humain " (LG, 1).

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Evangelii nuntiandi nous présente les " bases " (TMA, 21) de la nouvelle évangélisation, la vision qui permet la réalisation du projet conciliaire.

Le choix du Pape : " l’évangélisation dans le monde contemporain "

En 1972, le Conseil du Secrétariat du Synode se réunit en vue de déterminer le choix du prochain theme. Les sujets nombreux et les consultations de l’épiscopat obligent a établir certains criteres. Trois sujets ont été retenus : le premier sur la famille, le deuxieme sur l’évangélisation et la justice pour la libération de l’homme, le troisieme sur la foi et le magistere. Finalement, le 3 février 1973, le Pape choisissait le sujet suivant : " L’évangélisation dans le monde contemporain ". Un document préparatoire appelé Lineamenta est proposé aux Conférences épiscopales (30 mai 1973). Suite aux nombreuses réactions, un Instrument de travail est offert pour aider les éveques qui devaient se préparer a participer au Synode (7 juin 1974).

La ligne d’orientation du Synode est profondément marquée par la nécessité de se situer dans la ligne du Concile Vatican II. Cependant les Peres synodaux seront en face d’une incontournable originalité exprimée dans la deuxieme partie du titre de ce theme, c’est-a-dire : " le monde contemporain ". Se situer dans le sillage du Concile n’était pas en soi une difficulté. Par contre, considérer ce theme dans la perspective du monde contemporain représentait quelque chose de tout a fait neuf. Des tensions n’ont pas tardé a surgir étant donné la difficulté de trouver une méthode qui pouvait faciliter le dialogue et l’échange des expériences si multiples et variées a travers le monde.

Un synode " tendu "

Ce 4e Synode a été extremement difficile pour 5 raisons majeures. D’abord, le déroulement du Synode divisé en deux temps a rapidement soulevé des difficultés d’ordre méthodologique. La premiere partie du Synode, du 27 septembre au 4 octobre, consistait a établir un bilan de l’Église universelle sur l’évangélisation. Un matériel expérimental tres abondant et une diversité de situations pouvaient difficilement permettre une juste synthese. La deuxieme partie, du 8 au 26 octobre, offrait une réflexion théologique. Le passage de l’un a l’autre, d’un échange d’expériences a un approfondissement théologique, n’a pas été facile.

Deuxieme difficulté. Ce Synode thématique était placé devant un probleme de terminologie. Ce Synode, dix ans apres le Concile, aborde plus franchement le theme de l’évangélisation selon une perspective plus ou moins déterminée. Fallait-il aborder ce theme d’un point de vue plus théologique ou plus pastoral. Quelle est la définition de l’évangélisation ? Comment peut-on utiliser ce terme ? Au seuil du Synode, le terme demeurait imprécis. Les Peres synodaux venant de plusieurs horizons et confrontés a des défis différents n’arrivaient pas a s’entendre sur une définition commune.

Troisieme difficulté. Neuf ans apres la clôture du Concile Vatican II, l’Église universelle est plus consciente d’elle-meme et des différentes revendications régionales pour le renouveau de l’Église. Un des aspects les plus surprenants du Synode, fut l’abondance des problemes qui y furent soulevés et la tres riche diversité des expériences locales. Dans le texte final qui a été rédigé a l’occasion de ce Synode, on a pu dénombrer 67 themes théologiques et pastoraux différents. A la fin de la démarche synodale, les Peres synodaux ne sont pas parvenus a voter les recommandations qui auraient pu servir au Pape.

Quatrieme difficulté. La finalité de l’expérience synodale n’était pas tout a fait claire. La vocation propre du Synode romain, institution nouvelle qui est apparue apres le Concile, s’est précisée au cours et au coeur meme de ce 4e Synode. Les Peres synodaux ont pris conscience que cette assemblée ne devait pas etre considérée comme un mini-concile. Cette assemblée est consultative. Elle permet au Pape d’approfondir un theme théologique et pastoral a l’aide du matériel des différents représentants épiscopaux du monde entier.

Cinquieme difficulté. Des tensions importantes voient le jour selon l’origine géographique des éveques. Dressons la liste. Les Asiatiques étaient sensibles au dialogue avec les religions non-chrétiennes. Les Africains cherchaient a approfondir le lien entre culture et foi et a décentrer le point de vue européen du sécularisme pour l’ouvrir a la réalité fondamentale de la premiere évangélisation. Les Sud-américains étaient préoccupés par la difficile problématique de la théologie de la libération et de la promotion humaine. Les Européens et les Nord-américains faisaient face a la sécularisation et a la déchristianisation. L’Europe de l’Est était préoccupée par le theme de l’athéisme systématique.

L’évangélisation : une réalité difficile a cerner

Une autre série de tensions peut etre mentionnée. Elle se situe dans une autre catégorie. Ces tensions ont surgi dans le contexte d’une réflexion proprement théologique sur l’évangélisation. Elles sont nombreuses. Nous ne faisons que les énumérer : la tension entre la primauté du Christ et le rôle de l’Esprit Saint dans l’évangélisation ; entre le témoignage implicite de la vie et le témoignage explicite ; entre la nécessité de l’évangélisation et le respect de la conscience libre ; le rapport entre Église universelle et Églises locales, entre le Pape et les éveques, entre le Peuple de Dieu et la hiérarchie (d’ou la question des communautés ecclésiales de base), entre unité et pluralisme, entre l’intégrité du message évangélique et la nécessaire adaptation des méthodes, entre continuité et rupture vis-a-vis des mentalités (d’ou le probleme de la conversion), entre sécularisation et religion...

Dans cette longue énumération de difficultés, une premiere constatation se manifeste avec force. L’évangélisation ne peut etre comprise d’une maniere étroite. Il s’agit d’une réalité difficile a cerner. Il faut avoir l’humilité de reconnaître, et les Peres synodaux en ont surement fait l’expérience, que l’évangélisation demeure a ce point riche et variée qu’il faut faire preuve de beaucoup de dépassement et d’humilité pour en embrasser toutes les facettes. Finalement, l’expérience du Synode aura été d’un grand secours pour écarter tout point de vue réducteur et unilatéral, mais surtout pour chercher a établir une méthode adaptée et profondément articulée afin d’éviter toute forme de simplification partisane et idéologique.

Effectivement, au coeur du Synode, une méthodologie va se mettre en place. Au début de la deuxieme partie du Synode, le 14 octobre, le cardinal Wojtyla, archeveque de Cracovie, présente une réflexion théologique qui a pour but d’orienter les discussions ultérieures. Au tout début de cette synthese théologique, le cardinal Wojtyla disait : " En écoutant ou en lisant vos interventions, j’ai été sensible a la crainte de négliger l’un ou l’autre des themes de cette donnée complexe que nous désignons sous le nom d’" évangélisation " : il est tres important de rassembler tous les traits que vous avez notés. Et il ne suffit pas de les aligner, car ils se completent mutuellement, en sorte qu’il faut les réunir pour obtenir un concept intégral d’évangélisation " (L’Église des cinq continents, 148).

" Un concept intégral d’évangélisation "... cette méthode d’intégration qui est présentée au coeur de ce Synode sera particulierement privilégiée par le Pape Paul VI pour élaborer et offrir ce grand texte d’Église qu’est Evangelii nuntiandi. Comment cette méthode suggérée par le cardinal Wojtyla est-elle appliquée dans Evangelii Nuntiandi ? Tel sera l’objet de la troisieme partie.

Septembre 1974 : les éveques du monde entier sont conviés a un 4e Synode qui, pendant un mois, planchera sur " l’évangélisation dans le monde contemporain ". Un an plus tard, Paul VI publie l’exhortation apostolique " Evangelii nuntiandi : l’évangélisation dans le monde moderne ". Pour bien la comprendre, le Pere Mario Saint-Pierre poursuit sa chronique...

Qu’est-ce qu’évangéliser ?

L’évangélisation... réalité riche, complexe et dynamique qu’on ne peut saisir d’une maniere partielle et fragmentaire. Au cours de ce Synode, Karol Wojtyla alors éveque de Cracovie, parle de la nécessité d’obtenir " un concept intégral d’évangélisation ". Dans Evangelii nuntiandi, Paul VI va particulierement appliquer cette méthodologie de l’intégration dans le chapitre 2 intitulé : " Qu’est-ce qu’évangéliser ? ". Ce chapitre présente une définition juste et complete de ce qui constitue l’action évangélisatrice de l’Église.

Il insiste sur la nécessité d’une compréhension intégrale pour " embrasser du regard tous les éléments essentiels [de l’évangélisation] " (EN, 17). Sans cette " vision globale " (EN 24), il est impossible d’avoir une compréhension convenable de l’évangélisation. Dans le dernier numéro de ce chapitre deux (EN, 24), Paul VI affirme : " L’évangélisation, avons-Nous dit, est une démarche [un processus] complexe, aux éléments variés : renouveau de l’humanité, témoignage, annonce explicite, adhésion du cour, entrée dans la communauté, accueil des signes, initiative d’apostolat. Ces éléments peuvent apparaître contrastants, voire exclusifs. Ils sont en réalité complémentaires et mutuellement enrichissants. Il faut toujours envisager chacun d’eux dans son intégration aux autres. La valeur du récent Synode a été de nous avoir constamment invités a composer ces éléments, plutôt qu’a les opposer entre eux, pour avoir la pleine compréhension de l’activité évangélisatrice de l’Église. ".

Dans le premier numéro de ce chapitre sur la " complexité de l’action évangélisatrice ", Paul VI fait non seulement référence au Synode de 1974, mais aussi aux travaux du Concile Vatican II. Les éléments variés, essentiels et complémentaires de l’évangélisation " se situent, au fond, dans la ligne de ceux que le Concile Vatican II nous a transmis, surtout dans les Constitutions Lumen gentium, Gaudium et spes et dans le Décret Ad gentes " (EN, 17). Il est difficile d’approfondir tous les liens qui existent entre les textes du Concile Vatican II et l’Exhortation apostolique de Paul VI sur l’évangélisation. Cette recherche aurait été intéressante pour montrer a quel point la lettre de Paul VI et l’expérience du Synode de 1974 sont intérieurement constitutives de l’événement concilaire. Elle nous permettrait de découvrir le noyau le plus intime du Concile Vatican II dans sa visée apostolique, missionnaire et évangélisatrice.

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Les étapes de l’ouvre missionnaire

La " complexité de l’action évangélisatrice " a toutefois déja été abordée de maniere explicite et détaillée dans le Décret sur l’Activité missionnaire de l’Église Ad gentes au chapitre deux intitulé : " L’oeuvre missionnaire elle-meme ". L’action évangélisatrice est située dans le cadre précis de la mission ad gentes. Les étapes et tous les éléments essentiels de l’évangélisation sont décrits dans le contexte missionnaire de l’implantation de nouvelles Églises particulieres. Ainsi, dans l’oeuvre missionnaire se déploie une série d’étapes :

le témoignage de la vie (n°11)

la présence de charité (n°12)

évangélisation et conversion (n°14)

formation de la communauté chrétienne (n°15)

établissement du clergé local.

Sur cette question, la lettre de Paul VI ne présente aucune originalité particuliere sinon qu’elle permet un résumé succinct des éléments essentiels de l’évangélisation, une synthese géniale de l’activité évangélisatrice tout en rappelant avec précision le but de toute action évangélisatrice.

Le but de toute action évangélisatrice

Les numéros 18-20 rappellent en quelque sorte le mandat missionnaire de l’Église. Le numéro 18 situe clairement le but visé par l’action évangélisatrice : le renouvellement de l’humanité par la conversion. A ce sujet, Paul VI s’appuie sur de tres nombreuses références bibliques. Le numéro 19 précise jusqu’ou va cette évangélisation. Il ne s’agit pas seulement d’étendre géographiquement l’Évangile de la Bonne Nouvelle mais bien de l’insérer dans toutes les spheres de l’activité humaine. Le numéro 20 insiste sur la nécessaire évangélisation des cultures. La rupture entre ces deux réalités représente pour Paul VI " le drame de notre époque ". Ici le texte de Gaudium et spes (53) est d’un tres grand secours, puisqu’il établit les balises théologiques et spirituelles pour une compréhension juste et féconde du rapport entre culture et foi. La culture garde tout son sens et toute sa richesse lorsqu’elle considere la valeur de la personne et de ses relations avec les autres personnes et avec Dieu. Est ainsi précisé le but de l’évangélisation, jusqu’ou et dans quels milieux elle pouvait s’effectuer. Le numéro 21 approfondit l’importance primordiale du témoignage de vie. Ici, nous sommes a la 2e étape premiere du processus d’évangélisation.

Numéro 22 : nécessité d’une annonce explicite, claire et sans équivoque du Seigneur Jésus. Une mise en garde est exprimée. Bien que cette annonce soit nécessaire, qu’elle occupe une place prépondérante et qu’elle prenne la forme de kérygme, de prédication ou de catéchese, l’évangélisation ne peut se réduire a un aspect unique.

Le numéro 23 indique le fruit du témoignage de vie et de l’annonce explicite qui est l’adhésion vitale et communautaire a Jésus et a l’Église, " sacrement visible du salut ".

A cette derniere expression, une note importante est donnée pour référer aux textes conciliaires de Lumen gentium, Gaudium et spes et Ad gentes. Il vaut la peine de souligner également que le terme " adhésion " dans ce seul paragraphe revient 7 fois.

Cette adhésion du coeur conduit a une 5e étape du processus d’évangélisation, c’est-a-dire a l’entrée dans la communauté suivie de l’accueil des signes (6e étape) : d’abord, le grand signe qu’est l’Église, sacrement visible du salut ; ensuite, de nombreux autres signes : l’accueil de la Parole, des sacrements, de la grâce.

Au terme de toutes ces étapes, Paul VI nous donne le critere ultime d’une action évangélisatrice réussie : " Finalement, celui qui a été évangélisé évangélise a son tour. C’est la le test de vérité, la pierre de touche de l’évangélisation. " (EN, 24).

L’evangélisation : un "processus global".Le chapitre 2 de l’Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi présente tous les éléments essentiels de l’action évangélisatrice. Paul VI résume ainsi, au numéro 24, les 7 étapes de ce processus : " renouveau de l’humanité, témoignage, annonce explicite, adhésion du cour, entrée dans la communauté, accueil des signes, initiative d’apostolat " (EN, 24).

Des criteres d’évaluation aux projets d’évaluation

Ce chapitre est tres important. Il permet un éclairage profond sur ce qu’est l’action évangélisatrice de l’Église. Tout projet d’évangélisation trouve dans ce chapitre les criteres d’évaluation fondamentaux, premiers et incontournables. Non seulement ces éléments doivent etre considérés selon leur point de vue particulier, mais aussi selon la perspective d’ensemble. Ces éléments s’articulent organiquement et se completent dans une harmonie parfaite. C’est seulement selon cette " vision globale " (EN, 24) qu’on peut envisager les points déterminants qui suivront dans les quatre autres chapitres : le contenu, les moyens, les destinataires et les ouvriers de l’évangélisation.

Il vaut donc la peine de bien comprendre ces éléments dans leur complémentarité, leur mutuel enrichissement et leur intégration réciproque. Ces éléments s’articulent d’une maniere organique. Le modele biologique peut etre d’un grand secours. Les paraboles évangéliques ne sont-elles pas une référence obligée pour saisir en profondeur l’action évangélisatrice du Christ Jésus ? La semence est semée dans le terreau culturel d’un milieu déterminé. Le témoignage de foi, d’espérance et de charité est semé avec discrétion. Plus ce témoignage de vie étend ses racines dans les profondeurs de la terre, plus le témoignage explicite et oral aura une crédibilité ou pour poursuivre l’analogie aura une ramure ample et développée. Le témoignage de vie humble et caché permet une annonce explicite, qu’elle soit kérygmatique ou catéchétique. Puis vient le temps de la floraison dans l’adhésion a la vie communautaire préparée par une conversion radicale. Enfin, il y aura la production des fruits dans un apostolat fervent. La vie de la plante nous permet de comprendre que ce processus d’évangélisation forme une totalité a travers tout son développement temporel. Il s’agit de croissance.

L’action évangélisatrice fonctionne exactement comme le développement biologique de la plante. Il faut respecter chaque étape de croissance, sans chercher a ralentir le développement ou a le provoquer de maniere artificielle. On ne peut omettre un seul des éléments puisque chacun a une valeur déterminante et essentielle pour la croissance globale. En fait, la vie de la plante est conditionnée par la dynamique de son développement a travers l’élément stable de son identité de plante. Il en est de meme pour l’évangélisation comme processus global. C’est pour cela qu’il est si difficile d’atteindre " la pleine compréhension de l’activité évangélisatrice de l’Église ". Dans un monde si technocratique et bureaucratique, comment une mentalité organique d’intégration aura-t-elle sa place au coeur de l’Église pour permettre une juste conception de la mission évangélisatrice de tous les baptisés ?

Un processus global

Nous avons utilisé l’expression " processus global " pour caractériser la mission évangélisatrice de l’Église. Effectivement, dans certains textes récents du magistere ecclésial, on emploie l’expression " processus d’évangélisation ".

Le tout dernier Directoire général pour la catéchese (publié par la Congrégation pour le Clergé en 1997) situe l’activité catéchétique de l’Église dans le contexte de la mission évangélisatrice qui la précede et lui permet d’atteindre sa pleine fécondité. Apres avoir affirmé que " l’évangélisation doit etre conçue comme le processus par lequel l’Église, animée par l’Esprit, annonce et diffuse l’Évangile dans le monde entier " (n° 47), on énumere six caractéristiques ou étapes de ce processus.

Nous citons ce passage qui résume tres bien le chapitre 2 de Evangelii nuntiandi :

[Premiere étape] " - l’Église, animée par la charité, impregne et transforme tout l’ordre temporel, en assumant et en renouvelant les cultures ;

[Deuxieme étape] - elle témoigne parmi les peuples de la nouvelle maniere d’etre et de vivre qui caractérise les chrétiens ;

[Troisieme étape] - elle proclame explicitement l’Évangile, au moyen de la ‘‘premiere annonce’’, en appelant a la conversion ;

[Quatrieme étape] - elle initie a la foi et a la vie chrétienne, par la ‘‘catéchese’’ et les ‘‘sacrements d’initiation’’, ceux qui se convertissent a Jésus-Christ, ou ceux qui recommencent a marcher a sa suite, en incorporant les uns et les autres dans la communauté chrétienne ;

[Cinquieme étape] - elle développe sans arret le don de la communion chez les fideles, par l’éducation permanente de la foi (homélies, autres formes du ministere de la Parole), les sacrements et l’exercice de la charité ;

[Sixieme étape] - elle ne cesse de promouvoir la mission, en envoyant tous les disciples du Christ annoncer l’Évangile, en paroles et en oeuvres, dans le monde entier. "

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La vision intégrale de l’évangélisation

Ce texte nous révele que le processus d’évangélisation implique une méthode d’intégration puisqu’il s’agit de développer une :

Vision globale : les éléments ne sont pas opposés mais complémentaires.

Vision de totalité : chaque élément est lié a tous les autres éléments et permet a tous ces éléments d’etre vivifiés.

Vision organique : chaque élément contient en quelque sorte l’ensemble des éléments ; l’évangélisation implique en meme temps chaque élément de l’ensemble et la totalité de l’ensemble, ie que chaque élément doit etre évangélisateur sans prétendre etre a lui seul l’évangélisation et que dans ce processus il y a un acte spécifique, premier, déterminant et essentiel d’évangélisation pour la vitalité de toutes les autres étapes de la vie ecclésiale.

Vision dynamique : dans " l’unité d’un seul mouvement ", il s’agit d’une " activité " qui unifie l’Église et lui donne vie.

La vision intégrale de l’évangélisation est donc plus qu’une méthode. Il s’agit d’une réalité vivante, biologique, organique. En ce sens, l’activité évangélisatrice peut etre qualifiée de prioritaire, essentielle, fondamentale, urgente et " exclusive ". Oui, " exclusive " parce qu’intégrative, parce qu’elle seule, selon le mandat missionnaire confié par le Christ ressuscité a toute l’Église (il s’agit bien d’un mandat de re-création), permet la vie et la fécondité de toute l’Église et de toutes les activités ecclésiales. Oui, exclusive, dans la mesure ou nous saisissons bien le sens de l’intégration.

Le point de vue global de l’exhortation apostolique est porteur d’une signification profonde : il nous aide, non seulement a mieux comprendre ce qu’est l’évangélisation a travers ses axes fondamentaux, mais aussi a développer une méthode pastorale concrete.

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Le plan de l’Exhortation

Quelle est la structure de cette Exhortation apostolique ?

Ce point de vue global est porteur d’une signification profonde : le plan nous aide, non seulement a mieux comprendre ce qu’est l’évangélisation a travers ses axes fondamentaux, mais aussi a développer une méthode pastorale dans la maniere de regarder la réalité qui s’offre a nous pour y apporter la lumiere de l’Évangile. En voici les titres de chapitres :

Chapitre 1 - Du Christ évangélisateur a une Église évangélisatrice

Chapitre 2 - Qu’est-ce qu’évangéliser ?

Chapitre 3 - Le contenu de l’évangélisation

Chapitre 4 - Les voies de l’évangélisation

Chapitre 5 - Les destinataires de l’évangélisation

Chapitre 6 - Les ouvriers de l’évangélisation

Chapitre 7 - L’esprit de l’évangélisation

De cette perspective trinitaire enracinée dans le terreau biblique, nous pouvons alors définir le sens profond et complexe de l’évangélisation et déterminer quels sont ses buts ultimes. Ce sera l’objet du 2e chapitre qui déploiera le processus d’évangélisation dans ses éléments majeurs. Les 5 chapitres suivants sont d’une facture, je dirais, plus " méthodique ". Le 3e chapitre sur le contenu de l’évangélisation traite du message inaltérable de l’Évangile et de la nécessité de le transmettre en tenant compte de la question de la liberté et de la promotion humaines. Le 4e chapitre sur les voies de l’évangélisation déploie les moyens concrets a utiliser : témoignage de vie, prédication, catéchese, mass media, sacrements, piété populaire. Le 5e chapitre sur les destinataires donne des consignes utiles pour mieux considérer ceux a qui s’adressent l’évangélisation : premiere annonce, les athées, les non croyants, les non chrétiens, les non pratiquants. Dans ce chapitre, on aborde la question des communautés ecclésiales de base. Le 6e chapitre sur les ouvriers de l’évangélisation montre comment l’Église tout entiere est missionnaire, dans le respect des différents charismes et états de vie : le successeur de Pierre, les éveques, les pretres, les religieux, les laics, la famille, les jeunes. Enfin, le 7e chapitre sur l’esprit de l’évangélisation développe une spiritualité de la mission évangélisatrice qui exige le développement d’une vie de sainteté animée par l’Esprit Saint, agent principal de l’évangélisation.

Une perspective trinitaire

Bien que, dans le titre du dernier chapitre, le mot " esprit " porte un " e " minuscule, nous pouvons, tout en étant fidele au contenu de pensée, le remplacer par un " E " majuscule, indiquant ainsi la place déterminante de l’Esprit Saint. Ainsi, les deux personnes de la Trinité qui portent une mission dont la source originelle s’enracine dans le coeur bienveillant du Pere, c’est-a-dire le Christ et l’Esprit-Saint, encadrent d’une maniere harmonieuse et significative cette Exhortation apostolique de Paul VI. Quand nous saisissons cet ensemble englobant dans la perspective du mystere de la Trinité, nous nous situons en droite ligne dans la visée théologique du Concile Vatican II : " Par nature, l’Église pérégrinante est missionnaire, puisque elle-meme tire son origine de la mission du Fils et de la mission du Saint-Esprit, selon le dessein de Dieu le Pere " (Ad gentes, 2).

Nous pouvons donc affirmer que Evangelii nuntiandi applique la méthode d’intégration selon la perspective trinitaire, puisque la structure englobante (christologique et pneumatologique) est déja révélatrice de la dynamique profondément théologique et dogmatique de l’action évangélisatrice de l’Église.

Le Christ, premier évangélisateur...

Nous pouvons souligner que la perspective christologique dans les travaux préparatoires au synode a été presque mise de côté. Ici, dans la lettre de Paul VI, elle vient en tete de la réflexion. Cela n’est pas le fruit du hasard. Sans la perspective du Christ premier évangélisateur, il aurait été impossible d’établir une réflexion synthétique sur l’activité missionnaire de l’Église.

En effet, le Christ Jésus, contemplé et médité au coeur des Évangiles, nous révele les secrets de l’évangélisation. Le Christ envoyé par le Pere a donné a son Église l’Esprit Saint pour la fécondité de l’évangélisation. Sans le Christ uni a son Église, impossible de saisir cette vision trinitaire du mystere de l’évangélisation. Ce point de vue est nettement biblique.

... pleinement habité par l’Esprit-Saint

Du dernier chapitre, nous revenons au premier. Il faut meme soutenir que ce dernier chapitre s’enracine dans le premier. 1er paragraphe de ce chapitre 1er : " Le témoignage que le Seigneur donne de lui-meme et que saint Luc a recueilli dans son Évangile -" Je dois annoncer la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu "- a sans doute une grande portée, car il définit d’un mot toute la mission de Jésus : " Pour cela j’ai été envoyé ". Ces paroles prennent toute leur signification si on les rapproche des versets antérieurs ou le Christ venait de s’appliquer a lui-meme le mot du prophete Isaie : " L’Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu’il m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres " (EN 6).

" L’Esprit du Seigneur est sur moi " : voila l’affirmation majeure qui permet de saisir une clé déterminante dans la lecture de cette Exhortation apostolique. Le Christ est " le tout premier et le plus grand évangélisateur " (EN 7), parce qu’il est pleinement habité par l’Esprit Saint. Ce qui aurait pu etre considéré comme source d’une tension supplémentaire, c’est-a-dire vu comme une sorte d’opposition entre le Christ et l’Esprit Saint, doit etre ici completement écarté. Déja, dans le premier chapitre fortement christologique, se profile la personne de l’Esprit Saint.

Pas d’évangélisation sans cette perspective trinitaire

Cette intégration de la christologie et de la pneumatologie revient au numéro 75 de Evangelii nuntiandi. Paul VI affirme : " Il n’y aura jamais d’évangélisation possible sans l’action de l’Esprit Saint " (EN 75). Remarquons que le verbe de cette phrase est au futur. L’Église peut donc tourner son regard vers le passé pour constater comment a agi l’Esprit Saint. C’est ce que fait Paul VI en allant au coeur du récit évangélique pour nous faire découvrir comment le premier et le plus grand évangélisateur, Jésus Christ, tel qu’on l’a vu dans le premier chapitre, est habité par l’Esprit Saint dans sa mission d’évangélisation. En terme savant, on pourrait dire qu’il n’y a pas d’évangélisation possible sans cette christo-pneumatologie ; en termes plus simples, sans voir la profonde union du Christ et de l’Esprit Saint dans l’agir évangélisateur.

Lisons ce passage extraordinaire de Paul VI, profondément imprégné de paroles bibliques : " Il n’y aura jamais d’évangélisation possible sans l’action de l’Esprit Saint. Sur Jésus de Nazareth, l’Esprit descend au moment du bapteme lorsque la voix du Pere -’’Tu es mon Fils bien-aimé, tu as toute ma faveur’’ [Mt 3,17]- manifeste de façon sensible son élection et sa mission. C’est ’’conduit par l’Esprit’’ qu’il vit au désert le combat décisif et la supreme épreuve, avant de commencer cette mission [Mt 4,1]. C’est ’’avec la puissance de l’Esprit’’ [Lc 4,14] qu’il revient en Galilée et inaugure a Nazareth sa prédication, s’appliquant a lui-meme le passage d’Isaie : ’’L’esprit du Seigneur est sur moi’’. ’’Aujourd’hui, proclame-t-il, cette Écriture est accomplie’’ [Lc 4,18-21 ; Is 61,1]. Aux disciples qu’il est sur le point d’envoyer, il dit en soufflant sur eux : ’’Recevez l’Esprit Saint’’ [Jn 20,22] " (EN 75).

La mission évangélisatrice de l’Eglise : en union au Christ et sous l’action de l’Esprit-Saint

Ce meme principe de l’union du Christ et de l’Esprit Saint s’étend sur le mystere de l’Église dans sa mission d’évangélisation. Chaque chrétien est appelé a s’unir au Christ et a expérimenter l’action de l’Esprit pour une évangélisation efficace. Le livre des Actes de Apôtres est abondamment cité pour nous faire découvrir la maniere dont l’Esprit agit pour la croissance de l’Église : " En fait, ce n’est qu’apres la venue du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte, que les Apôtres partent vers tous les horizons du monde pour commencer la grande oeuvre d’évangélisation de l’Église, et Pierre explique l’événement comme la réalisation de la prophétie de Joël : ’’Je répandrai mon Esprit’’ [Ac 2,17]. Pierre est rempli de l’Esprit Saint pour parler au peuple de Jésus Fils de Dieu [Ac 4,8]. Paul, lui aussi, ’’est rempli de l’Esprit Saint’’ [Ac 9,17] avant de se livrer a son ministere apostolique, comme l’est Étienne lorsqu’il est choisi pour la diaconie et plus tard pour le témoignage du sang [Ac 6,5-10 ; 7,55]. L’Esprit qui fait parler Pierre, Paul ou les Douze, inspirant les paroles qu’ils doivent prononcer, tombe aussi ’’sur ceux qui écoutent la Parole’’ [Ac 10,44]. C’est grâce a l’appui du Saint-Esprit que l’Église s’accroît [Ac 9,31]. Il est l’âme de cette Église. C’est lui qui explique aux fideles le sens profond de l’enseignement de Jésus et son mystere. Il est celui qui, aujourd’hui comme aux débuts de l’Église, agit en chaque évangélisateur qui se laisse posséder et conduire par lui, et met dans sa bouche les mots que seul il ne pourrait trouver, tout en prédisposant aussi l’âme de celui qui écoute pour le rendre ouvert et accueillant a la Bonne Nouvelle et au Regne annoncé " (EN 75).

Cette clé de lecture est déterminante pour la compréhension de toute l’exhortation apostolique. Le lecteur qui voudra lui-meme aborder ce grand texte de Paul VI, ne pourra jamais la mettre de côté. Bien que le premier chapitre présente le Christ évangélisateur et que le dernier chapitre aborde la place de l’Esprit Saint dans le processus d’évangélisation, ces deux chapitres cernent et impregnent tout le contenu des chapitres intermédiaires. La structure d’ensemble de Evangelii nuntiandi offre une vision intégrée du mystere chrétien, non seulement du point de vue doctrinal, mais aussi du point de vue méthodologique et pastoral. L’évangélisateur pourra retrouver son identité et évaluer son action missionnaire, en fonction de cette vision trinitaire ou le Pere envoie son Fils et l’Esprit Saint, pour le salut du monde et le développement de l’Église. Ainsi comprise, l’évangélisation consiste a faire croître, a déployer et a faire rayonner la grâce baptismale de la vie trinitaire.

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Evangelii nuntiandi

Instrument de travail

Introduction(nos 1-5)

No 1 : Pourquoi l'évangélisation est-elle un service ?

No 2 : Quelles sont les citations bibliques utilisées qui justifient le fait que l'Église accomplit " son office de messagere de la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ " ?

Quel est le principal objectif du Concile Vatican II ?

Nos 2 et 3 : Comment parle-t-on de " nouvelle évangélisation " ?

Nos 1 et 3 : Quel est le devoir et la mission du Pape dans l'évangélisation ?

No 4 : Le Pape lui-meme pose 3 questions brulantes :

-- Qu'est devenue, de nos jours, cette énergie cachée de la Bonne Nouvelle, capable de frapper profondément la conscience de l'homme ?

-- Jusqu'a quel point et comment cette force évangélique est-elle en mesure de transformer vraiment l'homme de ce siecle ?

-- Suivant quelles méthodes faut-il proclamer l'Évangile pour que sa puissance soit efficace ?

Et il pose une question fondamentale :

Apres le Concile et grâce au Concile, qui a été pour elle une heure de Dieu en ce tournant de l'histoire, l'Église se trouve-t-elle, oui ou non, plus apte a annoncer l'Évangile et a l'insérer dans le cour de l'homme avec conviction, liberté d'esprit et efficacité ?

No 5 : A qui s'adresse l'Exhortation apostolique post-synodale Evangelii nuntiandi ?

Quels moyens privilégions-nous pour une réflexion sur l'évangélisation ?

Avons-nous créé des temps de formation du Peuple de Dieu afin de le rendre apte a proclamer le message évangélique ?

Y aurait-il de nouveaux moyens a exploiter ?

Quelles sont les caractéristiques du " message évangélique " ?

Énumérer les raisons qui font que la " présentation du message évangélique " n'est pas facultative pour l'Église ?

CHAPITRE I

Du Christ évangélisateur une Église évangélisatrice(nos 6-16)

No 6 : Qu'est-ce qui définit toute la mission du Christ ? Qu'est-ce qui compose l'activité évangélisatrice de Jésus ?

No 7 : Quelles références bibliques nous permettent d'affirmer que Jésus est " le tout premier et le plus grand évangélisateur " ?

En quoi l'impossibilité d'établir une " synthese " sur l'évangélisation de Jésus peut-elle etre positive ?

No 8 : Quel est l'évangéliste privilégié par le Pape pour décrire le " Regne de Dieu " selon le Christ ?

No 9 : Quel est le coeur de cette Bonne Nouvelle ?

No 10 : Comment peut-on recevoir le Salut et le Regne de Dieu ?

No 11 : Comment peut-on qualifier la prédication de Jésus ?

No 12 : Pourquoi les " signes " ont-ils leur importance dans l'évangélisation de Jésus ?

No 6-12 : Comment pouvons-nous approfondir notre connaissance de Jésus, de son témoignage et de sa mission pour etre de meilleurs évangélisateurs ?

No 13 : Quel est le signe par excellence de l'évangélisation de Jésus ?

No 14 : Quelle est la grande leçon que nous devons tirer du Synode de 1974 sur l'évangélisation ?

No 15 : L'Église est évangélisatrice selon 5 dimensions importantes. Ce sont des dimensions dynamiquement reliées entre elles. A la lumiere de ces caractéristiques nous pouvons évaluer la qualité évangélisatrice de nos communautés paroissiales. Faisons un examen de conscience sur la capacité de communiquer et de diffuser la Bonne Nouvelle dans nos paroisses.

- " L'Église naît de l'action évangélisatrice de Jésus et des Douze ". Cette premiere dimension insiste sur le caractere de diffusion du message, de la formation des disciples, de l'adhésion des nouveaux baptisés et de l'augmentation des sauvés ? Qu'en est-il de nos communautés paroissiales ?

-- " Née de la mission, l'Église est a son tour envoyée par Jésus ". Cette dimension souligne la transparence de l'Église comme signe de la vie de Jésus ressuscité, la qualité de son témoignage et de sa vie intime selon les 4 axes fondamentaux de la premiere communauté (fidélité a l'enseignement des apôtres, au partage, a la priere, a la fraction du pain, Ac 2, 42). Qu'en est-il de nos communautés paroissiales ?

-- " Évangélisatrice, l'Église commence par s'évangéliser elle-meme ". Cette dimension met en valeur cette capacité de renouvellement de l'Église par la conversion et la rénovation constante. Tout ceci est conçu pour évangéliser le monde avec crédibilité. C'est en fonction des trois vertus théologales que l'Église vit un renouveau constant, puisqu'elle est " communauté de croyants, communauté de l'espérance vécue et communiquée, communauté d'amour fraternel ". Qu'en est-il de nos communautés paroissiales ?

-- " L'Église est dépositaire de la Bonne Nouvelle a annoncer ". Cette dimension insiste sur le fait que l'Église est responsable du dépôt de la foi qu'elle doit préserver pour le communiquer. Nos paroisses ont-elles la nette conscience de posséder ce trésor de foi pour le transmettre ?

-- " Envoyée et évangélisée, l'Église elle-meme envoie des évangélisateurs ". Cette dimension manifeste que les évangélisateurs n'ont pas a transmettre leurs idées ou leur personne. Ils ne sont pas " propriétaires absolus " de l'Évangile. Dans nos paroisses, qui est évangélisateur ? Qui a été formé a l'évangélisation ? Qui a reçu le mandat d'évangéliser ?

No 16 : Y a-t-il possibilité de questionner l'attitude de ceux qui se réclament du Christ mais ne veulent rien savoir de l'Église ?

Sommes-nous portés a choisir ce qui fait notre affaire dans l'Église ?

Aimons-nous l'Église comme le Christ l'a aimée (Ep 5, 25) ?

En quoi notre amour de l'Église joue-t-il un rôle essentiel dans l'évangélisation ?

CHAPITRE IIretour page principale

Qu'est-ce qu'évangéliser ?(nos 17-24)

No 17 : L'évangélisation est une " réalité riche, complexe et dynamique ". Quels sont les textes conciliaires de Vatican II qui peuvent nous aider a ne pas perdre de vue l'ensemble des éléments essentiels de cette réalité ?

No 18 : Quand peut-on dire que l'évangélisation atteint son but ?

Quels sont les deux mots importants qui révelent le changement intérieur de l'homme évangélisé ?

No 19 : Jusqu'ou va l'évangélisation ?

No 20 : Comment s'articulent " Évangile " et " culture " ?

A quelle condition fondamentale peut-on dire que l'évangélisation des cultures est réussie ?

No 21 : Le témoignage des chrétiens s'exerce ou ?

Le témoignage des chrétiens s'exerce comment ?

Que doit susciter en tout premier lieu le témoignage des chrétiens ?

A qui s'adresse ce témoignage des chrétiens ?

Qui est appelé a ce témoignage ?

No 22 : En quoi le " témoignage de vie " demeure-t-il insuffisant ?

Que comporte l'annonce explicite ?

A quoi sommes-nous portés a confondre l'évangélisation ?

No 23 : Quel est le mot qui revient le plus souvent dans ce paragraphe ? Pourquoi ?

Le " signe de la transformation, le signe de la nouveauté de vie " suscité par une évangélisation authentique c'est d'etre uni a la communauté des fideles : " l'Église, sacrement visible du salut ". Que veut dire cette expression ?

No 24 : Quel est le test de vérité, quelle est la pierre de touche de l'évangélisation ?

Selon quelle perspective, avec quel regard pouvons-nous vraiment comprendre l'activité évangélisatrice de l'Église ?

Quels sont les sept éléments essentiels du processus d'évangélisation ? CHAPITRE III

Le contenu de l'évangélisation(nos 25-39)

No 25 : Que signifie pour nous : " contenu essentiel et éléments secondaires " ?

No 26 :Quel est le mystere de foi qui structure le contenu du témoignage chrétien ? On peut meme se demander quel sacrement est a la base de ce mystere de foi ?

No 27 : Quels sont les six éléments fondamentaux d'une évangélisation explicite ?

Qu'entend-on par salut immanent / salut transcendant ?

No 28 : Parmi les multiples aspects du contenu de la prédication lesquels méritent d'etre mis en évidence dans notre propre milieu ?

Dans Presbyterorum ordinis (no 5) on affirme : " L'eucharistie est la source et le sommet de l'évangélisation ". Cela concorde-t-il avec Evangelii nuntiandi ? Si oui, comment ?

No 29 : Pourquoi l'évangélisation ne peut pas etre conçu sans le theme de la " libération " ?

No 30 : Qui est principalement concerné par ce message de libération ?

No 31 : Pour articuler évangélisation, promotion humaine, développement et libération il y a trois niveaux a respecter. Quels sont-ils ?

No 32 : Quelle est la tentation des chrétiens d'aujourd'hui dans ce rapport évangélisation et libération ?

Quels sont les dangers pour l'Église d'une telle tentation ?

No 33 : Quelle est la raison théologique qui justifie cette mise en garde de l'Église sur le rapport évangélisation et libération ?

No 34 : Jusqu'ou doit aller l'évangélisation pour éviter une vision réductrice de la libération de l'homme ?

No 35 : Quels sont selon l'Église les véritables criteres d'une libération politique ?

No 36 : Quelle importance prennent pour nous les " structures " par rapport a la " conversion du coeur " ?

Comment certaines Églises locales peuvent-elles etre asservies par des structures qui empechent une réelle évangélisation ?

No 37 : Pourquoi la violence doit etre exclue dans ce chemin de libération ?

No 38 : Comment l'Église peut-elle d'une maniere authentique collaborer a la libération de l'homme ?

Comment peut-on concrétiser ce message de libération dans notre propre milieu ? '

No 39 : Comment peut-on affirmer que la " liberté religieuse " est un probleme toujours actuel ?

CHAPITRE IVretour page principale

Les voies de l'évangélisation(nos 40-48)

No 40 : Comment peut-on parler " d'adaptation " dans notre façon d'évangéliser ?

No 41 : Quel est le " premier moyen d'évangélisation " et pourquoi ?

Quels sont les qualités d'un authentique témoin ?

No 42 : Quel est le texte de Paul qui permet de souligner la nécessité de la prédication dans l'évangélisation ? Quelles sont les étapes successives de cette loi paulinienne ?

Pourquoi la civilisation d'aujourd'hui semble dévaloriser la " parole " ?

Quelles sont les solutions préconisées par l'Église ?

No 43 : Quelle qualité est particulierement exigée pour lire dans les événements le message de Dieu ?

Que faisons-nous de concret pour améliorer l'homélie, instrument valable et tres adapté d'évangélisation ?

Quelles devraient etre les qualités du prédicateur ?

Quelles sont les qualités de l'homélie qui sont le plus en souffrance actuellement ?

No 44 : Dans une perspective d'évangélisation, que doit viser l'enseignement catéchétique ?

No 45 : Quelle est la principale difficulté que comporte le moyen des communications sociales dans l'activité d'évangélisation ?

No 46 : Comme l'affirme Paul VI : " Y aurait-il au fond une autre maniere de livrer l'Évangile, que de transmettre a un autre sa propre expérience de la foi ? " Pourquoi le contact de personne a personne est si important dans le processus d'évangélisation ?

Comment Jésus a-t-il vécu ce contact personnel avec Nicodeme (Jn 3, 1-21), Zachée (Lc 19, 1-10), la Samaritaine (Jn 4, 1-42), Simon le Pharisien (Lc 7, 36-50) ? Connaissons-nous d'autres passages bibliques qui manifestent l'importance de ce contact personnel ?

No 47 : Quel est le rôle de l'évangélisation dans la sacramentalisation ?

Quel est le rôle de la sacramentalisation dans l'évangélisation ?

No 48 : Quelles sont les limites de la " religiosité populaire " ?

Pourquoi l'Église préfere-t-elle parler de " piété populaire " ? CHAPITRE Vretour page principale

Les destinataires de l'évangélisation(nos 49-58)

No 49 : Quels sont les deux événements relatés dans les Actes des Apôtres qui ont poussé l'Église a prendre au sérieux la parole de Jésus " Allez par le monde entier, proclamez l'Évangile a toutes les créatures " (Mc 16, 15) ?

No 50 : Que faisons-nous pour garder espérance dans notre mission d'évangélisation malgré les difficultés présentes ?

No 51 : A quels moyens devons-nous recourir pour évangéliser et " pré-évangéliser " ?

No 52 : Quels sont les types de personnes qu'on peut considérer comme vivant dans une situation de déchristianisation ?

No 53 : Quelles attitudes devons-nous avoir devant les religions non-chrétiennes ?

No 54 : Pourquoi et comment l'Église doit-elle tenir compte des fideles dans ce contexte d'évangélisation ?

No 55 : Comment distingue-t-on " sécularisme " et " sécularisation " ?

Peut-on déceler une valeur positive du " sécularisme " et de " l'athéisme anthropocentrique " ?

No 56 : Comment expliquer le phénomene des non pratiquants aujourd'hui ?

Quelles sont les résistances de l'athée et celles du non pratiquant ?

No 57 : A qui s'adresse le message évangélique ? Quelle citation biblique justifie ce point de vue ?

No 58 : Que sont les " communautés ecclésiales de base " ?

Pourquoi les communautés ecclésiales de base doivent respecter 9 criteres d'ecclésialité ?

Les communautés ecclésiales de bas sont-elles destinataires ou ouvrieres de l'évangélisation ?

CHAPITRE VIretour page principale

Les ouvriers de l'évangélisation

(nos 59-73)

No 59 : Quel est l'autre paragraphe d'Evangelii nuntiandi qui parle avec autant de clarté de la vocation propre de l'Église, de son identité la plus profonde qui est d'évangéliser ?

No 60 : Comment la double conviction se rattache-t-elle a l'action évangélisatrice de toute l'Église ?

No 61 : Quelles sont les images bibliques qui servent a justifier la perspective universaliste de l'Église ?

No 62 : Comment s'enrichissent mutuellement l'Église universelle et les Églises particulieres ?

No 63 : Dans le rapport Église universelle / Églises particulieres se profile le rapport entre la fidélité au message évangélique et la nécessité d'une daptation du langage selon la culture propre. Quelles sont les mises en garde fondamentales pour une juste compréhension de cette réalité ?

No 64 : Comment réagissent les chrétiens les plus simples a une compréhension régionaliste de l'Église ?

Quels sont les dangers pour l'Église particuliere de se couper de l'Église universelle ?

Quels sont les fruits d'un lien de communion solide entre l'Église particuliere et l'Église universelle ?

No 65 : Quel est le rôle du successeur de Pierre dans cette question du rapport entre Église universelle et Églises particuliere ?

No 66 : Comment peut-on concevoir la diversité des tâches évangélisatrices dans une Église appelée a évangéliser ?

No 67 : Dans quel domaine particulier s'applique le pouvoir plénier, supreme et universel du successeur de Pierre ?

No 68 : Quelle est l'identité la plus profonde des éveques et des pretres ?

No 69 : En quoi les religieux sont-ils des évangélisateurs efficaces et privilégiés ?

No 70 : Quelle est la tâche premiere des laics dans la mission évangélisatrice de l'Église ?

No 71 : Comment l'Église encourage-t-elle la famille a etre évangélisatrice ?

No 72 : Comment les jeunes sont-ils appelés a etre évangélisés ?

No 73 : Comment l'Église encourage-t-elle le dynamisme évangélisateur a travers la diversification des ministeres ?

Quels sont les ministeres laiques déja reconnus ?

Quels sont les moyens de formation utilisés pour permettre aux ouvriers de l'évangélisation d'augmenter en eux l'assurance indispensable mais aussi l'enthousiasme pour annoncer Jésus-Christ aujourd'hui ?

CHAPITRE VIIretour page principale

L'esprit de l'évangélisation

(nos 74-80)

No 74 : Pourquoi parler des attitudes intérieures des ouvriers de l'évangélisation ?

No 75 : Nous savons que l'Esprit Saint est " l'agent principal de l'évangélisation " et que Jésus est " le tout premier et le plus grand évangélisateur " (no 7). Comment concilier ces deux affirmations ?

Les ouvriers de l'évangélisation ne peuvent agir sans l'Esprit Saint. Parmi les exemples mentionnés dans Evangelii nuntiandi et tirés des Actes des Apôtres explicitez-en un ?

Dans quel domaine de la vie de l'Église l'Esprit Saint agit le plus ?

Comment l'Esprit Saint agit-il dans l'évangélisation ?

A quoi les Éveques du Synode de 1974 nous invitent-ils en ce qui concerne la place de l'Esprit Saint dans l'évangélisation ?

No 76 : Le monde d'aujourd'hui, en particulier les jeunes, a besoin d'évangélisateurs crédibles et de témoins authentiques. Evangelii nuntiandi insiste beaucoup sur ce theme. Quels sont les deux autres numéros de paragraphe ou il en est question ?

Quatre questions fondamentales sont posées a l'Église. " Tous sont responsables des réponses que l'on pourrait donner " :

-- Est-elle ancrée au coeur du monde et pourtant assez libre et indépendante pour s'adresser au monde ?

-- Fait-elle preuve de solidarité avec les hommes et témoigne-t-elle en meme temps de l'Absolu de Dieu ?

-- Est-elle plus ardente dans la contemplation et l'adoration et plus zélée dans l'action missionnaire, caritative, libératrice ?

--Est-elle toujours plus engagée dans les efforts qui cherchent a rétablir la pleine unité des chrétiens, laquelle rend plus efficace le témoignage commun " afin que le monde croie " ?

A ces quatre questions, Paul VI propose une réponse unique et audacieuse qui est en meme temps une exhortation. Quelle est cette réponse ?

No 77 : Quels sont les signes de division qui nuisent a l'évangélisation ?

Dans quel passage de l'Évangile nous retrouvons le " testament spirituel du Seigneur " qui montre que le sort de l'évangélisation est lié au témoignage d'unité donné par l'Église ?

No 78 : Qu'attend-on de l'évangélisateur en ce qui concerne la " parole de vérité " ?

No 79 : Quelle attitude fondamentale et essentielle l'évangélisateur doit-il développer en tout premier lieu ?

Quelles sont les principales caractéristiques de cette attitude dans l'oeuvre d'évangélisation ?

No 80 : Quels sont les signes du manque de ferveur dans l'évangélisation ?

Quels sont les alibis insidieux qui nous détournent de l'évangélisation ?

Comment proposer la vérité évangélique en respectant la conscience de nos freres ?

Quelle pensée mérite d'etre approfondie pour encourager l'évangélisation ?

Quelle attitude permet de garder la ferveur de l'esprit dans l'oeuvre de l'évangélisation ?

CONCLUSIONretour page principale

(nos 81-82)

No 81 : Quel est le programme d'action pastorale qui doit marquer toute l'Église dans sa préparation au grand Jubilé de l'an 2000 et dans son entrée dans le troisieme millénaire ?

No 82 : Quel est le titre donné a Marie pour nous encourager dans la mission d'évangéliser ? Quelle place Marie prend-elle dans la naissance de l'Église et dans son action évangélisatrice ?

Les grandes étapes de l’évangélisation

L’évangélisation -comme la sainteté a laquelle elle conduit- est un travail de longue haleine : ce travail commence sur soi-meme avant de rayonner sur les autres et il est surtout le fruit durable de communautés ecclésiales vivantes, unies et missionnaires, avant de devenir par osmose, l’ouvre de toute l’Eglise au fil des siecles.

L’Eglise du Christ, parce qu’elle est faite d’hommes, a continuellement besoin de se réformer pour etre fidele a sa mission. C’est pourquoi, a chaque époque de renouveau, l’Esprit Saint suscite des maîtres et des témoins qui entraînent l’Eglise sur le chemin d’une " nouvelle évangélisation " ; celle-ci revet alors des aspects différents selon les époques, les lieux et les cultures. Il s’agit toujours avec les force de l’Esprit Saint, de témoigner et d’annoncer le Christ. Si nous observons les nouveautés de l’Histoire, nous pouvons distinguer dans le flux et le reflux de la montée du christianisme des vagues de plus forte amplitude qui peuvent servir de reperes. Pour chaque étape, nous mettrons en relief une figure particulierement significative.

Une Bonne Nouvelle transmise de personne a personneretour page principale

A partir de l’Eglise de Jérusalem - issue de la Pentecôte et consciente de sa nouveauté par rapport a la communauté juive ou elle est née- la premiere évangélisation s’est développée dans les pays du Proche-Orient et du pourtour méditerranéen jusqu’en Mésopotamie et en Arménie a l’Est, et aux Iles Britanniques a l’Ouest. Cette époque est marquée par la persécution de la part des autorités juives et du pouvoir romain. Pierre et les apôtres, Philippe et de nombreux chrétiens, Paul apres sa conversion, ne ménagent pas leur peine, annonçant a tous la nouvelle extraordinaire et joyeuse de Dieu, venu sur la Terre ou il est mort et ressuscité, continuant de vivre au milieu de ses disciples. Cette " bonne nouvelle " attirait beaucoup de personnes qui vivaient l’expérience de la misere et de l’injustice, mais pressentait la grandeur et la bonté du vrai Dieu. C’était, dans le Christ, la découverte du créateur de l’univers, non pas lointain mais proche, parce que fait homme, et la découverte de son dessein sur les hommes, non pas abstrait mais concret et plein d’amour. C’était la révélation de la " folie " de la croix, qui change toute douleur en amour et fait de chaque moment de la vie une étape vers la plénitude du bonheur, en Dieu. C’était la découverte de l’amour réciproque, qui faisait dire aux paiens jusque dans l’arene des martyrs : " regardez comme ils s’aiment ". Si l’évangélisation est surtout le fait de pionniers, comme Paul, tous ont conscience de la mission : la vie exemplaire des premiers chrétiens attirait les contemporains de maniere capillaire et silencieuse. La " bonne nouvelle " se transmettait de l’un a l’autre par les parents, les amis, les commerçants, les voyageurs... Lorsqu’en 313 l’empereur Constantin libere l’empire de son carcan paien et reconnaît la liberté de conscience et de culte, il fait droit a une situation de fait : les forces vivent de l’empire sont devenues chrétiennes.

L’esprit chrétien pénetre mentalités et institutions

La période qui s’étend du Veme au Xeme siecle marque l’écroulement de la " chrétienté antique ", de culture gréco-romaine, et la lente formation de la " chrétienté médiévale ", de style " féodal " en Europe. A l’époque brillante des Peres de l’Eglise (IVeme siecle) succedent de longs siecles apparemment obscurs (Veme- Xeme siecle). Mais cet " hiver ", qui suit le temps des fruits murs, porte la seve d’un printemps nouveau. Le " Moyen-Âge " (entre " l’Antiquité " et les " Temps modernes ") commence avec les grandes migrations vers le sud des peuples du nord de l’Europe (Veme et VIeme siecle) et se prolonge jusqu’a l’éclosion de l’humanisme de la Renaissance (XIVeme et XVeme siecle). L’esprit chrétien survit a la chute de l’empire romain d’Occident (476) et pénetre peu a peu les mentalités et les institutions nouvelles, s’efforçant de les modeler selon l’idéal évangélique. L’évangélisation et la civilisation des " barbares " - comme on appelait les peuples nordiques qui avaient envahi l’empire- fut surtout l’ouvre des moines et des papes. Deux grandes figurent dominent cette deuxieme grande vague d’évangélisation : Benoît (vers 480 -547) e, fondateur des bénédictains, et Grégoire " le Grand " (540-604), pape. Vers l’âge de 20 ans, Benoît, originaire de Nurcie, en Ombrie, quitte Rome ou il est étudiant, pour suivre " son désir de plaire a Dieu seul ". Apres une alternance de vie solitaire et de vie commune avec des moines, Benoît émigre avec quelques disciples vers le sud. Ils entreprennent l’évangélisation de la région et construisent le monastere du Mont Cassin que Benoît gouvernera jusqu’a sa mort. L’ouvre de Saint Benoît se poursuivra a travers les siecles grâce a la " Regle ", le code de vie qu’il avait rédigé pour ses moines dont " Ora et Labora " (prie et travail) est le mot d’ordre. Les abbayes et monasteres couvrent bientôt l’Europe et deviennent des oasis de charité et de paix, des modeles et des écoles de vie sociale dans le bouillonnement des peuples du haut Moyen-Âge.

Renouveau spirituel avec Bernard, François, Dominiqueretour page principale

Apres une période assombrie par les guerres, les épidémies et la famine (fin IXeme -début XIeme siecle), l’Europe connaît une paix relative : le commerce se développe, des villes se fondent et s’agrandissent. A côté des chevaliers et des paysans, se développe la classe des bourgeois, marchands et artisans des villes et des bourgs. D’autre part, apres la rupture malheureuse du " schisme d’Orient ", entre l’Eglise de Rome et celle de Constantinople (1054), une troisieme grande vague de renouveau spirituel se prépare avec des saints comme Bernard de Clairvaux qui, en 1112, avec 30 compagnons, entre a l’abbaye de Cîteaux. L’exemple des cisterciens entraîne beaucoup de chrétiens dans le mouvement du renouveau : laics, clercs, religieux, membres de la curie romaine. Dans la foulée du VIeme concile de Latran (1215), la nouvelle évangélisation voit le jour avec " deux colonnes de l’Eglise " : François avec la pauvreté et Dominique avec la science. Face a l’absolutisme des princes et des éveques, souvent plus seigneurs que pasteurs, face a l’âpreté du gain qui provoquait tant de luttes intestines, beaucoup aspirait a une fraternité plus réelle entre les hommes.

L’incrédulité combattue par l’amour et non la force

Fils d’un riche marchand drapier d’Assise, le jeune François (1182-1226) était épris d’idéal chevaleresque, mais Dieu lui fait comprendre qu’il avait mieux a faire que de se mettre au service d’un seigneur de la terre. L’âme en fete, il se met a parcourir le pays vivant d’aumônes et prechant le pardon et la fraternité selon le cour de Dieu. A la différence des " vaudois " (pour qui seules comptaient les Ecritures, sans clergé ni sacrements) et des " cathares " ( qui voyaient le Bien et le Mal absolus se faire la guerre dans le champ clos de l’humanité), novateurs hérétiques qui divisaient la chrétienté, François ne pense pas a réformer l’Eglise mais a ressembler au Christ dans la pauvreté parfaite. Les disciples affluent : bourgeois, artisans, chevaliers, paysans, pretres. Ainsi naît la famille fransiscaine (1210). Le " poverello " lance ses freres sur les chemins du monde pour gagner les âmes au Christ : Italie, France, Espagne, Hongrie, Allemagne, Proche-Orient, Egypte, Maroc... Son influence est immense : il est a l’origine d’un nouveau style de vie chrétienne. Donnant la primauté a l’exemple sur la parole, il a rénové l’esprit missionnaire. L’incrédulité doit etre combattue par l’amour et non par la force, en prechant plutôt qu’en luttant : c’est l’abandon du style des croisades et par avance la condamnation de l’Inquisition. Le renouveau se répand dans le peuple grâce au " Tiers Ordre ". formé de milliers de chrétiens, qui ne pouvant entrer au couvent, se groupent en fraternités laiques liées a l’Ordre, pour vivre sa spiritualité et seconder son apostolat. Franciscains et dominicains ont contribué a intérioriser les convictions religieuses des fideles. L’instruction, jusqu’ alors réservée aux clercs, a progressé dans le peuple de Dieu et permis a un plus grand nombre de laics de s’exprimer, y compris sur les questions de la foi.

Premiers humanistes et Réforme

Affaiblie par le " schisme d’Occident ", l’Eglise se trouve confrontée au vaste mouvement de la Renaissance (début XVeme -fin XVIeme siecle), qui accompagne l’accroissement de la population, le développement du commerce et de la finance et les grandes inventions scientifiques et techniques. Le progres de l’imprimerie favorise la circulation des idées (1440). L’usage de la boussole renouvelle l’art de la navigation et rend possible des grands voyages d’exploration (Christophe Colomb " découvre " l’Amérique en 1422). En 1543, Nicolas Copernic élabore le systeme héliocentrique (le soleil et non la terre au centre du mouvement des planetes). Les mentalités changent, l’esprit critique se développe. Le Moyen-Âge était centré sur la religion avec une tendance a l’objectivité ; l’époque nouvelle porte son attention sur l’homme dans la subjectivité. Cependant les premiers " humanistes " sont chrétiens : Erasme, Thomas More, Guillaume Budé... comme les grands artistes : Fra Angelico, Raphaël, Michel Ange, Léonard de Vinci... Dans cette fermentation des esprits qui représente la crise de puberté du monde moderne, les responsables de l’Eglise auraient du se comporter en éducateurs, mettant leur contemporains devant l’idéal évangélique : transformer en rapport de liberté, la subordination de l’homme médiéval au principe d’autorité, travailler a intérioriser la foi dans le cour des fideles, au lieu de l’imposer... Malheureusement, ceux qui gouvernaient l’Eglise a ce moment la étaient plus ou moins impliqués dans la crise qu’ils auraient du guérir. C’est sans aucun doute les causes profondes de l’effritement de l’unité chrétienne avec Luther (en 1521), Calvin (en 1533) et Henri VIII d’Angleterre (en 1583).

Vers les autres continents

Face aux abus et aux scandales qui s’étaient répandus " de la tete aux membres ", l’Eglise connaît enfin une vague de réforme, malheureusement tardive, avec le Concile de Trente (1545-1563) et les saints, qui ont été promoteurs de son actualisation : c’est le 4eme grand mouvement de retour au sérieux de l’Evangile. L’évangélisation fait des progres en Afrique, en Asie du Sud-Ouest (Philippines) et en Amérique Latine avec des missionnaires issus d’ordre religieux anciens et nouveaux. Charles Borromée (1538-1584) est l’âme de la réforme catholique en Europe : cardinal et secrétaire d’Etat a 21 ans, jeune archeveque de Milan, il réalise en sa personne le modele du pasteur, proposé par le Concile travaillant a redonner aux pretres le gout de la priere et de l’apostolat, accomplis " avec amour " : " C’est ainsi que nous aurons la force d’engendrer le Christ en nous et chez les autres ". Il fonde plusieurs séminaires, visite régulierement les paroisses et jette les bases du célebre " catéchisme " du Concile de Trente. Parmi les nombreux fondateurs de l’époque, Ignace de Loyola (1491-1556), chevalier espagnol, comprend que Dieu le veut a son service. Il fait retraite au monastere de Monserrat, en Catalogne, donne son épée et son cheval aux moines, son bel habit a un mendiant et, simplement vetu, se rend a Manrese, une ville des environs, ou il soigne les malades de l’hôpital. C’est la qu’il rédige les " Exercices Spirituels ", fruit de sa rencontre avec Dieu. En 1528, a Paris ou il étudie, se forme le premier noyau de la " Compagnie de Jésus " (les jésuites), approuvée par le pape en 1540. La compagnie donnera des missionnaires magnifiques tels que François-Xavier (1506-1552), l’apôtre de Goa, du Malacca et du Japon ; beaucoup d’entre eux mourront martyrs.

De l’autodéfense au service de la société

Le temps qui sépare le Concile de Trente (XVIeme siecle) et le second Concile du Vatican (XXeme siecle) correspond a une période ou l’Eglise vit en autodéfense. La contestation s’est d’abord attaquée a la structure hiérarchique et sacramentelle, au nom d’une Eglise spirituelle, s’appuyant presque uniquement sur la Parole de Dieu (la justification par la " foi seule ") : ce fut l’essor du protestantisme sous tous ses aspects (XVIeme siecle). La critique s’est ensuite attaquée a la Parole de Dieu, c’est-a-dire a la Révélation au nom de la raison. La foi est mise en doute par la raison : c’est le rationalisme du XVIIIeme siecle qui triomphe avec la Révolution française (intronisation de la déesse " raison " dans la cathédrale de Paris en 1793). Enfin on nie l’existence meme de Dieu au nom d’une conception matérialiste de l’univers : c’est l’athéisme des XIXeme et XXeme siecles avec Freud, Marx, Nietzsche... Apres la " mort de Dieu ", proclamée par les athées, se profile la mort de l’humanité par une apocalypse atomique ! Durant cette période, notre monde a traversé révolutions, guerres civiles et mondiales, génocides, etc... Faces aux besoins immenses de l’humanité, l’Eglise -grâce aux congrégations nouvelles et anciennes- a continué d’éduquer la jeunesse, de secourir les pauvres, de soigner les malades, de precher des missions... Si l’Eglise a perdu son influence sur de larges couches sociales, traditionnellement catholiques, la conscience chrétienne s’est affinée et le christianisme a progressé dans le monde (2 milliards de chrétiens dont 1 milliard de catholiques). Les chrétiens " séparés " commencent a se rencontrer et avancent sur le chemin de la réconciliation, grâce au mouvement ocuménique. Avec la page de l’ouverture du monde moderne et de la premiere encyclique sociale préparée par des Papes clairvoyants comme Léon XIII (1878-1903), l’Eglise catholique connaît un renouveau spirituel et missionnaire avec le Concile de Vatican II (1962-1965) et les " mouvements ecclésiaux ", qui représentent un véritable don de Dieu pour la nouvelle évangélisation et pour l’activité missionnaire (Jean-Paul II Redemptoris Missio). L’Eglise a pris une conscience plus claire de sa nature, réalisé sa réforme (plus de collégialité a tous les niveaux) et entrepris une approche plus juste du monde contemporain.

En dialogue avec le monderetour page principale

Aujourd’hui, malgré la déchristianisation, la sécularisation et le développement des sectes nous commençons par etre portés par la " lame de fond " du retour a Dieu dans notre société. C’est la 5eme grande vague d’une " nouvelle évangélisation " qui ne fait que commencer et qui va s’amplifiant, en raison d’une convergence entre le message de l’Eglise et l’attente de l’humanité. Apres avoir vécu en autodéfense, l’Eglise n’a plus peur : elle est entrée en dialogue, tous azimuts avec le monde. Les XXIeme siecle laisse espérer qu’il sera celui de grandes découvertes spirituelles au service de la paix et de la fraternité universelle. La figure de Jean-Paul II est particulierement remarquable, lui, qui a l’imitation de l’apôtre Paul, parcourt le monde pour affermir les Eglises dans la foi et les entraîner a travailler avec lui a la régénération de l’humanité, invitant tous ses freres, les hommes, a ouvrir les portes au Rédempteur. Grâce a lui, le Pape n’apparaît plus seulement comme le directeur des catholiques , mais comme le défenseur des droits de Dieu et de chaque personne humaine. Comme Grégoire le Grand -avec l’aide des moines- a sauvé l’Eglise et la civilisation du danger des barbares en travaillant a leur évangélisation, de meme face aux idéologies modernes qui ont engendré des politiques tyranniques porteuses de tant de souffrances, Jean-paul II, secondé par le clergé, les mouvements et les communautés nouvelles ou renouvelées dans l’esprit du Concile, reporte l’Eglise a sa mission, tout en mettant la base d’un nouvel humanisme. Ce ne sont pas les idéologies mais la foi, qui transforme le monde de maniere durable et bénéfique. Les nouvelles générations, stimulées par les " Journées Mondiales de la Jeunesse " se préparent suivant le voeu de Jean-Paul II a faire des dioceses, paroisses, communautés, mouvements et associations, des " lieux et des écoles de communion " pour le monde.

Michel LEMONNIER (dominicain)

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Quelle assise théologique pour la Nouvelle Evangélisation ?

Le Pere Mario Saint-Pierre de l’Institut Missionnaire de Toulon, Québécois, docteur en théologie de l’Université de Laval réfléchit a l’assise théologique de a Nouvelle Evangélisation. Il expose l’enjeux de cette problématique et la méthode qu’il a développée, dite de " l’intégration ".

Pourquoi parler d’une " théologie de la nouvelle évangélisation " ?

Depuis le tout début de son pontificat, Jean-Paul II utilise l’expression " nouvelle évangélisation ". D’une maniere prophétique, il invite tous les baptisés et pasteurs a entrer dans cette mission essentielle, fondamentale, prioritaire et urgente pour toute l’Église. Nous connaissons bien la formule utilisée a Haiti en 1983 pour caractériser cette " nouvelle évangélisation quant a sa ferveur, ses méthodes et son expression ". Mais peu savent que le contenu théologique de cette expression se trouve dans l’exhortation apostolique post-synodale de 1975 : " Evangelii nuntiandi ". En effet, dans " Tertio Millenio Adveniente ", Jean-Paul II affirme au numéro 21 : " Le theme fondamental est celui de l’évangélisation, et meme de la nouvelle évangélisation, dont les bases ont été posées par l’exhortation apostolique Evangelii nuntiandi de Paul VI, publiée en 1975 apres la troisieme Assemblée générale du Synode des Éveques. " J’aime beaucoup citer ce texte.

Beaucoup me demandent : " Le concept de " nouvelle évangélisation " n’est-il qu’une expression a la mode ? Peut-on accorder une certaine importance théologique a cette formule ? " Comme vous le constatez, la citation de Jean-Paul II nous offre deux réponses intéressantes. Elle nous indique d’une part que le " theme fondamental " des Synodes qui se situent et s’inscrivent dans la perspective du Concile Vatican II est celui de la " nouvelle évangélisation ". D’autre part, il affirme que " les bases ont été posées par [...] Evangelii nuntiandi ". Cela est lourd de sens : l’expression a réellement et profondément un contenu théologique explicité dans " Evangelii nuntiandi ". Ce texte n’a rien perdu de sa fraîcheur et de son actualité.

A nouveau monde, nouvelle évangélisation, nouvelle théologie ?

Nous pouvons parler d’une nouvelle évangélisation dans un nouveau monde. Cela nous semble évident puisque l’Église du troisieme millénaire est particulierement appelée a se concentrer sur sa mission essentielle et fondamentale dans un contexte nouveau et inédit. Il y aurait beaucoup a dire sur ce sujet.

Il n’est en revanche pas juste de parler d’une " nouvelle théologie ". Nous n’avons pas a créer une nouvelle théologie de l’évangélisation. Le contenu de l’Évangile est toujours le meme et la nouvelle évangélisation doit trouver son chemin de réflexion non pas en elle-meme, mais au cour de l’Écriture et de la Tradition. Le Concile Vatican II s’inscrit dans cette mouvance de l’Esprit Saint qui nous invite a creuser les richesses inépuisables de la l’Écriture au cour de cette Tradition ecclésiale qui éclaire notre marche sur ce chemin nouveau. Vatican II nous ouvre des pistes insoupçonnées de réflexion sur la théologie de la nouvelle évangélisation. Nous avons lu les grands textes conciliaires. Nous avons constaté leur profondeur et leur richesse. Ils continuent a nous inspirer. Mais qui a lu les textes du Concile a la lumiere de ce qui me semble etre le concept clé, le fil conducteur théologique, pastoral et spirituel du Concile, a la lumiere de la " nouvelle évangélisation " ?

Mais puisqu’il s’agit d’une théologie de la nouvelle évangélisation, peut-on penser que la théologie puisse en quelque sorte bénéficier d’un certain renouveau ?

Je l’ai bien indiqué. Il ne s’agit pas d’inventer un nouveau contenu, d’adapter un nouvel Évangile, de créer une théologie originale pour le simple plaisir de la nouveauté. La nouvelle évangélisation s’enracine dans les profondeurs de l’Écriture et de la Tradition de l’Église. Si nous parlons d’une théologie de la nouvelle évangélisation, le caractere nouveau de cette théologie se trouverait plus particulierement dans sa méthodologie, dans sa maniere de voir et de contempler le mystere chrétien pour que l’Église puisse accomplir sa mission dans le monde d’aujourd’hui avec fécondité et efficacité. " A vin nouveau, outres neuves ". Il ne s’agit pas d’inventer une nouvelle sorte de vin, mais de permettre au vin de murir et d’atteindre sa qualité optimale. Le vin nouveau doit etre versé dans des outres neuves pour qu’il puisse vieillir dans la durée et au terme de sa maturation etre apprécié par les fins gouteurs. Il ne s’agit pas d’opposer vin nouveau et vieux vin puisque Jésus nous demande de faire en sorte que le vin nouveau vieillisse ! Par contre, il nous invite apres avoir considéré l’objectif principal et essentiel a utiliser les moyens adaptés pour accomplir cette mission. La théologie doit en quelque sorte jouer ce rôle d’outres neuves. Elle doit permettre au contenu inchangé de l’Évangile d’etre apprécié et gouté dans la joie et la ferveur de sa force renouvelante pour le monde d’aujourd’hui. Du point de vue du contenu, elle vise une réflexion de qualité, profonde et sérieuse pour exercer un discernement dans la vie ecclésiale, spirituelle et pastorale. Du point de vue de sa méthode, elle doit chercher des adaptations nouvelles pour rendre plus accessible le message chrétien, plus efficace le témoignage, plus vitalisante la vie ecclésiale. Bien sur, il ne faut pas mettre de côté les méthodes qui ont déja fait leur preuve dans l’histoire de la théologie chrétienne. Nous avons beaucoup a apprendre de ces méthodes. Mais n’y aurait-il pas d’autres méthodes théologiques plus adaptées pour rendre fécond ce ministere essentiel et fondamental de l’Évangélisation ?

Vous parlez de méthodes nouvelles pour la théologie de la nouvelle évangélisation. A quoi pensez-vous ?

En fait, je n’ai rien inventé. Je n’ai fait que découvrir ce qui est déja présent dans la réflexion conciliaire et post-conciliaire et dans le contexte de la vie ecclésiale depuis quelques décennies. J’identifie cette méthodologie par l’expression " intégration ". Ce terme m’apparaît tres important et situe bien l’enjeu de la nouvelle évangélisation. J’ai eu d’ailleurs la joie de découvrir que le cardinal de Cracovie, celui qui est devenu Pape, a abondamment utilisé cette méthode dans ses écrits philosophiques et théologiques.

Cette approche méthodologique de l’intégration est au cour de son anthropologie théologique et de son enseignement moral. Dans " Personne et acte ", l’etre de la personne humaine se révele et s’accomplit dans l’acte. Il utilise le concept de participation et la réalité de l’intégration pour unifier l’etre et l’acte de la personne. Il reprendra sensiblement le meme schéma pour développer son ecclésiologie. Dans " Aux sources du renouveau ", l’etre et la conscience de la Personne-Église - ‘‘Église, que dis-tu de toi-meme ?’’ - se révelent et s’accomplissent dans son agir, son acte de foi qui est partagé comme témoignage. Ainsi, nous comprenons que pour Karol Wojtyla la clé d’interprétation fondamentale du Concile Vatican II est la réalité théologique et pastorale du ‘‘témoignage’’. Dans " Aux sources du renouveau ", le chapitre sur le témoignage est l’axe central qui permet d’unifier dogme et pastorale et ainsi de comprendre le cour de l’ecclésiologie de Vatican II.

Jean-Paul II est l’exemple type de celui qui, formé a l’école thomiste et a la spiritualité carmélitaine, a su entrer en dialogue avec les écoles philosophiques plus contemporaines. Comment comprenez-vous sa mission et son ministere ?

Personnellement, je pense que si Jean-Paul II a un ministere pastoral et magistériel si puissant et fécond c’est en partie grâce a cette méthode d’intégration. Je dis bien en partie puisqu’il ne s’agit pas de faire de l’intégration une panacée ou une méthode démagogique. Il est intéressant de constater que non seulement Jean-Paul II l’a utilisée dans ses écrits philosophiques et théologiques que je viens de citer, mais aussi dans sa mission ecclésiale comme telle.

Ce qui me frappe particulierement c’est sa participation au Synode sur l’évangélisation en 1974. N’oublions pas que ce synode s’enlisait dans de multiples idéologies et tensions théologiques et pastorales. Ce synode a eu lieu dix ans apres la fermeture du Concile. A cette époque, toutes les tensions ont éclaté avec force. Au beau milieu de ce synode, le cardinal de Cracovie intervient et présente le fameux " Document bleu " ou il affirme dans son introduction : " En écoutant ou en lisant vos interventions, j’ai été sensible a la crainte de négliger l’un ou l’autre des themes de cette donnée complexe que nous désignons sous le nom d’" évangélisation " : il est tres important de rassembler tous les traits que vous avez notés. Et il ne suffit pas de les aligner, car ils se completent mutuellement, en sorte qu’il faut les réunir pour obtenir un concept intégral d’évangélisation " (" L’Église des cinq continents ", 148). Dans ce discours si important et malheureusement si peu connu, Karol Wojtyla met en place cette méthode de l’intégration pour réconcilier toutes les tensions qui se sont exprimées dans ce synode. Ce document est tres important puisqu’il a servi a la rédaction d’ "Evangelii nuntiandi ". D’ailleurs, celui qui lit " Evangelii nuntiandi " avec attention, y retrouvera les traces évidentes de cette méthode théologique de l’intégration.

Pouvez-vous nous expliquer comment votre parcours vous a rendu si sensible a cette approche de l’intégration pour la nouvelle évangélisation ?

Tout cela n’est pas le fruit du hasard. L’Esprit Saint nous guide en ce chemin nouveau de réflexion sur l’évangélisation. Le chantier théologique sur la nouvelle évangélisation est vaste et immense. Mon parcours théologique et pastoral m’a permis de faire des découvertes intéressantes. Tout au long de ma recherche doctorale sur la pensée du pere Hans Urs von Balthasar, je découvrais jusqu’a quel point la puissance et la profondeur de sa pensée philosophique et théologique étaient articulées elles aussi au cour de cette méthode de l’intégration. Apres avoir accompli cette recherche, j’ai été plongé dans le ministere paroissial. Au meme moment, je découvrais de nouvelles méthodes d’évangélisation que j’ai d’ailleurs eu la joie d’implanter au Québec. Mais mon réflexe et ma formation théologiques me poussaient constamment a réfléchir théologiquement sur les fondements bibliques, dogmatiques, spirituels et pastoraux de l’évangélisation. Plus j’avançais, plus je m’émerveillais de la profondeur et de la fécondité réelle de cette vision méthodologique de l’intégration. Elle est un outil tres approprié et adapté pour l’évaluation des méthodes d’évangélisation.

Vous avez étudié la théologie proposée par Hans Urs von Balthasar et publié l’ouvrage " Beauté, bonté, vérité chez Hans Urs von Balthasar " paru en 1998 aux Editions du Cerf. Qu’est-ce qui vous a séduit dans la pensée de ce théologien ?

Ce n’est pas au début que j’ai découvert la place importante de la méthode d’intégration chez Balthasar. Dans mon ouvrage, j’ai surtout étudié, comme le titre l’indique, les transcendantaux, c’est-a-dire les qualités de l’etre (beau, bien, vrai) qui ont servi a structurer l’ensemble de son ouvre, de sa grande Trilogie : " La gloire et la croix " sur le beau ; " La Dramatique divine " sur le bien ; " La Théo-logique " sur le vrai. Plus j’avançais dans mon travail, plus je découvrais chez Balthasar la puissance de cette méthode d’intégration. J’en parle un peu dans mon ouvrage, mais en fait il faudrait écrire une these uniquement sur ce theme si important.

Permettez-moi de vous présenter brievement cette méthode puisque de nombreuses personnes me posent souvent la question : " Vous parlez d’intégration, mais de quoi s’agit-il ? Comment comprendre cette méthode ? " Je réponds a la question de maniere schématique et peut-etre trop breve en indiquant les quatre caractéristiques selon le point de vue du pere Balthasar :

1- le rapport tout/parties a travers deux axiomes complémentaires : a) le tout est plus que la somme des parties b) le tout dans le fragment (" Das Ganze im Fragment " publié en français sous le titre " De l’intégration "

2- plus un etre est évolué, plus il peut intégrer des éléments en apparence opposés (La vérité est symphonique)

3- plus est fort l’acte intérieur d’un etre par lequel il se connaît, plus son rayonnement extérieur est grand (la priere contemplative)

4- le mystere de l’etre est inépuisable et se situe dans la logique du ‘‘toujours-plus’’ de l’amour (l’amour seul est digne de foi) : plus un etre se donne, plus il s’enrichit et s’épanouit.

Ces 4 caractéristiques sont profondément reliées entre elles. Il serait intéressant de lire " Evangelii nuntiandi " a la lumiere de ces caractéristiques de l’intégration et de comprendre la pertinence de cette méthode pour l’approfondissement de la théologie de la nouvelle évangélisation.

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CONFÉRENCE DE S. Em. LE CARD. JOSEPH RATZINGER SUR LE THEME DE LA NOUVELLE ÉVANGÉLISATION JUBILÉ DES CATÉCHISTES

Dimanche 10 décembre 2000

La vie humaine ne se réalise pas d’elle-meme. Notre vie est une question ouverte, un projet incomplet qu’il nous reste a achever et a réaliser. La question fondamentale de tout homme est : comment cela se réalise-t-il - devenir un homme ? Comment apprend-t-on l’art de vivre ? Quel est le chemin du bonheur ? Evangéliser signifie : montrer ce chemin - apprendre l’art de vivre. Jésus a dit au début de sa vie publique : Je suis venu pour évangéliser les pauvres (Lc 4, 18) ; ce qui signifie : j’ai la réponse a votre question fondamentale ; je vous montre le chemin de la vie, le chemin du bonheur - mieux : je suis ce chemin. La pauvreté la plus profonde est l’incapacité d’éprouver la joie, le dégout de la vie, considérée comme absurde et contradictoire. Cette pauvreté est aujourd’hui tres répandue, sous diverses formes, tant dans les sociétés matériellement riches que dans les pays pauvres.

L’incapacité a la joie suppose et produit l’incapacité d’aimer, elle produit l’envie, l’avarice - tous les vices qui dévastent la vie des individus et du monde. C’est pourquoi nous avons besoin d’une nouvelle évangélisation - si l’art de vivre demeure inconnu, tout le reste ne fonctionne plus. Mais cet art n’est pas un objet de la science - cet art ne peut etre communiqué que par celui qui a la vie - celui qui est l’Evangile en personne.

I. Structure et méthode de la nouvelle évangélisation

1. La structure

Avant de parler des contenus fondamentaux de la nouvelle évangélisation, je voudrais dire un mot a propos de sa structure et de la méthode appropriée. L’Eglise évangélise toujours et n’a jamais interrompu le cours de l’évangélisation. Elle célebre chaque jour le mystere eucharistique, administre les sacrements, annonce la parole de vie - la Parole de Dieu, s’engage pour la justice et la charité. Et cette évangélisation porte ses fruits : elle donne la lumiere et la joie, elle donne un chemin de vie a tant de personnes ; et beaucoup d’autres vivent, souvent meme sans le savoir, de la lumiere et de la chaleur resplendissantes de cette évangélisation permanente. Cependant, nous observons un processus progressif de déchristianisation et de perte des valeurs humaines essentielles qui est préoccupant. Une grande partie de l’humanité d’aujourd’hui ne trouve plus, dans l’évangélisation permanente de l’Eglise, l’Evangile, c’est-a-dire une réponse convaincante a la question : Comment vivre ?

C’est pourquoi nous cherchons, outre l’évangélisation permanente, jamais interrompue, et a ne jamais interrompre, une nouvelle évangélisation, capable de se faire entendre de ce monde qui ne trouve pas l’acces a l’évangélisation "classique". Tous ont besoin de l’Evangile ; l’Evangile est destiné a tous, et pas seulement a un cercle déterminé, et nous sommes donc obligés de chercher de nouvelles voies pour porter l’Evangile a tous.

Mais ici se cache également une tentation - la tentation de l’impatience, la tentation de chercher tout de suite le grand succes, de chercher les grands nombres. Ce n’est pas la méthode de Dieu. Pour le Royaume de Dieu, comme pour l’évangélisation, instrument et véhicule du Royaume de Dieu, est toujours valable la parabole du grain de sénevé (cf. Mc 4, 31-32). Le Royaume de Dieu recommence toujours de nouveau sous ce signe. La nouvelle évangélisation ne peut pas signifier : attirer tout de suite par de nouvelles méthodes plus raffinées les grandes masses qui se sont éloignées de l’Eglise. Non - ce n’est pas cela la promesse de la nouvelle évangélisation. La nouvelle évangélisation signifie : ne pas se contenter du fait que du grain de sénevé a poussé le grand arbre de l’Eglise universelle, ne pas penser que le fait que dans ses branches toutes sortes d’oiseaux peuvent y trouver place suffit - mais oser de nouveau avec l’humilité du petit grain, en laissant Dieu choisir quand et comment il grandira (Mc 4, 26-29). Toutes les grandes choses commencent toujours par un petit grain et les mouvements de masse sont toujours éphémeres. Dans sa vision du processus de l’évolution, Teilhard de Chardin parle du "blanc des origines" : Le début des nouvelles especes est invisible et introuvable pour la recherche scientifique. Les sources sont cachées - trop petites. Autrement dit : Les grandes réalités commencent dans l’humilité. Ne nous inquiétons pas de savoir si, et jusqu’a quel point, Teilhard a raison avec ses théories évolutionnistes ; la loi des origines invisibles dit une vérité - une vérité présente précisément dans l’agir de Dieu dans l’histoire : "Ce n’est pas parce que tu es grand que je t’ai élu, bien au contraire - tu es le plus petit des peuples ; je t’ai élu parce que je t’aime... " dit Dieu au peuple d’Israël dans l’Ancien Testament, et il exprime ainsi le paradoxe fondamental de l’histoire du salut : Certes, Dieu ne compte pas avec les grands nombres ; le pouvoir extérieur n’est pas le signe de sa présence. Une grande partie des paraboles de Jésus indiquent cette structure de l’agir divin et répondent ainsi aux préoccupations des disciples, qui attendaient du Messie bien d’autres succes et signes - des succes du genre de ceux offerts par Satan au Seigneur : Tout cela - tous les royaumes du monde - je te le donnerai... (Mt 4, 9). Certes, Paul a la fin de sa vie a eu l’impression d’avoir porté l’Evangile jusqu’aux extrémités de la terre, mais les chrétiens étaient de petites communautés dispersées dans le monde, insignifiantes selon des criteres séculiers.

En réalité, elles furent le levain qui pénetre de l’intérieur la pâte et porterent en elles l’avenir du monde (cf. Mt 13, 33). Un vieux proverbe dit : "Le succes n’est pas un nom de Dieu". La nouvelle évangélisation doit se soumettre au mystere du grain de sénevé, et ne doit pas prétendre produire tout de suite un grand arbre. Nous vivons tantôt dans la trop grande sécurité du grand arbre déja existant, tantôt dans l’impatience d’avoir un arbre plus grand, plus vigoureux - nous devons au contraire accepter le mystere que l’Eglise est a la fois le grand arbre et le grain minuscule. Dans l’histoire du salut, c’est toujours en meme temps Vendredi saint et Dimanche de Pâque...

2. La méthode

De cette structure de la nouvelle évangélisation découle aussi la méthode appropriée. Certes, nous devons utiliser de maniere raisonnable les méthodes modernes pour nous faire entendre - mieux : pour rendre la voix du Seigneur accessible et compréhensible... Nous ne cherchons pas seulement l’écoute pour nous - nous ne voulons pas augmenter le pouvoir et l’extension de nos institutions, mais nous voulons nous mettre au service du bien des personnes et de l’humanité en faisant place a Celui qui est la Vie. Cette expropriation de soi-meme, en l’offrant au Christ pour le salut des hommes, est la condition fondamentale d’un authentique engagement pour l’Evangile. "Je suis venu au nom de mon Pere et vous ne m’accueillez pas" ; qu’un autre vienne en son propre nom, celui-la vous l’accueillez" dit le Seigneur (Jn 5, 43). Le signe distinctif de l’antéchrist est de parler en son nom propre. Le signe du Fils est sa communion avec le Pere. Le Fils nous introduit dans la communion trinitaire, dans le cercle de l’amour éternel, dont les personnes sont des "relations pures", l’acte pur de se donner et de se recevoir. Le dessein trinitaire - visible dans le Fils, qui ne parle pas en son nom - montre la forme de vie du véritable évangélisateur - mieux encore, évangéliser n’est pas uniquement une façon de parler, mais une façon de vivre : vivre dans l’écoute et se faire la voix du Pere. "Car il ne parlera pas de lui-meme, mais ce qu’il entendra, il le dira" dit le Seigneur a propos de l’Esprit Saint (Jn 16, 13). Cette forme christologique et pneumatologique de l’évangélisation est en meme temps une forme ecclésiologique : le Seigneur et l’Esprit construisent l’Eglise, se communiquent dans l’Eglise. L’annonce du Christ, l’annonce du Royaume de Dieu suppose l’écoute de sa voix dans la voix de l’Eglise. "Ne pas parler en son propre nom" signifie : parler dans la mission de l’Eglise...

De cette loi de l’expropriation découlent des conséquences tres pratiques. Toutes les méthodes raisonnables et moralement acceptables doivent etre étudiées - c’est un devoir d’utiliser ces possibilités de communication. Mais les paroles et tout l’art de la communication ne peuvent atteindre la personne humaine a la profondeur a laquelle doit arriver l’Evangile. Il y a quelques années, je lisais la biographie d’un excellent pretre de notre siecle, Dom Didimo, curé de Bassano del Grappa. Dans ses notes, on trouve des paroles précieuses, fruit d’une vie de priere et de méditation. A ce propos, Dom Didimo dit par exemple : "Jésus prechait le jour, la nuit il priait". Par cette breve remarque il voulait dire : Jésus devait acquérir ses disciples de Dieu. Cela toujours valable. Nous ne pouvons pas gagner, nous, les hommes. Nous devons les obtenir de Dieu pour Dieu. Toutes les méthodes sont vides sans le fondement de la priere. La parole de l’annonce doit toujours baigner dans une intense vie de priere.

Nous devons y ajouter un élément supplémentaire. Jésus prechait le jour, la nuit il priait - mais ce n’est pas tout. Sa vie tout entiere fut - comme le montre de façon tres belle l’Evangile de saint Luc - un chemin vers la croix, une ascension vers Jérusalem. Jésus n’a pas racheté le monde par de belles paroles, mais par sa souffrance et sa mort. Sa passion est une source de vie intarissable pour le monde ; sa passion donne force a sa parole.

Le Seigneur lui-meme - en étendant et en élargissant la parabole du grain de sénevé - a formulé cette loi de fécondité dans la parole du grain de blé qui meurt, tombé en terre (Jn 12, 24). Cette loi est valable elle aussi jusqu’a la fin du monde, et - avec le mystere du grain de sénevé - elle est fondamentale pour la nouvelle évangélisation. Toute l’histoire le prouve. Il serait facile de le démontrer dans l’histoire du christianisme. Je me bornerai a rappeler ici le début de l’évangélisation dans la vie de saint Paul. Le succes de sa mission ne fut pas le fruit d’une grande habileté rhétorique ou de la prudence pastorale ; sa fécondité fut liée a sa souffrance, a sa communion dans la passion avec le Christ (cf. 1 Co 2, 1-5 ; 2 Co 5, 7 ; 11, 10 sq ; 11,30 ; Ga 4, 12-14). "Il ne lui sera donné que le signe du prophete Jonas" a dit le Seigneur. Le signe de Jonas est le Christ crucifié - ce sont les témoins, qui completent "ce qui manque aux tribulations du Christ" (Col 1, 24). Dans toutes les périodes de l’histoire, se sont chaque fois de nouveau confirmés ces mots de Tertullien : Le sang des martyrs est une semence.

Saint Augustin dit la meme chose d’une façon plus belle, en interprétant Jn 21, ou la prophétie du martyre de Pierre et le mandat de paître les brebis, c’est-a-dire l’institution de son primat, sont intimement liés. Saint Augustin commente ainsi le texte Jn 21, 16 : "Pais mes brebis", c’est-a-dire souffres pour mes brebis (Sermo Guelf. 32 PLS 2, 640). Une mere ne peut donner la vie a un enfant sans souffrir. Tout accouchement implique la souffrance, est souffrance, et le devenir chrétien est un accouchement. Ou pour le dire avec les paroles du Seigneur : le Royaume de Dieu souffre violence (Mt 11, 12 ; Lc 16, 16), mais la violence de Dieu est la souffrance, est la croix. Nous ne pouvons donner vie aux autres sans donner notre vie. Le processus d’expropriation cité plus haut est la façon concrete (exprimée sous tant de formes diverses) de donner sa propre vie. Rappelons-nous la parole du Sauveur : "...Qui perdra sa vie a cause de moi et de l’Evangile la sauvera... " (Mc 8, 35).

II. Les contenus essentiels de la nouvelle évangélisationretour page principale

1. Conversion

Pour ce qui est des contenus de la nouvelle évangélisation, il faut avant tout garder a l’esprit que l’Ancien et le Nouveau Testament sont inséparables. Le contenu fondamental de l’Ancien Testament est résumé dans le message de Jean Baptiste : Convertissez-vous ! Il n’y a pas d’acces a Jésus sans le Baptiste ; il n’est pas possible d’arriver a Jésus sans avoir répondu a l’appel de son précurseur, mieux encore : Jésus a fait sien le message de Jean dans la synthese de sa propre prédication : Repentez-vous et croyez a l’Evangile (Mc 1, 15). Le mot grec pour se convertir signifie : repenser - remettre en question son propre mode de vie et le mode de vie ordinaire ; laisser entrer Dieu dans les criteres de sa propre vie ; ne plus juger uniquement selon les opinions courantes. Se convertir signifie par conséquent : ne pas vivre comme tout le monde vit, ne pas faire ce que tout le monde fait, ne pas se sentir justifié en accomplissant des actions douteuses, ambiguës ou mauvaises par le fait que les autres font de meme ; commencer a regarder sa propre vie avec les yeux de Dieu ; donc, chercher le bien, meme s’il est dérangeant : ne pas s’en remettre au jugement des multitudes, des hommes, mais au jugement de Dieu - autrement dit : chercher un nouveau style de vie, une vie nouvelle. Tout cela n’implique pas de moralisme ; en réduisant le christianisme a la moralité, on perd de vue l’essence du message du Christ : Le don d’une nouvelle amitié, le don de la communion avec Jésus, et par la suite avec Dieu. Celui qui se convertit au Christ n’entend pas se créer une autarchie morale bien a lui, il ne prétend pas construire sa propre bonté par ses propres forces. La "Conversion" (métanoia) signifie précisément l’opposé : sortir de l’autosuffisance, découvrir et accepter son indigence - une indigence des autres et de l’Autre, de son pardon, de son amitié. La vie non-convertie est autojustification (je ne suis pas pire que les autres) ; la conversion est l’humilité de s’en remettre a l’amour de l’Autre, un amour qui devient mesure et critere de ma propre vie.

Ici nous devons également garder a l’esprit l’aspect social de la conversion. Certes, la conversion est avant tout un acte éminemment personnel, elle est personnalisation. Je me sépare de la formule "vivre comme tout le monde" (je ne me sens plus justifié par le fait que tous font ce que je fais) et je trouve devant Dieu mon propre moi, ma responsabilité personnelle. Mais la vraie personnalisation est également toujours une nouvelle et plus profonde socialisation. Le moi s’ouvre de nouveau au toi, dans toute sa profondeur, en donnant naissance a un nouveau Nous. Si le style de vie répandu dans le monde comporte un risque de dépersonnalisation, de vivre non pas sa propre vie, mais la vie de tous les autres, dans la conversion doit se réaliser le nouveau Nous du cheminement commun avec Dieu. En annonçant la conversion, nous devons aussi offrir un parcours de vie, un espace commun du nouveau style de vie. On ne peut pas évangéliser uniquement par des paroles ; l’Evangile crée la vie, il crée une communauté de parcours ; une conversion purement individuelle n’a pas de consistance...

2. Le Royaume de Dieu

Dans l’appel a la conversion est implicite - c’est meme sa condition fondamentale - l’annonce du Dieu vivant. Le théocentrisme est fondamental dans le message de Jésus, et il doit etre aussi au coeur de la nouvelle évangélisation. La parole clef de l’annonce de Jésus est : le Royaume de Dieu. Or le Royaume de Dieu n’est pas une chose, une structure sociale ou politique, une utopie. Le Royaume de Dieu est Dieu. Le Royaume de Dieu signifie : Dieu existe. Dieu vit. Dieu est présent et agit dans le monde, dans notre vie - dans ma vie. Dieu n’est pas une lointaine "cause ultime", Dieu n’est pas le "grand architecte" du déisme, qui a monté la machine du monde et qui se trouverait maintenant en dehors - bien au contraire : Dieu est la réalité la plus présente et décisive dans chaque acte de ma vie, a chaque moment de l’histoire. Dans son discours d’adieu, en quittant sa chaire a l’université de Münster, le théologien J.B. Metz a dit des choses inattendues de sa part. Metz, dans le passé, nous avait appris l’anthropocentrisme - le véritable avenement du christianisme aurait été le tournant anthropologique, la sécularisation, la découverte de la sécularité du monde. Puis il nous a appris la théologie politique - le caractere politique de la foi ; puis encore la "mémoire dangereuse" ; et enfin la théologie narrative. Apres ce cheminement long et ardu, il nous dit aujourd’hui : le vrai probleme de notre temps est la "Crise de Dieu", l’absence de Dieu camouflée par une religiosité vide. La théologie doit redevenir réellement theologia, un discours sur Dieu et avec Dieu. Metz a raison : L’unum necessarium pour l’homme est Dieu. Tout change, selon le fait que Dieu existe ou qu’il n’existe pas. Mais hélas ! - meme nous, les chrétiens, nous vivons souvent comme si Dieu n’existait pas (si Deus non daretur). Nous vivons selon le slogan : Dieu n’existe pas, et s’il existe, il n’a rien a voir. C’est pourquoi l’évangélisation doit avant tout parler de Dieu, annoncer l’unique vrai Dieu : le Créateur - le Sanctificateur - Le Juge (cf. le Catéchisme de l’Eglise catholique).

Encore une fois, il faut garder a l’esprit l’aspect pratique. On ne peut pas faire connaître Dieu uniquement avec des paroles. On ne connaît pas une personne si on ne la connaît que par oui-dire. Annoncer Dieu signifie introduire a la relation a Dieu : Enseigner a prier. La priere est la foi en acte. Et ce n’est que dans l’expérience de la vie avec Dieu qu’apparaît aussi l’évidence de son existence. C’est pour cette raison que sont si importantes les écoles de priere, de communauté de priere. Il y a complémentarité entre la priere personnelle ("dans sa propre chambre", seul devant les yeux de Dieu), la priere commune "para-liturgique" ("religiosité populaire") et la priere liturgique. Oui, la liturgie est avant tout priere ; sa spécificité consiste dans le fait que son sujet primaire, ce n’est pas nous (comme dans la priere privée ou dans la religiosité populaire), mais Dieu lui-meme - la liturgie est actio divina, Dieu agit et nous répondons a l’action divine. Parler de Dieu et parler avec Dieu doivent toujours aller de pair. L’annonce de Dieu nous guide a la communion avec Dieu dans la communion fraternelle, fondée et vivifiée par Jésus-Christ. C’est pourquoi la liturgie (les sacrements) n’est pas un theme secondaire par rapport a la prédication du Dieu vivant, mais la concrétisation de notre relation a Dieu. Dans ce contexte, qu’on me permette une observation générale sur la question liturgique. Notre maniere de célébrer la liturgie est souvent trop rationaliste. La liturgie devient enseignement ; son critere est : se faire comprendre - ce qui aboutit bien souvent a la banalisation du mystere, a la prévalence de nos paroles, a la répétition de phraséologies qui semblent plus accessibles et plus agréables aux gens. Mais il s’agit d’une erreur non seulement théologique, mais aussi psychologique et pastorale. La vague d’ésotérisme, la diffusion des techniques asiatiques de relaxation et de vide mental montrent qu’il manque quelque chose dans nos liturgies. C’est justement dans notre monde d’aujourd’hui que nous avons besoin du silence, du mystere supra-individuel, de la beauté. La liturgie n’est pas l’invention du pretre célébrant ou d’un groupe de spécialistes ; la liturgie (le "rite") a grandi selon un processus organique au cours des siecles, elle porte en elle le fruit de l’expérience de foi de toutes les générations précédentes. Meme si les participants ne comprennent probablement pas toutes les paroles, ils perçoivent leur signification profonde, la présence du mystere qui transcende toutes les paroles. Le centre de l’action liturgique n’est pas le célébrant ; le célébrant n’est pas devant le peuple en son nom propre - il ne parle pas de lui-meme et pour lui-meme, mais in persona Cristi. Ce ne sont pas les capacités personnelles du célébrant qui comptent, mais uniquement sa foi, dans laquelle transparaît Jésus-Christ. "Il faut que lui grandisse et que moi je décroisse" (Jn 3, 30).

3. Jésus-Christretour page principale

Par cette réflexion, le theme de Dieu s’est déja étendu, et il s’est concrétisé dans le theme de Jésus-Christ : C’est seulement dans le Christ et par le Christ que le theme de Dieu devient réellement concret : le Christ est l’Emmanuel, le Dieu-avec-nous - la concrétisation du "Je suis", la réponse au déisme. Aujourd’hui la tentation est grande de réduire Jésus-Christ, le Fils de Dieu, a un simple Jésus historique, a un homme pur. On ne nie pas nécessairement la divinité de Jésus, mais au moyen de certaines méthodes on distille dans la Bible un Jésus a notre mesure, un Jésus possible et compréhensible d’apres les parametres de notre historiographie. Mais ce "Jésus historique" est un artefact, il est l’image de ses auteurs, et non l’image du Dieu vivant (cf. 2 Co 4, 4s ; Col 1, 15). Ce n’est pas le Christ de la foi qui est un mythe, mais le Jésus historique, qui est une figure mythologique auto-inventée par les divers interpretes. Les deux cents ans d’histoire du "Jésus historique" refletent fidelement l’histoire des philosophies et des idéologies de cette période.

Je ne peux pas, dans le cadre de cette conférence, développer les contenus de l’annonce du Sauveur. Je voudrais seulement citer brievement deux aspects importants. Le premier est la suite du Christ - le Christ s’offre comme chemin de ma vie. Suivre le Christ ne signifie pas : imiter l’homme Jésus. Une tentative de ce genre échoue nécessairement - ce serait un anachronisme. Suivre le Christ a un but beaucoup plus élevé : ne faire qu’un avec le Christ, et arriver ainsi a l’union avec Dieu. Ce discours peut sembler étrange aux oreilles de l’homme moderne. Mais en réalité, nous avons tous soif d’infini : d’une liberté infinie, d’un bonheur sans limites. Toute l’histoire des révolutions des deux siecles passés ne s’explique que de cette façon. La drogue ne s’explique que de cette façon. L’homme ne se contente pas de solutions en de-ça du niveau de la divinisation. Et tous les chemins proposés par le "serpent" (Gn 3, 5), c’est-a-dire par le savoir du monde, échouent. Le seul chemin est la communion avec Jésus-Christ, réalisable dans la vie sacramentelle. Suivre le Christ n’est pas une question de moralité, mais un theme "mystérique" - un ensemble fait d’action divine et de réponse de notre part.

Nous rencontrons ainsi, dans le theme de la suite, l’autre centre de la christologie auquel je voulais faire allusion : le mystere pascal - la croix et la résurrection. Dans les reconstructions du "Jésus historique", le theme de la croix est en général dépourvu de signification. Selon une interprétation "bourgeoise", c’est un incident en soi évitable, sans valeur théologique ; selon une interprétation révolutionnaire, c’est la mort héroique d’un rebelle. La vérité est tout autre. La croix appartient au mystere divin - elle est l’expression de son amour jusqu’a la fin (Jn 13, 1). Suivre le Christ est participer a sa croix, s’unir a son amour, transformer notre vie, en donnant naissance a l’homme nouveau, créé selon Dieu (cf. Ep 4, 24). Celui qui oublie la croix oublie l’essence du christianisme (cf. 1 Co 2, 2).

4. La vie éternelle

Le dernier élément central de toute véritable évangélisation est la vie éternelle. Aujourd’hui, nous devons annoncer notre foi avec une nouvelle vigueur, dans la vie quotidienne. Je me bornerai a ne citer ici qu’un aspect de la prédication de Jésus, qui est souvent négligé aujourd’hui : l’annonce du Royaume de Dieu est l’annonce d’un Dieu présent, d’un Dieu qui nous connaît et nous écoute ; d’un Dieu qui entre dans l’histoire pour faire justice. Cette prédication est donc aussi l’annonce du jugement, l’annonce de notre responsabilité. L’homme ne peut pas faire uniquement ce qu’il veut. Il sera jugé. Il doit rendre compte. Cette certitude vaut pour les puissants comme pour les simples.

Lorsqu’elle est acceptée, les limites de chaque pouvoir de ce monde sont tracées. Dieu fait justice, et lui seul peut la faire en dernier. Nous y réussirons d’autant mieux, si nous sommes capables de vivre sous le regard de Dieu et de communiquer au monde la vérité du jugement. Ainsi l’article de foi du jugement, sa puissance formatrice pour les consciences, est un contenu central de l’Evangile, qui est vraiment une bonne nouvelle. Cela l’est pour tous ceux qui subissent l’injustice du monde et cherchent la justice. De cette maniere, on comprend aussi la connexion entre le Royaume de Dieu et les "pauvres", ceux qui souffrent et tous ceux dont parlent les béatitudes du discours de la montagne. Ils sont protégés par la certitude du jugement, par la certitude qu’il y a une justice. Tel est le véritable contenu de l’article sur le jugement, sur Dieu-juge : Il y a une justice. Les injustices du monde ne sont pas le dernier mot de l’histoire. Il y a une justice. Seul celui qui refuse qu’il y ait une justice peut s’opposer a cette vérité. Si nous prenons au sérieux le jugement et la gravité de la responsabilité qui en découle pour nous, nous comprenons bien l’autre aspect de cette annonce, a savoir la rédemption, le fait que par la croix, Jésus a assumé nos péchés ; que Dieu lui-meme, dans la passion de son Fils, se fait l’avocat de nos péchés, en rendant ainsi possible la pénitence, l’espérance pour le pécheur repenti, une espérance merveilleusement exprimée dans les paroles de saint Jean : devant Dieu, nous réconforterons notre coeur, quoi qu’il nous reproche. Dieu est plus grand que notre coeur, et il connaît toute chose (1 Jn 3, 19s). La bonté de Dieu est infinie, mais nous ne devons pas réduire cette bonté a une mievrerie édulcorée et privée de vérité. Ce n’est qu’en croyant au juste jugement de Dieu, en ayant faim et soif de la justice (cf. Mt 5, 6) que nous ouvrons notre coeur et notre vie a la miséricorde divine. On le voit : la foi dans la vie éternelle ne rend pas la vie terrestre insignifiante. Bien au contraire : Ce n’est que si la mesure de notre vie est l’éternité, que notre vie sur terre est grande elle aussi, et qu’elle possede une valeur immense. Dieu n’est pas le concurrent de notre vie, mais le garant de notre grandeur. Ainsi, nous revenons a notre point de départ : Dieu. Lorsque nous considérons bien le message chrétien, nous ne parlons pas de beaucoup de choses. Le message chrétien est en réalité tres simple. Nous parlons de Dieu et de l’homme, et ce faisant, nous disons tout.

Pourquoi une nouvelle évangélisation ?

Il y a déja plusieurs années déja, le Pape Jean-Paul II lançait l’invitation a mettre en ouvre une " nouvelle évangélisation ". Depuis tout temps l’évangélisation a été pour l’Eglise et pour les chrétiens, une mission de premiere importance. Alors pourquoi parler de " nouvelle " évangélisation ? N’est- ce- pas toujours la meme réalité qui est en cause ? En quoi donc est elle " nouvelle " ?

En quoi l’évangélisation de nos jours est -elle " nouvelle " ? il y a plusieurs raisons a cela. La premiere est simple et elle vise tout particulierement les pays que l’on appelle " de vieille chrétienté ", l’Europe, l’Amérique entre autres. Si la foi , comme adhésion a Jésus Sauveur demeure encore assez majoritaire (80% de français se disent catholiques), elle est souvent vécue comme une simple référence, importante, ou comme une appartenance revendiquée. Mais pour beaucoup (qui par exemple continuent a faire baptiser leurs enfants) elle n’est plus guere une foi vivante qui engage la vie et invite a une pratique personnelle des signes de la vie chrétienne. E t l’on est obligé de constater que les multiples efforts d’évangélisation qui ont été tentés (celle du monde ouvrier, celle des scientifiques, des techniciens, etc.) plafonnent tres vite. Beaucoup de chrétiens déclarés se contentent de maintenir leur vitesse de croisiere, avec comme seule référence, les quatre grands actes de la vie chrétienne : le bapteme, la profession de foi, le mariage et les obseques. Ils vivent dans une totale bonne conscience qui leur fait penser que " Dieu n’en demande pas tant ".

Une Bonne Nouvelle a proclamerretour page principale

Autre raison : évangéliser c’est proclamer une bonne nouvelle capable de changer la vie de ceux qui en reçoivent l’annonce. Jésus est venu pour sauver l’humanité et chaque croyant en reçoit en meme temps l’assurance et la joie : " Il m’a aimé et s’est livré pour moi ! " (Ga 2,20). Or aujourd’hui la foi chrétienne n’apparaît plus vraiment comme une bonne nouvelle. Beaucoup y voient seulement un rempart pour la morale, quand encore ils n’en récusent pas les rigueurs, trop exigeantes dans notre monde hédoniste, a la recherche du plaisir immédiat. Le matérialisme et la société de consommation ont fait dériver le bonheur vers la jouissance immédiate et cela suffit a beaucoup, qui ne voient guere de quoi ils ont a etre sauvés. On constate aussi depuis quelques décennies, un net affaiblissement de la religion populaire, faite de pratiques diverses, qui sont l’expression d’une foi tres affaiblie, d’une appartenance plus sociologique que personnelle et engagée. S’il est vraie que la pratique saisonniere demeure encore (les pratiquants de Noël et de Pâques, ou ceux de la Toussaint et des Rameaux), elle a beaucoup baissé. En outre, alors qu’il y a encore trente ans, une majorité d’enfants en âge scolaire suivait le Catéchisme, ils ne sont plus environ aujourd’hui que 30% et cela meme dans les régions jadis réputées chrétiennes. Certes les nombre de baptemes d’adultes a beaucoup augmenté (au moins 350 en France cette année 2004), mais c’est aussi parce que les baptemes d’enfants sont eux aussi moins nombreux. Et cela témoigne d’un important éloignement de la foi pour une majorité d’hommes et de femmes d’aujourd’hui.

Proposer la foi dans la société actuelle

Ces diverses constatations ont depuis une dizaine d’années posé question a l’Eglise, comme aux Eglises de divers pays. Des 1994, la Conférence des Eveques de France présentait un rapport intitulé : Proposer la Foi dans la société actuelle, repris quelques années plus tard dans la Lettre aux catholiques de France. Le cardinal Koenig archeveque de Vienne en Autriche et le cardinal Lustiger, archeveque de Paris ont lancé une Mission d’évangélisation pour les grandes villes : Vienne, Paris et autres capitales européennes. Autrefois comme au XVIIeme siecle avec Grignon de Montfort, Jean François Régis et autres missionnaires, c’était le monde rural qu’il fallait évangéliser et ces régions sont restées longtemps chrétiennes. Aujourd’hui dit le cardinal Lustiger, ce sont les villes qui sont plus pratiquantes que les campagnes : c’est donc elles qu’il faut évangéliser en priorité. Je me souviens que pendant les vacances de mon enfance, c’était " les parisiens " qui pratiquaient, et non pas les ruraux de ce pays déchristianisé depuis des siecles... Il faut donc une évangélisation nouvelle, parce que pour une part tres importante, la foi héritée du passé s’est perdue. Mais aussi parce que les conditions meme de la vie sont aujourd’hui tres différentes. Ainsi il n’y a plus guere de vrais ruraux mais des citadins dont quelques uns vivent a la campagne. De plus comment évangéliser notre société de consommation, plus apte a créer des besoins nouveaux qu’a ouvrir sur une recherche spirituelle ? Il est vrai qu’un nombre important de nos contemporains recherchent aujourd’hui les voies d’une spiritualité qui donne une âme a leur existence. Mais beaucoup la cherchent dans les spiritualités asiatiques ou dans les syncrétismes du New Age, plutôt que dans la foi chrétienne qui pour beaucoup est plus ou moins disqualifiée : ce n’est plus vers l’Eglise, que spontanément on regarde.

Importance des laics et de nouveaux mouvements

Nouvelle évangélisation donc : nouvelle parce qu’il faut la refaire, en un monde qui a oublié sa foi traditionnelle ; nouvelle parce que le monde a changé et que les méthodes ou les chemins d’autrefois ne sont plus en phase avec le monde d’aujourd’hui. Deux faits orientent cette nouveauté de l’évangélisation. Tout d’abord la diminution significative du nombre de pretres, des religieux et religieuses. Jusque vers 1970, c’est eux qui avaient assuré l’évangélisation : missions a l’intérieur (au cour des vieilles chrétientés) ou missions lointaines, congrégations fondées par Grignon de Montfort, Alphonse de Ligori, le Cardinal Lavigerie et tant d’autres. Second facteur : la prise en charge de l’évangélisation des divers milieux sociaux par les laics : Action Catholique sous toutes ses formes, grands mouvements spirituels : Foyers de Charité, Retraites Spirituelles, etc. Et nouveaux mouvements ecclésiaux : Equipes Notre-Dame (1948), Renouveau Charismatique (1970), Néo-Catéchuménat, Mouvement des Focolari (1943) et tant d’autres. La nouvelle évangélisation sera donc avant tout le fait de chrétiens laiques, témoignant de leur foi dans leur vie quotidienne, dans leur travail, dans leur entourage, dans leurs engagements publics ou ecclésiaux. Le rôle des pretres et religieux sera d’abord de les animer spirituellement. Elle sera aussi l’ouvres des nouveaux Mouvements d’Eglises, le plus souvent fondés, animés et dirigés par des laics. Le Pape Jean-Paul II attend beaucoup de ces nouveaux Mouvements qu’il a rassemblé dans une meme vision, a la Pentecôte 1998 a Rome et auxquels il donne toute sa confiance. La nouvelle évangélisation : un défi lancé a tous les chrétiens, pour qu’ils annoncent la foi qu’ils ont reçue et dont ils vivent, et que sans doute, tant d’hommes et de femmes attendent confusément. Sans oublier que la nouvelle évangélisation demande que chacun commence par se " ré-évangéliser " lui-meme.

 

évangélisation

et renouveau des paroisses

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Pere Alain BANDELIER, Foyer de Combs-la-Ville

Le Pere Alain Bandelier a été curé de la paroisse de Combs-La-Ville jusqu'en septembre dernier. Cet article fait écho aux cellules paroisiales d'évangélisation qu'il y a implantées.

Quand on entend parler de nouvelle évangélisation, on pense spontanément a de nouvelles fondations ou a de nouvelles initiatives. Cela peut faire peur : certains craignent d'etre mobilisés dans des engagements supplémentaires, d'autres imaginent que leurs engagements missionnaires actuels sont disqualifiés. Pourtant, quand il a commencé d'utiliser cette formule, Jean Paul II visait tout autre chose. Nouvelle par sa ferveur, ses méthodes, son langage (1), l'évangélisation n'est pas une mission confiée a quelques troupes d'élite, mais l'horizon de tout chrétien et de toute communauté chrétienne dans l'Église. En ce sens, ce n'est qu'une expression particulierement heureuse et actuelle de la prise de conscience qui a été au cur du Concile Vatican II : La vocation chrétienne est par nature vocation a l'apostolat. Les laics tiennent de leur union avec le Christ le droit et le devoir d'etre apôtres (2). Cette conviction, le pere Finet l'avait faite sienne. Il ne cessait de la rappeler aux retraitants comme aux membres de Foyer : non seulement disciples, mais apôtres !

Quand on parle du Renouveau, du moins dans les milieux catholiques et occidentaux, on désigne les groupes de priere charismatiques et les communautés nouvelles qui en sont issues. On peut regretter cette limitation de sens. Ces groupes et ces communautés contribuent au renouveau de l'Église, de la priere, de l'évangélisation, c'est sur. Mais ils n'en ont pas l'exclusivité, et d'ailleurs ils ne le prétendent pas. Avec d'autres réalités ecclésiales anciennes ou récentes, ils sont plutôt un sel et un levain, parfois meme un raisin vert qui agace quelques dents. Ils rappellent a tout le Peuple de Dieu que si l'on doit s'appuyer sur le passé, on ne peut s'y enfermer. Ce renouvellement permanent est la vraie Tradition de l'Église, depuis deux millénaires. Il exclut la rupture des discontinuités aussi bien que la paresse des continuités seulement répétitives.

L'onction toujours nouvelle de l'Esprit Saint doit toucher les institutions les plus vénérables aussi bien que les mouvements qui sont apparus a une époque récente. Les plus allergiques aux remises en cause, les plus fermés a la nouveauté, ne sont pas toujours ceux que l'on pense ! Les paroisses sont directement concernées par ce nouveau souffle d'évangélisation.

Jusqu'a une date récente, j'ai exercé mon ministere dans un cadre paroissial. J'ai été longtemps aumônier de jeunes. Ensuite, pendant douze années, j'ai eu la responsabilité de deux paroisses successives, comme curé. J'ai pu éprouver les difficultés de ce ministere. J'en ai gouté aussi les joies et les grâces. La paroisse, c'est la proximité de l'Église, son ouverture a tous, son service quotidien de la Parole et des Sacrements. Contrairement a ce qu'annonçaient des articles soi-disant prophétiques il y a vingt ans, elle n'est pas pres de disparaître. Mais elle a besoin d'un renouveau.

Nouvelle organisation

L'évolution la plus facile a décrire est celle qui touche l'organisation de nos paroisses. Leur structure et leur fonctionnement, qui semblaient immuables, sont en pleine transformation. Dans beaucoup d'endroits, il est difficile de faire exister, de rassembler et d'animer une communauté chrétienne locale. Tantôt c'est l'éparpillement des zones rurales, tantôt c'est la concentration urbaine, ici c'est le trop petit nombre des pratiquants, ailleurs on est débordé par le nombre. Un peu partout on essaie de mieux répondre aux attentes des hommes et aux motions de l'Esprit. Dans la ligne du XXI° Concile, on a vu se développer la responsabilité des laics, l'ouverture cuménique, le service de la société, le renouveau liturgique... Dans soixante-dix dioceses de France, on a mis en chantier une nouvelle définition des contours des paroisses, qui ne correspondent plus forcément a ceux des communes. On sent que ce n'est pas seulement un découpage géographique. C'est une vision communautaire et missionnaire. Il ne faut pas croire pour autant que ces réformes de structure entraîneront d'elles-memes un réveil de la foi. Elles peuvent faciliter l'évangélisation, elles ne peuvent pas la remplacer. Il ne faut pas confondre nouvelle paroisse et paroisse renouvelée.

La ou manquent les pretres, le probleme est celui de sauvegarder la mission spécifique et sacramentelle du pasteur, tout en confiant aux fideles la responsabilité d'animer la paroisse. De ce point de vue l'expérience des catéchistes en Afrique et des communautés de base en Amérique latine pourraient aider l'Europe. Notre esprit occidental, trop juridique et meme politique, nous fait poser les problemes en termes d'administration et de pouvoir. Ici ou la, on a vu fleurir un cléricalisme laic aussi écrasant et stérilisant que le cléricalisme qu'on a connu (et qu'on connaît encore), la ou le curé est seul maître a bord. Il n'y aura de renouveau des paroisses que si grandit un esprit vraiment communautaire, a base d'humilité, de fraternité, de générosité.

Parmi les efforts qui visent a améliorer le fonctionnement des paroisses, il faudrait mentionner d'innombrables initiatives. On organise des temps et des lieux d'accueil, au presbytere ou a l'église, parfois aussi dans des lieux de passage, comme les centres commerciaux. On propose des temps de rencontre originaux : moins de réunions réservées aux habitués, et davantage de temps conviviaux ouverts a tous. On fait des propositions nouvelles, avec le souci de rejoindre des personnes qui découvrent ou redécouvrent la foi. On se soucie de la qualité des célébrations, de la communication, des relations internes et externes, etc.

Nouvelle orientationretour page principale

Tout cela n'est pas inutile, mais ce n'est pas décisif. Toutes les améliorations que l'on voudra ou pourra imaginer ne suffiront pas a créer un nouvel élan. Je l'ai moi-meme expérimenté. J'étais pleinement engagé dans ma mission pastorale. Mes paroissiens étaient des fideles sympathiques et actifs. Mon ministere était passionnant, de l'enfant qui communie pour la premiere fois a la vieille dame de l'hospice qui communie pour la derniere fois, des jeunes qui vont se marier ou baptiser leur nouveau-né aux adultes qui partagent leurs soucis de famille, leurs responsabilités professionnelles, leurs combats dans la société. J'étais pourtant habité par une insatisfaction. Tout cela remplit mon cur et ma priere, et aussi mon agenda ! Mais ou est-ce que cela va ? Qu'est-ce qu'on bâtit ? La question la plus grave était celle-ci : dans nos paroisses françaises, nous nous occupons surtout des pratiquants, qui sont moins de 5% de la population (les chiffres officiels sont largement au dessus de la réalité) ; nous nous occupons de loin en loin des non-pratiquants, lorsqu'ils viennent pour un mariage, un bapteme, le catéchisme de l'enfant ou l'enterrement de la grand-mere ; mais les autres ?

J'étais dans cet état d'esprit lorsque j'ai eu sous les yeux un article consacré au systeme des cellules paroissiales d'évangélisation, tel qu'il était pratiqué dans la paroisse Sant Eustorgio de Milan, avec don Pigi, a la suite de la paroisse St Boniface de Miami. Je dois dire que cela a été pour moi une réponse lumineuse et un appel tres fort. Je l'ai partagé avec la nouvelle paroisse qui m'était confiée, a Combs-la-Ville, en banlieue parisienne (en parallele commençait le Foyer de Charité). Une conviction nous habitait désormais : nous sommes la pour ceux qui ne sont pas la. L'Église n'existe pas pour elle, mais pour le monde. Le peu de Jésus Christ que tu as reçu, ne le garde pas pour toi, partage-le. La mission est un probleme de foi, elle est précisément la mesure de notre foi (3). La foi grandit quand on la partage. Cette vision des choses, neuve dans son expression, profondément traditionnelle dans son inspiration, pouvait traverser, éclairer et dynamiser toute la vie d'une paroisse.

Concretement, il s'agissait de mettre chaque paroissien en situation d'évangéliste, ou qu'il soit. Personne ne peut se reposer sur d'autres de l'évangélisation des gens de son entourage (en gardant le terme grec du Nouveau Testament, on dira l'oikos) : sa famille, ses voisins, ses collegues de travail, ses amis, bref non pas tous ceux qu'il connaît, mais tous ceux avec qui il vit. La force de ce projet pastoral, c'est qu'il ne se réduit pas a une exhortation pieuse, comme on en fait beaucoup. Il propose une méthode et un appui.

La méthode, c'est un parcours missionnaire ainsi balisé : Annoncer Jésus Christ, c'est d'abord aimer, c'est-a-dire concretement se faire le serviteur des personnes. Ensuite, le moment venu, il faudra répondre a une question et témoigner de Jésus, mon Sauveur et mon Seigneur. L'étape suivante consiste en quelque sorte a déblayer le terrain : accueillir les objections, accompagner une recherche, aider a murir une décision. Enfin le moment décisif est l'invitation a rejoindre la communauté chrétienne, a faire un pas vers le Christ et vers son Église, en rejoignant concretement une cellule : cette dizaine de freres et surs qui ont accompagné dans la priere tout ce cheminement, depuis le début. Aussitôt la personne est appelée a son tour a évangéliser son oikos et a recevoir un service dans la communauté.

L'appui, c'est la rencontre hebdomadaire de la cellule d'évangélisation. Le mot cellule veut souligner deux choses. Il ne s'agit pas d'un groupe ou d'un mouvement, comme il y en a tant ; c'est une cellule du corps, qui est la communauté locale ; a travers les cellules, c'est la paroisse qui se ramifie, c'est tout un courant de vie qui circule. D'autre part chaque cellule est appelée a grossir et a se multiplier ; la visée est d'accueillir sans cesse des nouveaux, non d'entretenir l'autosatisfaction d'un club de copains. Chaque rencontre est un temps fort de vie chrétienne, qui commence par la louange et se termine par l'intercession, avec comme nourriture centrale d'une part le partage (chacun est invité a témoigner de l'action du Seigneur dans sa vie et dans celle de son entourage), d'autre part la formation (le pasteur donne chaque quinzaine un enseignement de base, sous forme d'une cassette enregistrée et diffusée dans chaque cellule).

Une nouvelle inspirationretour page principale

J'évoque avec un peu d'insistance cette expérience parce que je la connais et que j'en ai vu les fruits. Pour des chrétiens convaincus et déja bien engagés dans la paroisse, c'était une découverte ; leurs propres enfants, parfois incroyants, pouvaient constater le changement. Pour des personnes aux marges de l'Église, c'était une porte d'entrée dans une foi vivante. Pour des gens étrangers a nos rendez-vous habituels, c'est-a-dire notre messe du dimanche et nos réunions du soir, c'était enfin un lieu possible. Malgré mon enthousiasme, je ne prétends pas que c'est la seule voie possible et féconde. En revanche il y a derriere tout cela une intuition qui, elle, me paraît fondamentale et incontournable, si l'on veut se mettre a l'heure de la nouvelle évangélisation : le point de départ, c'est le Christ. Dans l'histoire de l'Église, les renouveaux missionnaires ont été et seront toujours des renouveaux spirituels.

Dieu seul peut donner Dieu. Des siecles de chrétienté ont pu nous laisser croire que la foi allait de soi et qu'elle se transmettait d'elle-meme. L'activisme moderne, celui des pretres comme celui des militants, a pu donner l'impression que la mission se déploierait en meme temps que se déploieraient nos efforts. Paul VI nous a pourtant avertis prophétiquement : Les techniques d'évangélisation sont bonnes, mais les plus perfectionnées ne sauraient remplacer l'action discrete de l'Esprit. La préparation la plus raffinée de l'évangélisateur n'opere rien sans lui. Sans lui, les schémas psychologiques ou sociologiques les plus élaborés se révelent vite dépourvus de valeur... Le monde réclame des évangélisateurs qui lui parlent d'un Dieu qu'ils connaissent et fréquentent comme s'ils voyaient l'invisible (3). Autrement dit l'évangélisation commence a genoux.

Je fais partie de cette génération a laquelle on a inculqué un schéma de pensée simpliste. Il y avait d'un côté la vie spirituelle, de l'autre l'engagement et le témoignage. On retombait sans cesse dans ce dualisme : action et contemplation, sacramentalisation et évangélisation, Église rassemblée et Église présente au monde. L'articulation de la passivité mystique et de l'activité apostolique est le secret le plus profond, le mystere meme de l'Église. Si on la casse, on ne comprend plus rien. Il n'y a plus qu'a équilibrer au mieux (comme on dit si mal) une piété désincarnée et un engagement déchristianisé. On ne voit plus l'interaction et l'interpénétration des deux. La priere est l'âme de tout apostolat, la mission a pour finalité l'union a Dieu. C'est dans le Christ que tout s'unifie, car tout vient de Lui et tout tend vers Lui. Ex fide in fidem (5). Vatican II l'affirme a plusieurs reprises : la liturgie est la source et le sommet de la vie chrétienne comme de l'évangélisation (6).

Il ne faut donc pas s'étonner de voir combien les communautés les plus rayonnantes aujourd'hui sont aussi les plus priantes. On peut constater en particulier quelque chose d'assez inattendu : c'est la redécouverte et la remise en honneur, dans beaucoup d'endroits, de l'adoration du Saint Sacrement. Il ne s'agit pas d'une mode, encore moins d'une fuite, comme certains l'insinuent, pas non plus d'un gout quelque peu rétro pour des pratiques désuetes. Les adorateurs d'aujourd'hui sont des hommes et des femmes qui sont aux avant-postes de la compassion, de l'évangélisation, de la responsabilité. Ils ont entendu le message du Christ : je suis avec vous tous les jours jusqu'a la fin du monde, et ils ont compris qu'ils devaient Lui répondre en étant avec Lui. Etre présents a la présence, si nous voulons que cette présence habite ce monde, pour l'éclairer, le guérir, le transformer.

Un certain nombre de paroisses ont mis l'adoration eucharistique au cur de la vie paroissiale. Cela va de l'Heure sainte mensuelle, le premier vendredi du mois, ou hebdomadaire, a une journée complete, et meme, ici ou la, l'adoration perpétuelle. Le but n'est pas d'encourager une dévotion privée (qui ne serait pas mauvaise de toute façon) mais de poser un acte public. C'est l'affirmation non verbale que Jésus Christ est le Centre de la paroisse, son vrai Pasteur, la Source de sa vie, le Secret de sa fécondité et de son rayonnement. La communauté chrétienne en reçoit une plus grande profondeur. La fraternité devient une communion spirituelle. Les divers services deviennent des ministeres traversés par la grâce. La mission devient une manifestation d'Esprit et de puissance, comme a Corinthe au temps de St Paul (7), autrement dit l'évangélisation n'est pas autre chose que le rayonnement du Ressuscité.

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Les "Louisianes" : une réponse au défi culturel de la nouvelle évangélisation

Jean Chaunu

Plus d’une génération nous sépare du discours de Jean-Paul II a Nowa Huta sur la nouvelle évangélisation. L’heure n’est pas encore au bilan, mais on peut déja constater que si la nouvelle évangélisation a reçu droit de cité dans l’Église, sa dynamique est loin d’avoir épuisé tous ses ressorts. Certes, on s’enlise moins dans les débats stériles sur les "structures" qui ont caractérisé la période antérieure, mais la persistance de la crise de la transmission au sein de l’Église elle-meme n’aurait-elle pas un lien avec les difficultés de l’évangélisation ?

Sans doute sommes-nous proches des temps apostoliques parce que les chrétiens sont redevenus cette minorité agissante dans un monde devenu néopaien. Cette situation ne présente pas que des inconvénients, elle peut etre stimulante. Mais l’Église des premiers siecles était chevillée sur la tradition reçue des apôtres et pétrie de culture biblique, prete a influer sur la culture environnante en usant au besoin de l’apologétique et de temps a autre d’un vocabulaire philosophique. La tentation est grande chez beaucoup de nos contemporains d’Église de comprendre a contresens la tabula rasa. Opter pour la table rase en proposant l’annonce de Jésus-Christ hic et nunc sans préambule est tres certainement d’une grande urgence. Mais sous prétexte d’un jubilé du millénaire souvent mal compris, cela ne signifie pas faire table rase d’un passé chrétien trop encombrant, au contraire.

Les conditions de l’évangélisation

Deux conditions sont nécessaires pour une nouvelle évangélisation.

Il faut une poignée d’apôtres cultivés qui assument le patrimoine culturel du christianisme et qui soient capables d’en rendre compte. Cette culture est certes portée par l’Esprit Saint qui nous fait souvenir de tout ce que le Seigneur a dit (Jean 14, 26) mais elle doit etre proposée et transmise.

Il faut que les structures paroissiales de l’Église puise proposer aux nouveaux commençants ou recommençants des nourritures spirituelles qui assurent le "service apres vente".

Un constat s’impose sur ce point. Le monde déchristianisé qui attend l’annonce du message chrétien est plus vite sorti de la crise progressiste des années soixante que l’Église elle-meme. La crise de l’Église depuis cinquante ans est certes une crise de l’évangélisation dont l’histoire reste a écrire et doit etre écrite, de l’évangélisation d’abord a l’humanisation d’abord en passant par l’enfouissement. Or si l’évangélisation directe du proche n’est plus d’actualité, quel intéret y aurait-il a se nourrir soi-meme d’une culture chrétienne?

Sans doute le renouveau du concile et les années qui l’ont précédé ont vu naître des communautés nouvelles. Mais le fait est que rares sont celles qui ont au cour de leur vocation le projet d’une réelle transmission d’un savoir durable (théologique, historique) aupres des jeunes générations. Cette situation est sans précédent dans l’histoire de l’Église qui a toujours su inventer les institutions capables de transmettre la foi face a l’hérésie ou face a la sécularisation.

Que l’on songe aux grandes intuitions fondatrices des XVIe-XVIIe siecles ou du XIXe et encore du début du XXe. Or la crise actuelle de l’Église est aussi celle de la transmission que n’assument plus sérieusement ni l’école catholique, qui se porte bien en apparence (en partie grâce a la carte scolaire) mais qui est incapable de se réformer faute de maîtres authentiquement chrétiens, ni les institutions catéchétiques ou les aumôneries.

Il est beaucoup question de développement durable aujourd’hui. Qu’en est-il du développement durable d’un savoir théologique, historique pour les jeunes générations de catholiques?

Crise de la transmission, crise de l'évangélisationretour page principale

La raison vient sans doute de la crise de 1968 qui est au cour une crise de l’autorité, du magistere intellectuel et finalement de la transmission . Est-ce un hasard si des intellectuels non chrétiens tels Régis Debray ou Alain Finkielkraut ont été les premiers a s’en émouvoir ? Le grand soupçon regne encore sur l’"encyclopédisme", entendez une culture de l’honnete homme, ou sur l’apologétique, ce bien vilain mot qui ne passait plus guere et qui consiste pourtant a rendre compte des raisons de croire et d’espérer. Et le soupçon s’étend aussi sur des fondations d’écoles indépendantes de l’appareil administratif clérical pour des raisons qui ne sont pas toutes désintéressées.

Les sortileges de soixante-huit projettent encore leurs derniers feux sur des générations de chrétiens. Un certain anti-intellectualisme émotiviste, un certain fidéisme, une conception fausse de la tabula rasa (dans le vocabulaire "missiologique" une méthode d'évangélisation par rapport aux méthodes d'inculturation, Ndlr), une amnésie entretenue dans un esprit consensuel sur les dérives de l’Église de France pour ne pas chagriner les hautes spheres de la pyramide des âges ecclésiastique, contribuent a cette anémie intellectuelle alors qu’il suffirait de puiser a pleines mains dans les trésors de science et de sagesse de l’Église. Tandis qu’une discipline nouvelle appelée "culturegé" fait flores sur les décombres du savoir, quand pensera-t-on a se soucier d’une "culturegé" a l’usage des jeunes chrétiens?

Certes, et c’est une bonne nouvelle, de nouveaux canaux sont apparus depuis une décennie : les cathos se sont emparés de l’Internet comme jadis les Freres de la Vie-Commune, bien avant les humanistes, ou les cisterciens allemands, furent pionniers dans l’usage de l’imprimerie, des universités d’été, tels ou tels séminaires proposent des formations. Mais la vitalité de la culture chrétienne semble réservée a quelques initiés. Des grains de sable certes... A quand les masses de granit ?

Une initiative pluridisciplinaire

Comment remédier aux faiblesses de la transmission de la culture chrétienne ? D’abord faire confiance dans le magistere inspiré de l’Église. La pierre d’angle méthodologique d’une bonne formation — osons ajouter : a la fois orthodoxe, et libérale par sa souplesse — reste la formule théologique du grand concile de Chalcédoine (451) d’union sans confusion ni séparation de la nature humaine et de la nature divine du Christ. De cette foi découle la distinction relationnelle entre raison et Révélation, entre spirituel et temporel, entre théologie de l’histoire et christianisme objet d’histoire. Par la le chrétien peut rendre pleinement compte de l’espérance qui l’habite par l’intelligence de la foi.

Pour répondre au défi culturel de la nouvelle évangélisation, de jeunes enseignants et chercheurs catholiques ont pris l’initiative de proposer cet été (du 25 au 29 aout) une session annuelle de formation pour des jeunes de 18 a 25 ans. Objectif : offrir des points de repere et des éléments d’approfondissement de leurs connaissances théologiques, spirituelles, juridiques, littéraires, philosophiques, historiques, bioéthiques…

Sous le nom de "Louisianes" (en référence a saint Louis, feté le 25 aout), ces journées s’inscrivent dans la triple dimension du défi missionnaire des laics chrétiens :

Le défi apostolique. Il s’agit de répondre a l’appel urgent de l’évangélisation aupres d’un jeune public par l’échange et la formation.

Le défi culturel au sens strict, a travers l’assimilation des clés de réponse aux grands débats contemporains sur des bases pluridisciplinaires (théologie, histoire, philosophie, nouvelles techniques de la communication) a la lumiere de la Révélation et de la raison. Une culture de vie passe par la connaissance de l’histoire de l’Église qui peut structurer et affermir la foi.

Le défi spirituel, illustré par l’accueil des participants et des intervenants dans le cadre d’une communauté monastique qui leur permettent de s’associer a la priere des religieux car l’effort théologique et la recherche intellectuelle en général ne peuvent etre dissociées d’une spiritualité vivante.

A défaut d’institution enseignante qui ait un caractere permanent, (privilege ou fardeau réservé a d’autres temps de chrétienté?) il est possible et souhaitable de multiplier de telles initiatives dans le souci de viser une formation intégrale et pluridisciplinaire. La prochaine étape de la nouvelle évangélisation sera culturelle ou ne sera pas. Aux jeunes générations de s’approprier le patrimoine vivant d’une intelligence chrétienne de la culture qui réponde aux grandes questions de leurs contemporains. Si les chrétiens ne s’occupent pas de la culture et de ses liens féconds avec le christianisme, d’autres s’en chargeront assurément.

Qu’est-ce que la nouvelle évangélisation ?

II. Les contenus essentiels de la nouvelle évangélisationretour page principale

1. Conversion Pour ce qui est des contenus de la nouvelle évangélisation, il faut avant tout garder a l’esprit que l’Ancien et le Nouveau Testament sont inséparables. Le contenu fondamental de l’Ancien Testament est résumé dans le message de Jean Baptiste : " Convertissez-vous ! " Il n’y a pas d’acces a Jésus sans le Baptiste ; il n’est pas possible d’arriver a Jésus sans avoir répondu a l’appel de son précurseur, mieux encore, Jésus a fait sien le message de Jean dans la synthese de sa propre prédication : (Mc 1, 15). Le mot grec pour se convertir signifie repenser, remettre en question son propre mode de vie et le mode de vie ordinaire, laisser entrer Dieu dans les criteres de sa propre vie, ne plus juger uniquement selon les opinions courantes. Se convertir signifie par conséquent : ne pas vivre comme tout le monde vit, ne pas faire ce que tout le monde fait, ne pas se sentir justifié devant des actions douteuses, ambiguës ou mauvaises par le fait que les autres font de meme ; commencer a regarder sa propre vie avec les yeux de Dieu ; chercher donc le bien, meme s’il est dérangeant ; ne pas s’en remettre au jugement des multitudes, des hommes, mais au jugement de Dieu. Autrement dit : chercher un nouveau style de vie, une vie nouvelle.

Tout cela n’implique pas de moralisme ; en réduisant le christianisme a la moralité, on perd de vue l’essence du message du Christ : Le don d’une nouvelle amitié, le don de la communion a Jésus, et par suite a Dieu. Celui qui se convertit au Christ n’entend pas se créer une autarcie morale bien a lui, il ne prétend pas construire sa propre bonté par ses propres forces. La " Conversion " (métanoia) signifie précisément l’opposé : sortir de l’autosuffisance, découvrir et accepter son indigence, une indigence des autres et de l’Autre, de son pardon, de son amitié. La vie non-convertie est autojustification (je ne suis pas pire que les autres) ; la conversion est l’humilité de s’en remettre a l’amour de l’Autre, un amour qui devient mesure et critere de ma propre vie.

Ici nous devons également garder a l’esprit l’aspect social de la conversion. Certes, la conversion est avant tout un acte éminemment personnel, elle est personnalisation. Je me sépare de la formule " vivre comme tout le monde " (je ne me sens plus justifié par le fait que tous font ce que je fais) et je trouve devant Dieu mon propre moi, ma responsabilité personnelle. Mais la vraie personnalisation est toujours une nouvelle et plus profonde socialisation. Le moi s’ouvre de nouveau au toi, dans toute sa profondeur, en donnant naissance a un nouveau Nous. Si le style de vie répandu dans le monde comporte un risque de dépersonnalisation, de vivre non pas ma propre vie, mais la vie de tous les autres, dans la conversion doit se réaliser le nouveau Nous du cheminement commun avec Dieu. En annonçant la conversion, nous devons aussi offrir un parcours de vie, un espace commun du nouveau style de vie. On ne peut pas évangéliser uniquement par des paroles ; l’Évangile crée la vie, il crée une communauté de parcours ; une conversion purement individuelle n’a pas de consistance

2. Le Royaume de Dieuretour page principale

Dans l’appel a la conversion est implicite -c’est meme sa condition fondamentale -l’annonce du Dieu vivant. Le théocentrisme est fondamental dans le message de Jésus et il doit etre aussi au coeur de la nouvelle évangélisation. La parole clef de l’annonce de Jésus est : le Royaume de Dieu. Or le Royaume de Dieu n’est pas une chose, une structure sociale ou politique, une utopie. Le Royaume de Dieu est Dieu. Le Royaume de Dieu signifie : Dieu existe. Dieu vit. Dieu est présent et agit dans le monde, dans notre vie, dans ma vie. Dieu n’est pas une lointaine " cause ultime ", Dieu n’est pas le " grand architecte " du déisme, qui a monté la machine du monde et qui se trouverait maintenant en dehors, bien au contraire : Dieu est la réalité la plus présente et décisive dans chaque acte de ma vie, a chaque moment de l’histoire. Dans son discours d’adieu, en quittant sa chaire a l’université de Munster, le théologien J.B. Metz a dit des choses inattendues de sa part. Metz, dans le passé, nous avait appris l’anthropocentrisme ; le véritable avenement du christianisme aurait été le tournant anthropologique, la sécularisation, la découverte de la sécularité du monde. Puis il nous a appris la théologie politique, le caractere politique de la foi, puis encore la " mémoire dangereuse " et enfin la théologie narrative. Apres ce cheminement long et ardu, il nous dit aujourd’hui : le vrai probleme de notre temps est la " Crise de Dieu ", l’absence de Dieu camouflée par une religiosité vide. La théologie doit redevenir réellement théo-logia, un discours sur Dieu et avec Dieu. Metz a raison : L’unum necessarium pour l’homme est Dieu. Tout change, selon que Dieu existe ou qu’il n’existe pas. Mais hélas ! Meme nous, les chrétiens, vivons souvent comme si Dieu n’existait pas (si Deus non daretur). Nous vivons selon le slogan : Dieu n’existe pas, et s’il existe, il n’a rien a voir. C’est pourquoi l’évangélisation doit avant tout parler de Dieu, annoncer l’unique vrai Dieu : le Créateur , le Sanctificateur, Le Juge (cf. le Catéchisme de l’Église catholique). Encore une fois, il faut garder a l’esprit l’aspect pratique. On ne peut pas faire connaître Dieu uniquement avec des paroles. On ne connaît pas une personne si on ne la connaît que par oui-dire.

Annoncer Dieu est introduire a la relation a Dieu : Enseigner a prier. La priere est la foi en acte. Et ce n’est que dans l’expérience de la vie avec Dieu qu’apparaît aussi l’évidence de son existence. C’est pour cette raison que sont si importantes les écoles de priere, les communautés de priere. Il y a complémentarité entre la priere personnelle (" dans sa propre chambre ", seul devant les yeux de Dieu), la priere commune " para-liturgique " (" religiosité populaire ") et la priere liturgique.

Oui, la liturgie est avant tout priere ; sa spécificité consiste dans le fait que son sujet primaire, ce n’est pas nous (comme dans la priere privée ou dans la religiosité populaire), mais Dieu lui-meme, la liturgie est actio divina, Dieu agit et nous répondons a l’action divine.

Parler de Dieu et parler avec Dieu doivent toujours aller de pair. L’annonce de Dieu nous guide a la communion avec Dieu dans la communion fraternelle, fondée et vivifiée par Jésus-Christ. C’est pourquoi la liturgie (les sacrements) n’est pas un theme secondaire par rapport a la prédication du Dieu vivant, mais la concrétisation de notre relation a Dieu. Dans ce contexte, qu’on me permette une observation générale sur la question liturgique. Notre maniere de célébrer la liturgie est souvent trop rationaliste. La liturgie devient enseignement, son critere est : se faire comprendre, ce qui aboutit bien souvent a la banalisation du mystere, a la prévalence de nos paroles, a la répétition de phraséologies qui semblent plus accessibles et plus agréables aux gens. Mais il s’agit d’une erreur non seulement théologique, mais aussi psychologique et pastorale. La vague d’ésotérisme, la diffusion des techniques asiatiques de relaxation et de vide mental montrent qu’il manque quelque chose dans nos liturgies. C’est justement dans notre monde d’aujourd’hui que nous avons besoin du silence, du mystere supra-individuel, de la beauté. La liturgie n’est pas l’invention du pretre célébrant ou d’un groupe de spécialistes ; la liturgie (le " rite ") a grandi selon un processus organique au cours des siecles, elle porte en elle le fruit de l’expérience de foi de toutes les générations précédentes. Meme si les participants ne comprennent probablement pas toutes les paroles, ils perçoivent leur signification profonde, la présence du mystere qui transcende toutes les paroles. Le centre de l’action liturgique n’est pas le célébrant ; le célébrant n’est pas devant le peuple en son nom propre, il ne parle pas de lui-meme et pour lui-meme, mais in persona Cristi. Ce ne sont pas les capacités personnelles du célébrant qui comptent, mais uniquement sa foi, dans laquelle transparaît Jésus-Christ. " Il faut que lui grandisse et que moi je décroisse " (Jn 3, 30).

3. Jésus-Christretour page principale

Par cette réflexion, le theme de Dieu s’est déja étendu, et il s’est concrétisé dans le theme de Jésus-Christ : C’est seulement dans le Christ et par le Christ que le theme de Dieu devient réellement concret. le Christ est l’Emmanuel, le Dieu-avec-nous, la concrétisation du " Je suis ", la réponse au déisme. Aujourd’hui la tentation est grande de réduire Jésus-Christ, le Fils de Dieu, a un simple Jésus historique, a un homme pur. On ne nie pas nécessairement la divinité de Jésus, mais au moyen de certaines méthodes on distille dans la Bible un Jésus a notre mesure, un Jésus possible et compréhensible d’apres les parametres de notre historiographie. Mais ce " Jésus historique " est un artéfact, il est l’image de ses auteurs, et pas l’image du Dieu vivant (cf. 2 Co 4, 4s ; Col 1, 15). Ce n’est pas le Christ de la foi qui est un mythe, mais le Jésus historique, qui est une figure mythologique auto-inventée par les divers interpretes. Les deux cents ans d’histoire du " Jésus historique " refletent fidelement l’histoire des philosophies et des idéologies de cette période.

Je ne peux pas, dans le cadre de cette conférence, développer les contenus de l’annonce du Sauveur. Je voudrais seulement citer brievement deux aspects importants. Le premier est la suite du Christ, le Christ s’offre comme chemin de ma vie. La suite du Christ ne signifie pas : imiter l’homme Jésus. Une tentative de ce genre échoue nécessairement, ce serait un anachronisme. La suite du Christ a un but beaucoup plus élevé : ne faire qu’un avec le Christ, et arriver ainsi a l’union a Dieu. Ce discours peut sembler étrange aux oreilles de l’homme moderne. Mais en réalité, nous avons tous soif d’infini : d’une liberté infinie, d’un bonheur sans limites. Toute l’histoire des révolutions des deux siecles passés ne s’explique que de cette façon. La drogue ne s’explique que de cette façon. L’homme ne se contente pas de solutions en deça du niveau de la divinisation. Et tous les chemins proposés par le " serpent " (Gn 3, 5), c’est-a-dire par le savoir mondain, échouent. Le seul chemin est la communion a Jésus-Christ, réalisable dans la vie sacramentelle. La suite du Christ n’est pas une question de moralité, mais un theme " mystérique ", un ensemble fait d’action divine et de réponse de notre part.

Nous rencontrons ainsi, dans le theme de la suite, l’autre centre de la christologie auquel je voulais faire allusion : le mystere pascal , la croix et la résurrection. Dans les reconstructions du " Jésus historique ", le theme de la croix est en général dépourvu de signification. Dans une interprétation " bourgeoise ", c’est un incident en soi évitable, sans valeur théologique ; dans une interprétation révolutionnaire, c’est la mort héroique d’un rebelle. La vérité est tout autre. La croix appartient au mystere divin, elle est l’expression de son amour jusqu’a la fin (Jn 13, 1). La suite du Christ est participation a sa croix, union a son amour, a la transformation de notre vie, en donnant naissance a l’homme nouveau, créé selon Dieu (cf. Ep 4, 24). Celui qui omet la croix omet l’essence du christianisme (cf. 1 Co 2, 2). 4. La vie éternelle Le dernier élément central de toute véritable évangélisation est la vie éternelle. Aujourd’hui nous devons annoncer notre foi avec une nouvelle vigueur, dans la vie quotidienne. Je me bornerai a citer ici un aspect de la prédication de Jésus, qui est souvent négligé aujourd’hui : L’annonce du Royaume de Dieu est l’annonce d’un Dieu présent, d’un Dieu qui nous connaît et nous écoute ; d’un Dieu qui entre dans l’histoire pour faire justice. Cette prédication est donc aussi l’annonce du jugement, l’annonce de notre responsabilité. L’homme ne peut pas faire ou ne pas faire ce qu’il veut. Il sera jugé. Il doit rendre compte. Cette certitude vaut pour les puissants comme pour les simples. Lorsqu’elle est honorée, les limites de tout pouvoir de ce monde sont tracées. Dieu fait justice, et lui seul peut la faire en dernier. Pour nous, cela se passera d’autant mieux que nous serons capables de vivre sous le regard de Dieu et de communiquer au monde la vérité du jugement. Ainsi l’article de foi du jugement, sa puissance formatrice pour les consciences, est un contenu central de l’Évangile, qui est vraiment une bonne nouvelle. Cela l’est pour tous ceux qui subissent l’injustice du monde et cherchent la justice. De cette maniere, on comprend aussi la connexion entre le Royaume de Dieu et les " pauvres ", ceux qui souffrent et tous ceux dont parlent les béatitudes du discours de la montagne. Ils sont protégés par la certitude du jugement, par la certitude qu’il y a une justice. Tel est le véritable contenu de l’article sur le jugement, sur Dieu juge : Il y a une justice. Les injustices du monde ne sont pas le dernier mot de l’histoire. Il y a une justice. Seul celui qui refuse qu’il y ait une justice peut s’opposer a cette vérité. Si nous prenons au sérieux le jugement et la gravité de la responsabilité qui en découle pour nous, nous comprenons bien l’autre aspect de cette annonce, a savoir la rédemption, le fait que par la croix, Jésus a assumé nos péchés ; que Dieu lui-meme, dans la passion de son Fils, se fait l’avocat de nos péchés, en rendant ainsi possible la pénitence, l’espérance pour le pécheur repenti, une espérance merveilleusement exprimée dans les paroles de saint Jean : Devant Dieu, nous réconforterons notre coeur, quoi qu’il nous reproche. Dieu est plus grand que notre coeur, et il connaît toute chose (1 Jn 3, 19s). La bonté de Dieu est infinie, mais nous ne devons pas réduire cette bonté a une mievrerie édulcorée et privée de vérité. Ce n’est qu’en croyant au juste jugement de Dieu, en ayant faim et soif de la justice (cf. Mt 5, 6) que nous ouvrons notre coeur et notre vie a la miséricorde divine. On le voit : la foi dans la vie éternelle ne rend pas la vie terrestre insignifiante. Bien au contraire : Ce n’est que si la mesure de notre vie est l’éternité que notre vie sur terre est grande elle aussi et qu’elle a une valeur immense. Dieu n’est pas le concurrent de notre vie, mais le garant de notre grandeur. Ainsi, nous revenons a notre point de départ : Dieu. Lorsque nous considérons bien le message chrétien, nous ne parlons pas de beaucoup de choses. Le message chrétien est en réalité tres simple. Nous parlons de Dieu et de l’homme, et ce faisant, nous disons tout. Article écrit par Pere Alexis le 09/11/2003 (lu 56 - catégorie : Génération Jean Paul II) -retour page principale

La Nouvelle Evangélisation sera l’évangélisation d’une Europe radicalement nouvelle : une société " européenne " dont le climat mental se façonne déja autour de nous, sous l’emprise de forces sociales, économiques et démographiques irrésistibles. Ce climat va requérir de nouvelles formes de témoignage catholique. Avec le regard de l’Evangile, positif et réaliste, les croyants prennent acte de deux éléments nouveaux, qui posent des problemes inédits mais qui ne peuvent pas décourager des évangélisateurs.

L’un de ces deux éléments nouveaux est psychologique. L’autre est culturel.

On voit se répandre en Occident une psychologie collective, façonnée par les puissances commerciales, et qui va dans un sens toujours plus éloigné de la culture chrétienne. Nous venons d’en connaître un exemple avec le film Da Vinci Code : cette superproduction, lancée par Hollywood avec un budget de 125 millions de dollars, aggrave la propagande antichrétienne du roman de Dan Brown, qui a vendu plus de 40 millions d’exemplaires en Occident. N’en sous-estimons pas l’effet sur l’opinion publique : 31 % des lecteurs français croient que Da Vinci Code rapporte " des faits réels de la vie du Christ ", et 21 % croient qu’il y a " du vrai " dans les accusations de Brown contre l’Eglise... Une grande partie du public ne voit pas que les allégations de Da Vinci Code sont invraisemblables. Ces chiffres montrent quel abîme sépare les mentalités d’aujourd’hui et la connaissance du christianisme.

La seconde réalité massive, en effet, est l’ignorance des habitants de l’Europe envers le contenu de la foi chrétienne. Cette ignorance touche aujourd’hui des pans entiers de populations :

- les Européens " de souche " ont perdu le contact avec la culture chrétienne, au cours du grand abandon des patrimoines spirituels, intellectuels, moraux qui a marqué la fin du XXe siecle occidental ;

- d’autre part, les populations qui immigrent en Europe viennent largement de sociétés non chrétiennes.

Cet afflux d’immigrants est une donnée irréversible : la cause en est l’effondrement volontaire des naissances européennes. Notre désert démographique attire les peuples jeunes, selon un processus aussi ancien que l’humanité.

Telle est l’Europe que le Seigneur nous donne a évangéliser. Elle peut déconcerter. On peut déplorer (comme certains philosophes laiques) la perte des " reperes culturels " hérités du passé… Mais nous n’avons pas le droit d’esquiver la mission confiée a chaque génération de chrétiens : témoigner de la foi, quelles que soient les conditions du moment présent – y compris lorsque ces conditions sont sans précédent. Comme le constatait en novembre 2005 le P. Cantalamessa dans sa premiere homélie de l’Avent devant le pape Benoît XVI, la majorité des habitants de l’Europe nouvelle ne se soucient pas du patrimoine spirituel et moral de l’ancienne civilisation européenne. Leur conscience n’est pas attirée par les trésors d’un passé devenu trop " lointain ". Donc ce passé n’évangélise pas (sauf peut-etre les étudiants en histoire !). On ne peut pas évangéliser sans rejoindre les gens dans leur vie personnelle quotidienne, dans leur instant présent, ainsi que Jésus-Christ le fait a toutes les pages de l’Evangile... Il ne s’agit au fond que d’une seule chose : aider le prochain – d’ou qu’il vienne, quelle que soit sa culture d’origine (ou son absence de culture) – a entrer en contact personnel, ici et maintenant, avec la personne du Christ.

Donc les catholiques croyants – minoritaires des aujourd’hui en Europe occidentale – ont a trouver de nouvelles façons (et un nouveau langage) pour faire connaître " l’espérance qui est en eux " a qui leur en " demandera les raisons ". Pour que l’on ait simplement envie de leur demander ces raisons, les croyants ont a faire voir leur espérance par toute leur façon d’etre.

L'Église a l'école des premiers chrétiensretour page principale

Le pere Marcel Dumais o.m.i. enseigne a l'Université Saint-Paul a Ottawa depuis 35 ans. Il s'est spécialisé dans l'enseignement de la Bible et plus particulierement du livre des Actes des apôtres. Il est aussi un spécialiste des Béatitudes. Son intéret principal a pour objet l'étude des premieres communautés chrétiennes telles qu'elles apparaissent au livre des Actes. Saint Luc, l'auteur de ce livre du Nouveau Testament, a raconté comment s'est déroulée l'évangélisation des Juifs et des paiens quelques années apres la mort-résurrection de Jésus. Cette période de l'histoire de l'Église peut encore nous servir de source d'inspiration au moment ou l'Église d'ici entreprend une nouvelle évangélisation.

Les premieres communautés chrétiennes sont pour le pere Marcel Dumais un précieux laboratoire. Ces communautés étaient attrayantes et les conversions au christianisme furent nombreuses de sorte qu'a la fin du premier siecle, le message de Jésus était déja répandu partout autour du bassin de la mer Méditerranée. Comment cela se fait-il que des hommes sans trop d'instruction aient fait voyager la Parole de Dieu au rythme d'une véritable course de fond? Le pere Dumais décrit dans cette entrevue les conditions qui ont permis une si rapide expansion.

Le livre des Actes des apôtres est le livre de la mission. Il est important de le relire.

NDC - Vous dites que la situation vécue par les apôtres dans le livre des Actes a certaines ressemblances avec ce que nous vivons aujourd'hui. Pourquoi?

M. D. - Saint Luc a écrit le livre des Actes des apôtres vers les années 80-90 apres Jésus. La situation de l'Église est tres semblable a ce que nous vivons en 2002. La fin de la guerre juive qui opposait les Juifs et les Romains est survenue en 70. Le christianisme a perdu ses assises sociales, institutionnelles et politiques. La religion juive avait été autorisée par les Romains a l'époque d'Hérode le Grand. A ses débuts, le christianisme était vu comme une secte juive. Les premiers chrétiens ont obtenu les memes privileges que la religion juive. Avec la défaite juive, tout cela était perdu. Les chrétiens se sont retrouvés minoritaires et ils ont été persécutés.

C'est un peu ce qui s'est passé au Québec dans les années 60. L'Église a perdu ses assises sociales et du jour au lendemain on lui a enlevé ses grandes institutions. Nous avons assisté a une marginalisation du rôle joué par l'Église.

Saint Luc, dans le livre des Actes des apôtres, a voulu donner quelque chose de solide a son Église qui avait été ébranlée. Il a décrit les débuts de la communauté chrétienne tout en nous montrant les fondements de la mission. Le livre des Actes est le livre de l'Église en plein élan missionnaire.

NDC - Vous décrivez cette situation dans votre livre. Vous insistez cependant beaucoup sur le rôle joué par l'Esprit lors de la premiere évangélisation. En quoi ce rôle consistait-il?

M. D. - L'Esprit Saint est partout dans le livre des Actes. C'est lui qui conduit l'Église. Je regarde la situation que nous vivons aujourd'hui et je me demande si on croit a la place de l'Esprit dans l'évangélisation. Je ne dis pas que l'Esprit doit tout faire. Nous avons des tâches a accomplir mais l'Esprit a sa place comme il l'avait a l'origine de l'Église. L'Esprit n'agit pas seulement quand ça va bien. Il est présent dans les tensions que nous vivons en Église. Nous avons souvent peur des querelles. Le livre des Actes montre que l'Esprit peut faire avancer des choses grâce a de vives discussions.

Les premiers chrétiens pensaient que l'Église était réservée aux juifs convertis. Il a fallu des événements nouveaux pour que l'on ouvre la porte aux paiens. Saint Paul a présenté son point de vue. Tout ce qui est arrivé était imprévu. L'Esprit parle dans les situations que la communauté est appelée a discerner. On retrouve cela d'une maniere spéciale dans le chapitre 15 du livre des Actes. Des questions semblables nous touchent maintenant. Comment donner de la place aux jeunes? Comment accueillir ceux et celles qui se sont éloignés? Comment les "chrétiens de souche" se laissent-ils déranger dans nos communautés chrétiennes par la nouveauté?

NDC - Vous décrivez le rôle de l'Esprit comme venant déranger nos habitudes et nous amener sur un terrain inconnu. En est-il toujours ainsi?

M. D. - Le livre des Actes des apôtres représente quelque chose d'unique. Il s'agit de l'Église au moment de sa fondation. Il est difficile de vivre la meme expérience aujourd'hui. Nous y trouvons cependant la source d'une Tradition en laquelle on doit etre fidele. Il est vrai que l'Esprit dérange tout au long du livre des Actes. Cela a vraiment caractérisé les débuts de l'Église jusqu'a la période de chrétienté au 4e siecle. Cette chrétienté a été vécue jusqu'au milieu du 20e siecle. Nous venons juste d'en sortir. Alors, il est souvent difficile de voir les choses autrement. C'est pour cette raison que notre Église est appelée a vivre de grandes conversions. Nous devons retrouver les sources de notre Tradition et mettre le doigt sur ce qui nous caractérise, sur ce qui est essentiel a vivre comme projet d'évangélisation.

NDC - Qu'est-ce qui est essentiel?retour page principale

M. D. - C'est une bonne question! L'Église publie de beaux textes sur l'évangélisation. On se demande comment éduquer les jeunes a la foi? Je commence par le début. Est-ce qu'on s'entend sur ce que c'est que l'Évangile, la Bonne Nouvelle? Je pose la question lorsque je donne des cours et des sessions. Il y a une multitude de réponses. Des gens disent que c'est une doctrine alors que d'autres croient que c'est une morale. Le livre des Actes nous présente ce qu'il est convenu d'appeler le coeur de la Bonne Nouvelle. Les discours de l'apôtre Pierre nous en donne la clé. La Bonne Nouvelle qui nous identifie comme chrétien n'est pas une morale ni une doctrine. Il s'agit de rencontrer Dieu a travers Jésus Christ. Aujourd'hui, on ne peut plus prendre pour acquis que nous connaissons Dieu.

NDC - Qu'est-ce qui a amené un rayonnement si important de la premiere communauté chrétienne?

M. D. - Il ne semble pas que ces gens aient eu une stratégie missionnaire. Je remarque des le début du livre des Actes que les communautés étaient attirantes. Nous vivons présentement une période de temps marquée par le réaménagement des paroisses et j'y vois une bonne occasion de nous poser la question suivante: qu'est-ce qu'une communauté chrétienne? Cela est urgent sinon la formule que nous sommes en train de mettre en place va durer cinq ans jusqu'a épuisement des personnes. On fera quoi apres cela? Les dioceses sont sensibilisés a cette situation.

Le livre des Actes montre les quatre piliers de la communauté qui sont ce que j'appelle les quatre fidélités. Les gens étaient assidus a l'enseignement des apôtres c'est-a-dire a la formation continue. La vie des communautés était ensuite caractérisée par la vie fraternelle, l'Eucharistie et la priere. C'est pour cette raison que les nouvelles communautés étaient attirantes. En y regardant de pres, on s'aperçoit que c'est la foi en Jésus Christ qui est attirante. Ce n'est pas l'enseignement de l'Église. Les gens sont attirés par quelqu'un qui témoigne d'une foi qui rend heureux et d' une foi qui donne un sens a la vie. L'institution comme telle n'attire pas. Elle est au service de la communion fraternelle et de l'Évangile. Le Royaume de Dieu c'est la communion fraternelle qui a sa source en Dieu. C'est a partir de cela que l'Église devient attirante.

NDC - Vous savez sans doute que ce n'est pas facile de vivre la communion fraternelle telle que décrite dans le livre des Actes. Pourquoi?

M. D. - Nous avons vécu plusieurs expériences dans les années qui ont suivi le Concile. Il y a eu les messes rythmées et bien d'autres essais. Je me suis rendu compte que la fraternité sans intériorité ne mene pas loin. Les gens peuvent se poser cette question: pourquoi aller vivre une vie de fraternité a l'Église alors qu'on peut la vivre avec des copains au travail ou dans des loisirs? Peut-on vraiment sentir la présence de Jésus Christ dans la communion fraternelle vécue dans nos communautés chrétiennes? Voila la question a poser. Je remarque que le sens de l'Église se perd meme lors de nos célébrations eucharistiques.

Le livre des Actes nous dit que les premiers chrétiens partageaient leurs biens. Est-ce que cela nous intéresse encore? A-t-on envie de partager avec les autres? Personne n'est intéressé a partager avec un autre. On peut partager s'il y a un lien avec la personne. La motivation profonde qui tisse un lien entre nous réside dans le fait que nous entretenons un lien commun avec Jésus ressuscité qui nous unit a Dieu. Il faut que dans nos eucharisties on sente qu'on célebre la présence de quelqu'un qui nous unit. Il n'y a pas de raison d'aller prier dans une église avec d'autres personnes si nous n'avons pas une foi commune en Jésus Christ. Il faut qu'un climat d'intériorité puisse nous rassembler.

NDC - Nous avons donc une grande conversion a faire?

M. D. - Nous parlons beaucoup de faire des choses et de partager avec les pauvres. Il n'est pas nécessaire d'etre chrétien pour faire cela. Je pense qu'il n'y a jamais eu de véritable évangélisation au Canada. Je mets un bémol pour les personnes de 50 ans et plus. Il y avait dans notre jeunesse un climat chrétien que nous retrouvions a l'école, dans la famille et dans la société. Cela nous tenait. Il y avait un témoignage de foi qui était social. Des que cela a cessé, la foi a tombé. Les personnes de moins de 50 ans n'ont jamais eu a faire une réelle option pour Jésus. Elles ont reçu les sacrements et la catéchese a l'école mais elles n'ont pas vraiment choisi Jésus Christ pour le mettre au centre de leur vie. Tout le reste est bien beau mais cela n'accroche pas. Les personnes n'ont plus un lien avec un Dieu personnel parce qu'il n'y a plus de priere. Le meilleur enseignement religieux n'a pas d'avenir si la personne ne donne pas un ancrage a sa foi dans la priere.

NDC - Le livre des Actes parle de l'importance des témoins. Comment cela est-il encore d'actualité?

M. D. - Paul et Barnabé travaillaient ensemble. Cela est d'autant plus intéressant que c'était deux personnalités différentes. Paul était fougueux alors que Barnabé était un homme de conciliation. Dans l'Église primitive, le témoin n'agissait pas seul. On était au moins deux sur la route. Cela appelle une complémentarité. Si on est seul, les gens vont penser qu'on est quelqu'un d'étrange et d'un peu spécial.

NDC - Cette démarche d'évangélisation demande-t-elle beaucoup de patience?

M. D. -- Nous vivons dans une société marquée par l'efficacité alors que l'Évangile nous demande d'etre fécond. Le Royaume de Dieu est comparé a une semence. Tout ce qui est de l'ordre de la vie est en lien avec la fécondité. Cette démarche demande de vérifier la qualité de notre etre. Jésus ne nous demande pas d'aller convertir des gens. On doit cependant leur porter la lumiere de l'Évangile. La conversion n'est pas notre affaire. Cela concerne l'Esprit. Il faut croire qu'il est a l'oeuvre et qu'il est utile. Il faut cheminer avec les gens et les écouter longuement comme il l'a fait sur la route d'Emmaüs avec deux disciples apres la résurrection.

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L’EVANGELISATION, ESSENCE DE L’EGLISE

L’évangélisation, essence de l’Eglise

Intervention de Mgr Jean-Marie Le Vert, éveque auxiliaire de Meaux, pour la recollection d’Eglise en Actes - Melun - 13 mai 2007

Les communautés chrétiennes, d’apres toute la Tradition de l’Eglise, expriment leur foi a travers trois points qui ne peuvent exister les uns sans les autres : la priere, la charité et la mission. Et c’est plus spécialement insister sur ce dernier point que porte notre rencontre. En effet, je suis de plus en plus convaincu que notre premier rôle en ce temps de notre histoire est de proposer l’Evangile de la vie et du salut de Dieu. Le Pere nous a envoyés son Fils pour cela, et c’est notre mission prioritaire que de témoigner de cette volonté d’amour de Dieu pour l’humanité. Mais un tel objectif nous semble bien difficile. Et apres tout, qu’est-ce que c’est, évangéliser ? Pour répondre a cette question, nous partirons des Actes des Apôtres et de textes du Magistere. Mais auparavant, sans doute est-il bon de rappeler pourquoi il faut évangéliser.

1- POURQUOI EVANGELISER ?

La réponse a cette question est basée sur la foi. Nous croyons, parce que Dieu nous l’a révélé, que le Christ est le seul Sauveur de l’homme, et qu’il veut amener tous les etres humains a la rencontre avec son Pere, qui est le bonheur plénier de l’homme. Ce cadeau de Dieu, que nous avons reçu par grâce, nous ne pouvons pas le garer pour nous-memes. Et le Christ, avant son retour vers le Pere, nous en a meme fait un commandement : " Allez, de toutes les nations faites des disciples " . Pour nous chrétiens, il est donc grave que certains ne croient pas au Christ, puisque c’est le bonheur qui en dépend. Et peut-etre que, trop habitués par une fausse notion de tolérance, nous pouvons penser qu’il suffit que ceux qui nous entourent soient gentils et qu’ils fassent le bien autant qu’ils le peuvent, et qu’alors il n’est pas si nécessaire que cela d’etre disciple de Jésus. Mais si cela était vrai, la mort et la résurrection du Christ n’auraient plus aucun sens : il ne serait venu que pour certains d’entre nous, et non pour tous ! Oui, il est grave que des hommes et des femmes ne connaissent pas le Christ, qui est le Chemin, la Vérité et la Vie . Il est grave de ne pas avoir la possibilité de croire que Jésus est le bonheur de tout homme. Et etre disciple de Jésus, ce n’est pas simplement faire le bien et suivre des valeurs meme évangéliques. C’est suivre, adhérer a la personne meme du Christ, c’est l’aimer en croyant qu’il est le Fils de Dieu, vrai Dieu et vrai Homme, Sauveur du monde, et nous laisser mener par lui vers son Pere dans l’Esprit. Cela veut donc dire que pour nous, toutes les religions ne se valent pas, que nous croyons que la foi catholique est celle qui mene le mieux vers le Seigneur, ce qui est logique, puisque nous continuons a la suivre. Si nous ne croyons pas que c’est ce qu’il y a de meilleur pour l’homme, pourquoi y rester ? Et c’est tout cela que nous voulons annoncer et proposer dans l’Evangélisation. Le proposer et non l’imposer, ce qui fait toute la différence avec le prosélytisme. Tout etre humain est libre de suivre Jésus ou non. Mais si personne ne lui dit rien sur Jésus, comment peut-il etre libre de choisir, puisqu’il ne le connaîtra pas ? Comment etre libre si on n’a pas le choix ? Et comment avoir le choix si on ne connaît pas ? Evangéliser, c’est aussi rendre l’autre plus libre. Le Christ nous a dit que la Vérité nous rendra libres . Et il est la Vérité. Le premier don, le plus grand don que nous pouvons faire a ceux que nous rencontrons, c’est de leur annoncer, de leur faire connaître Jésus. Etre chrétien, c’est ne pas garder le cadeau de Dieu pour soi tout seul. Il faut en etre convaincu, pour pouvoir ensuite comprendre ce qu’est l’Evangélisation, ce que nous allons maintenant aborder. 2- LES ACTES DES APOTRES

Dans les Actes des Apôtres, donc dans l’histoire de l’Eglise naissance et de la premiere évangélisation, on découvre deux choses fondamentales : tout d’abord que le plus grand risque de l’Eglise est l’extinction de l’esprit missionnaire ; les premiers chrétiens en avaient tres conscience ; ensuite que l’évangélisation dans les Actes n’est pas théorique, mais profondément concrete. Ainsi, par exemple, les Actes nous montre que celui qui évangélise est toujours envoyé et qu’un chrétien n’est jamais isolé, qu’il fait partie d’une communauté. Puis les Actes nous donnent les caractéristiques de cette communauté : le partage, la joie, l’accueil, la simplicité de cour, une seule âme et un seul cour, pas de division ni de peur. Et de plus, on s’aperçoit que les chrétiens des premiers temps vivaient d’une maniere qui sortait de l’ordinaire, au point que cette façon de vivre posait question. Ce qui veut dire que l’on n’est pas d’abord chrétien puis témoin ou évangélisateur, mais que l’on est les deux en meme temps. Tout cela pour dire que ce que nous découvrons dans les Actes, c’est que la premiere communauté ne se constitue que dans le but d’annoncer le Christ. Voyons maintenant ce qu’en dit les textes de l’Eglise.

2- LES TEXTES DU MAGISTERE DE L’EGLISEretour page principale

Quand on relit aussi les textes du Concile Vatican II, ou plus récemment les exhortations apostoliques ou encyclique de Paul VI, " L’évangélisation du monde moderne ", et de Jean-Paul II, " Christi fideles laici " et " Redemptoris Missio ", on y découvre une affirmation capitale : " Evangéliser, c’est la grâce et la vocation propre de l’Eglise, son identité la plus profonde : elle existe pour évangéliser " . L’Eglise n’est donc pas la d’abord pour le confort de ces membres, mais pour l’annonce de l’Evangile. La communauté chrétienne n’est donc pas un groupe simplement tourné sur lui-meme ; au contraire, elle doit etre tournée vers l’extérieur. Ainsi, on peut dire qu’une part de notre vie chrétienne n’est pas mise en ouvre que si nous accomplissons cette mission d’évangélisation ; a contrario, il faut admettre que si nos communautés n’accomplissent pas cette mission, elles ne vivent pas completement l’évangile, et qu’une église qui n’évangélise pas est une église qui va mourir.

3- LA PRIORITE DE L’EVANGELISATION

Aujourd’hui comme hier, la meme question donc nous est posée : comment réalisons-nous ce qui est dit dans les Actes, concretement, alors que nous vivons en Europe au XXI° s. a peu pres la meme situation que l’Eglise primitive (raréfaction de la foi, perte du sens du spirituel... sauf que le chemin est déja tracé) ? Comment nos paroisses, nos aumôneries, nos communautés ecclésiales correspondent-elles aux caractéristiques décrites dans les Actes ? Notre façon de vivre pose-t-elle question aux autres, et comment la revivifier ? Pour répondre a cette question, on pourrait se contenter des bonnes formules rassurantes de l’évangile sur le ministere pastoral et sur l’évangélisation : • " l’un seme l’autre récolte " : mais peut-on dire qu’avant nous, personne n’a semé ? • " les serviteurs inutiles " : mais on n’oublie le début de la phrase : " quand vous aurez fait tout ce que vous devez faire " ; • " le petit troupeau " : mais le mot " petit " se réfere-t-il nécessairement et toujours au nombre ? Il nous faut donc retrouver cette intuition fondamentale de notre foi et l’enseigner a ceux dont nous sommes chargés : l’exigence commune d’etre évangélisateur, de façon a ne pas attendre que ceux qui sont loin du Christ vienne jusqu’a nous, ni meme prétendre que le pretre ou quelques laics aillent les voir, mais bien réaliser l’évangile : " Chemin faisant, annoncez que le Royaume de Dieu est proche ". Chemin faisant, c’est-a-dire en faisant les choses que l’on fait quotidiennement, la ou nous sommes, sans nous inventer des missions ou des situations extraordinaires. Ce qui veut dire que l’évangélisation est une évangélisation de proximité, par cercles concentriques. Je ne pars pas dans le but d’évangéliser, mais j’évangélise dans ma vie quotidienne, en saisissant toutes les occasions. L’Esprit Saint fait le reste. Aujourd’hui, il est terrible de constater que quand quelqu’un a une Bible avec lui ou parle de Jésus, on le prend systématiquement pour un témoin de Jéhovah ! Notre société n’est plus chrétienne depuis longtemps. C’est pour cela que Jean-Paul II, en mars 1983 (cela fait déja 24 ans !), a lancé la nouvelle évangélisation, en soulignant qu’elle devait etre " nouvelle dans sa ferveur, nouvelle dans ses méthodes, nouvelle dans son expression ". Elle est nouvelle aussi parce que l’homme a changé...

4- LES POINTS COMMUNS A TOUTE " METHODE " D’EVANGELISATION Quand on regarde toutes les formes d’évangélisation depuis le début de l’Eglise, on retrouve plusieurs constantes : 1- l’évangélisation vue non pas comme un programme pastoral ou une méthode, mais comme un style de vie : comprendre que l’évangélisation n’est pas une option dans la vie chrétienne, mais un commandement du Christ et quelque chose qui nous fait vivre dans notre bapteme ; 2- la valorisation des relations humaines normales, qui existent déja (proximité), en étant particulierement attentif dans les temps modernes, a ceux qui ont reçu le bapteme mais qui n’en vivent pas vraiment ; 3- l’accompagnement, a plusieurs niveaux, de ceux qui veulent cheminer vers le Christ (accompagnement lointain et personnel, puis par un groupe, puis plus proche...) ; 4- la formation permanente des fideles, en particulier des responsables. Sans doute pouvons-nous vérifier nos actions pastorales a la lumiere de ces quatre criteres.

5- L’EVANGELISATION DANS LES RELATIONS DE PROXIMITE NORMALES : LES 7 ETAPES

Nos relations proches peuvent se diviser aujourd’hui en quatre grandes catégories de personnes : les parents, les voisins, les collegues de travail, ceux qui partagent les memes centres d’intéret. Les lieux fréquentés habituellement sont en effet les plus favorables pour annoncer le Royaume des Cieux, parce qu’ils sont le cadre des relations stables et approfondies. Il n’y a pas lieu de provoquer des occasions, il suffit de saisir celles qui se présentent. On ne s’invente pas de relations nouvelles ; on évangélise celles que l’on a déja. Et c’est ainsi que l’on découvre, en reprenant par exemple les Actes des Apôtres, que tout processus d’évangélisation se déroule en sept phases, ou la priere est permanente :

1- La priere : dans le premier temps de toute évangélisation, il y a toujours la priere pour ceux qui sont proches. Il y a un regard nouveau porté sur eux, ne serait-ce déja en s’apercevant qu’elles sont la, régulierement, dans la vie de l’évangélisateur. Il y a aussi le choix de personnes plus particulieres, discernée comme plus aptes sur le moment a recevoir l’Evangile (cela a été vrai, par exemple, pour l’appel des premiers apôtres, ou c’est André qui amene son frere Pierre a Jésus, Philippe qui va chercher Nathanaël...). C’est a ces personnes que le message évangélique sera proposé ultérieurement. Auparavant, elles vont parcourir tout un cheminement vers l’amour du Christ. 2- Le service : c’est le grand secret que nous avons appris de Jésus lui-meme : " Le fils de l’homme n’est pas venu pour etre servi, mais pour servir " . Celui qui se sent l’objet d’une attention, d’un amour désintéressé et sans mesure, se demandera : " Quelle est la raison qui pousse cette personne a agir ainsi envers moi " ? 3- Le partage : le frere dont la confiance a été gagnée par l’amour peut s’ouvrir a l’Evangile grâce au pont d’amitié qui a été construit par le service. A ce moment, il est possible de partager avec lui un témoignage de vie chrétienne, lui dire quelle a été l’expérience chrétienne d’etre des hommes sauvés, et la place que Jésus occupe dans la vie de l’évangélisateur. Celui-ci témoigne en fait " du peu de Jésus qu’il a rencontré ". C’est par exemple la rencontre de l’infirme avec Pierre , ou avec Corneille . 4- L’explication : le fait de partager notre expérience sur Jésus entraînera forcément des questions et des réactions, parfois négatives, auxquelles nous devrons répondre. Dans cette phase avancée de l’approche, on s’aperçoit qu’il faut avoir une grande sensibilité, de la patience, et de la charité, pour aider l’évangélisé a dépasser les préjugés, les hésitations et les peurs sur la Dieu, la foi, l’Eglise, les pretres, les chrétiens... On en a un exemple remarquable dans le dialogue de Jésus avec la Samaritaine, ou de celui de Philippe avec l’Ethiopien . 5- L’envoi : le moment suivant est une annonce plus explicite : " Ce meme Jésus, qui d’abord m’a aimé et m’a sauvé, t’aime également et est en train de te sauver ". C’est l’invitation a confier sa propre vie au Christ et a s’engager envers Lui. C’est la phase la plus délicate du processus d’évangélisation, ou il est proposé a ce frere d’entrer dans une autre forme de pensée, et a commencer de rejoindre et de rencontrer d’autres croyants (ex : le discours de la Pentecôte ). 6- L’entrée dans un premier groupe de croyants : a un moment, il faudra faire rencontrer a cette personne d’autres croyants, pour qu’il se rende compte que nous ne sommes pas seuls de notre espece, mais que d’autres comme nous, vivent de cette foi en Jésus. Ces autres croyants d’ailleurs pourront parfois lui apporter d’autres choses sur la foi, puisque nous sommes complémentaires et qu’aucun de nous ne peut présenter la plénitude du mystere évangélique. Mais pour que cette étape existe, encore faut-il que nous ayons nous-memes partagé notre effort d’évangélisation avec d’autres amis chrétiens, que nous leur ayons demander de porter celui que nous accompagnons dans la priere, que nous ayons parlé de lui, afin qu’il ne soit pas un étranger pour eux. C’est la, encore une fois, ou la communion fraternelle, la confiance mutuelle sont tellement importantes dans une communauté ecclésiale. Et quand celui a qui nous avons parlé du Christ entre en contact avec un tel groupe de croyants, il doit s’apercevoir qu’il est attendu et désiré, qu’il est déja un frere, car depuis longtemps, l’Eglise a travers ce petit groupe prie pour lui et a soutenu celui qui l’évangélisait. Se pencher sur le dernier est la méthode de Jésus. Et pendant ces rencontres, l’évangélisé peut alors sentir le besoin d’approfondir son propre engagement, de connaître la communauté, ainsi que son pasteur. Mais pour cela, encore faut-il que ce soit une réalité dans nos communautés ecclésiales, et donc que tous soient convaincus de cette nécessité de l’évangélisation. Cela rejoint l’affirmation que c’est en Eglise que nous évangélisons, et non pas seul, et que les responsables de communautés ont a former les fideles sur ce point. 7- L’entrée dans la communauté confessante : ce petit groupe de croyants fait partie d’une communauté plus large, confessante, dans laquelle chaque nouveau disciple trouve naturellement sa place. Ayant pris conscience des dons que le Seigneur lui a accordés, l’évangélisé veut, a son tour, servir. A ce moment-la, il est invité a passer du rôle d’évangélisé a celui d’évangélisateur.

6- CE QUI NOUS FAIT LE PLUS PEUR : LA PRISE DE PAROLE DANS LE PROCESSUS D’EVANGELISATIONretour page principale

a)- Le partage On comprend, en regardant ce processus d’évangélisation, que l’amour est la base de tout : c’est la clef qui ouvre le cour de l’autre. Mais cela est exigeant, car cela suppose un regard et un amour nouveaux sur celui que l’on connaît déja. D’autre part, notre style de vie devra etre un témoignage, au point de poser question (comme dans les Actes des Apôtres). 1- Mais ce style de vie ne dit pas forcément le pourquoi, l’origine, la raison qui guident les gestes du chrétien. Dans l’évangile, on s’aperçoit que le style de vie de Jésus ne suffit pas ; il doit aussi parler. A un moment, il faut parler (Cf. Evangélium Nuntiandi : il faut une annonce claire de l’Evangile. Sinon, le témoignage de vie ne portera pas de fruits). D’ou le partage de l’expérience personnelle que l’on a du Christ : comment allons-nous, nous qui avons une motivation plus forte, une expérience plus forte, allé au devant de personnes qui n’ont pas forcément tres envie de sortir de leurs habitudes, qui ne sont pas forcément tres motivées, pas tres attirées..., pour leur dire : " nous avons quelque chose a faire ensemble, maintenant, tout de suite " ? Le principe de base de la communication, c’est quelqu’un qui dit quelque chose a quelqu’un. Si personne ne veut rien dire a personne, vos pretres peuvent bien se démener tant qu’ils veulent avec vos EAP, le diocese peut bien réfléchir a des tas de choses, vos éveques peuvent bien vous faire des tonnes d’orientations diocésaines, et le pape aller a l’autre bout du monde, il ne se passera rien ! Et donc il faut s’y mettre avec confiance, avec courage et avec joie. 2- Pour cela, il n’est pas nécessaire d’etre tres savant, mais d’avoir rencontré Jésus. Encore une fois, on partage sur le " peu de Jésus que l’on a rencontré " (Cf. le paralytique descendu par le toit, qui est appelé a témoigner chez lui, ou le possédé de Génésareth). 3- Mais la question qui se pose alors est comment préparer ce partage. Plusieurs éléments concrets, eux aussi tirés des attitudes de Jésus ou des apôtres :

• PRIER pour avoir des opportunités de partage, de parole, et savoir quoi dire.

• ECOUTER l’autre pour saisir ces opportunités, car ce qu’il dit est pour lui la chose la plus importante.

• SE PREPARER au partage non seulement par la priere et le service, mais aussi par la formation et l’enseignement, car le partage ne peut pas etre superficiel.

• CONNAITRE LES CONDITIONS qui facilitent le partage, et y etre attentif : les joies et les peines, les grands changements de vie, bref ce qui préoccupe vraiment l’autre, afin de lui dire que dans ces moments-la, le Christ est présent et qu’un chrétien les vivre de manieres tres particulieres. Jésus profite souvent de ces temps-la dans l’Evangile (ex : la Samaritaine, les noces de Cana, Zachée...)

• NE PAS JUGER celui qui nous fait l’immense confiance et le cadeau de se livrer a nous, meme s’il le fait parfois de façon agressive. 4- L’insucces est possible, parce que l’homme est libre et peut refuser Dieu. Parfois aussi parce que nous oublions que l’évangélisation est l’ouvre de l’Esprit Saint, et que ce que nous avons apporté a l’autre est simplement nous-memes. Il faut donc régulierement demander a l’Esprit de faire son ouvre. 5- Que devons-nous partager ? L’expérience que nous avons faite de Jésus, et pas seulement ni d’abord le dogme ou la morale chrétienne. Car en donnant notre expérience, ce que nous disons ne peut avoir alors que l’accent de la vérité. Et le sommet du partage sera la joie de la rencontre avec Jésus.

b)- Les explications L’étape suivant le partage est l’explication de la foi. Elle correspond a la phrase de Pierre, dans sa premiere épître : " Soyez toujours capable de rendre compte de l’espérance qui est en vous ". • Ces explications doivent se faire sans jugement sur les difficultés ou les oppositions que l’autre veut bien nous dévoiler. • Répondre a ces objections ou donner des explications simples, cela s’apprend. C’est pourquoi, au sein de l’Eglise, la formation a toujours été primordiale (ne serait-ce que par la catéchese). Mais cette formation n’est pas seulement intellectuelle, mais aussi spirituelle, afin que le " savoir-faire " n’empeche pas le " laisser-faire " par l’Esprit Saint. • Et pour donner ces explications, encore une fois, il n’est pas nécessaire d’etre docteur en théologie. Les apôtres ne l’étaient pas ! Il ne faut pas non plus oublier que, la encore, l’Esprit Saint intervient dans les coeurs pour inspirer ce qu’il y a a dire : " Ne vous souciez pas de ce que vous aurez a répondre ; l’Esprit vous communiquera une sagesse a laquelle vos adversaires ne pourront répondre ". • On voit aussi que le Christ n’explique pas souvent sa doctrine ; par contre, il dit ce que Dieu promet. • Enfin, on sait bien qu’il n’est pas possible de répondre a tout, et qu’il faut etre capable de s’arreter devant le mystere.

7- NOS COMMUNAUTES D’EGLISEretour page principale

On n’évangélise pas seul, mais en Eglise. Et c’est pourquoi les évangélisateurs, puis les évangélisés, se retrouvent régulierement dans une communauté confessante (ex : aujourd’hui, la paroisse, un service, un mouvement...). Les Actes le montrent fortement, en décrivant les premiers chrétiens comme " assidus a l’enseignement des apôtres, fidele a la communion fraternelle, a la fraction du pain et aux prieres " . Ainsi, toute communauté chrétienne est la pour permettre plusieurs choses : faire grandir dans l’intimité du Seigneur et dans l’amour réciproque ; donner et recevoir de l’aide ; approfondir sa propre identité de foi. Et la communauté chrétienne n’est pas un groupe simplement tourné sur lui-meme ; au contraire, elle doit etre tournée vers l’extérieur. L’Eglise n’est pas la d’abord pour le confort de ces membres, mais pour l’annonce de l’Evangile.

Pour conclure, je reprends a nouveau des propos que Mgr Vingt-Trois . " J’ai eu plusieurs fois l’occasion de le dire, l’Église doit etre missionnaire ou elle ne sera plus rien en ce monde. Quand je dis cela, je ne pense pas a un simple probleme de diffusion ou de recrutement, comme si nous devions nous employer a faire le plein de nos ouvres et de nos églises. Je pense a la réalité de notre foi. Si nous vivons d’abord la foi comme un produit a " usage interne " pour notre consolation, ou meme pour la réussite spirituelle de notre vie, nous nous exposons simplement a la voir se dissoudre ou s’éteindre, comme hélas ! on le voit trop souvent. Notre foi ne peut etre vivante, vivifiante et donc féconde que si notre communion avec Dieu, célébrée en Église, nous pousse au risque de la rencontre des hommes et des femmes qui nous entourent. " Celui qui a vraiment rencontré le Christ ne peut le garder pour lui-meme, il doit l’annoncer " . Comment pourrions-nous etre vraiment attachés a Jésus-Christ et a son Évangile, si nous n’étions pas constamment préoccupés de partager la richesse que nous avons reçue ? A quoi bon etre chrétiens si notre foi n’a aucun effet sur notre vie ? Et par " notre vie " il faut entendre non seulement chacune de nos existences personnelles mais encore la vie de notre société et de notre monde. Le Christ n’a pas rassemblé ses disciples pour simplement améliorer leur condition de pecheurs du lac de Tibériade ou leur pratique des commandements. Il les a appelés pour aller au large, avancer en eaux profondes, et pour devenir des témoins d’une bonne nouvelle qui s’adresse a tous. Faute d’entrer résolument dans cette mission d’annoncer la Bonne Nouvelle, nous nous exposons a ne plus croire qu’elle est vraiment bonne et a ne plus en voir la pertinence pour nous-memes. Une foi qui ne se propose pas et ne se partage pas est une foi qui se desseche et qui n’intéresse plus, meme les croyants. Certes, nous sommes les générations qui voient disparaître un certain nombre de formes de la vie chrétienne ou d’activités qui caractérisaient l’encadrement réalisé par nos paroisses. Mais Jésus n’a pas promis l’éternité a nos modalités de vie, meme de vie en Église. Il a promis l’assistance de son Esprit a ceux qu’il a envoyés comme témoins dans le monde, sans les retirer du monde. Il ne leur a promis ni l’approbation générale ni le soutien des puissances, mais l’incompréhension et l’adversité. Il n’a jamais dit que tous les enfants seraient ravis d’etre catéchisés et préféreraient le caté au foot ou a la danse, ni que les adolescents exulteraient si on leur faisait éprouver les interdits nécessaires a la croissance de leur liberté ou si on leur annonçait que la frustration et l’effort du travail font partie de la condition humaine. Il n’a jamais prétendu que les gens qui s’aiment accepteraient volontiers les contraintes d’un engagement dans le mariage avec la fidélité et la responsabilité mutuelle, etc. Bref, les difficultés que nous rencontrons [...] ne sont pas des anomalies étranges qui nous rendraient la vie plus difficile qu’a d’autres époques. [...] Cessons de gémir et de nous plaindre ! Notre grâce, c’est de recevoir l’Esprit du Christ pour vivre son Évangile et l’annoncer aux hommes et aux femmes de notre temps [...]. Deux citations de la Lettre aux catholiques de France (1996), nous aideront a situer ce projet missionnaire : " Nous avons a accueillir le don de Dieu dans des conditions nouvelles et a retrouver en meme temps le geste initial de l’évangélisation : celui de la proposition simple et résolue de l’Évangile du Christ. " ; " Il faut que la pastorale de l’accueil s’accompagne d’une pastorale de la proposition, par laquelle l’Église ne craint pas de prendre l’initiative... ". [...] Le premier domaine que je vous suggere d’examiner a la lumiere de notre vocation missionnaire est celui de la vie pastorale. Je veux parler de nos organisations ecclésiales et de leur fonctionnement. Comment nos projets sont-ils marqués par le souci de l’évangélisation ? [...] Nous ne devons [...] pas laisser consommer toutes nos forces et nos possibilités d’action dans notre réponse a [les] demandes [qui nous sont faites, sacramentelles ou non] et nous devons chercher, dans notre travail pastoral habituel, comment nous pouvons rejoindre les situations humaines de ceux qui ne nous demandent plus rien. Comment pouvons-nous aider nos contemporains dans les différents domaines [tels que] la conjugalité, l’éducation des enfants et des jeunes, la confrontation aux difficultés de l’existence, le travail et le chômage, la maladie, la mort, etc. Toutes ces situations, nous les vivons comme les autres, mais dans la lumiere du Christ ressuscité et dans l’attente de sa venue. Faisons partager notre espérance. [...]Il [s’agit] d’évaluer si nos moyens sont employés a bon escient, avec un juste discernement des priorités. Etes-vous surs que toutes les initiatives prises depuis des décennies doivent etre perpétuées indéfiniment, comme si rien n’avait changé ? Etes-vous surs que les urgences de 1970 sont toujours des urgences ? En tout cas, il vaut la peine de se poser la question. Je vous invite simplement a renouveler et a développer l’élan missionnaire dans les organisations pastorales. Celles-ci sont au service de la vie des communautés chrétiennes, mais ce service a une finalité qui n’est pas le simple fonctionnement harmonieux d’un supermarché spirituel. La finalité, c’est d’abord la mission de l’Église dans le monde. Une paroisse peut etre missionnaire meme si elle n’a pas tous les services imaginables et traditionnellement répertoriés dans les livrets de présentation annuelle. Mais une paroisse peut avoir tous ses rayons abondamment garnis et n’avoir plus aucune perspective missionnaire. Je ne vous dis pas cela pour critiquer ce que vous faites ni pour vous décourager, au contraire. Je vous le dis pour vous aider a vous réapproprier les finalités de la mission de l’Église dans tous les domaines de votre activité.

Des champs missionnaires L’éthique : Ne vous laissez pas impressionner par le mot et pensez a la réalité. Beaucoup de gens ne savent plus ce qui est bien et mal. Ils suivent les modes et la " pensée correcte ", c’est-a-dire qu’ils vivent dans un conformisme moutonnier. Mais, en meme temps, ils sentent que ce qu’on leur vend comme ce que " tout le monde fait " ou comme des modeles " branchés " ne colle pas bien avec leur sens de l’homme. Il y aurait beaucoup d’exemples a prendre, je les évite pour faire court. Dans leur perplexité ou leur désarroi, il ne leur manque souvent que de rencontrer quelqu’un qui OSE. Quand je dis quelqu’un qui ose, je ne pense pas a des bravades de " Pere la Rigueur ". Je pense a des hommes et des femmes ordinaires qui vivent humblement les vertus humaines, et meme civiques si vous voulez, et qui sont prets a rendre compte de leurs choix de vie. Pourquoi tenir quand le ménage bat de l’aile ? Pourquoi préférer qu’un enfant ait un pere et une mere plutôt que deux peres ou deux meres ? Pourquoi refuser de faire de l’enfant un objet a notre disposition ? Pourquoi accepter plusieurs enfants avec les charges que représente une famille nombreuse ? Pourquoi ne pas éliminer les handicapés ou les vieillards ? Pourquoi ne pas profiter de toutes les possibilités pour arranger les comptabilités et truquer les bilans ? Etc. Cette dimension éthique de l’existence n’est pas un simple souci de conformité a une morale judéo-chrétienne, dont on n’a d’ailleurs pas lieu de rougir. Elle constitue un pas décisif dans la possibilité d’etre atteint par l’Évangile du Christ. Saint Jean nous dit que " la lumiere est venue dans le monde et les hommes ont mieux aimé les ténebres que la lumiere car leurs ouvres étaient mauvaises " . [...] Notre mission est d’entrer en dialogue et endiscussion dans leslieuxou ces questions éthiques sont posées, - et ces lieux commencentsur les paliers devant nos appartements -, et d’y défendre la dignité de l’homme par notre mode de vie comme par notre discours.

Le champ des familles. La famille est aujourd’hui un lieu de grande épreuve. [...] Nous avons fait beaucoup, et nous faisons encore beaucoup, pour la préparation au mariage et le soutien a un engagement sérieux des époux. Nous savons que cela ne suffit pas. Il faut aussi accompagner les familles dans leur aventure et leurs épreuves. La encore, il ne s’agit pas tant de nouvelles organisations compliquées que de présence attentive a notre entourage. Avons-nous le souci de fournir aux époux et aux parents la possibilité de partager leurs expériences, de parler de leurs difficultés et de trouver des interlocuteurs attentifs et disponibles ? Beaucoup de paroisses comptent des familles jeunes dans leurs rangs, plus qu’on ne le croit généralement. Comment les aidons-nous dans l’exercice de leurs responsabilités éducatives ? Comment les encourageons-nous a entrer en contact régulier avec les autres familles de leur génération ? Comment essayons-nous de partager les dons que nous avons reçus dans ce domaine ?

Le champ de la jeunesse. Est-ce la pyramide des âges ou la crispation sur une situation économique, je ne sais, mais il ne faudrait pas chercher tres loin pour ressentir la jeunesse comme une menace. Or, nous le savons, avant d’avoir trouvé sa place dans la société, un jeune a besoin de confiance. Et c’est la confiance raisonnée qui est le meilleur vecteur de progres et donc la disposition principale de l’éducation. Comment pratiquons-nous cette confiance envers les jeunes ? On ne peut pas abandonner une jeunesse a la fascination des reves " gothiques " et des sites " gores ", aux fantasmes sur la mort pour finir par le suicide ou l’autodestruction de son environnement. Nous devons nous interroger sur la hiérarchie des priorités dont notre société fait la promotion. A nous voir vivre, a nous entendre parler, a considérer nos choix, a regarder nos " reality-show ", quel idéal de vie s’offre a notre jeunesse ? Quel sens de l’homme quand on indemnise pour la perte d’un chien de compagnie, mais pas pour la perte d’un fotus humain ? A quoi accordons-nous pratiquement la premiere place ? Comment rendons-nous compte de ces choix ? L’Évangile du Christ nous donne une vision positive de l’existence humaine. C’est l’espérance dans la possibilité de transformer le monde par l’amour qui peut séduire et mobiliser les jeunes en leur permettant de voir l’avenir comme une promesse et non comme une malédiction. L’Église dispose d’une expérience pédagogique séculaire pour éveiller et conforter les libertés personnelles. Ne la laissons pas disparaître ! [...] [D’ou la question fondamentale :] quelle est la visée missionnaire de la paroisse ? Ou, quand, comment et avec qui les initiatives missionnaires sont-elles discutées, débattues et définies ? Comment les priorités sont-elles arretées et mises en ouvre ? Comment des personnes sont-elles appelées a se former pour les mener a bien ? Je sais que dans nombre de paroisses ce travail est déja entrepris et qu’il est suivi d’effets. Il s’agira alors de faire le point sur le chemin parcouru, peut-etre de relancer l’effort. Pour d’autres, il faut le mettre en route avec conviction. Comment les conseils pastoraux, les conseils économiques et les autres acteurs de la pastorale sont-ils associés a cette recherche et a sa mise en application ? Comment les assemblées dominicales sont-elles informées et sollicitées pour participer a ce travail ? Comment la pratique missionnaire des religieuses et des religieux trouve-t-elle sa place dans cet effort ? Comment les mouvements et communautés nouvelles contribuent-ils a cet engagement commun ? Comment les pretres et les diacres ont-ils la possibilité de vérifier la pratique de leur ministere dans cette dynamique de l’évangélisation ?

Dans une société que l’on dit morose ou démoralisée, nous avons la grâce formidable d’avoir une espérance qui nous fait vivre et de pouvoir la proposer a nos contemporains. Ne manquons pas notre chance ! [...] C’est le sacrifice du Christ pour la vie du monde qui est notre motivation centrale. C’est lui qui nous pousse a ne pas nous renfermer sur notre confort spirituel, mais a ouvrir nos églises pour y accueillir tout homme qui cherche Dieu. C’est lui qui nous pousse a en sortir pour aller au-devant de nos freres et leur partager le pain qui nous a été donné a profusion. Ne limitons pas la générosité de Dieu par nos timidités ou notre respect humain. " " Celui qui a vraiment rencontré le Christ ne peut le garder pour lui-meme, il doit l’annoncer. " (Jean-Paul II.)

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Un texte pour prier sur l’évangélisation Lc 10, 1-11 : l’envoi des apôtres en mission

Me mettre en présence de Dieu comme j’arrive aujourd’hui.

Demander la grâce que je veux. Ici, me sentir envoyé a la maniere des 72 disciples, en me laissant guider par l’Esprit, en comprenant de l’intérieur que je suis un coopérateur de Dieu.

Il y a trois temps : l’appel, la recommandation fondamentale, les modalités de la mission. Etre attentif a chacun de ses 3 aspects. Ils ont un sens, m’en laisser imprégner tour a tour. • Dans l’appel, il y a la priere : c’est le réflexe de se tourner vers Dieu avant de se lancer dans la mission. La maniere de vivre la mission. • Ecouter aussi les conseils, les recommandations de Jésus, et les laisser résonner en moi. • Entendre aussi cet appel a la liberté suivant la maniere dont on est accueilli. Il ne s’agit ni de culpabiliser ni de s’enorgueillir, comme disait Paul dans 2 Corinthiens 4, 7 : " Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? Et si tu l’as reçu, pourquoi te glorifier comme si tu ne l’avais pas reçu ? " • Il y a la possibilité de l’échec. Nul n’est dispensé de l’épreuve, mais nul n’y est abandonné.

Le plus important n’est pas le travail a faire, mais la relation avec le Pere. Il ne s’agit pas d’ouvrer pour Dieu, mais de faire l’ouvre de Dieu. Ainsi, est-ce que je fais ce que je crois etre bon pour la mission, pour Dieu, ou est-ce que je fais ce que Dieu veut ?

M’adresser a Dieu avec ce que cela provoque en moi.

Terminer par un Notre Pere.

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L’attrait Jésus.

Un passage de sainte Thérese de l’Enfant-Jésus

"Ô Jésus, il n’est donc meme pas nécessaire de dire: En m’attirant, attirez les âmes que j’aime. Cette simple parole "Attirez-moi" suffit"

édité par don Maurizio Benzi

Il est compréhensible que l’appel a une Nouvelle Évangélisation en majuscules se soit fait aussi insistant. C’est compréhensible avant tout parce qu’il n’est pas possible d’éluder le commandement du Seigneur, "allez par tout le monde et prechez la bonne nouvelle a toute la création" (Mc 16,15), et ensuite parce qu’est en cours, ces dernieres décennies surtout, une déchristianisation inimaginable.

Mais c’est précisément la qu’est le probleme: parfois l’appel semble un peu trop inquiet, plus soucieux d’obtenir un résultat que de collaborer a la joie de qui devrait l’obtenir. Presque comme si celle-ci (la joie, fruit surprenant de la grâce) n’était pas opérante, n’était pas la fin meme de tout ce que Jésus a dit et fait ("Je vous dis cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite" Jn 15,11), n’était pas le point d’appui gratuit d’un pauvre chrétien en meme temps que la demande que le Seigneur agisse avec nous ("…le Seigneur agissant avec eux" Mc 16,20).

Tout se passe comme s’il était nécessaire d’ajouter un autre engagement a la récitation quotidienne des prieres et a l’humble observance des dix commandements ("car tel est l’amour de Dieu: garder ses commandements. Et ses commandements ne sont pas pesants" 1 Jn 5,3).

La vocation de Matthieu, Caravage, église Saint-Louis-des-Français, Rome

e texte de la constitution Lumen gentium est si consolant et convaincant – et donc inévitablement opérant – quand il parle, au numéro 31 de "l’ambiance ou se meuvent la vie familiale et sociale" comme du lieu ou les fideles laiques sont appelés "a manifester le Christ aux autres, principalement par le témoignage de leur propre vie, par le rayonnement de leur foi, de leur espérance et de leur charité".

Le récent Abrégé du Catéchisme de l’Église catholique va dans la meme direction quand il explique au numéro 97 "comment Marie collabore au dessein divin du salut": "par la grâce de Dieu elle est restée préservée de tout péché personnel durant toute son existence"; puis, quand au numéro 433, sous la forme presque d’un commentaire de la constitution Lumen gentium 31, il explique que "par leur vie conforme au Seigneur Jésus, les chrétiens attirent les hommes a la foi au vrai Dieu; ils édifient l’Église; ils pénetrent le monde avec l’esprit de l’Évangile et préparent la venue du Royaume de Dieu" (c’est nous qui soulignons ici et plus haut).

Mais c’est une parole encore plus convaincante, parce que pleine de la légereté et de la candeur de la sainteté, qu’offrent les dernieres pages du manuscrit C de l’Histoire d’une âme. Pages ou la petite Thérese de Lisieux raconte l’accomplissement inattendu de sa vocation missionnaire. Nous les publions comme la meilleure contribution a la cause de la nouvelle évangélisation que la patronne des missions, déclarée docteur de l’Église par le pape Jean Paul II, est certainement la plus active a plaider.

par don Maurizio Benzi

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"Aux âme simples, il ne faut pas de moyens compliqués; comme je suis de ce nombre, un matin, pendant mon action de grâces, Jésus m’a donné un moyen simple d’accomplir ma mission. Il m’a fait comprendre cette parole des Cantiques: "Attirez-moi, nous courrons a l’odeur de vos parfums" (Ct 1,4).

Ô Jésus, il n’est donc meme pas nécessaire de dire: "En m’attirant, attirez les âmes que j’aime!". Cette simple parole: "Attirez-moi" suffit.

Seigneur, je le comprends, lorsqu’une âme s’est laissée captiver par l’odeur enivrante de vos parfums, elle ne saurait courir seule, toutes les âmes qu’elle aime sont entraînées a sa suite; cela se fait sans contrainte, sans effort, c’est une conséquence naturelle de son attraction vers vous.

De meme qu’un torrent, se jetant avec impétuosité dans l’océan, entraîne apres lui tout ce qu’il a rencontré sur son passage, de meme, ô mon Jésus, l’âme qui se plonge dans l’océan sans rivages de votre amour, attire avec elle tous les trésors qu’elle possede…".

[…]

La vocation de Pierre et André, Caravage, Royal Gallery Collection, Hampton Court Palace, Londres

"Ma Mere, je crois qu’il est nécessaire que je vous donne encore quelques explications sur le passage du Cantique des Cantiques: "Attirez-moi, nous courrons" car ce que j’en ai voulu dire me semble peu compréhensible. "Personne, a dit Jésus, ne peut venir apres moi, si mon Pere qui m’a envoyé ne l’attire". Ensuite, par de sublimes paraboles, et souvent meme sans user de ce moyen si familier au peuple, Il nous enseigne qu’il suffit de frapper pour qu’on ouvre, de chercher pour trouver et de tendre humblement la main pour recevoir ce que l’on demande… Il dit encore que tout ce que l’on demande a son Pere en son nom, Il l’accorde. C’est pour cela sans doute que l’Esprit Saint, avant la naissance de Jésus, dicta cette priere prophétique: Attirez-moi, nous courrons.

Qu’est-ce donc de demander d’etre attiré, sinon de s’unir d’une maniere intime a l’objet qui captive le cour? Si le feu et le fer avaient la raison et que ce dernier disait a l’autre: Attire-moi, ne prouverait-il pas qu’il désire s’identifier au feu de maniere qu’il le pénetre et l’imbibe de sa brulante substance et semble ne faire qu’un avec lui? Mere bien-aimée, voici ma priere, je demande a Jésus de m’attirer dans les flammes de son amour, de m’unir si étroitement a Lui qu’Il vive et agisse en moi. Je sens que plus le feu de l’amour embrasera mon cour, plus je dirai: Attirez-moi, plus aussi les âmes qui s’approcheront de moi (pauvre petit débris de fer inutile, si je m’éloignais du brasier divin), plus ces âmes courront avec vitesse a l’odeur des parfums de leur Bien-Aimé, parce qu’une âme enflammée d’amour ne peut rester inactive; sans doute comme sainte Madeleine elle se tient aux pieds de Jésus, elle écoute sa parole douce et enflammée. Paraissant ne rien donner, elle donne bien plus que Marthe qui se tourmente de beaucoup de choses et voudrait que sa sour l’imite. Ce ne sont point les travaux de Marthe que Jésus blâme, ces travaux, sa divine Mere s’y est humblement soumise toute sa vie puisqu’il fallait préparer les repas de la Sainte Famille. C’est l’inquiétude seule de son ardente hôtesse qu’il voudrait corriger".

"Ce ne sont point les travaux de Marthe que Jésus blâme, ces travaux, sa divine Mere s’y est humblement soumise toute sa vie puisqu’il fallait préparer les repas de la Sainte Famille. C’est l’inquiétude seule de son ardente hôtesse qu’il voudrait corriger" 

AUTRES  REFLEXIONS SUR LE MEME SUJET DE LA NOUVELLE EVANGELISATION

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Le Seigneur vous attend pres de Lui... Venez ! 814 Les agentes et agents de pastorale 815  pour renouveler notre vie chrétienne 816 La « journée Alpha-Québec » 817 Appel universel a la sainteté 818  "ASSOCIATIONS CHARISMATIQUES" 819 JEAN-PAUL II AUX JEUNES DU MONDE 820  aux responsables des communautés chrétiennes 821 CHEMIN NEOCATECHUMENAL 822 Congres International pour une Nouvelle Evangélisation 823 CONGRES MISSIONNAIRE AMÉRICAIN 824 les diacres permanents 825 Monseigneur Claude DAGENS éveque d’Angouleme 826 la Pastorale des Migrants 827 Les communautés nouvelles 828 DES OEUVRES PONTIFICALES MISSIONNAIRES 829 POUR L’AMÉRIQUE LATINE 830 Nature de la Doctrine Sociale de L'Église 831 L´apostolat biblique et Ecclesia in America 832 pour la pastorale biblique en Océanie 833 Ecole d'Evangélisation Jean-Paul II 834 Une réflexion sur « Eglise émergente ». 835 Église et communications sociales 836 L'identité des Eglises Orientales Catholiques 837 Evangéliser est la mission essentielle de l'Eglise. 838 Devenir témoin par la parole et l'art de vivre 839  des Hérauts de l’Évangile 840 Initiative Buisson Ardent – Les caractéristiques 841 L'EVANGÉLISATION DES PEUPLES 842 LA JOURNEE MONDIALE DES MISSIONS 843 MESSAGE DU PAPE JEAN PAUL II 844 JOURNÉE MONDIALE DU MALADE 845 JUBILÉ DES CATÉCHISTES 846 Avec un AMOUR universel 847  relever les defís de la mondialisation 848 la " Theotokos " dans l’évangélisation du peuple russe 849 L’ÉVANGELISATION EN ASIE 850 “Toutes les Eglises pour le monde entier” 851 LE CHEMIN 852 La « nouvelle évangélisation » 853 l'Apostolat de la Priere 854 La formation a la vie chrétienne 855 La Légion et la Nouvelle Évangélisation 856 La mission en Afrique aujourd'hui 857 La mission en Amérique latine 858 Lettre oecuménique sur l'évangélisation 859 Saint Vincent de Paul prechant la mission 860 la Pastorale de la route 861 La nouvelle Évangélisation 862 Congres Mondial de la pastorale des Migrants 863 DU LAICAT CATHOLIQUE 864 Le Buisson Ardent 865 Vous etes la lumiere du monde 866 Pistes pour évangéliser notre monde 867 un défi nouveau a l'Église 868 le domaine des médias 869 Le pretre aujourd'hui 870 Le pretre, ministre d’espérance 871 LE RENOUVEAU CHARISMATIQUE 872 Mission "Ad gentes" 873 Les charismes selon l'Eglise 874 Les congres eucharistiques internationaux. 875 la préparation au mariage 876 LES CULTURES, LES ARTS ET L'ÉGLISE 877 LES JOURNÉES MONDIALES DE LA JEUNESSE 878 Les mouvements dans L'Église locale 879 "La Vraie Vie en Dieu" 880 LA DIMENSION CONTEMPLATIVE DE L'EUCHARISTIE 881 L'homme Post-Moderne 882 de l'Internet chrétien 883 François et Claire a l'écoute de la Parole 884 Regards sur l’itinérance dominicaine 885 « Messager d'espérance » 886 Mission paroissiale — prosélytisme ? 887 «Comme le Pere m'a envoyé, moi aussi je vous envoie» 888 "Missionnaires de la Miséricorde" 889 JUBILÉ DU MONDE DU SPECTACLE 890 quelle mission pour les laics ? 891 « Paris Toussaint 2004 » 892 « POUR UNE PASTORALE DE LA CULTURE. » 893 Catholiques d'Orient 894 JUBILÉ DES PRETRES 895 Pastorale : proposer la foi ? 896 QUE SONT LES "REDEMPTORIS MATER" 897 Recevoir l'ESPRIT de Jésus 898 LES JEUNES D'EUROPE 899 Se convertir pour convertir 900 Un Maître spirituel pour notre temps 901 UN NOUVEAU PRINTEMPS POUR L'ÉGLISE 902 Jubilé des Catéchistes 903 LA PASSION DU CHRIST 904 Tu n'es pas loin du Royaume de Dieu 905 Jésus nourrit cinq mille hommes. 906 Vous êtes porteurs de DIEU906retour page principale